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Correspondance de Voltaire/1770/Lettre 7887

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Correspondance : année 1770GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 80-81).
7887. — DE M. HENNIN[1].
À Genève, le 20 mai 1770.

Aussitôt que je l’ai pu, monsieur, je suis allé chez M. Rigot, syndic de la garde, à qui j’ai fait part de l’avis que vous me donnez. Il doit avoir vu, à la manière dont je lui ai parlé, que l’affaire était très-sérieuse. Votre lettre n’entrant en aucun détail, je n’ai pu l’assurer qu’il y eût des témoins. Il m’a dit qu’aucune raison n’empêchant le sieur Dufour-Vincent d’entrer dans Genève, le plus simple était qu’il vînt lui-même faire sa déposition ; et sur ce que je lui ai demandé s’il m’assurait qu’il n’y serait pas insulté, il m’a répondu que non, mais qu’on en ferait bonne et prompte justice si le fait était avéré. Je crois donc qu’à tous égards il convient que le sieur Dufour vienne ici au plus tôt ; qu’il amène des témoins, s’il y en a, et que, pour plus de sûreté, il se fasse accompagner par deux Français. Il ira chez M. Rigot, qui fera recevoir sa plainte par un auditeur ; et vous pouvez être certain que je suivrai cette affaire avec toute l’attention qu’elle mérite. Lalime est un des plus grands pendards de la république. J’avais avis depuis longtemps qu’il guettait les natifs pour les insulter, s’il pouvait les trouver seuls dans les chemins. En France, il serait roué nous verrons ce qu’on en fera ici.

J’aurai soin, monsieur, de rendre compte au ministre du commencement et de la suite de cette affaire, et je n’oublierai pas de l’instruire de l’intérêt que vous y avez pris.

Il ne serait pas inutile de faire faire une note de tous les faits dont les natifs se plaignent. Je prévois que si nous n’avons pas justice, nous recevrons ordre de nous la faire ; c’est fort mon avis, et j’en écrirai dans ce sens.

J’ai l’honneur d’être, etc.

P. S. Je viens d’apprendre qu’il y avait des témoins, et leurs noms. Que Dufour fasse en sorte de les rassembler, et qu’ils aillent tous chez M. Rigot en disant que c’est moi qui leur ai fait savoir qu’ils devaient s’y rendre, et qu’ensuite ils viennent m’instruire de ce qui se sera dit et fait pour la poursuite de cette affaire.

  1. Correspondance inédite de Voltaire avec P.-M. Hennin ; 1825.