Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7124

La bibliothèque libre.
7124. — À M. LE MARQUIS DE VILLEVIEILLE.
8 janvier.

Il y a des occasions, monsieur, où il faut chanter des Te Deum au lieu de De Profundis. Les âmes de ces deux braves gens sont immortelles sans doute, puisqu’elles ont eu tant de lumières et tant de courage. J’espère bientôt avoir l’honneur de mourir comme eux, quoique des faquins aient poussé la calomnie jusqu’à dire que j’allais à confesse. Il faut être bien méchant et avoir l’âme bien noire pour inventer de pareilles impostures.

Agréez mes respects et présentez-les, je vous prie, à MM. Duché et Venel. Je serais bien trompé si le titre d’encyclopédiste vous avait nui auprès de M. de Guerchy[1] ; mais je vous suis bien caution que le titre d’encyclopédiste ne vous fera aucun tort auprès de M. du Châtelet.

Nous avons essuyé un froid si excessif, et j’ai été si malade, que je n’ai pu répondre encore à Mme Cramer.

On m’a envoyé quelques petites brochures intéressantes échappées aux griffes de l’inquisition. Ayez la bonté de me mander si on pourrait vous faire tenir quelques-unes de ces fariboles sous l’enveloppe de monsieur l’intendant, ou du premier secrétaire, ou sous une enveloppe quelconque. Gardons-nous la fidélité et le secret que se doivent les initiés aux sacrés mystères. Quand vous irez faire des revues, ce qui est une chose infiniment agréable, n’oubliez pas, monsieur, votre ancienne auberge. L’hôte, l’hôtesse, et toutes les filles du cabaret, sont à vos ordres.

  1. Le comte de Guerchy était ambassadeur de France en Angleterre.