Cours d’agriculture (Rozier)/MACHE, ou PLANCHETTE, ou POULE GRASSE, ou SALADE DE CHANOINE

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Hôtel Serpente (Tome sixièmep. 354-355).


MACHE, ou PLANCHETTE, ou POULE GRASSE, ou SALADE DE CHANOINE. Tournefort la place dans la troisième section de la seconde classe destinée aux fleurs d’une seule pièce, à entennoir, dont le calice devient le fruit, ou l’enveloppe du fruit, & il l’appelle valeriana arvensis precox, semine compresso Von Linné la nomme valeriana locusta bolisoria, & la classe dans la triandrie monogynie.

Fleur. Calice dentelé, dont la base s’unit à l’embryon, & subsiste jusqu’à la maturité du fruit ; la fleur d’une seule pièce, en entonnoir, & découpée en cinq parties à son sommet ; les étamines, au nombre de trois, surmontées de sommets mobiles en tout sens ; les pistils au nombre de deux.

Fruit. Capsule à plusieurs loges, renfermant chacune une semence applatie, ridée & blanchâtre.

Feuilles. Oblongues, assez épaisses, molles, tendres, les unes entières, les autres crénelées & sans pétioles.

Racine. Menue, fibreuse, blanchâtre.

Port. La tige s’élève du milieu des feuilles à la hauteur de six à dix pouces, foible, ronde, canelée, creuse ; les fleurs naissent au sommet des tiges en ombelle, leurs feuilles sont opposées deux à deux.

Lieu. Les vignes, les balmes, les bords des chemins ; on la cultive dans les jardins potagers, la plante est annuelle.

Propriétés. La racine a une saveur douce, ainsi que les feuilles, elles sont rafraîchissantes & adoucissantes ; on les employe dans les bouillons de veau ; on les mange dans les salades d’hiver.

Culture. On compte plusieurs variétés, les unes à feuilles plus ou moins larges, les autres à racines en forme de petits navets ; on préfère ces dernières ; leurs racines se mangent dans les salades comme les feuilles.

On multiplie cette plante & ses variétés par les semis ; leur graine se conserve bonne à semer pendant plusieurs années ; dans les provinces du nord on peut commencer à les semer depuis le milieu du mois d’août, jusqu’à la fin du mois d’octobre, en répétant les semis de quinzaine en quinzaine. Dans celles du midi, on seme en septembre, jusqu’au commencement & même au milieu de novembre, mais la règle la plus sûre pour chaque climat du royaume, est d’observer l’époque à laquelle elle sort de terre dans les champs ; celle-ci est un peu dure ; la bonne culture, le sol & les soins rendent celle des jardins très-tendre. On ne doit pas craindre de semer dru, parce que l’on coupe raz de terre les pieds surnuméraires & les plus gros, & on arrache avec la racine celles qui pivotent : de cette manière on éclaircit peu-à-peu les tables. Si la semence est trop enterrée, elle ne lève pas, & paroît les années suivantes après qu’on a remué la terre. Il est important de veiller sur la plante laissée pour graine lorsqu’elle approche de sa maturité, parce que la semence s’en détache facilement ; on la cueillera donc, s’il est possible, par un temps de pluie, ou lorsqu’elle est chargée de rosée ; alors, étendue sur un drap dans un lieu sec ou exposé au soleil, on ne craindra plus d’en perdre la graine. Quelques jardiniers entassent ces plantes dans un lieu frais, la fermentation & la chaleur ne tardent pas à s’y établir, & ils croyent perfectionner la graine par ce procédé. Ce n’est pas la loi de la nature, & si elle en avoit eu besoin, elle n’auroit pas donné à la graine une si grande facilité à s’échapper de la capsule. Les mâches, qui se multiplient d’elles-mêmes dans les champs, dans les vignes, démontrent l’inutilité d’amonceler les plantes, & de les faire fermenter pour en avoir la graine.