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LIVRE 3 CHAPITRE 32
contre la hayne.
pour se deffendre contre la hayne, il faut tenir une reigle qui est vraye, que toutes choses ont deux anses par lesquelles l’on les peust prendre : par l’une elles nous semblent griefves et poisantes, par l’autre aisées et legeres. Prenons donc les choses par la bonne anse, et nous trouverons qu’il y a de bon et à aymer en tout ce que nous accusons et hayssons : car il n’y a rien au monde qui ne soit pour le bien de l’homme. Et en ce qu’il nous offense, nous avons plus de subject de le plaindre que de le hayr ; car il est le premier offensé, et en reçoit le plus grand dommage, pource qu’il perd en cela l’usage de la raison, la plus grande perte qui puisse estre. Tournons donc en tel accident la hayne en pitié, et mettons peine de rendre dignes d’estre aymez ceux que nous voudrons hayr, ainsi que fit Lycurgue à celuy qui luy avoit crevé l’œil, lequel il rendit pour peine de l’injure un honneste, vertueux et modeste citoyen, par sa bonne instruction.