Correspondance de Voltaire/1767/Lettre 6982

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Correspondance : année 1767GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 45 (p. 351).
6982. — À M. DAMILAVILLE.
14 auguste.

Mon cher ami, votre lettre du 8 ne m’a pas laissé une goutte de sang : je crains que Mme d’Argental ne soit morte ; c’est une perte irréparable pour ses amis. Que deviendra M. d’Argental ? Je suis désespéré, et je tremble.

M. le maréchal de Richelieu m’écrit sur l’aventure de Sainte-Foy[1]. La chose est très-sérieuse. J’espère qu’à la fin l’innocence des protestants sera plus reconnue au parlement de Bordeaux qu’à celui de Toulouse.

Il me mande que La Beaumelle n’est point de son département. Ce La Beaumelle n’a été que fortement réprimandé et menacé par le commandant du pays de Foix, au nom du roi. Ce n’est pas le silence de ce coquin que je demande, c’est une rétractation : sans quoi on lui apprendra à calomnier. Ne tient-il qu’à débiter des impostures atroces, pour se taire ensuite, et laisser le poison circuler ? Lavaysse doit le renoncer pour son beau-frère, s’il ne se repent pas.

Il paraît tous les huit jours, en Hollande, des livres bien singuliers. Je vois avec douleur qu’on a une bibliothèque nombreuse contre la religion chrétienne, qu’on devrait respecter. Vous savez que je ne l’ai jamais attaquée, et que je la crois, comme vous, utile à l’Europe.

Permettez que je vous prie d’envoyer à M. Delaleu un certificat qui assure que votre ami est encore en vie, quoique cela ne soit pas tout à fait vrai ; mais, tant qu’il aura un souffle, il vous aimera.

  1. Voyez lettres 6923 et 6960.