Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7280
Ma vieillesse et mes maladies m’ont empêché, monsieur, de répondre plus tôt à votre lettre du 21 de mai ; mes yeux affaiblis distinguent à peine les caractères. Je suis peu en état de juger de la réforme que vous voulez faire dans les langues de l’Europe. Il en est peut-être de ces langues comme des mœurs et du gouvernement ; tout cela ne vaut pas grand’chose ; c’est du temps qu’il faut attendre la réforme. On parle comme on peut, on se conduit de même, et chacun vit avec ses défauts comme avec ses amis. Cependant, si vous voulez absolument réformer les langues, vous pouvez m’adresser votre ouvrage à Lyon, chez M. La Vergne, mon banquier, par les voitures publiques.
En attendant que la langue française se corrige, et que tout le monde écrive français avec un a, et non pas avec un o, comme saint François d’Assise, mon cher patron, j’ai l’honneur d’être, selon la formule ordinaire des Français, monsieur, votre très-humble, etc.
- ↑ Cet auteur m’est inconnu ; il n’a point place dans le Dictionnaire de la Provence et du comtat Venaissin. (B.)