Court Traité/Première partie/Chapitre IX

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Traduction par Paul Janet.
Germer Baillière (p. 45-46).

CHAPITRE IX


DE LA NATURE NATURÉE.


Quant à ce qui concerne la nature naturée générale, c’est-à-dire les modes ou créatures qui dépendent immédiatement de Dieu ou sont créées par lui, nous n’en connaissons pas plus de deux, à savoir le mouvement dans la nature[1] et l’entendement dans la chose pensante, lesquels modes sont de toute éternité et subsisteront pendant toute éternité. Œuvre vraiment grande et digne de la grandeur de son auteur !

Pour le mouvement, comme il appartient plus spécialement à la science de la nature qu’à celle dont nous traitons, nous n’avons pas besoin de dire qu’il a été de toute éternité et qu’il subsistera sans altération pendant toute l’éternité, qu’il est infini en son genre et ne peut ni exister ni être conçu par lui-même, mais seulement par le moyen de l’étendue ; nous ne parlerons point de ces choses, et nous nous contenterons de dire qu’il est le Fils de Dieu, l’ouvrage de Dieu, immédiatement créé par lui.

Quant à l’entendement dans la chose pensante, il est aussi, comme celui-là, fils, œuvre, création immédiate de Dieu, existant de toute éternité et subsistant sans altération pendant toute l’éternité. Son seul attribut est de comprendre toutes choses en tout temps d’une manière claire et distincte, accompagnée d’une joie infinie, parfaite, immuable, qui ne peut pas agir autrement qu’elle n’agit ; et quoique tout cela soit suffisamment clair par soi-même, nous en traiterons avec plus de clarté encore dans notre Traité sur les passions de l’âme ; c’est pourquoi nous n’en dirons pas davantage en ce moment.




  1. Le manuscrit A contient la note suivante, qui n’est pas très-claire :

    « Ce qui est dit ici du mouvement dans la matière n’est pas entendu sérieusement, car l’auteur pense en trouver encore la cause, comme il l’a déjà fait en quelque sorte à posteriori. Mais il n’y a pas de mal à laisser subsister ce passage, car l’auteur n’en tire aucune conséquence. »