Correspondance de Voltaire/1772/Lettre 8597
Mon cher ami, vous sentez bien que ce serait pour moi un extrême plaisir de profiter des offres très-flatteuses de M. Belmont, de paraître sur le théâtre établi par mon héros, et d’être embelli par un homme aussi supérieur que vous l’êtes.
La pièce est très-différente de celle que vous avez lue, et moins indigne de vos soins ; mais comment vous l’envoyer ? J’ignore si monsieur le maréchal est à Bordeaux : la saison s’avance ; mais, de plus, nous avons un obstacle insurmontable : la pièce n’est point encore approuvée par le ministère. Monsieur le chancelier et messieurs les secrétaires d’État me sauraient très-mauvais gré d’avoir fait représenter les Lois de Minos en province avant d’y être autorisé par eux. Cette démarche même pourrait compromettre un peu M. le maréchal de Richelieu. Je suis donc forcé, mon cher ami, à mon très-grand regret, de vous supplier de me priver d’une satisfaction qui me comblerait d’honneur et de joie.
Mme Denis et moi, nous vous attendons à Ferney.
Je vous prie de dire à M. de Belmont combien je l’estime et l’honore.
Signé, le meilleur de vos amis. V.