Cours d’agriculture (Rozier)/ARBRET

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Marchant (Tome onzièmep. 161-163).


ARBRET. La chasse à l’arbret est une de celles qui se font au moyen de gluaux posés sur un jeune arbre, ou sur une branche assez rameuse, d’où est venu le nom d’arbret ou d’arbrot, sous lequel cette espèce de piège est connue. Il est comme le supplément de la pipée, et s’emploie à la chasse de beaucoup d’oiseaux qui ne se prennent point à la pipée, et notamment à la chasse des chardonnerets, des tarins, des linottes et des bouvreuils. Un arbret d’environ six pieds, et suffisamment garni de rameaux, taillé en pointe par le bas, pour être fiché en terre, est dépouillé de ses branches, de manière cependant à laisser, à la naissance de chacune d’elles, un petit prolongement qui sert comme de tenon à autant de bouts de sureau garnis de leur moelle, longs d’un demi-pouce, et que l’on implante à l’aide de cette moelle sur l’excédant des branches coupées. Ces bouts de sureau s’appellent des dés ; ils supportent les gluaux, et remplacent d’une manière simple et commode les entaillures qu’à leur défaut on est obligé de faire le long des branches de l’arbret pour recevoir les gluaux.

Ces derniers doivent avoir de six à sept pouces de long, et être plus forts que pour la pipée, afin de présenter à l’oiseau un point d’appui, en apparence, capable de le soutenir. Les baguettes de saule ou d’osier, destinées à tendre l’arbret, sont engluées jusques à quelques doigts de distance de leur extrémité pointue, légèrement implantée dans les dés de sureau, dont l’arbret est garni de tous côtés. L’adresse que demande cette tendue, consiste en ce que chaque gluau à peine touché par un oiseau, tombe et l’entraîne avec lui.

Pour inviter les oiseaux à venir se poser sur l’arbret, on a des Moquettes et des Appelants. (Voy. ces mots.) Ceux-ci sont enfermés dans des cages plates ; on peut en avoir trois ou quatre qu’on place à huit ou dix pas de l’arbret. La moquette est un autre oiseau vivant, attaché par la patte à une ficelle qui lient elle-même à une verge de fer, dite paumille ou verge de meute. Cette verge, longue d’environ un pied, fait le coude à une de ses extrémités, et est percée de trois trous, l’un au milieu et les deux autres à chaque bout. Celui du milieu sert à la fixer au moyen d’une goupille sur un piquet enfoncé en terre, à quelques pas de l’arbret, de manière qu’elle a un petit mouvement de balançoire sur ce piquet. À l’extrémité coudée, et relevée en l’air, est une ficelle qui se rend dans la main du chasseur et qui lui sert à faire mouvoir la paumille. L’oiseau attaché à l’autre extrémité est obligé de voleter à chaque secousse, et sa vue excite les autres oiseaux à descendre sur l’arbret. Le chasseur doit faire jouer sa moquette quand il les voit tourner autour du piège, en paraissant craindre d’en approcher.

Les lieux propres à tendre l’arbret, sont les endroits du passage des oiseaux, tels que les avenues d’un verger, les environs d’une chènevière. L’heure du matin, et l’époque du printemps et de l’automne, sont les plus favorables à cette chasse.

On prépare aussi un arbret particulier pour les Becfigues. (Voy. ce mot.) En Lorraine, j’ai vu dans ma jeunesse, que l’on se servoit en quelques endroits d’un arbret portatif, avec lequel on chassoit sur-tout aux moineaux et autres oiseaux qui fréquentent les haies et clôtures voisines des villages, des fermes et des habitations rurales. Cet arbret est une jeune tige d’arbre assez rameuse, dégarnie de ses feuilles, et à laquelle on laisse des branches dégagées de presque toutes leurs feuilles, pour servir elles-mêmes de gluaux. Un homme armé de cet appareil se rend le long des haies, derrière lesquelles il se tapit, en tenant son arbret élevé au dessus des autres arbrisseaux ; il se met à frouer (voyez Appeau) alors les oisillons se rassemblent. Quand le chasseur les voit se poser sur l’arbret, il donne un coup de poignet qui en imprimant un mouvement brusque à l’arbret, ne manque guères d’en empêtrer plusieurs dans la glu dont les petites branches sont enduites, et il ne quitte son poste que quand les oiseaux cessent de répondre à son appel. (S.)