Coups d’ailes/Au paysan canadien

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Bibliothèque de l’Action française (p. 149-152).

Au paysan canadien


Paysan canadien, à ton immense effort,
Nous devons aujourd’hui d’être ce que nous sommes
Race qui pour grandir a méprisé la mort,
Peuple deux fois béni, peuple de gentilshommes.

Sans doute tu n’as pas parcouru l’univers ;
Le sol et le ciel bleu furent ton premier livre ;
À l’or tu préféras tes grands érables verts,
Et tu savais lutter, puisque tu savais vivre !


Les vastes horizons de ton riche pays
Ont fait les horizons plus vastes de ton âme.
Paysan, tu fus beau sans le savoir ! Et puis,
Que t’importe, dis-moi, que le monde t’acclame ?

Nous te remercions, sublime pionnier,
D’avoir, par ton labeur, gardé notre jeunesse.
D’autres t’appelleront, peut-être, roturier !
Mais nous te donnerons tes titres de noblesse.

Va, ce n’est pas encor l’heure de ton repos ;
Un cœur comme le tien n’a jamais trop de gloire.
Mais si nous sommes tous les enfants de héros,
Tu ne seras plus seul pour écrire l’histoire !

En trois siècles, tu nous donnas une leçon…
Quand nous étions petits, on nous l’avait apprise :
Dans nos âmes d’enfants, c’était une chanson ;
Et chacun s’en souvient, fidèle à sa devise.


Nous travaillerons donc ensemble, tu le veux ?
Ennemis de la peur, des haines et des grèves ;
Et lorsque tu seras devenu vieux, très vieux,
Nous veillerons sur tes cheveux blancs et tes rêves…

Et, pour avoir usé sur le sol tes genoux,
Paysan, l’avenir t’apparaîtra sans voiles :
Joyeux, tu t’en iras, croyant revivre en nous,
Te reposer là-haut, derrière les étoiles…