Correspondance de Voltaire/1763/Lettre 5230

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Correspondance : année 1763GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 423).
5230. — À M.  MOULTOU[1].
Samedi, 12 mars 1763.

C’était un vilain jour pour moi, monsieur, que celui où j’étais à Ferney quand vous me faisiez l’honneur de venir aux Délices.

Mais c’est un bien beau jour, malgré la bise et la neige, que celui où nous apprenons l’arrêt du conseil et la manière dont le roi a daigné se déclarer contre les dévots fanatiques qui voulaient qu’on abandonnât les Calas. Nous devons beaucoup à M. le duc de Choiseul, et surtout à M. le duc de Praslin.

Le règne de l’humanité s’annonce.

Ce qui augmente ma joie et mes espérances, c’est l’attendrissement universel dans la galerie de Versailles[2].

Voilà bien une occasion où la voix du peuple est la voix de Dieu.

Je parie que vous avez pleuré de joie, en apprenant cet heureux succès.

Je vous demande pardon de vous avoir fait lire mes esquisses informes, mais je crois vous devoir ces prémices, comme un tribut que mon cœur et mon esprit payent aux vôtres,

  1. Éditeur, A. Coquerel.
  2. L’émotion fut très-vive en effet dans cette galerie, où une foule de courtisans et d’autres personnes attendaient avec impatience la sentence des derniers juges.