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Correspondance de Voltaire/1772/Lettre 8464

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Correspondance : année 1772GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 48 (p. 14).
8464. — À M. MARMONTEL.
26 janvier

Je vous écris bien tard, mon cher ami ; mais je n’ai pas un moment à moi. Mes maladies et mes travaux, qui ne les soulagent guère, occupent tout ce malheureux temps ; ces travaux sont devenus forcés, car quand on a commencé un ouvrage, il faut le finir. J’envoie les tomes VI, VII et VIII[1] aux adresses que vous m’avez données, et j’espère que ces rogatons vous parviendront sûrement.

Je verrai bientôt cet Helvétius que les assassins du chevalier de La Barre traitèrent si indignement, et dont je pris le parti si hautement. Je n’avais pas beaucoup à me louer de lui, et d’ailleurs je ne trouvais pas son livre trop bon ; mais je trouvais la persécution abominable. Je l’ai dit et redit vingt fois. Je ne sais si M. Saurin a reçu un petit billet que je lui ai écrit sur la mort de son ami[2].

Je dois de grands remerciements à M. l’abbé Morellet pour une dissertation très-bien faite que j’ai reçue de sa part. Je n’ai pas la force de dicter deux lettres de suite ; chargez-vous, je vous en prie, de ma reconnaissance, et dites-lui combien je l’estime et je l’aime.

Ma misère m’empêche aussi d’écrire à M. d’Alembert. Embrassez-le pour moi, aussi bien que tous mes confrères qui veulent bien se souvenir que j’existe.

Dites à Mlle Clairon que je ne l’oublierai qu’en mourant, et aimez votre ancien ami V., qui vous est tendrement attaché, jusqu’à ce qu’il aille fumer son jardin après l’avoir cultivé.

  1. Des Questions sur l’Encyclopédie.
  2. Helvétius, qui venait de mourir.