Correspondance de Voltaire/1765/Lettre 6039
J’écrivis hier à mon cher frère, à son adresse, et je lui envoyai les réponses de M. Tronchin[2]. Je lui écrivis il y a quelques jours un petit billet par M. Héron, et un autre par M. d’Argental.
Il doit être instruit du juste sujet de mes inquiétudes ; il doit savoir qu’un gros paquet envoyé à M. Gaudet a été intercepté.
Il est à croire qu’une lettre, envoyée depuis sous le couvert de M. Gaudet, a été interceptée encore. Dans cette lettre, on avertissait mon cher frère que des gens malintentionnés avaient été alarmés de son commerce avec Genève ; qu’on avait ouvert ses lettres depuis plus de six semaines. On donnait l’adresse de M. Camp, banquier à Lyon. Mais comme il y a beaucoup d’apparence que si mon frère a reçu cette lettre, elle a été ouverte, et que si elle ne lui est pas parvenue, on ouvrira toutes les lettres adressées à M. Camp, il faudra prendre d’autres mesures. Je supplie donc mon cher frère de m’instruire de tout ce qui se passe, de me mander quelles lettres il a reçues de moi depuis plus de quinze jours, et d’adresser son paquet à Mlle Sainton, à Lyon. Il faudra, sous l’enveloppe de Mlle Sainton, écrire simplement : « À madame Racle[3], à Genève. » Les lettres qui arriveront pour Mme Racle me seront rendues.
Mandez-moi donc, sous cette adresse, tout ce que vous avez sur le cœur ; et croyez que le mien est aussi pénétré de tendresse pour vous que de douleur.