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Correspondance de Voltaire/1771/Lettre 8198

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Correspondance : année 1771GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 344-345).
8198. — À M. CHRISTIN.
5 février.

Mon très-cher avocat de l’humanité contre la rapine sacerdotale, voici deux lettres[1] que je vous envoie ; c’est tout ce que peut faire pour le présent votre ami moribond. Je ne crois pas que votre affaire soit sitôt jugée ; tout le conseil est actuellement occupé à remplacer le parlement. Il me semble qu’on se soucie fort peu à Paris de ce parlement. Au bout du compte, il est dans son tort avec le roi, et l’assassinat du chevalier de La Barre et de Lally ne doit pas le rendre cher à la nation.

On dit que monsieur le chancelier prépare un nouveau code dont nous avons grand besoin. M. Chéry[2] devrait bien l’engager à mettre dans son corps de lois quelque règlement en faveur des hommes libres que des chanoines veulent rendre esclaves. Il doit savoir s’il est vrai qu’on va resserrer la juridiction de Paris dans des limites plus convenables, et qu’on ne sera plus forcé d’aller se ruiner à Paris en dernier ressort, à cent cinquante lieues de chez soi. C’est le plus grand service que monsieur le chancelier puisse rendre ; son nom sera béni.

Si j’étais à Paris, mon cher philosophe, je me ferais votre clerc, votre commissionnaire, votre solliciteur ; je frapperais à toutes les portes, je crierais à toutes les oreilles. Dès que vous serez près d’être jugé, je prendrai la liberté d’écrire à monsieur le chancelier, à qui j’ai déjà écrit[3] sur cette affaire ; vous pouvez en assurer vos clients. Je pense fermement qu’il est de son intérêt de vous être favorable, et qu’il se couvrira de gloire en brisant les fers honteux de douze mille sujets du roi, très-utiles, enchaînés par vingt chanoines très-inutiles.

Adieu, mon cher ami ; je suis à vous et à vos clients jusqu’au dernier jour de ma vie.

  1. Les deux précédentes à M. Joly de Fleury et à M. le chevalier de Chastellux.
  2. Avocat aux conseils du roi, chargé des intérêts des habitants de Saint-Claude, et signataire de leurs mémoires ; voyez lettre 8280.
  3. La lettre manque.