Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 5975

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Correspondance : année 1765GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 43 (p. 518-519).

5975. — À M.  D’ALEMBERT.
3 avril.

Ma reconnaissance est vive, je l’avoue ; mais ce n’est pas elle qui fait mon enthousiasme pour vous ; c’est votre zèle aussi intrépide que sage, c’est votre manière d’avoir toujours raison, c’est votre art d’attaquer le monstre, tantôt avec la massue d’Hercule, tantôt avec le stylet le plus affilé ; et puis, quand vous l’avez mis sous vos pieds, vous vous moquez de lui fort plaisamment. Que j’aime votre style ! que votre esprit est net et clair ! Plût à Dieu que les autres frères eussent écrit ainsi ! l’inf… ne se débattrait pas encore comme elle le fait sous la vérité qui l’écrase. Je voudrais bien savoir quel est le polisson de théologien à qui vous faites tant d’honneur. Quoi qu’il en soit, vous serez obéi ponctuellement et promptement[1].

Avez-vous lu le Siège de Calais[2] ? Je suis ami de l’auteur, je dois l’être ; je trouve que le retour du maire et de son fils, à la fin, doit faire un bel effet au théàtre. Il se peut d’ailleurs qu’il y ait dans la pièce quelques défauts qui vous aient choqué, mais ce n’est pas à moi de m’en apercevoir, et d’ailleurs le patriotisme excuse tout. Je voudrais savoir jusqu’à quel point vous êtes bon patriote ; j’ai peur que vous ne vous borniez à être bon juge. Je vous aime et révère ; écr. l’inf…

  1. Dans sa lettre du 26 mars (n° 5964), d’Alembert priait Voltaire de recommander l’opuscule Sur la Destruction des jésuites.
  2. Tragédie de de Belloy.