De la sagesse/Livre I/Chapitre VIII

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Texte établi par Amaury Duval, Rapilly (tome 1p. 44-79).

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CHAPITRE VIII [1].

De l'ame en general.


SOMMAIRE. — De l'origine et de la fin des ames : de leur entrée dans les corps, et de leur sortie ; d'où elles y viennent ; quand elles y entrent ; et où elles vont, quand elles en sortent ; de leur nature, état et action, et s'il y en a plusieurs en l'homme, ou une seule. Le siége de l'ame est le cerveau, et non pas le cœur. Ses trois facultés, l'entendement, la mémoire et l'imagination. Si l'ame raisonnable est organique, et a besoin d'un instrument corporel, ou organe, pour faire ses fonctions. Du tempérament du cerveau, et des facultés de l'ame. L'entendement est sec dans la vieillesse et dans le Midi : la mémoire est humide dans l'enfance et dans les régions du Nord : l'imagination est chaude sans l’adolescence et dans les pays situés entre le Nord et le Midi. Comparaison des tempérances. Il n'y a que trois tempéramens et trois facultés de l'ame. Propriétes et actions de ces facultés, avec l'ordre d'agir ; comparaison de ces facultés en prééminence et dignité. Trois images ou comparaisons de ces facultés. L'ame est, de sa nature, savante, et non par le bénéfice des sens. De l'unité et de la pluralité des ames. Quand et comment l'ame est unie au corps. L'immortalité de l'ame est utilement crue, mais faiblement prouvée.

SOMMAIRE du même Chapitre [2], d'après la première édition. — La définition de l'ame est très-difficile. Il est aisé de dire ce qu'elle n'est pas, et mal aisé de dire ce qu'elle est. De sa nature et de son essence ; de ses facultés et de ses actions ; de son unité ; de son origine ; de son entrée et de son existence dans le corps ; de son siège et de ses instrumens ; de l'exercice de ses facultés ; de sa séparation du corps, naturelle et ordinaire ; de son immortalité, et des preuves en sa faveur ; de sa séparation non naturelle ; de son état après la mort.


Exemples : Aristote. — Les Grecs, les Arabes, les Égyptiens, les Stoïciens, Philon, les Manichéens, les Priscilianistes. — Tertullien, Apollinaris, les Lucifériens. — Les Pythagoriciens et Platoniciens, Origènes. — Saint Augustin et saint Grégoire, Daniel, Zacharie, Esdras, Ezéchiel, saint Paul. — Jean Lescot, Cardan. — Les Académiciens, les Stoïciens, les Égyptiens. — Nabuchodonosor.

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VOICY [3] une matiere difficile sur toutes, traittée et agitée par les plus sçavans et sages de toutes nations, spécialement Ægyptiens, Grecs, Arabes et Latins, par ces derniers plus maigrement, comme toute la philosophie, mais avec grande diversité d'opinions, selon les diverses nations. [4] accord ny resolution certaine. Le generale cognoissance et dispute d'icelle, se peut rapporter à ces dix points. Définition, essence ou nature, facultés et ac-ac-

ac-tions, unité ou pluralité, origine, entrée au corps, residence en iceluy, siege, suffisance à exercer ses fonctions, sa fin et separation du corps.

Il est premierement très difficilement de definir et bien dire au vray que c'est l'ame, comme generalement toutes formes, d'autant que ce sont choses re-re-

re-latives, qui ne subsistent point d'elles-mesmes, mais sont parties d'un tout, c'est pourquoi il y a une telle et si grande diversité de definitions d'icelle, des-des-

quelles n'y en a aucune receue sans contredit : Aristote en a refusé douze qui estoient devant lui, et n'a peu bien establir la sienne.

Il est aisé à dire ce que ce n'est pas : que ce n'est pas feu, air, eau, ny le temperament des quatre elemens ou qualités, ou humeurs ; lequel est tousjours

muable, sans lequel l'animal est et vit : et puis c'est accident, et l'ame est substance : Item les mineraux et les choses inanimés ont bien un temperament des


quatre elemens, et qualités premieres. Ny sang (car il y a plusieurs choses animées et vivantes sans sang, et plusieurs animaux meurent sans perdre goutte de sang). Ny principe ou cause de mouvement (car plu-plu-

plu-sieurs choses inanimées meurent, comme la pierre d'aymant meut le fer ; l'ambre, la paille ; les medicaments, les racines des arbres coupées et seches tirent

et meuvent). Ny l'acte ou vie ou energie ou perfection (car ce mot d'Entelechie [5] est diversement tourné et interpreté) du corps vivant : car tout cela est l'ef-ef-

ef-fect et l'actionde l'ame, et non l'ame, comme le vivre, le voyr, l'entendre est l'action de l'ame : et puis il s'ensuivoit que l'ame seroit accident et non sub-sub-

sub-stance : et ne pourroit estre sans ce corps, dusquel elle est acte et perfection ; non plus que le couvercle d'une maison ne peust sans icelle, et un relatif

sans corellatif : bref, c'est à dire ce qu'elle faict et est à autruy, non ce qu'elle est en soy.

Mais de dire ce que c'est, il est très mal aysé : l'on

peust bien dire tout simplement que c'est une forme essentielle vivifiante, qui donne à la plante vie vegetative ; à la beste, vie sensitive, laquelle comprend la vegetative ; à l'homme, vie intellective, qui comprend

les deux autres, comme aux nombres, le plus grand contient les moindres, et aux figures, le pentagone contient le tetragone, et celluy-ci le trigone. J'ay dit l'intellective plus tost que le raisonnable, qui est comprise en l'intellective, comme le moindre au plus grand : car le raisonnable, en quelque sens et mesure, selon tous les plus grands philosophes, et l'experience se trouve aux bestes, mais non l'intellective qui est plus haute. Sictus equus et mulus, in quibus non est intellectus [6]. L'ame donc est non le principe ; ce mot ne convient proprement qu'à l'autheur souverain premier ; mais cause interne de vie, mouvement, sentiment, entendement. Elle meut le corps, et n'est point meue ; ainsi qu'au contraire le corps est meu, et ne meut point : elle meut, dis-je, le corps, et non soy-mesme que Dieu, et tout ce qui se meut soy-mesme que Dieu, et tout ce qui se meut soy-mesme est eternel, et maistre de soy : et ce qu'elle meut le corps, ne l'a point de soy, mais de plus haut.

De quelle nature et essence est l'ame, humaine s'entend (car la brutale [7]est sans aucun doute est cor-cor cor-porelle, matérielle, esclose et née avec la matière, et, avec elle corruptible) ? C’est une question qui n’est pas si petite qu’il semble. Car aucuns l’affirment corporelle, les autres incorporelle : cecy est fort accordable si l’on ne veut opiniastrer. Qu’elle soit corporelle, voicy de quoy : les esprits et demons bons et meschans qui sont du tout separés de la matiere, sont corporels par le dire de tous les philosophes et principaux theologiens, Tertullien, Origene, sainct Basile, Gregoire, Augustin, Damascene : combien plus l’ame humaine qui a commerce et est joincte à la matiere ? Leur resolution est que toute chose creée, comparée à Dieu, est grossière, corporelle, matérielle ; Dieu seul est incorporel. Que tout esprit est corps et de nature corporelle. Après l’authorité presque universelle, la raison est irrefragable : tout ce qui est enfermé dedans ce monde fini, est fini, limité en vertu et en substance, borné de superficie, clos et comprins en lieu, qui sont les vrayes et naturelles conditions d’un corps. Car il n’y a que le corps qui aye superficie , qui soit resserré et enfermé en lieu. Dieu seul est par-tout, infini, incorporel ; les distinctions ordinaires circumscripiivè, definitivè, effectivè [8], ne sont que verbales, et ne destruisent en rien la chose ; car tousjours il demeure vray que les esprits sont tellement en lieu, qu’en ce mesme temps qu’ils sont en un lieu, ils ne peuvent estre ailleurs, et ne sont en lieu on infini, ou très grand ou très petit, mais égal à leur mesurée et finie substance et superficie. Et si cela n’estoit ainsi, les esprits ne changeroient point de lieu, ne monteroient ny ne descendroient, comme l’escriture affirme qu’ils font, et par ainsi seroient immobiles, indivisibles, seroient par-tout indifféremment : or, est-il qu’ils changent de lieu ; le changement convainq qu’ils sont mobiles, divisibles, subjects au temps et à la succession d’iceluy, requise au, mouvement et passage d’un lieu à autre, qui sont toutes qualités d’un corps. Mais pource que plusieurs simples, soubs ce mot de corporel, imaginent visible, palpable, et ne pensent que l’air pur, ou le feu hors la flamme et le charbon soient corps, ils ont dict que les esprits, tant séparés que humains, ne sont corporels, comme de vray ils ne le sont en ce sens ; car ils sont d’une substance invisible, soit aërée, comme veulent la plus part des philosophes et théologiens ; ou celeste, comme aucuns Hebrieux et Arabes, appellans de mesme nom le ciel et l’esprit essence propre à l’immortalité, ou plus subtile et deliée encores, si l’on veut, mais tousjours corporelle ; puis qu’elle est finie et limitée de place et de lieu, mobile, subjecte au mouvement et au temps : finalement, s’ils n’estoient corporels, ils ne seroient pas passibles, et capables de souffrir comme ils sont ; l’humain reçoit de son corps plaisir, desplaisir, volupté, douleur, aussi bien à son tour, comme le corps de luy, et de ses passions : plus des qualités bonnes et mauvaises, vertus, vices, affections, qui sont tous accidens : et tous tant les séparés et demons que les humains sont subjects aux supplices et tourmens : ils sont donc corporels, car il n’y a rien de passible qui ne soit corporel, c’est au corps d’estre subject des accidens.

Or, l’ame a un très grand nombre de vertus et facultés, autant quasi que le corps a de membres : elle en a aux plantes, plus encores aux bestes, et plus beaucoup en l’homme, sçavoir, vivre, sentir, mouvoir, appeter, attirer, assembler, retenir, cuire, digérer, nourrir, croistre, rejetter, voir, oyr, gouster, flairer, parler, spirer, respirer, engendrer, penser, opiner, raisonner, contempler, consentir, dissentir, souvenir, juger ; toutes lesquelles choses ne sont point parties de l’ame, car ainsi elle seroit divisible, et seroit establie d’accidens, mais sont ses qualités naturelles. Les actions viennent après, et suivent les facultés, et ainsi sont trois degrés, selon la doctrine du grand sainct Denis, suivie de tous, qu’il faut considérer ès créatures spirituelles trois choses, essence, faculté, opération : par le dernier qui est l’action, l’on cognoist la faculté, et par celle-cy l’essence. Les actions peuvent bien estre empeschées et cesser du tout, sans prejudice aucun de l’ame et de ses facultés, comme la science et faculté de peindre demeure entiere au peintre, encores qu’il aye la main liée, et soit im-im puissant à peindre : mais si les facultés périssent, il faut que l’ame s’en aille, ne plus ny moins que le feu n’est plus, ayant perdu la faculté de chaufer.

Après l’essence et nature de l’ame aucunement expliquée, il se présente ici une question des plus grandes, sçavoir si en l’animal, spécialement en l’homme, il n’y a qu’une ame, ou s’il y en a plusieurs. Il y a diversité d’opinions, mais qui reviennent à trois. Aucuns des Grecs, et à leur suitte presque tous les Arabes, ont pensé (non seulement en chascun homme, mais generalement en tous hommes) n’y avoir qu’une ame immortelle : les Egyptiens pour la plus part ont tenu tout au rebours, qu’il y avoit pluralité d’ames en chascun, toutes distinctes, deux en chaque beste, et trois en l’homme, deux mortelles, végétative et sensitive, et la troisiesme intellective, immortelle. La tierce opinion, comme moyenne et plus suivie, tenue par plusieurs de toutes nations, est qu’il y a une ame en chaque animal sans plus : en toutes ces opinions il y a de la difficulté. Je laisse la première comme trop refutée et rejettée. La pluralité d’ames en chaque animal et homme, d’une part, semble bien estrange et absurde en la philosophie, car c’est donner plusieurs formes à une mesme chose, et dire qu’il y a plusieurs substances et subjects en un, deux bestes en une, trois hommes en un : d’autre part, elle facilite fort la créance de l’immortalité de l’intellectuelle ; car estans ainsi trois distinctes, il n’y a aucun inconvénient que les deux meurent, et la troisiesme demeure immortelle. L’unité semble resister à l’immortalité ; car comment une mesme indivisible pourra-t-elle estre en partie mortelle et en partie immortelle ? comme semble toutesfois avoir voulu Aristote. Certes il semble par necessité qu’elle soit ou du tout mortelle ou du tout immortelle, qui sont deux très lourdes absurdités : la première abolit toute religion et saine philosophie ; la seconde faict aussi les bestes immortelles. Neantmoins est bien plus vray-semblable qu’il n’y a qu’une ame en chasque animal, la pluralité et diversité des facultés, instrumens, actions n’y deroge point, ny ne multiplie en rien cette unité, non plus que la diversité des ruisseaux l’unité de la source et fontaine, ny la diversité des effects du soleil, eschaufer, esclairer, fondre, secher, blanchir, noircir, dissiper, tarir, l’unité et simplicité du soleil, autrement il y auroit un très grand nombre d’ames en un homme, et de soleils au monde : et cette unité essentielle de l’ame n’empesche point l’immortalité de l’humaine en son essence, encores que les facultés vegetative et sensitive, qui sont accidens, meurent, c’est à dire ne puissent estre exercées hors le corps, n’ayant l’ame subject ni instrument pour ce faire, mais si faict bien tousjours la troisiesme intellectuelle ; car pour elle, n’a point besoing de corps ; combien qu’estant dedans iceluy, elle s’en sert pour l'exercer : que si elle retournoit au corps, elle retour-retour retour-neroit aussi de rechef exercer ses facultés vegetative et sensitive, comme se voit aux ressuscités pour vivre icy bas, non aux ressuscités pour vivre ailleurs, car tels corps n’ont que faire pour vivre de l’exercice de telles facultés. Tout ainsi que le soleil ne manque pas, ains demeure en soy tout mesme et entier ; encores que durant une pleine eclipse, il n’esclaire ny eschaufe, et ne face ses autres effects aux lieux subjects à icelle.

Ayant demonstré l’unité de l’ame en chasque subject, voyons d’où elle vient, et comment elle entre au corps. L’origine des ames n’est pas tenue pareille de tous, j’entends des humaines ; car la vegetative et sensitive des plantes et des bestes, est par l’advis de tous, toute materielle, et en la semence, dont aussi est-elle mortelle ; mais de l’ame humaine, il y a eu quatre opinions célébrés. Selon la première, qui est des Stoïciens, tenue par Philon, juif, puis par les Manichéens, Priscillianistes, et autres : elle est extraitte et produite comme parcelle de la substance de Dieu, qui l’inspire au corps, prenant à leur advantage les paroles de Moyse, inspiravit in faciem ejus spiraculum vitte [9]. La seconde, tenue par Tertullien, Apollinaris, les Luciferiens, et autres Chrestiens, dict qu’elle vient et derive des ames des parens avec la semence, à la façon des ames brutales. La troisiesme des Pythagori-Pythagori Pythagori-ciens et Platoniciens, tenue par plusieurs rabins et docteurs juifs, puis par Origene et autres docteurs chrestiens, dit qu’elles ont esté du commencement toutes créées de Dieu, faictes de rien, et réservées au ciel, pour puis estre envoyées icy bas, selon qu’il est besoing, et que les corps sont formés et disposés à les recevoir ; et de là est venue l’opinion de ceux qui ont pensé que les ames estoient icy bien ou mal traittées et logées en corps sains ou malades, selon la vie qu’elles avoient mené là haut au ciel avant estre incorporées : et certes le maistre de sagesse monstre bien qu’il croit que l’ame est l’ainée et avant le corps, erani puer, bonam indolem sorlitus, imo bonus cum essein, corpus inconiaminatum reperi [10]. La quatriesme receue, et qui se tient en la chrestienté, est qu’elles sont toutes créées que Dieu, et infuses aux corps préparés, tellement que sa création et infusion se fasse en mesme instant. Ces quatre opinions sont affirmatives : car il y en a une cinquiesme plus retenue, qui ne définit rien, et se contente de dire que c’est une chose secrette et incognue aux hommes, de laquelle ont esté sainct Augustin, Grégoire et autres, qui tou-tou tou-tesfois ont trouvé les deux dernleres affirmatives, plus vray-semblables que les deux premieres.

Voyons maintenant quand et comment elle entre au corps, si toute entiere en un coup, ou successivement ; j’entends de l’humaine, car delà brutale n’y a aucune doubte, puis qu’elle est naturelle en la semence, selon Aristote le plus suivi, c’est par succession de temps et par degrés, comme la forme artificielle que l’on feroit par pièces, l’une après l’autre, la teste, puis la gorge, le ventre, les jambes : d’autant que l’ame vegetative et sensitive toute materielle et corporelle, est en la semence, et avec elle descendue des parens, laquelle conforme le corps en la matrice, et iceluy faict, arrive la raisonnable de dehors, et pour cela n’y a ny deux ny trois ames, ny ensemble ny successivement, et ne se corrompt la vegetative par l’arrivée de la sensitive, ni la sensitive par l’arrivée de l’intellectuelle ; ce n’est qu’une qui se fait, s’acheve et parfaict avec le temps prescrit par nature. Les autres veulent qu’elle entre avec toutes ses facultés en un coup, sçavoir lors que tout le corps est organisé, formé et tout achevé, et qu’auparavant n’y a eu aucune ame, mais seulement une vertu et energie naturelle, forme essentielle de la semence, laquelle agissant par les esprits qui sont en la dicte semence, avec la chaleur de la matrice et sang maternel, comme par instruments, forme et bastit le corps, agence tous les membres, les nourrit, meut, et accroit : ce qu’estant faict, cette energie et forme seminale s’esvanouit et se perd, et par ainsi la semence cesse d’estre semence, perdant sa forme par l’arrivée d’une autre plus noble, qui est l’ame humaine, laquelle faict que ce qui estoit semence ou embryon ne l’est plus, mais est homme.

Estant entrée au corps, faut sçavoir de quel genre et sorte est son existence en iceluy, quelle, et comment elle y faict sa residence. Aucuns philosophes empeschés à le dire, et à bien joindre et unir l’ame avec le corps, la font demeurer et résider en iceluy comme un maistre en sa maison, le pilote en son navire, le cocher en son coche : mais c’est tout destruire, car ainsi ne seroit-elle point la forme ny partie interne et essentielle de l’animal, ou de l’homme, elle n’auroit besoing des membres du corps pour y demeurer, ne se sentiroit en rien de sa contagion, mais seroit une substance toute distincte du corps, subsistant de soy, qui pourroit a son plaisir aller et venir, et se séparer du corps sans distinction d’iceluy, et sans diminution de toutes ses fonctions, qui sont toutes absurdités : l’ame est au corps comme la forme en la matière, estendue et respandue par tout iceluy donnant vie, mouvement, sentiment, à toutes ses parties, et tous les deux ensemble ne font qu’une hypostase, un subject entier, qui est l’animal, et n’y a point de milieu qui les noue et lie ensemble ; car entre la matière et la forme, il n’y a aucun milieu, ce dict toute la philosophie : l’ame douc est toute en tout le corps, je n’adjoute point (encores que soit le dire commun) qu’elle est toute en chasque partie du corps ; car cela implique contradiction, et divise l’ame.

Or combien que l’ame comme dict est, soit par tout le corps diffuse et respandue, si est ce que pour exploitter et exercer ses facultés elle est plus spécialement et expressément en certains endroits du corps qu’ès autres, esquels est dicte avoir son siege, et non y estre toute entiere, car le reste seroit sans ame et sans forme : et comme elle a quatre principales et maistresses facultés, aussi luy donne-t-on quatre sieges, ce sont les quatre régions que nous avons marqué cy-dessus en la composition du corps, les quatre premiers et principaux instrumens de l’ame, les autres se rapportent et dépendent de ceux-cy, comme aussi toutes les facultés à celles-cy, sçavoir pour la faculté genitale les génitoires, pour la naturelle le foye, pour la vitale le cœur, pour l’animale et intellectuelle le cerveau.

Il vient [11] maintenant à parler en général de l’exercice de ses facultés : à quoy l’ame est de soy [12] sçavante et suffisante, dont elle ne faut point à produire ce qu’elle sçait, et bien exercer ses fonctions, comme il faut, si elle n’est empeschée, et moyennant que ses instrumens soient bien disposés : dont a esté bien et vrayement dict par les sages, que nature est sage, sçavante, industrieuse, suffisante maistresse, qui rend habile à toutes choses, insita sunt nobis omnium artium ac viriutum semina, magisterque ex occuto Deus producit ingenia [13] : ce qui est aisé à monstrer par induction : la vegetative sans instruction forme le corps en la matrice tant excellemment, puis le nourrit et le faict croistre, attirant la viande, la retenant et cuisant, puis remettant les excremens, elle engendre et refaict les parties qui defaillent, ce sont choses qui se voyent aux plantes, bestes, et en l’homme. La sensitive de soy sans instruction faict, aux bestes, et en l’homme remuer les pieds, les mains, et autres membres, les gratter, frotter, secouer, demener les levres, tetter, plorer, rire : la raisonnable de mesme, non selon l’opinion de Platon, par reminiscence de ce qu’elle sçavoit avant entrer au corps ; ny selon Aristote, par reception et acquisition, venant de dehors par les sens, estant de soy une carte blanche et vuide, combien qu’elle s’en sert fort, mais de soy sans instruction, imagine, entend, retient, raisonne, discourt. Mais pour ce que cecy semble plus difficile de la raisonnable que des autres, et heurte aucunement Aristote, il en sera davantage traitté en son lieu, au discours de l’ame intellective.

Il reste encores le dernier point de l’ame, sa separation d’avec son corps, laquelle est de diverses sortes et genres : l’une et l’ordinaire est naturelle par mort, cette-cy est differente entre les animaux et l’homme : car par la mort des animaux l’ame meurt et est aneantie selon la regle, qui porte que par la corruption du subiect la forme se perd et perit, la matiere demeure. Par celle de l’homme, l’ame est bien séparée du corps, mais elle ne se perd, ains demeure, d’autant qu’elle est immortelle.

L’immortalité de l’ame est la chose la plus universellement, religieusement (c’est le principal fondement de toute religion) et plausiblement retenue par tout le monde : j’entends d’une externe et publique profession ; car d’une serieuse, interne et vraye non pas tant, tesmoin tant d’Epicuriens, libertins, et moqueurs ; toutesfois les Saduceens, les plus gros milours [14] des Juifs n’en faisoient point la petite bouche à la nier : la plus utilement creue, aucunement assez prouvée par plusieurs raisons naturelles et humaines, mais proprement et mieux establie par le ressort de la religion, que par tout autre moyen [15] . Il semble bien y avoir une inclination et disposition de nature à la croire, car l’homme desire naturellement allonger et perpétuer son estre ; d’où vient aussi ce grand et furieux soin et amour de nostre posterité et succession : puis deux choses servent à la faire valoir et rendre plausible ; l’une est l’esperance de gloire et reputation, et le desir de l’immortalité du nom, qui tout vain qu’il est, a un merveilleux crédit au monde : l’autre est l’impression que les vices qui se dérobent de la veue et cognoissance de l’humaine justice, demeurent tousjours en butte à la divine, qui les chastiera, voyre après la mort : ainsi outre que l’homme est tout porté et disposé par nature à la desirer, et par ainsi la croire, la justice de Dieu la conclud.

De là nous apprendrons y avoir trois differences et degrés d’ames, ordre requis à la perfection de l’univers. Deux extremes : l’un de celles qui estans du tout materielles, plongées, enfondrées et inseparables de la matière ; et ainsi avec elle corruptibles : ce sont les brutales [16] : l’autre au contraire de celles qui n’ont aucun commerce avec la matiere et le corps, comme les demons immortels : et au milieu est l’humaine qui comme moyenne n’est du tout attachée à la matiere, ny du tout sans elle, mais est joincte avec elle, et peust aussi sans icelle subsister et vivre. Cet ordre et distinction est un bel argument pour l’immortalité : ce seroit un vuide, un defaut et deformité trop absurde en nature, honteuse à son autheur, et ruineuse au monde, qu’entre deux extremes, le corruptible et incorruptible, il n’y eust point de milieu, qui fust en partie et l’un et l’autre : il en faut par necessité un qui lie et joigne les bouts, et n’est autre que l’homme. Au dessous les ultimes, et du tout materielles, est ce-qui n’en a point, comme les pierres : au dessus les plus hautes et immortelles, est l’eternel unique Dieu.

L’autre separation non naturelle ny ordinaire, et qui se faict par bouttées et par fois, est très difficile à entendre, et fort perplexe : c’est celle qui se faict par extase et ravissement, qui est fort diverse, et se faict par moyens fort differens : car il y en a de divine, telle que l’escriture nous rapporte de Daniel, Zacharie, Esdras, Ezechiel, saint Paul. Il y en a de demoniacle [17] procurée par les demons et esprits bons ou mauvais, ce qui se lit de plusieurs, comme de Jean Duns dit Lescot, lequel estant en son extase trop longuement tenu pour mort, fut porté et jette en terre ; mais comme il sentit les coups que l’on luy jettoit, revint à soy et fut retiré ; mais pour avoir perdu le sang et la teste cassée, il mourut tost du tout : Cardan le dit de soy et de son pere [18]. Et demeure bien vérifié autentiquement en plusieurs et divers endroits, du monde, de plusieurs et presque tousjours populaires, foibles, et femmes possédées, desquels les corps demeurent non seulement sans mouvement et sans pouls de cœur et des arteres, mais encores sans sentiment aucun des plus cruels coups de fer et de feu ; et puis leurs ames estans revenues, ils sentoient de très grandes douleurs, et racontoient ce qu’elles avoient veu et faict fort loin de là. Tiercement y a l’humaine qui vient ou de la maladie que Hippocrates appelle sacrée, le vulgaire mal caduc, morbus comitialis [19], auquel l’on escume par la bouche, qui est sa marque, laquelle n’est point aux possedés, mais en son lieu y a une puante senteur : ou des medi-medi medi-caments narcotiques, stupefiants et endormissants. Ou de la force de l’imagination, qui s’efforce et se bande par trop en quelque chose, et emporte toute la force de l’ame. Or, en ces trois genres d’extase et ravissement,divin, demoniacle, humain, la question est, si l’ame est vrayement et realement séparée du corps, ou si demeurant en iceluy, elle est tellement occupée à quelque chose externe qui est hors son corps, qu’elle oublie son propre corps, dont il advient une sur seance et vacation de ses actions et exercice de ses fonctions. Quant à la divine, l’apostre parlant de soy et de son propre faict, n’en ose rien definir, si incorpore vel extra corpus nescio, Deus scit [20], instruction qui devroit servir pour tous autres, : et pour les autres abstractions moindres. Quant à la demoniacle, ne sentir de si grands coups, et rapporter ce qui a esté faict à deux ou trois cents lieues de là, sont deux grandes et violentes conjectures, mais non du tout necessaires ; car le demon peut tant amuser l’ame et l’occuper’au dedans, qu’elle n’aye aucune action ny commerce avec son corps, pour quelque temps, et cependant l’affoler et lui représenter en l’imagination tellement ce qui a esté faict loing de là, qu’elle le puisse bien conter : car d’affirmer que certainement l’ame entiere sorte et abandonne son corps, le-le le-quel ainsi demeureroit mort, il est bien hardi et choque rudement la nature : de dire que non entiere mais la seule imaginative ou intellectuelle est emportée, et que la vegetative demeure, c’est s’embarasser encores plus ; car ainsi l’ame unique en son essence, seroit divisée, ou bien l’accident seul seroit emporté et non la substance. Quant à l'humaine, sans-doubte il n’y a point de separation d’ame, mais seulement suspension de ses actions externes et patentes.

Ce que devient l’ame, et quel est son estat après sa separation naturelle par mort, les opinions sont diverses, et ce poinct n’est du subject de ce livre. La metempsycose et transanimation de Pythagoras a esté aucunement embrassée par les Academiciens, Stoïciens, Egyptiens, et autres, non toutesfois de tous en mesme sens ; car les uns l’ont admise seulement pour la punition des meschans, comme se lit de Nabuchodonosor changé en bœuf par punition divine. D’autres et plusieurs grands ont pensé que les ames bonnes et excellentes estans separées, devenoient anges, comme les meschantes, diables ; il eust esté plus doux de les dire semblables à eux, non nubent, sed erunt sicut angeli [21]. Aucuns ont dict que les ames des plus meschans estoient au bout de quelque long temps reduites en rien : mais il faut apprendre la verité de tout cecy, de la religion et des theologiens qui en parlent tout clairement.


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CHAPITRE IX [22].

De l'ame en particulier, et premierement de la faculté vegetative.


SOMMAIRE. — Des facultés de l’ame ; de sa faculté vegetative, et des trois autres sortes de facultés qui en dérivent.
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APRÉS la description generale de l'ame en ces dix poincts , il faut en parler particulièrement, scion l’ordre de ses facultés, commençant par les moindres, lequel est tel, végétative, sensitive, apprehensive, ou imaginative, appetitive, intellective, qui est la souveraine et vrayement humaine. Sous chascune y en a plusieurs, qui leur sont subjectes et comme parties d’icelles, comme se verra en les traittant de rang.

De la vegetative plus basse, qui est, mesme aux plantes, je n’en veux parler beaucoup, c’est le propre subject des médecins, de la santé et de la maladie.

    cog-noissance de l’humaine justice, demeurent tousjours en butte à la divine, qui les chastiera, voyre (l) après la mort.

    et changeant, et estant bon pour une fonction d’ame, est contraire à l’autre ; estant chaud et humide en la jeunesse, est bon pour la vegetative, et mal pour la raisonnable ; et au contraire froid et sec en la vieillesse, est bon pour la raisonnable, mal pour la vegetative. Par maladie ardente fort eschaufé et subtilisé, est propre à l’invention et divination, mais impropre à maturité et solidité de jugement et sagesse.

    De l’unité et singularité ou pluralité des ames en l’homme, les opinions et raisons sont fort diverses entre les sages. Qu’il y en aye trois essentiellement distinctes, c’est l’opinion des Égyptiens, et d’aucuns grecs comme platoniciens. Mais c’est chose estrange qu’une mesme chose aye plusieurs formes essentielles. Que les ames soient singulieres, et à chascun homme la sienne ; c’est l’opinion de plusieurs, contre laquelle l’on dict qu’il faudroit ou qu’elle fust toute mortelle, ou bien en partie mortelle en la vegetative et sensitive, et en partie immortelle en la raisonnable, et ainsi seroit divisible. Qu’il n’y en aye qu’une seule raisonnable generalement de tous hommes ; c’est l’opinion des arabes, venue de Themistius grec, mais refutée par plusieurs. La plus commune opinion est qu’il n’y en a en chascun homme qu’une en substance, cause de la vie et de toutes les actions ; laquelle est toute en tout, et toute en chaque partie ; mais elle est garnie et enrichie d’un très grand nombre de diverses facultés et puissances, merveilleusement differentes, voyre contraires les unes aux autres, selon la diversité des vaisseaux et instrumens où elle est retenue, et des objects qui luy sont proposez. Elle exerce l’ame sensitive et raisonnable au cerveau ; la vitale

    de-voir adoucir. Il s’expliquait avec bien plus de hardiesse dans la Ire, édition, comme on pourra le voir à la fin de la longue variante citée en note, dans ce chapitre.

    Autres veulent qu’elle y entre toute entiere avec toutes ses facultés en un coup, sçavoir lors que le corps est tout organisé,formé et tout achevé d’estre faict, et qu’auparavant n’y a eu aucune ame, mais seulement une vertu et energie naturelle, forme essentielle de la semence, laquelle agissant par les esprits qui sont en ladite semence, comme par instrumens, forme et bastit le corps, et agence tous les membres ; ce qu’estant faict, ceste energie s’evanouit et se perd, et par ainsi la semence cesse d’estre semence, perdant sa forme par l’arrivée d’une autre plus noble, qui est l’ame humaine ; laquelle faict que ce qui estoit semence est maintenant homme.

    L’immortalité de l’ame est la chose la plus universellement, religieusement et plausiblement reçeue par tout le monde (j’entends d’une externe et publique profession, non d’une interne, serieuse et vraye creance, de quoy sera parlé cy-après), la plus utilement creue, la plus foiblement prouvée et establie par raisons et moyens humains (k). Il semble y avoir une inclination et disposition de nature à la croire, car l’homme desire naturellement allonger et perpetuer son estre, d’où vient aussi ce grand et furieux soin et amour de nostre posterité et succession. Puis deux choses servent à la faire valoir et rendre plausible : l’une est l’esperance de gloire et reputation, et le desir de l’immortalité du nom, qui, tout vain qu’il est, a un merveilleux credit au monde : l’autre est l’impression que les vices, qui se desrobent de la veue et cog-cog-

    (k) Voyez ci-après, L. II, Chap. V.

    Hippocrates, l’on avoit pensé communement ; car le cœur a sentiment et n’est capable de sapience. Or le cerveau, qui est beaucoup plus grand en l’homme qu’en tous autres animaux, pour estre bien fait et disposé, afin que l’ame raisonnable agisse bien, doibt approcher de la forme d’un navire, et n’estre poinct rond, ny par trop grand, ou par trop petit, bien que le plus grand soit moins vicieux ; composé de substance et de parties subtiles, delicates et deliées, bien joinctes et unies, sans separation ny entre-deux, ayant quatre petits creux ou ventres, dont les trois sont au milieu rangez de front et collateraux entre eux, et derriere eux, tirant au derriere de la teste, le quatriesme seul, auquel se faict la preparation et concoction des esprits vitaux pour estre puis (b) faicts animaux, et portez aux trois creux de devant, ausquels l’ame raisonnable faict et exerce ses facultés, qui sont trois, entendement, memoire, imagination, lesquelles ne s’exercent poinct separement et distinctement, chascune en chascun creux ou ventre, comme aucuns vulgairement ont pensé, mais communement et par ensemble toutes trois en tous trois et chascun d’eux, à la façon des sens externes qui sont doubles, et ont deux creux en chascun desquels le sens s’exerce tout entier : d’où vient que celuy qui est blessé en l’un ou deux de ces trois ventres, comme le paralytique, ne laisse pas d’exercer toutes les trois, bien que plus foiblement, ce qu’il ne feroit si chascune faculté avoit son creux à part. Aucuns ont pensé que l’ame raisonnable n’estoit poinct org-org-

    (b) Pour être ensuite faits.

    org-nique et n’avoit besoing, pour faire ses fonctions, d’aucun instrument corporel, pensant par là bien prouver l’immortalité de l’ame : mais sans entrer en un labyrinthe de discours, l’experience oculaire et ordinaire dement ceste opinion, et convainq du contraire : car l’on sçait que tous hommes n’entendent ny ne raisonnent de mesme et esgalement, ains avec très grande diversité : et un mesme homme aussi change, et en un temps raisonne mieux qu’en un autre, en un aage, en un estat et certaine disposition qu’en un autre, tel mieux en santé qu’en maladie, et tel autre mieux en maladie qu’en santé : un mesme en un temps prevaudra en jugement, et sera foible en imagination. D’où peuvent venir toutes ces diversités et changemens, sinon de l’organe et instrument changeant d’estat ? Et d’où vient que l’yvrognerie, la morsure du chien enragé, une fievre ardente, un coup en teste, une fumée montant de l’estomach, et autres accidens, feront culbutter, et renverseront entierement le jugement, tout l’esprit intellectuel, et toute la sagesse de Grece, voire contraindront l’ame de desloger du corps ? Ces accidens purement corporels ne peuvent toucher ny arriver à ceste haute faculté spirituelle de l’ame raisonnable, mais seulement aux organes et instrumens, lesquels estans detraqués et desbauchés, l’ame ne peut bien et reglement agir, et estans par trop forcez et violentez, est contraincte de s’absenter et s’en aller. Au reste se servir d’instrument ne prejudicie poinct à l’immortalité, car Dieu s’en sert bien et y accommode ses actions. Et comme selon la diversité de l’air, region et climat, Dieu produict hommes fort divers en esprit et suffisance naturelle, car en Grece et

    en Italie, il les produict bien plus ingenieux qu’en Moscovie et Tartarie ; aussi l’esprit (c), selon la diversité des dispositions organiques, des instrumens corporels, raisonne mieux ou moins. Or l’instrument de l’ame raisonnable, c’est le cerveau et le temperament d’iceluy, duquel nous avons à parler.

    Temperament est la mixtion et proportion des quatre premieres qualités, chaud, froid, sec, et humide, ou bien une cinquiesme et comme l’harmonie resultante de ces quatre. Or du temperament du cerveau vient et depend tout l’estat et l’action de l’ame raisonnable : mais ce qui cause et apporte une grande misere à l’homme, est que les trois facultez de l’ame raisonnable, entendement, memoire, imagination, requierent et s’exercent par temperamens contraires. Le temperament de l’entendement est sec, d’où vient que les advancés en aage prevalent en entendement par dessus les jeunes, d’autant que le cerveau s’essuye et s’asseiche tousjours plus : aussi les melancholiques secs, les affligés, indigens, et qui sont à jeun (car la tristesse et le jeusne desseiche), sont prudens et ingenieux. Splendor siccus, animus sapientissimis. Vexatio dat intellectum (d). Et les bestes de temperament plus sec, comme fourmis, abeilles, elephans, sont prudentes et inge-inge-

    (c) Cette phrase est ainsi bouleversée dans l'édition de Bastien, par la transposition d'une ligne : « aussy l'esprit selon la diversité des dispositions organiques des moins. Or l'instrument de l'ame raisonnable instrumens corporels, raisonne mieux, ou c'est le cerveau, et le temperament d'iceluy, duquel nous avons à parler ».

    (d) « Tempérament sec, esprit très-sage. Les peines qu'on éprouve augmentent l'intelligence ».

    inge-nieuses (comme les humides, tesmoin le pourceau, sont stupides, sans esprit) ; et les meridionaux, secs et modérés en chaleur interne du cerveau, à cause du violent chaud externe. Le temperament de la memoire est humide, (d’où vient que les enfans l’ont meilleure que les vieillards), et le matin après l’humidité acquise par le dormir de la nuict, plus propre à la memoire, laquelle est aussi plus vigoureuse aux septentrionaux. J’entends icy une humidité non aqueuse, coulante, en laquelle ne se puisse tenir aucune impression, mais aërée, gluante, grasse et huileuse, qui facilement reçoit et retient fort, comme se voit aux peintures faites en huile. Le temperament de l’imagination est chaud, d’où vient que les frenetiques, maniaques et malades de maladies ardentes, sont excellens en ce qui est de l’imagination, poësie, divination, et qu’elle est forte en la jeunesse et adolescence (les poëtes et prophetes ont fleury en cest aage) et aux lieux mitoyens entre septentrion et midy.

    De la diversité des temperamens il advient que l’on peust estre mediocre en toutes les trois facultés, mais non pas excellent, et que qui est excellent en l’une des trois, est foible ès autres. Que les temperamens de la memoire et l’entendement soient fort differens et contraires ; cela est clair, comme le sec et l’humide : de l’imagination qu’il soit contraire aux autres, il ne le semble pas tant ; car la chaleur n’est pas incompatible avec le sec et l’humide, et toutesfois l’experience monstre que les excellens en l’imagination sont malades en l’entendement et memoire, et tenus pour fols et furieux ; mais cela vient que la chaleur grande qui sert à l’imagination, con-con-

    con-somme et l’humidité qui sert à la memoire, et la subtilité des esprits et figures, qui doibt estre en la seicheresse qui sert à l’entendement, et ainsi est contraire et destruict les autres deux.

    De tout cecy il est evident qu’il n’y a que trois principaux temperamens qui servent et fassent agir l’ame raisonnable, et distinguent les esprits, sçavoir le chaud, le sec et l’humide : le froid ne vaut à rien, n’est point actif, et ne sert qu’ à empescher tous les mouvemens et fonctions de l’ame ; et quand il se lit souvent aux autheurs que le froid sert à l’entendement ; que les froids de cerveau, comme les melancholiques et les meridionaux, sont prudens, sages, ingenieux ; là le froid se prend non simplement, mais pour une grande moderation de chaleur ; car il n’y a rien plus contraire à l’entendement et sagesse que la grande chaleur, laquelle au contraire sert à l’imagination ; et selon les trois temperamens il y a trois facultés de l’ame raisonnable. Mais, comme les temperamens, aussi les facultés reçoivent divers degrés, subdivisions et distinctions.

    Il y a trois principaux offices et differences d’entendement, inferer, distinguer, eslire. Les sciences qui appartiennent à l’entendement sont la theologie scholastique, la theorique de medecine, la dialectique, la philosophie naturelle et morale. Il y a trois sortes de differences de memoire ; recevoir et perdre facilement les figures, recevoir facilement et difficilement perdre, difficilement recevoir et facilement perdre. Les sciences de la memoire sont la grammaire, theorique de ju-ju-

    ju-risprudence et theologie positive, cosmographie, arithmetique.

    De l’imagination y a plusieurs differences et en beaucoup plus grand nombre que de la memoire et de l’entendement ; à elle appartiennent proprement les inventions, les faceties et brocard, les poinctes et subtilités, les fictions et mensonges, les figures et comparaisons, la proprieté, netteté, elegance, gentillesse. Parquoy appartiennent à elle la poësie, l’eloquence, musique, et generallement tout ce qui consiste en figure, correspondance, harmonie et proportion.

    De tout cecy appert que la vivacité, subtilité, promptitude, et ce que le commun appelle esprit, est à l’imagination chaude ; la solidité, maturité, verité, est à l’entendement sec. L’imagination est active, bruyante ; c’est elle qui remue tout et met tous les autres en besongne. L’entendement est action morne et sombre. La memoire est purement passive, et voyci comment : l’imagination premierement recueille les especes et figures des choses tant presentes par le service des cinq sens, qu’absentes par le benefice du sens commun ; puis les represente, si elle veust, à l’entendement, qui les considere, examine, cuit et juge : puis elle-mesme les met en depost et conserve en la memoire, comme l’escrivain au papier, pour, derechef, quand besoin sera, les en tirer et extraire (ce que l’on appelle reminiscence) ; ou bien, si elle veust, les recommande à la memoire, avant les presenter à l’entendement. Par quoy recueillir, representer à l’entendement, mettre en la memoire, et les extraire, sont tous œuvres de l’imagination. Et ainsi à elle appartient le sens commun, la reminis-reminis-

    reminis-cense, et ne sont point puissances separées d’elle, comme aucuns veulent, pour faire plus de trois facultez de l’ame raisonnable.

    Le vulgaire, qui ne juge jamais bien, estime et faict plus de feste de la memoire que des deux autres ; pource qu’elle en compte fort, a plus de monstre et faict plus de bruict en public ; et pense-il que, pour avoir bonne memoire, l’on est fort sçavant, et estime plus la science que la sagesse : c’est toutesfois la moindre des trois, qui peust estre avec la folie et l’impertinence ; mais très rarement elle excelle avec l’entendement et sagesse, car leurs temperamens sont contraires. De cette erreur populaire est venue la mauvaise instruction de la jeunesse, qui se voyt par-tout (c) . Ils sont tousjours après à lui faire apprendre par cœur (ainsi parlent-ils) ce que les livres disent, affin de les pouvoir alleguer, et à luy remplir et charger la memoire du bien d’autruy, et ne se soucient de luy reveiller et esguiser l’entendement, et former le jugement, pour lui faire valoir son propre bien et ses facultés naturelles, pour le faire sage et habile à toutes choses. Aussi voyons-nous que les plus sçavans qui ont tout Aristote et Ciceron en la teste, sont plus sots et plus ineptes aux affaires, et que le monde est mené et gouverné par ceux qui n’en sçavent rien. Par l’advis de tous les sages, l’entendement est le premier, la plus excellente et principale piece du harnois. Si elle joue bien, tout va bien, et l’homme est sage ; et au rebours, si elle se mescompte, tout va de travers. En second lieu, est l’imagination : la memoire est la derniere.

    (c) Voyez L. III, Chap. XIV.

    Toutes ces differences s’entendront peut-estre encore mieux par cette similitude, qui est une peincture ou imitation de l’ame raisonnable. En toute cour de justice y a trois ordres et estages : le plus haut, des juges, auquel y a peu de bruit, mais grande action ; car sans s’esmouvoir et agiter, ils jugent, decident, ordonnent, determinent de toutes choses : c’est l’image du jugement, plus haute partie de l’ame. Le second, des advocats et procureurs, auquel y a grande agitation et bruit sans action : car ils ne peuvent rien vuider ny ordonner, seulement secouer les affaires : c’est la peincture de l’imagination, faculté remuante, inquiete, qui ne s’arreste jamais, non pas pour le dormir profond ; et faict un bruit au cerveau comme un pot qui boult, mais qui ne resoult et n’arreste rien. Le troisiesme et dernier estage est du greffe et registre de la cour, où n’y a bruit ny action ; c’est une pure passion, un gardoir et reservoir de toutes choses, qui represente bien la memoire.

    L’ame, qui est la nature et la forme de tout animal, est de soy toute sçavante (f) sans estre apprinse, et ne faut (g)

    (f) Cette assertion est contraire à l'expérience : elle tient à celle des idées innées auxquelles personne ne croit plus. C'est un fait incontestable que toutes les idées viennent des sens. Voyez l'Histoire de l'homme par Buffon, Locke, Condillac, Destuit de Tracy, etc. etc.

    (g) « Ne fault point à produire ce qu'elle sçait, et bien exercer ses fonctions comme il faust ». — C'est ainsi que Bastien, d'après une édition antérieure sans doute, écrit, dans la même phrase, fault par l, quand il signifie faillit, manquer ; faust par s, quand il signifie est

    poinct à produire ce qu’elle sçait, et bien exercer ses fonctions comme il faut, si elle n’est empeschée, et moyennant que ses instrumens soyent bien disposés ; dont a esté bien et vrayement dict par les sages que nature est sage, sçavante, industrieuse, et rend habile à toutes choses ; ce qui est aisé à monstrer par induction. L’ame vegetative, de soy sans instruction, forme le corps en la matrice tant excellemment (h), puis le nourrit et le faict croistre, attirant la viande, la retenant et cuysant, et rejettant les excremens ; elle r’engendre et refaict les parties qui defaillent : ce sont choses qui se voyent aux plantes, bestes, et en l’homme. La sensitive, de soy sans instruction, faict aux bestes et en l’homme remuer les pieds, les mains et autres membres ; les gratter, frotter, secouer, tetter, demener les levres, pleurer, rire. La raisonnable de mesme, non selon l’opinion de Platon, par reminiscence de ce qu’elle sçavoit avant entrer au corps, comme si elle estoit plus aagée que le corps ; ny selon Aristote, par reception et acquisition venant de dehors par les sens, estant de soy une carte blanche

    nécessaire ; ce qui est contraire à l'étymologie, puisque l'un et l'autre viennent du latin fallit. Cette double orthographe d'un même mot aura sans doute été imaginée par le besoin d'en distinguer les deux significations. Mais cette distinction orthographique n'a point lieu dans la première édition ; et je m'y suis conformé dans celle-ci.

    (h) Essentiellment. Bastien écrit ce mot excellement ; mais il n'a pas fait attention qu'il était écrit excellemment dans la première édition, et qu'on n'a jamais pu l’écrire autrement que par deux m, puisqu'il vient d'excellemment, du latin excellente mente, de latin excellente mente, d'un esprit excellent.

    et irascible au cœur ; la naturelle vegetative et concupiscible au foye ; la genitale aux genitoires : ce sont les principales et capitales, ne plus ne moins que le soleil, un en son essence, despartant ses rayons en divers endroicts, eschaufe en un lieu, esclaire en un autre, fond la cire, seiche la terre, blanchist la neige, nourrist la peau, dissipe les nuées, tarist les estangs : mais quand et comment, si toute entiere et en un coup, ou si successivement elle arrive au corps, c’est une question. La commune opinion venue d’Aristote est que l’ame vegetative et sensitive, qui est toute materielle et corporelle, est en la semence, et avec elle descendue des parens ; laquelle conforme le corps en la matrice, et, iceluy faict, arrive la raisonnable de dehors ; et que pour cela il n’y a deux ny trois ames, ny ensemble ny successivement, et ne se corrompt la vegetative par l’arrivée de la sensitive, ny la sensitive par l’arrivée de la raisonnable : ce n’est qu’une qui se faict, s’acheve et se parfaict avec le temps et par degrés (i), comme la forme artificielle de l’homme, qui se peindroit par pieces l’une après l’autre, la teste, puis la gorge, le ventre, etc.

    (i) Cette option d'Aristote est aussi celle de Lucrèce, de Voltaire qui l'exposent en très-beau vers, etc. etc. L'ame est créée ou plutôt developpée avec le corps ; elle croît avec lui, et ne se manifeste que par ses organes. Voltaire dit :

    Est-ce là ce rayon de l'essence suprême,
    Que l'on nous peint si lumineux ?
    Est-ce là cet esprit survivant à lui-même ?...
    Il naît avec nos sens, croit, s'affaiblit comme eux :
    Hélas ! il périra de même.

    et vuide : mais de soy et sans instruction, imagine, entend, retient, raisonne et discourt. Et pource que ceste proposition semble plus difficile à croire de la raisonnable que des autres, elle se prouve premierement par le dire des plus grands philosophes, qui tous ont dict que les semences des grandes vertus et sciences estoient esparses naturellement en l’ame ; puis par raison tirée de l’expérience, les bestes raisonnent, discourent, font plusieurs choses de prudence et d’entendement, comme il a esté bien prouvé cy-dessus. Ce qu’advouant mesme Aristote, a rendu la nature des bestes plus excellente que l’humaine, laquelle il faict vuide et ignorante du tout : mais les ignorans appellent cela instinct naturel, qui ne sont que des mots en l’air ; car après ils ne sçavent declarer qu’est-ce qu’instinct naturel. Les hommes melancholiques, maniaques, phrenetiques et atteincts de certaines maladies qu’Hippocrates appelle divines, sans l’avoir apprins, parlent latin, font des vers, discourent prudemment et hautement, devinent les choses secrettes et à venir (lesquelles choses les sots ignorans attribueront au diable ou esprit familier), bien qu’ils fussent auparavant idiots et rustiques, et qui depuis sont retournez tels après la guarison. Item y a des enfans qui bientost après estre nez, ont parlé, comme ceux qui sont venus de parens vieils : d’où ont-ils apprins et tiré tout cela, tant les bestes que les hommes ?

    Si toute science venoit, comme veust Aristote, des sens, il s’ensuivroit que ceux qui ont les sens plus entiers et plus

    vifs seroient plus ingenieux et plus sçavans ; et se voyt le contraire souvent, qu’ils ont l’esprit plus lourd et sont plus mal-habiles ; et plusieurs se sont privez à escient de l’usage d’iceux, affin que l’ame fist mieux et plus librement ses affaires. Et seroit chose honteuse et absurde, que l’ame tant haute et divine questast son bien des choses si viles et caduques, comme les sens ; car c’est au rebours que les sens ont tout de l’ame, et sans elle ne sont et ne peuvent rien. Et puis enfin que peuvent appercevoir les sens, sinon les accidens et superficies des choses ? Car les natures, formes, les thresors et secrets de nature, nullement.

    Mais on demandera, pourquoy donc ces choses ne se font-elles tousjours par l’ame ? Pourquoy ne faict-elle en tout temps ses propres fonctions, et que plus foiblement et plus mal elle les faict en un temps qu’autre ? L’ame raisonnable agit plus foiblement en la jeunesse qu’en la vieillesse ; et au contraire la vegetative, forte et vigoureuse en la jeunesse, est foible en la vieillesse, en laquelle elle ne peust refaire les dents tombées comme en la jeunesse. La raisonnable faict en certaines maladies ce qu’elle ne peust en santé, et au rebours en santé ce qu’elle ne peust en maladie. A quoy pour tout la response (touchée cy-dessus) est que les instrumens, desquels l’ame a besoin pour agir, ne sont ny ne peuvent tousjours estre disposez comme il faut pour exercer toutes fonctions, et faire tous effects, voyre ils sont contraires et s’entr’empeschent ; et, pour le dire plus court et plus clairement, c’est que le temperament du cerveau, duquel a esté tant parlé cy-dessus, par lequel et selon lequel l’ame agit, est divers

  1. Ce chapitre. VIII est le quinzème de la première édition.
  2. Nous le mettons en note, comme Variante.
  3. Variante. Voicy une matière difficile sur toutes, traictée et agitée par les plus sçavans et sages, mais avec une grande diversité d’opinions, selon les diverses nations, religions, professions et raisons, sans accord et resolution certaine. Les principaux poincts sont de l’origine et de la fin des ames, leur entrée et sortie des corps, d’où elles viennent, quand elles y entrent, et où elles vont quand elles en sortent ; de leur nature, estat, action, et s’il y en a plusieurs en l’homme ou une seule.

    De l’origine des ames humaines, il y a de tout temps eu

  4. très grande dispute et diversité d’opinions entre les philosophes et les theologiens. Il y a eu quatre opinions celebres : selon la premiere, qui est des Stoïciens, tenue par Philon, juif, puis par les Manichéens, elles sont extraites et produictes comme parcelles de la substance de Dieu, qui les inspire aux corps : la seconde d’Aristote, tenue par Tertulien, Apollinaris, les Luciferiens et autres chrestiens, dit qu’elles viennent et dérivent des ames des parens avec la semence, ainsi que les corps, à la façon des ames brutales, vegetatives et sensitives : la troisième des Pythagoriciens et Platoniciens, tenue par plusieurs rabins et docteurs juifs, puis par Origene et autres docteurs chrestiens, dit qu’elles ont esté du commencement toutes creées de Dieu, faites de rien, et reservées au ciel, puis envoyées icy-bas, selon qu’il est besoing aux corps formés et disposés à les recevoir : la quatriesme, receue en la chrestienté, est qu’elles sont creées de Dieu, et infuses aux corps preparés, tellement que sa creation et infusion se fasse en mesme instant. Ces quatre opinions sont affirmatives : car il y en a une cinquiesme plus retenue qui ne definist rien, et se contente de dire que c’est une chose secrette et incognue aux hommes, de laquelle opinion ont esté SS. Augustin, Gregoire de Nice et autres : qui toutesfois ont trouvé les deux dernieres affirmatives, plus vraysemblables que les deux premieres.

    Le siege de l’ame raisonnable, ubi sedet pro tribunali (a), c’est le cerveau et non pas le cœur, comme, avant Platon et

    (a) « Où elle siége comme sur un tribunal ».

  5. επιχείρηση signifie, en effet, perfection, acte parfait.
  6. « Comme le cheval et le mulet, qui n'ont point d'intelligence ».
  7. L'ame des bêtes.

    (l) Même après la mort.

  8. « Circonscriptivement, définitivement, effectivement. »
  9. « Il souffla sur sa face l’esprit de vie. « Gen. C. II, 188.
  10. « J’étais enfant, j’avais reçu en partage un bon naturel ; et, comme j’étais bon, je trouvai un corps sans souillure ». Lib. Sapient. C. VIII, V. 19 et 20. — Charron a un peu altéré le texte : nous le rétablissons ici : Puer autem erarn ingeniosus, et sortitus sum animam bonam. — Et cum esseni magis bonus, veni ad corpus incoinquinatum.
  11. Il convient maintenant de parler.
  12. Voyez la note de la page 54.
  13. « Les semences de tous les arts et de toutes les vertus sont en nous ; mais c’est Dieu qui, en secret, produit les talens ».
  14. Les plus gros milords, c’est-à-dire, docteurs.
  15. Ce passage est un de ceux que Charron avait cru de-de-
  16. Les ames des bêtes.
  17. Nous remarquerons, une fois pour toutes, que Charron écrit indifféremment demoniacle et demoniaque, maniacle et maniaque, etc. Sur certains mots, il n’y avait point encore d’orthographe et sans doute de prononciation, bien arrêtée.
  18. Le Cardan, dont il est question ici, était fils du célèbre Cardan, ce médecin italien, d’un esprit si bizarre, et qui, comme Socrate, croyait avoir un esprit familier. Ce fils de Cardan, aussi docteur en médecine, eut la tête tranchée à Rome, âgé de 26 ans seulement, pour avoir voulu empoisonner sa tante. Voyez dans Bayle, l’article Cardan..
  19. « La maladie des comices », c’est-à-dire, le mal caduc, le haut mal ; appelé ainsi, parce que les Romains rompaient leurs comices quand quelqu’un y tombait du haut mal.
  20. « Si c’est en corps ou sans corps, je n’en sais rien, Dieu seul le sait ». S. Paul. Ep. II, aux Corinth, C. XIIx, v. 2.
  21. « Ils ne se marieront pas, mais ils seront comme des anges ».
  22. Ce chapitre ne se trouve point dans la première édition.