Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7303

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Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 85-86).
7303. — À M. DE CHABANON[1].
26 juillet.

J’ai l’air d’être un ingrat, mon cher ami, mon cher confrère ; vous m’avez envoyé des vers charmants, et je ne vous en ai pas remercié sur-le-champ. Mais songez toujours combien je suis vieux, et par l’âge, et par les maladies. L’envie et la calomnie poursuivent encore ma pauvre vieillesse. On ne m’a point laissé en repos dans ma retraite. Ce qu’il y a de pis, c’est que ces persécutions continuelles font perdre un temps précieux. Je n’en ai pas été moins sensible au charme de vos vers. Il n’y a peut-être qu’une personne qui en puisse être plus touchée que moi, c’est celle à qui ils sont adressés. Si j’étais son mari, je me défierais fort d’un pareil faiseur de compliments.

Vous devez avoir une Princesse de Babylone. Elle viendra sans doute vous voir à votre lever. Si vous voulez bien lui apprendre par quelle voiture il faut qu’elle parte, et à quel intendant des postes il faut qu’elle présente requête, son père vous aimera de toutes ses forces tant qu’il respirera[2].

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. MM. de Cayrol et François donnent, à la date du 25 et du 27 juillet, ces deux fragments à Marmontel :

    « 25 juillet.

    « Pendant que la Sorbonne, entraînée par un zèle louable, mais très-peu éclairé et qui fait peu d’honneur à la nation, veut censurer Bélisaire, il est traduit dans presque toutes les langues de l’Europe, et l’impératrice de Russie mande de Casan, en Asie, qu’on y imprime actuellement la traduction russe. »

    « Du 27 juillet.

    « Je suis assailli, mon cher ami, à droite et à gauche. Le ministère a fait parler vertement a La Beaumelle par le commandant du pays de Foix. On devrait parler plus vertement au calomniateur Coger. »

    Mais le premier n’est que la répétition de quelques lignes du n° 6924, et le second n’a guère plus de valeur. Ni l’un ni l’autre, en tout cas, ne seraient ici à leur date.