Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7327

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Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 112-113).
7327. — À M. DE LA MOTTE-GEFRARD.
À Ferney, 3 septembre.

Je suis, monsieur, dans un état si triste, j’éprouve de si longues et de si cruelles maladies, qui sont la suite de ma vieillesse, que je n’ai pu répondre plus tôt à la lettre dont vous m’avez honoré. C’est une grande grâce sans doute, accordée par un grand roi, de permettre qu’on lui érige une statue.

Je trouve l’incription de M. le comte de Muy fort bonne et fort convenable. Je crois que si je m’avisais d’en faire une[1], il aurait lieu d’être mécontent. Les inscriptions, d’ailleurs, réussissent rarement dans notre langue. Permettez-moi de vous conseiller d’employer celle de M. de Muy Vous savez que le mieux est l’ennemi du bien ; et, de plus, il me serait bien difficile de faire ce mieux. Les bons vers sont des coups de hasard, et à mon âge on n’est pas heureux à ce jeu-là.

Comptez que ni ma vieillesse, ni mes maux, ne diminuent rien de l’estime respectueuse avec laquelle j’ai l’honneur d’être, etc.

  1. La Motte-Gefrard avait demandé à Voltaire une inscription pour la statue pédestre que le bailli d’Autan, gouverneur de l’île de Ré, avait érigée à Louis XV dans cette île.