Cours d’agriculture (Rozier)/HÉLIOTROPE ou HERBE AUX VERRUES

La bibliothèque libre.
Hôtel Serpente (Tome cinquièmep. 433-435).


HÉLIOTROPE ou HERBE AUX VERRUES. (Voyez Planche XVII.) Tournefort la place dans la quatrième section de la seconde classe, qui comprend les fleurs d’une seule pièce en forme d’entonnoir, dont le fruit est composé de quatre semences renfermées dans le calice de la fleur, & il l’appelle heliotropium majus dioscoridis. Von-Linné le nomme heliotropium europæum, & le classe dans la pentandrie monogynie.

Fleur. Tube menu à sa base, évasé à son extrémité, divisé en six segmens inégaux. C, offre une de ces corolles vues par derrière ; B, la même corolle ouverte avec ses étamines ; D, le pistil ; E, le calice.

Fruit. Le pistil D, par sa maturité devient un fruit F, à quatre capsules arrondies & rassemblées, contenant chacune une semence G, anguleuse d’un côté, convexe de l’autre & de couleur cendrée.

Feuilles, pétiolées, ovales, très entières, cotonneuses, ridées.

Racine A, simple, menue, un peu ligneuse.

Port. La hauteur de cette plante varie singulièrement suivant le climat, le sol & la saison ; elle s’élève depuis demi-pied jusqu’à un pied & demi ; les tiges sont droites, remplies de moelle, cylindriques, branchues, un peu velues ; les feuilles sont alternes, placées à l’origine des rameaux ; les fleurs naissent au sommet des tiges en épi, disposées d’un seul côté, & l’épi est recourbé en manière de crosse.

Lieu, le bord des chemins, les terreins sablonneux ; la plante est annuelle, & fleurit en juin, juillet & août, suivant les climats.

Propriétés. Les feuilles sont amères dessiccatives, antiseptiques, résolutives & détersives par excellence ; le suc de cette plante est caustique, fait tomber les poireaux appelés vernies, d’où vient son nom ; mais il faut auparavant couper la peau coriace qui les termine ; elle est employée utilement pour déterger les vieux ulcères, les ulcères carcinomateux ; elle s’oppose à la gangrène.

Usages. On emploie l’herbe en décoction, en cataplasmes. On doit la cueillir avant que la fleur épanouisse ; fraîche, elle est plus efficace.

Von-Linné compte huit espèces d’héliotrope ; il est inutile d’en parler, excepté de l’espèce appelée héliotrope du Pérou, parce qu’elle en est originaire. La plante est vivace, & presque ligneuse, craint singulièrement le froid ; elle exige la serre chaude dans nos provinces du nord, & l’orangerie dans celles du midi. L’héliotrope du Pérou diffère du précédent par ses feuilles lancéolées, ovales, pointues, ridées, plissées, d’un vert brun en-dessus, & plus clair en-dessous ; deux stipules accompagnent la base des feuilles. Un grand nombre de tiges s’élèvent du collet des racines, & forment une espèce de touffe en petit buisson ; plusieurs épis naissent au sommet de ces tiges, rassemblées les unes près des autres, au lieu que dans les autres héliotropes elles sont solitaires ; & dans toutes ces sortes d’espèces elles sont recourbées en manière de crosse. Von-Linné nomme cette espèce heliotropium peruvianum.

Quatre ou cinq vases remplis de cette plante suffisent pour embaumer l’air & le parfumer d’une odeur délicieuse, qui approche de celle de la vanille. L’héliotrope du Pérou demande beaucoup d’eau, à cause du grand nombre de ses racines chevelues, qui ont bientôt absorbé toute l’humidité de la terre du vase qui la renferme.

On peut le multiplier par semences ou par boutures, ou en séparant des drageons de ses racines. La voie des semences est plus longue & plus casuelle, sur-tout dans les pays froids. Il suffit de casser une des tiges, de la piquer en terre, de la tenir à l’ombre, de l’arroser souvent, & elle reprend très-vite. Les drageons sont plus hâtifs & plus sûrs.

Chaque année il faut dépoter la plante, supprimer une grande partie de ses chevelus, & encore mieux ne rien supprimer, & lui donner successivement de plus grands vases. On a alors un épais buisson chargé de fleurs.