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Dharmasindhu, ou Océan des rites religieux/Chapitre XXIV

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Dharmasindhu, ou Océan des rites religieux
Texte établi par Musée Guimet, Ernest Leroux (Tome 7p. 242-246).

CHAPITRE XXIV
RÈGLES POUR LE REPAS À OFFRIR AUX BRÂHMANES EN L’HONNEUR DES MÂNES DES ANCÊTRES À LA DATE DE LA NOUVELLE LUNE

Pour le repas dos Brâhmanes en l’honneur des ancêtres décédés, il faut prendre le jour dont la quatrième des cinq parties entre lesquelles le jour est divisé, c’est-à dire l’après midi, renferme la Date de la nouvelle lune. On peut prendre le premier ou li> second jour de la Date de la nouvelle lune, si leurs après-midi renferment complètement ou à peu près la Date de la nouvelle lune. Si les après-midi des deux jours renferment presque la Date de la nouvelle lune, mais pas également, il faut prendre le jour dont l’après-midi renferme le plus de la Date de la nouvelle lune. Quand les soirées de deux jours renferment également la Date do la nouvelle lune, alors s’il y a eu une décroissance de la (quinzième) Tithi le premier jour doit être pris, mais si la quinzième Tithi a augmenté, ou bien est égale à la quatorzième, il faut prendre le second jour.

Voici des exemples d’après-midi des deux jours renfermant presque la Date de la nouvelle lune, et cela également quand il y a ou accroissement, ou décroissance, ou similitude :

La quatorzième a 19 ghatikas après le lever du soleil, la Date de la nouvelle lune 23, et la durée du jour est de 30. Dans ce cas les après-midi des deux jours renferment également 5 ghatikas de la Date de la nouvelle lune, et comme il y a un accroissement de 4 ghatikas de la quinzième comparée à la quatorzième, il faut prendre le second jour.

Autre exemple : La quatorzième a 23 ghaṭikas après le lever du soleil, la Date de la nouvelle lune 19. Ici, comme les après-midi des deux jours renferment également 1 ghaṭika et qu’il y a une décroissance de 4 ghaṭikas, il faut prendre le second jour.

Nouvel exemple : La quatorzième a 21 ghaṭikas après le lever du soleil, et la Date de la nouvelle lune aussi 21 ghaṭikas. Ici les deux après-midi renferment également 3 ghaṭikas, et comme il n’y a ni accroissement, ni décroissance, mais que la quatorzième et la quinzième sont égales, il faut alors prendre le second jour.

Quand les deux après-midi renferment complètement (c’est-à-dire pendant leur propre durée ou 6 ghaṭikas) la Date de la nouvelle lune, alors il y a forcément un accroissement (de la quinzième comparée à la quatorzième), il faut prendre le second jour.

Quand l’après-midi d’aucun des deux jours ne renferme la Date de la nouvelle lune, alors ceux qui n’entretiennent qu’un seul Feu domestique sacrificatoire, aussi bien que ceux qui les entretiennent tous les trois, doivent prendre le premier jour, c’est-à-dire, celui où la quatorzième et la quinzième se rencontrent et qui renferme cette partie de la quinzième, ou Date de la nouvelle lune, qu’on appelle Sinivāli[1].

Quant à ceux qui n’entretiennent aucun Feu sacrificatoire, tels que les femmes, les Shudras[2] etc., ils doivent prendre le jour où la première Tithi, et la quinzième se rencontrent et qui renferme ce temps de la quinzième ou Date de la nouvelle lune qu’on appelle « Kuhu »[3] ; telle est du moins l’opinion de Mādhavāchārya au sujet de la Date de la nouvelle lune pour ces personnes, et elle est généralement acceptée par tous les savants.

Le Purushārthaćintāmani dit que ceux qui entretiennent le Feu domestique sacrificatoire, et suivent le Rig-Véda ou le Yajur-Véda noir doivent faire le repas aux brahmanes on l’honneur des ancêtres décédés, pendant le jour qui précède celui du sacrifice (c’est-à dire, le quatorzième) alors même que son après-midi ne renferme pas la Date de la nouvelle lune.

Ainsi lorsque les après-midi des deux jours sont entièrement occupés par la Date de la nouvelle lune, le repas aux brahmanes en l’honneur des mânes des ancêtres doit être fait le second jour. Si les soirées des deux jours renferment presque la Date de la nouvelle lune et qu’il y ait un accroissement de la première Tithi, alors le repas aux brahmanes en l’honneur des mânes des ancêtres doit être accompli pendant la première Tithi et après le sacrifice.

Lorsque l’après-midi du second jour renferme la Date de la nouvelle lune et que la première Tithi étant en décroissance le sacrifice s’accomplit à la Date de la nouvelle lune, alors les Rig-Védistes doivent prendre le premier jour qui renferme le temps de la Date de la nouvelle lune appelé Sinivāli (voir note 154) ; les sectateurs du Yajur-Véda-noir[4] doivent prendre le second jour qui renferme le temps de la Date de la nouvelle lune appelé Kuhu (voir note 156) ; et les Sāma-Védistes peuvent choisir l’un ou l’autre.

Quand l’après-midi du premier jour renferme plus de la Date de la nouvelle lune que celle du second jour, les Sāma-Védistes doivent prendre le premier jour et les sectateurs du Yajur-Véda noir le second. On dit que lors même que l’après-midi d’aucun des deux jours ne renferme la Date de la nouvelle lune, les Sāma Védistes doivent prendre le premier et les sectateurs du Yajur-Véda-noir le second jour.

Quand le Repas de nouvelle lune et le repas annuel offert aux brahmanes en l’honneur des mānes des ancêtres ; ou le Repas de nouvelle lune et le Repas mensuel aux brahmanes eu l’honneur des mânes des ancêtres ; ou le Repas de nouvelle lune et le Repas de la donation du Pot d’eau[5] aux brahmanes en l’honneur des ancêtres décédés se trouvent à la même Date de la nouvelle lune, alors chaque fois tous deux doivent être accomplis le même jour ; mais on doit adorer différentes divinités. Dans ces occasions les Repas mensuels, les Repas annuels, etc., doivent être accomplis les premiers, puis le Repas de nouvelle lune pour les ancêtres décédés doit être accompli avec de la nourriture préparée à part.

Le rite Vaishvadeva[6] doit être accompli, avant le Repas de nouvelle lune offert aux brahmanes en l’honneur des ancêtres décédés, avec les restes du Repas mensuel ou du Repas annuel, ou bien il faut préparer tout exprès de nouveaux mets.

Quand ces rites se rencontrent ainsi le même jour, ceux qui entretiennent le Feu domestique sacrificatoire doivent accomplir d’abord le rite Vaishvadeva, puis l’offrande de boules de riz aux ancêtres morts, puis les Repas annuels, ou mensuels aux brahmanes en l’honneur des ancêtres morts, etc.

Les Repas de nouvelle lune offerts aux brahmanes en l’honneur des ancêtres morts peuvent être accomplis même par ceux qui n’ont pas reçu l’investiture du cordon sacré, par les veufs et par les voyageurs.

Ceux qui ont négligé d’offrir les Repas de nouvelle lune aux Brâhmanes en l’honneur des ancêtres décédés doivent répéter cent fois l’incantation du Rig-Véda qui commence ainsi : « Nyūschu vāćam »[7].

Tel est le vingt-quatrième chapitre traitant des rites du Repas aux mânes des ancêtres pendant la Date de la nouvelle lune.


  1. Sinivāli est la première veille de tout le temps de la Date de la nouvelle lune.
  2. La quatrième des quatre castes entre lesquelles la société Indoue était divisée autrefois et qui n’a pas le droit de porter le cordon sacré de l’épaule. Maintenant le mot Shudras désigne toutes les divisions des castes inférieures qui sont reconnues appartenir à l’Indouisme.
  3. Kuhu se compose des deux dernières veilles de tout le temps de la Date de la nouvelle lune.
  4. Il faut se rappeler que le Véda appelé Yajur existe en deux recensions, soit : le Vājasaneya ou récension blanche et le Taittiriya ou récension noire, qui diffèrent sur plusieurs points, et que cette divergence se produisit probablement avant que le texte du Yajur ne fût confié à l’écriture, au temps où les Védas se transmettaient encore oralement d’une génération à une autre. La légende du Matsia Purāna rapporte que l’auteur du Yajur-Véda, le snge Vaishampāyana communiqua d’abord ce Véda à son disciple Yājnavalkya en le chargeant de l’apprendre à ses vingt-six autres compagnons d’étude. Cependant, avant que Yajnavalkya eftt eu le (emps de s’acquitter de ce devoir, il commit une grave offense contre le sage son maître, qui lui ordonna aussitôt de restituer les mots védiques qu’il lui avait confiés. Yajnavalkya les vomit aussitôt sur le sol sous une forme matérielle. Alors le maître transformant ses vingt-six autres disciples en autant de Taittiris, ou perdrix, leur dit de ramasser le Véda vomi, qui, par son contact avec le sol, était déjà souillé et noirci et fut depuis ce temps appelé Yajur-Noir ou Taittiriya-Yajur-Véda.

    Demeuré ainsi sans Véda, Yājnavalkya se rendit le soleil favorable au moyen d’hymnes agréables, et celui-ci, en récompense, lui apparut sous la forme d’un cheval, ou Vajin, et lui donna un nouveau texte du Yajur Véda, qui fut appelé pour cette raison texte Vûjasaneyin et aussi Yajur-Véda Blanc.

    Le véritable sens de celle légende n’est pas difficile à deviner. Il est toujours arrivé dans les écoles scholastiques et philosophiques, nous en voyons de nombreux exemples dans l’histoire de la philosophie grecque, et même, de notre temps dans les relations qu’ont eu entre eux Saint-Simon, Comte, Spencer, qu’un disciple ardent et avancé se sépare de son maître, rejette une partie de son système et ajoutant à ce qu’il conserve de nouvelles conceptions, crée, pour ainsi dire, un nouveau système et méprise In source a laquelle il s’était d’abord désaltéré ; de même aussi Yajnavalkya, après s’être rendu maître de la philosophie de son précepteur, en rejeta une partie, établit une nouvelle méthode et appela l’ancien système de son premier maître d’un nom de mépris le Yajur Noir ou le Yajur des perdrix.

  5. Le rite du don d’un pot d’eau n’est autre que (écrite usuel du repas offert aux brahmanes en l’honneur des ancêtres morts du donateur, avec cette différence qu’on répand sur le sol pour rafraîchir les ancêtres des poignées d’eau et qu’on donne un pot rempli d’eau à chacun des brahmanes qui représentent les ancêtres du donateur. Il est très méritoire de donner un pot d’or, d’argent ou d’autre métal (voir note 32).
  6. Les Vishvadévas forment une classe de divinités inférieures aux dieux, mais supérieures aux mânes des ancêtres. On doit leur faire chaque jour un sacrifice pour se les rendre favorables, et l’oblation qui leur est présentée d’après ce texte doit être accomplie avant de servir le repas des brahmanes qui représentent les ancêtres. Dans les Védas, le mot Vishvadevas paraît signifier tous les dieux de l’univers.
  7. Nyūschuvâéam pramahe bharCimahe giraindrCiyasadane vivasvatah,
    Nūciddhirat nam sasalilmivitvidannaduschtutirdrainnodeschu shasyate.

    Ce qui signifie :

    « Nous présentons au glorieux Indra, qui a son trône dans le soleil, un hymne agréable de louange (car) il reçoit avec empressement le don des bons et la mauvaise louange ne s’accepte pas par des bienfaiteurs. »

    En traduisant ce Mantra du Rig-Véda Mand, I, 53, I, je ne suis pas exactement le commentaire de Sàyana, parce que les mots inutiles qu’il ajoute ne font qu’obscurcir la simplicité du texte. Lorsqu’il prend ici « gira » pour un nominatif pluriel, il fait évidemment une erreur.