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Correspondance de Voltaire/1771/Lettre 8159

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Correspondance : année 1771GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 311).
8159. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
1er janvier 1771.

Mon cher ange, le jeune étourdi qui vous a envoyé l’œuvre des onze jours[1] vous demande en grâce de le lui rendre. Il m’a dit qu’il était honteux, mais qu’il fallait pardonner aux emportements de la jeunesse ; qu’il voulait absolument y mettre vingt-deux jours au moins.

À propos de jours, je vous en souhaite à tous deux de fort agréables ; mais on dit que cela est difficile par le temps qui court. Vous ne perdez rien, et je perds tout. Voilà ma colonie anéantie ; je fondais Carthage, et trois mots ont détruit Carthage.

Je n’ai pas une passion bien violente pour la Sophonisbe de Lantin, mais je serais fort aise qu’on rejouât Olympie ; c’est un beau spectacle. Mlle Clairon avait grand tort, et on dit que Mlle Vestris s’en tirerait à merveille. Vous devriez bien présenter requête à M. Lekain pour jouer Cassandre ; ce serait même une fête à donner à la cour, en guise de feu d’artifice. Chargez-vous, je vous prie, de cette importante négociation, et moi, je me chargerai de faire la paix de Catherine et de Moustapha.

On me mande que M. le maréchal de Richelieu est fort malade ; il devrait pourtant se bien porter. J’écris à M. le duc de Praslin[2]. Voilà qui est fait ; il n’enverra plus de mes montres au prétendu roi d’Égypte, mais il lui reste Praslin : c’est une bonne et belle consolation, non pas en hiver, mais dans les grandes chaleurs. Le lieu est froid, sombre, et d’une beauté assez triste. Vous y attendiez-vous ? Dites-moi enfin si messieurs obtempèrent et se tempèrent.

On fait vos montres. Mme d’Argental sera plus tôt servie que le roi d’Égypte.

Mille tendres respects.

  1. Les Pélopides ; voyez lettre 8129 ; et tome VII, page 101.
  2. Cette lettre manque.