Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6357

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Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 301-302).

6357. — À M.  THIERIOT.
30 mai.

Mon cher et ancien ami, je vous fais mon sincère compliment sur votre nouveau traité avec les puissances du Nord. Tâchez de jouir longtemps des avantages que cette bonne fortune vous procure. Vous avez le département le plus agréable du monde, levia carmina et faciles versus. Je souhaite que vos beaux esprits de Paris vous fournissent une ample matière ; mais votre santé me donne autant d’inquiétude que votre nouvelle correspondance me fait de plaisir. Prenez garde à votre hydrocèle, imposez-vous un régime qui vous mette en état de courir pour chercher des nouvelles. Lorsque vous ne pourrez point écrire, je vous conseillerais de vous munir d’un homme qui écrirait sous votre dictée, afin que la correspondance ne fût pas interrompue. Je ne pourrai guère vous aider dans votre ministère ; nous n’avons à Genève que des sottises ennuyeuses. Il vient de paraître un ouvrage bien plat contre M.  d’Alembert, M.  Hume, et les encyclopédistes[1] ; j’y suis aussi pour ma part. Vous pensez bien que le libelle est d’un prêtre. Ce prêtre est un nommé Vernet, théologien huguenot de son métier ; c’est un homme à qui on rend toute la justice qu’il mérite, c’est-à-dire qu’il est couvert d’opprobre. Son livre est entièrement ignoré. Il n’est question dans Genève que des tracasseries pour lesquelles on a fait venir trois plénipotentiaires. Je vous embrasse du meilleur de mon cœur.

  1. Lettres critiques d’un voyageur anglais, etc. (par Vernet) ; voyez la note, tome XXV, page 491.