Correspondance de Voltaire/1768/Lettre 7435

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Correspondance : année 1768GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 46 (p. 212-213).
7435. — À MADAME DE POMMEREUL[1].
À Ferney, le 29 décembre.

Madame, si je n’avais pas été très-malade sur la fin de cette courte vie, je vous aurais sans doute remercié sur-le-champ de la longue vie que vous voulez bien me procurer. Il faut que vous descendiez d’Apollon en droite ligne, vous et M. d’Antremont.

Vous ne démentez pas votre illustre origine ;
Il est le dieu des vers et de la médecine,
Il prolonge nos jours, il en fait l’agrément.
Ce dieu vous a donné l’un et l’autre talent :
Ils sont rares tous deux. J’apprends dans mes retraites
Ils sont raQu’on a dans Paris maintenant
Moins de bons médecins que de mauvais poëtes.

Grand merci, madame, de votre recette de longue vie. Je me doute que vous en avez pour rendre la vie très-agréable : mais j’ai peur que vous ne soyez très-avare de cette recette-là. Le cardinal de Fleury prenait tous les matins d’un baume qui ressemblait fort à votre élixir ; il avait beaucoup usé, dans son temps, de cette autre recette que vous ne donnez pas. Je crois que c’est ce qui l’a fait vivre quatre-vingt-dix ans assez joyeusement. Ce bonheur n’appartient qu’à des gens d’église : Dieu ne bénit pas ainsi les pauvres profanes.

Quoi qu’il en soit, daignez agréer le respect et la reconnaissance avec lesquels j’ai l’honneur d’être, etc.

  1. Mme de Pommereul avait adressé à l’auteur la recette de l’élixir de longue vie, avec une lettre mêlée de prose et de vers. (K.)