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Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/311-320

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Fascicules du tome 1
pages 301 à 310

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 311 à 320

pages 321 à 330


Hésiod. Théog. V. 930. Ce mot semble venir d’ἀμφὶ, circùm, & τριβω, terro, parce que la mer environnant la terre, la ronge tout autour ; ou bien d’ἀμφὶ, & de τρεῖν, qui signifie épouvanter, parce que la mer épouvante. C’est l’opinion d’Hésychius, de l’Etymologiste, & de Tzetzès, ou du Scholiaste d’Hésiode. Amphitrite est représentee sur des médailles de Corinthe devant Neptune. Elle tient un petit enfant, qu’elle présente à ce Dieu ; & Pausanias dit qu’il y avoit à Corinthe une statue d’Amphitrite, dans le temple de Neptune. Vaill. Colon. T. p. 201. M. Spanheim, p. 253. de la dern. édit. prétend qu’elle est souvent représentée comme une Syrène ; c’est-à-dire, tout le haut du corps jusqu’à la ceinture semblable à une femme, & pour le bas au lieu de deux jambes deux queues de poisson.

Jalouse de l’éclat de ces honneurs nouveaux,
Amphitrite se cache au plus profond des eaux.

R.

AMPHITRYON. s. m. Ce mot, qui est le nom d’un Roi de Mycènes & de Thèbes, est devenu françois d’une manière proverbiale, pour exprimer celui qui donne à manger, ou qui paye pour plusieurs une certaine dépense. C’est Molière qui, sans y penser, a été l’auteur de ce mot : car depuis qu’il a fait dire à Sosie que le véritable Amphitryon est celui chez qui l’on dine, on demande, qui est-ce qui est l’Amphitryon ? Ou bien on dit : c’est M. un tel qui est l’Amphitryon, pour dire, que c’est lui qui traite ou qui paye.

AMPHORE. s. f. Sorte de mesure des choses liquides, qui étoit en usage chez les Romains. Amphora. Chaque amphore tenoit trois boisseaux. Les vaisseaux qu’il étoit permis à chaque Sénateur d’avoir au nombre de deux, pour son usage particulier, furent réglés du temps de la République à 300 amphores, & par Auguste à 1000 amphores. De la Mar.

Amphore. C’est la plus grande mesure dont on se serve à Venise pour les liquides. L’amphore contient quatre bigots, le bigot quatre cartes, la carte quatre Tischanfferras.

☞ AMPHONTES. s. m. Espèce de combat poëtique qui se faisoit dans l’île d’Ægine, où l’on donnoit un bœuf pour récompense au poëte qui avoit fait de meilleurs vers Dithyrambiques en l’honneur de Bacchus. Mor. qui cite Natal. Comes. L. 5. c. 4.

AMPIGLIONÉ. Empulum. Ce sont les ruines de l’ancien Empulum, ville d’Italie. Elles sont dans la Campagne de Rome, près de Castello-Sant-Angelo, à une lieue de Tivoli.

AMPLE. adj. m. & f. Qui est grand, étendu, au-delà de la mesure la plus ordinaire. Amplus. Ils se sont battus dans une ample & vaste campagne. Ce bâtiment n’est pas assez ample pour loger le train du maître. Ce pourpoint, ces manches sont trop amples, trop larges.

Ample se dit figurément, par rapport à l’étendue & à la durée des choses. Le pouvoir qu’on donne à des Plénipotentiaires ne sauroit être trop ample. Cette bulle contient des priviléges fort amples. Une ample matière. Ample récit. Ample repas.

AMPLEMENT. adv. D’une manière ample. Fusè latéque, amplè. Il a amplement répondu à toutes les objections qu’on lui a faites. Nous parlerons plus amplement de cette affaire une autre fois. Nous dinâmes amplement.

AMPLEUR. s. f. Étendue de ce qui est ample. Ce mot n’est d’usage qu’en parlant des habits & des meubles. Les robes des femmes ont plus d’ampleur qu’elles n’en avoient avant l’invention des paniers. Ce manteau a trop d’ampleur. Ce rideau n’a pas assez d’ampleur.

AMPLIATEUR. s. m. Terme peu en usage, pour signifier celui qui étend ou qui augmente. Les seconds chefs ne peuvent être considerés que comme les Ampliateurs du premier établissement des Phocéens. Merc. Octob. 1731.

AMPLIATIF, IVE. adj. Qui augmente, qui ajoute. Amplians, amplificans. On ne le dit guère que des lettres ou bulles apostoliques qui ajoutent aux précédentes. Bref ampliatïf. Bulle ampliative.

AMPLIATION. s. f. Terme de Chancellerie romaine, synonyme d’augmentation. Bref d’ampliation. C’est la même chose qu’ampliatif.

AMPLIATION. Terme de Finance. Exemplum, Exemplar. C’est le double qu’on retient d’une quittance, ou autre acte dont on a besoin pour produire, quand on en a besoin. On l’appelle aussi Duplicata.

Lettres d’ampliation, en termes de Chancellerie, sont des lettres qu’on obtenoit ci-devant pour articuler les moyens omis dans les lettres de Requête civile, qu’on avoit auparavant impétrées. Par l’Ordonnance de 1667, elles sont abrogées, & il est dit que ces moyens seront articulés par une simple Requête.

Requête d’ampliation Voyez Requête.

Ampliations de contrats, en fait de Pratique, ce sont des copies des contrats, dont on dépose les grosses chez un Notaire, pour en délivrer des ampliations ou expéditions aux parties, ou à des créanciers colloqués utilement dans un ordre, avec déclaration de l’intérêt que chaque créancier a dans ces contrats relativement à la collocation dans l’ordre. Et après avoir recueilli les voix, on leur donne différentes parties de rentes en payement de leur collocation en conformité de l’ordre.

Ampliation, se dit encore de l’expédition en papier d’un nouveau contrat de rente sur la ville, que le Notaire fournit avec la grosse en parchemin, & que le rentier remet au payeur avec sa quittance la première fois qu’il reçoit. Dict. des Finances.

AMPLIER. v. a. Terme de Palais. Différer. Amplier le terme d’un payement. Ampliare præfinitum solvendo debito tempus.

Amplier un criminel ; c’est différer son jugement. Ampliare reum.

Amplier un prisonnier ; c’est lui donner dans sa prison plus de liberté qu’il n’en avoit ; le tenir moins resserré qu’il n’étoit. Custodiant facere liberiorem.

☞ AMPLIÉ, ÉE. part. Il n’est d’usage, ainsi que le verbe, que dans quelques Tribunaux.

☞ AMPLIFICATEUR. s. m. Qui amplifie, qui exagère. Amplificator. Ce mot est peu en usage, & ne se prend qu’en mauvaise part. C’est un amplificateur, un grand amplificateur.

AMPLIFICATION. s. f. Amplificatio. Terme de Rhétorique. C’est une partie du discours, ou de l’oraison, dans laquelle, & par laquelle on étend le sujet qu’on traite, on aggrave un crime, on augmente une louange, on étend une narration, & l’on excite les mouvemens qu’il convient dans l’ame de l’auditeur. La première partie est l’argumentation, qui comprend les preuves, & la seconde est l’amplification, qui les étend, & les pousse : toutes deux appartiennent à l’invention, qui est le premier devoir de l’Orateur. L’amplification, dit Cicéron, dans les partitions oratoires, est une espèce d’argumentation véhémente. C’est, dit-il encore, une forte affirmation qui persuade en excitant les mouvemens de l’ame. L’amplification est un des moyens qui contribuent au sublime. Longin. L’amplification se peut diviser en un nombre infini d’espèces ; mais l’Orateur doit savoir que pas une de ces espèces n’est parfaite de soi, s’il n’y a du grand & du sublime ; si ce n’est lorsqu’on cherche à émouvoir la pitié, ou que l’on veut ravaler le prix de quelque chose. Par-tout ailleurs, si vous ôtez à l’amplification ce qu’elle a de grand, vous lui arrachez, pour ainsi dire, l’ame du corps. Id. Les maîtres de l’éloquence appellent l’amplification l’ame du discours. Longin blâme ceux qui la définissent, un discours qui donne de la grandeur aux choses. Car, dit-il, cette définition peut convenir tout de même au sublime, au pathétique, & aux figures, puisqu’elles donnent toutes au discours je ne sais quel caractère de grandeur. Le sublime consiste dans la hauteur & l’élévation ; au lieu que l’amplification consiste aussi dans la multitude des paroles. Le sublime se trouve quelquefois dans une simple pensée ; mais l’amplification ne subsiste que dans la pompe & dans l’abondance. L’amplification donc, pour en donner une idée générale, est un accroissement de paroles, que l’on peut tirer de toutes les circonstances particulières des choses & de tous les lieux de l’oraison, qui remplit le discours, & le fortifie en appuyant sur ce qu’on a déjà dit. Ainsi elle différe de la preuve, en ce qu’on emploie celle-ci pour prouver la question, au lieu que l’amplification ne sert qu’à étendre & à exagérer. Rien n’est plus contraire à l’éloquence que l’amplification puérile, vide de pensées, & qui ne consiste que dans un vain appareil de mots entassés les uns sur les autres. La bonne amplification est un amas de pensées, qui enchérissent toutes les unes sur les autres, & qui sont soutenues d’expressions vives, fortes, & convenables au sujet.

On se sert aussi de ce terme hors de la Rhétorique, où on l’applique à tous les discours, & aux narrations même ordinaires, quand on grossit, qu’on augmente les choses. Il y a de l’amplification à cette nouvelle : il se prend alors pour exagération.

On appelle encore Amplification, le discours amplifié, le discours que font les écoliers sur un sujet qui leur est donné pour l’orner comme ils jugeront à propos. On exerce les écoliers à faire des amplifications au collége. Pour faire une bonne amplification, il faut que le discours s’élève par degrés, en sorte qu’un mot enchérisse sur l’autre : autrement l’amplification est languissante, & n’a plus ni force ni mouvement. Boil. Longin, dans son Traité du Sublime, chap. IX & X. Cicéron, dans ses Partitiones Oratoriæ, n. 27 & 53, & le P. Caussin, dans tout le V. Liv. de son Eloquentia sacra & profana, ont traité de l’amplification.

AMPLIFIER. v. a. Etendre, augmenter par le discours. Il ne se dit qu’au figuré. Amplificare. Il amplifie toutes les histoires qu’il rapporte. Il amplifie tout ce qu’il dit. Il a amplifié cette action par toutes les circonstances qui la peuvent agrandir.

AMPLIFIÉ, ÉE. part.

AMPLISSIME. adj. au superlatif, est une qualité dont on honore quelques personnes en leur parlant, particulièrement chez les étrangers, & dans l’Université de Paris à l’égard du Recteur. Amplissimus Rector.

AMPLITUDE. s. f. Terme d’Artillerie. Dans l’art de jeter des bombes, c’est la ligne comprise, entre le point d’où la bombe est tirée, & celui où elle va tomber. Jactûs amplitudo. Pour ce qui est de la force de la poudre dans une certaine quantité, ou bien de la hauteur à laquelle le jet pourroit s’élever en tirant vers le zénith ; comme on ne peut pas le connoître par l’expérience, on sait par la démonstration, que le point de l’horizon où la bombe peut arriver lorsqu’elle est jetée par un angle de 45 degrés, ou demi-droit, est toujours éloigné du lieu d’où on la tire, du double de l’élévation du jet vertical, c’est ce qu’on appelle amplitude du jet ; par exemple, si le jet est allé à 1600 toises, le jet vertical ou à plomb seroit monté à 800 toises. De la Hire, Acad. des Sc. 1700 Mém. p. 103.

Amplitude d’un astre. Terme d’Astronomie. C’est l’arc de l’horizon, compris entre l’équateur & cet astre, quand il se trouve à l’horizon. Elle s’appelle ortive ou orientale ou occase, selon qu’on mesure cet arc quand l’astre se leve ou se couche. L’amplitude ortive est l’arc de l’horizon qui se trouve entre le point où s’éleve un astre, & celui du vrai orient, où se fait l’intersection de l’équateur, & de l’horizon. Amplitudo ortiva. On l’appelle autrement, Latitude ortive. L’amplitude occidentale est l’arc de l’horizon terminé par le point où l’astre se couche, & le point de l’occident équinoxial. L’amplitude orientale, ou occidentale, est appelée septentrionale, quand elle est dans la partie septentrionale ; & méridionale, quand elle est dans la partie méridionale de l’horizon. L’amplitude orientale du soleil se nomme orient du soleil, & son amplitude occidentale, occident du soleil.

☞ Les seules étoiles qui se trouvent dans l’équateur, n’ont aucune amplitude soit orientale, soit occidentale. Toutes les autres en ont une, plus ou moins grande, suivant qu’elles sont plus ou moins éloignées de l’équateur.

AMPOSTA. Bourg de Catalogne, en Espagne. Amposta. Il est sur l’Ebre, au-dessous de Tortose. Quelques-uns le prennent pour l’ancienne Adeda, ville de l’Espagne Tarragonoise, que d’autres placent à Adébra, qui est dans la même contrée.

☞ AMPOULE. s. f. Fiole, petite bouteille. Ampulla. Dans ce sens il ne se dit que de la Sainte Ampoule.

On appelle la Sainte Ampoule, certaine petite bouteille venue du ciel, où il y a de l’huile qui sert à sacrer les Rois de France, laquelle on garde bien soigneusement dans l’Abbaye de saint Remi de Reims, Sacra Ampulla. Hincmar, Archevêque de Reims, qui vivoit du temps de Charles le Chauve, rapporte, en la vie de S. Remi, qu’une colombe blanche l’apporta du ciel en son bec, lorsque les saintes huiles lui manquoient, à cause de la foule qu’il y avoit auprès des fonts baptismaux ; qu’elle disparut aussi-tôt ; que cette huile parfuma toute l’église, & que le Roi Clovis en fut baptisé. Il y a eu un beau Traité Apologétique de la Sainte Ampoule, fait par Alexandre le Tanneur contre Jacques Chiftlet, imprimé en 1652. Voyez Du Cange au mot Ampoule, Aimoin, L. I, chap. XVI. Flodoard, Hist. Remens. Liv. I, c. XIII. Annales Bertinienses au Ch. 868. Gaguin, du Haillan, Liv. III, Rerum Gallicar. Le P. Sirmond sur la Lettre d’Avitus, Conc. Gall. T. I, ad an. 446, p. 1268. Morus, de sacris unctionibus : le Sueur Calviniste, Hist. de l’Emp. & de l’Eglise, à l’an de Jésus-Christ 496, les notes du P. Ruinard sur Grégoire de Tours, Hist. Franc. Liv. II, ch. 21. Le P. Dorigni, Jésuite, qui a composé la Vie de saint Remi, imprimée en 1714, à Châlons sur Marne, a fait une Dissertation sur le miracle de la Sainte Ampoule, qu’il prétend être véritable. Il n’y entre point dans le détail des mêmes objections que les Critiques modernes ont faites contre ce miracle. Marlot, Le Tanneur, & Du Saussay y ont suffisamment répondu. Il s’attache à la plus forte, tirée du silence d’Avitus, & de Grégoire de Tours. Il dit sur cela que la lettre d’Avitus est fort suspecte de supposition ; que Henri Derford a écrit qu’il avoit vu des manuscrits de Grégoire de Tours, où le miracle de la Sainte Ampoule étoit raconté ; que les argumens tirés du silence des Auteurs, sont bien foibles ; que le silence de Fortunat ne fait douter personne du baptême de Clovis par S. Remi. Il oppose à Avitus & à Grégoire de Tours l’autorité de Hincmar & la tradition. Gaguin, Hincmar, & Aimoin, disent aussi que Clovis institua un Ordre de Chevaliers de la Sainte Ampoule. Joseph de Michiéli, dans son Tesoro Militar. fol. 77. Le P. Andréa Mendo, Jésuite, De ordinib. militar. fol. 16. & Bernardo Giustiani, Hist. dell’ origine de Cavallieri, Ch. VI en parlent aussi. Ce dernier dit, que les Auteurs ne disent point l’année que cet Ordre fut institué ; mais qu’il est aisé de juger que ce fut dans la solennité de son baptême que Clovis l’institua, & par conséquent l’an 485 de Jésus-Christ ; qu’il voulut que les Chevaliers s’appelassent Chevaliers de S. Remi ; qu’ils ne pussent être plus de quatre ; que leur fonction fût d’assister l’Evêque, lorsqu’il porte la Sainte Ampoule, & qu’ils n’ont point de bannière particulière, parce que la dignité de leur fonction suffit pour les distinguer parmi tous les autres Chevaliers. Ces quatre Chevaliers sont les barons de Terriers, de Belestre, de Senestre, & de Louversy. Ce même Auteur remarque dans la seconde édition, que ces Chevaliers n’étant que quatre, ils ne peuvent passer pour un Ordre militaire. Une description des ordres militaires imprimée à Paris en 1671, dit, qu’ils ont une croix dont le tronc & les branches sont triangulaires, avec quatre fleurs-de-lis dans les angles, & sur le tronc de laquelle on voit au centre la Sainte Ampoule soutenue d’une main par-dessous, & dessus un S. Esprit en forme de colombe. Tout cela certainement n’est pas plus du temps de Clovis, que le nom de Chevaliers de S. Remi.

Ce mot Ampoule vient du latin Ampulla, qui signifie une bouteille qui a un cou long & étroit. C’étoit autrefois un vaisseau où on gardoit le vin servant à l’autel. C’étoit aussi celui où on gardoit l’huile, & le saint chrême pour les catéchumènes & les malades.

Ampoule, se dit aussi en physique de certaines petites bouteilles, ou enflures pleines de vent qui se font sur l’eau quand il pleut. Bulla. Il s’en fait aussi dans toutes les autres liqueurs agitées ; & c’est ainsi que se forme l’écume, quand l’ébullition est bien petite.

Ampoule, se dit aussi de ces petites vessies, ou élévations qui se font sur la peau, & qui sont pleines d’eau, ou de pus. Tumor. Il lui est venu des ampoules par tout le corps.

AMPOULÉ, ÉE. adj. Qui se dit d’un discours enflé, & rempli de plusieurs grands mots & magnifiques. Tumidus, Inflatus. Des vers ampoulés. Un discours ampoulé. Un style ampoulé.

AMPOULETTE. s. f. Terme badin, dont un Poëte s’est servi pour signifier une petite bouteille.

On ose outrer l’extravagance
Jusqu’à m’offrir au jour de l’an
Dix-huit Ampoulettes chétives,
Dont deux sont pleines de safran,
Et les autres d’eaux corrosives …

Ampoulette, terme d’Artillerie. C’est une cheville de bois, qui sert à fermer la lumière de la bombe. On l’enfonce dedans à grands coups de maillet. Cette cheville est percée tout du long, pour être remplie d’une composition lente ; & lorsqu’elle est remplie, on la nomme fusée. Cette ampoulette doit être de bois de tilleul, ou de bois d’aune bien sec.

Ampoulette, terme de Marine. Horloge à sable. L’Acad. suit cette orthographe. Voyez Empoulette.

AMPOURDAN, ou AMPURDAN, mais prononcez Ampourdan. Petit pays de la Catalogne, dont la capitale est Ampurias, de laquelle il a tiré son nom. Ampuriensis ager, ou Emporiensis, ou Emporitanus tractus. Dans l’usage, on dit le Lampourdan, du Lampourdan, par une corruption manifeste, qui du nom & de l’article en a fait un nouveau nom.

AMPUDIA. Ampudia. Ce fut autrefois une ville épiscopale : ce n’est aujourd’hui qu’un village du diocèse de Valence, dans le Royaume de Léon, en Espagne.

AMPUGNANA. Village de l’île de Corse. Ampuniana. Il est dans la partie orientale de l’île, entre Accia rouinana, & Mariana distrutta.

AMPURIAS. Empuriæ, Ampuriæ. Capitale du Lampourdan. On la nomme aussi Emporium, & c’est de là qu’est venu son nom, parce que c’est un port sur la Méditerranée, & que c’étoit un abord de marchands.

AMPUTATION. s. f. Terme de Chirurgie. Retranchement d’un membre qui se fait avec le fer. Amputatio. On ne peut guérir cette plaie ; il faut faire l’amputation du bras. En justice on punit comme une espèce de meurtre, les plaies faites par amputation de membres.

AMPUTER. v. a. Terme de Chirurgie, fait du latin amputare. Couper, retrancher. Sancho, en conséquence d’une folle gageure qu’il avoit faite contre un chasseur, lui tendit de trente pas le derrière, où il reçut une demi-charge de dragées de plomb, dont il se trouva fort incommodé. L’officier son ami, s’enferma avec lui dans une chambre, & ayant étalé sur une table tous les instrumens de la Chirurgie desquels il lui expliquoit les propriétés : « Si l’os est attaqué, desorte qu’on y voie du danger, ce petit instrument, dit-il, montrant une scie, qui est un des plus jolis du métier, vous ampute l’os dans un moment, après qu’avec celui-ci, qu’on appelle couteau courbe, on a coupé la chair tout autour ; & c’est une des plus agréables opérations & des plus promptes de la Chirurgie, & vous auriez un plaisir extrême à la voir faire. Hist. de Don Quichotte, to. 5, ch. 30, p. 384. »

AMR.

AMRON, AMROD, AMÉREN. Île de l’Océan septentrional. Amrona, Amerenum. Elle est sur la côte du duché de Sleswick, au couchant des îles de Fora & de Nortstrand.

AMS.

AMSDORFIEN, ENNE. s. m. & f. Secte d’hérétiques Protestans du XVI. siècle, disciples d’Amsdorf. Les Amsdorfiens, dit Sanders, hær. 186, enseignoient que les bonnes œuvres étoient pernicieuses au salut ; cependant d’autres prétendent qu’à la vérité Amsdorf l’enseigna, mais que ses disciples l’abandonnèrent en ce point. Les Amsdorfiens étoient Confessionistes rigides. Voyez encore Pratéole au mot Amsdorf.

AMSTEL. Petite rivière de Hollande. Amstela. Elle se jette dans le golfe d’Ye, à Amsterdam, auquel elle donne le nom ; car originairement c’est le Amsteldam, comme en latin Amstelodamum. L’usage a changé le l en r. On appelle aussi Amsteland le pays où elle coule.

AMSTELAND. s. m. Pays de la Hollande méridionale. Amstelandia. Il est entre le Goyland & le Rhinland, la province d’Utrecht & le golfe d’Ye. Il n’a rien de remarquable qu’Amsterdam.

AMSTERDAM, ou AMSTELDAM. Amstelodamtum, Amsterodamum, Amstelrodamum. Ville & port de mer en Hollande. Ce n’étoit qu’un château sur la rivière d’Yam, lequel appartenoit aux seigneurs d’Amstel, dont il prit son nom. Quelques pêcheurs s’établirent autour du château, en firent un bourg, qui grossit peu à peu par le commerce de la pêche. Gisbert d’Amstel, l’un des conjurés contre Florent V, comte de Hollande, après son retour, y fit bâtir des ponts, des tours, & apparemment une chaussée, & ce bourg commença à s’appeler Amsteldam, du mot dam, qui signifie chaussée, & du nom des seigneurs du château, Amstel. Ainsi Amsteldam est proprement son nom ; mais l’usage est de dire Amsterdam. Elle ne fut entourée de murailles qu’en 1480. Depuis ce temps-là Amsterdam est une ville qui a toujours augmenté jusqu’au point que nous la voyons. C’est aujourd’hui une des villes du monde des plus riches & des plus marchandes. Mais c’est une tache pour une ville si célébre, dit un Auteur, imprimé à la Haye en 1698, que d’être le réceptacle de toutes les religions. Sa longitude est 26d, 34’, & sa latitude 54d, 30’. Cette ville, selon Hortensius, est à 22°, 44’, 33” de longitude, & 52°, 22’, 45” de latitude. Amsterdam fut pris en 1578, par Guillaume de Nassau après un long siége. Amsterdam porte d’or au pal de gueule, chargé de trois sautoirs d’argent. Le P. Menestrier remarque très-bien que ce pal signifie la chaussée d’Amstel, & les trois sautoirs marquent les levées & les digues. Par une concession de l’Empereur Maximilien, de l’an 1490, ces armes sont timbrées d’une couronne impériale.

NOUVELLE AMSTERDAM. Novum Amstelodamum. C’est une ville de l’Amérique septentrionale, à l’embouchure du fleuve du Nord, dans le nouveau Pays-Bas.

Il y a encore cinq îles auxquelles on a donné le nom d’Amsterdam. L’une est dans la mer glaciale, près des côtes du Spitsberg. Une autre dans l’Asie, entre les îles du Japon & Formose. Une troisième dans la mer pacifique, entre l’île Salomon & les côtes du Pérou. La quatrième est dans l’océan Indien, entre la nouvelle Hollande au levant, & l’île de Madagascar au couchant. Enfin, la cinquième est dans l’Asie, près de la côte orientale de l’île de Céilan. Les Hollandois y ont un fort, qu’ils nomment Amsterdam.

AMSTRUTTER, ou ANSTRUTTER. Ville d’Ecosse. Amstruttera, Anstruttera. Elle est dans la province de Fire, sur le golfe de Forth ou d’Edimbourg. Elle est séparée en deux par une petite rivière qui y passe ; ce qui fait comme deux villes, dont l’une s’appelle East Amstrutter, c’est-à-dire, l’Amstrutter oriental ; & l’autre West Amstrutter, l’Amstrutter occidental.

AMT.

AMTHAR. Ancienne ville de la Terre-Sainte Amthar. Elle étoit dans la tribu de Zabulon, dans la partie qui confinoit à celle de Nephthali.

AMU.

AMU. Lac du Zagatay. Amus. Il sort de ce lac une petite rivière de même nom, qui, jointe à une autre nommée apparament Abia, forme la rivière d’Abiamu, ou Géhun, & Giéhun.

AMUCE. s. f. Qui s’est dit autrefois pour Aumusse, & qui se trouve dans l’acte de la fondation du chapitre de Lamballe, fait l’an 1435, par Jean, duc de Bretagne, qui veut que les chanoines qu’il appelle Chapelains, soient & demeurent au chœur de ladite église en surplis, amuces en hiver, & à chapeaux de cuir en été. Voyez Lobineau. Hist. de Bretagne, T. II, p. 104. col. 1.

AMULER. Terme de Marine. C’est peser sur la voile & sur le bord vers le vent. Voyez Amurer.

AMULETTE. s. m. ☞ Remède, figure ou caractère auxquels la crédulité ou la superstition attribuent beaucoup de propriétés. On prétend qu’en l’attachant au cou, il guérit ou préserve de divers maux. Amuletum. Il y a des amulettes mystérieux, qui consistent en caractères & en paroles qui servent à éloigner les maux & à en garantir. Pline en fait souvent mention.

Le mot d’amulette vient du latin Amuletum, ou plutôt amoletum, amolimentum. C’étoit un remède superstitieux contre les maladies : nous dirions en notre langue un préservatif. Les Grecs appellent ces sortes de remèdes φυλαϰτήρια, περίαπτα, ἀποτελέσματα, περτρήματα, περιάμματα, βρέβια.

Le Concile de Laodicée défend aux Ecclésiastiques de porter de ces phylactères, ou amulettes, sous peine d’être dégradés. S. Chrysostôme en parle dans quelques-unes de ses homélies sur S. Paul, & il les regarde comme une espèce d’idolâtrie, ne pouvant souffrir que les Chrétiens se servissent d’amulettes pour guérir les maladies, quoiqu’ils crussent ne point pécher, sous prétexte qu’ils ne faisoient autre chose que d’invoquer le nom de Dieu. S. Jérôme n’est pas plus favorable aux amulettes dans son Commentaire, sur le chap. 23 de S. Matthieu, où il condamne de superstition tous les phylactères des Juifs, bien qu’ils fussent d’une autre nature que les amulettes. Il prend de-là occasion de rejeter comme superstitieuse une coutume qui étoit de son temps parmi le simple peuple, sur-tout parmi les femmes, qui portoient à leur cou de petites parties des évangiles, du bois de la croix, & quelques autres choses semblables, faisant paroître en cela plus de zèle que de véritable piété. Hoc apud nos, dit ce saint Docteur, surperstitiosæ mulierculæ in parvulis Evangeliis & in crucis ligno, & istiusmodi rebus quæ habent quidem zelum Dei, sed non juxta scientiam, usque hodiè factitant. Voyez Kirker, Oed. Egyp. Clas. XI, chap. 4. Tom. II, pag, 445 & suiv. & dans le troisième Tome pag. 219, 335, 470, 518, 528, 564, &c.

☞ AMULONNER. v. a. S’est dit autrefois pour mettre en mule. Amulonner du foin.

AMURCA. s. f. Terme de Pharmacie. Médicament fait de la lie des olives. Amurca. Il est astringent.

AMURÉES. s. f. Nom d’un certain ordre de religieuses resserrées étroitement, & enfermées de hautes murailles. Amurées a été dit pour emmurées. Ménag.

Amurées, n’est point un ordre de religieuses. Il y a à Rouen un couvent de religieuses de S. Dominique, qu’on appelle les Amurées, ou Emurées ; je crois qu’on leur a donné ce nom, parce qu’elles sont enfermées intra muros, quoique cela ne les distingue pas maintenant des autres Religieuses, qui toutes sont amurées dans le même sens : peut-être que celles de Rouen ne l’ont pas été toujours, & qu’on n’a commencé à les nommer Amurées, que lorsqu’elles furent bâties & enfermées. Quoi qu’il en soit, il n’y a point d’ordre de religieuses qui s’appellent Amurées. C’est une maison particulière & non pas un ordre.

AMURER, ou AMULER. v. a. Terme de Marine. C’est bander & roidir les couets, ou cordages qui tiennent au point d’en-bas des pacfis, ou grandes voiles. Pedem veli stringere. On dit Amurer tout bas, lorsque l’on amure le plus bas qu’il est possible pour aller au plus près du vent, ou pour aller vent largue.

AMURES. s. f. Terme de Marine. Ce sont des trous pratiqués dans le platbord d’un vaisseau & dans la gorgère de l’éperon, pour y arrêter les cordages qui servent à bander les voiles. Pes veli. Les amures des voiles d’étai, sont de simples cordes. Les amures de la grande voile s’appellent dogues d’amures. L’amure d’une voile est son étroit, ou la manœuvre qui sert à l’amurer. L’amure d’artimon, est un palanquin, ou quelquefois une corde simple. L’amure à basbord ou à stribord ; c’est à droite ou à gauche.

AMUSANT, ANTE. adj. Qui amuse agréablement, qui divertit. C’est un esprit amusant. C’est la personne du monde la plus amusante. Un livre fort amusant. C’est un homme d’une conversation fort amusante.

☞ AMUSEMENT. s. m. C’est, disent les grands Vocabulistes, d’après le Dict. de l’Acad. ce qui amuse, ce qui sert à amuser. Et amuser, c’est divertir par des choses agréables & amusantes. Cela est clair, mais en est-on plus instruit ? Le mot d’amusement indique proprement une occupation légère, & de peu d’importance, mais qui plaît, & qu’on prend pour éviter l’ennui, pour se distraire, pour moins penser à soi. Voyez encore divertissement, récréation. Occupatio levis, jocosa. La poësie est un agréable amusement. Il ne faut pas jouer par avarice, mais par amusement, pour passer le temps. Un simple amusement n’a pas la vivacité d’une passion. La Bruy. Il y a d’innocens amusemens, qui ne divertissent plus dès qu’ils deviennent une nécessité, & qu’on est dans la disgrace. S. Evr. Il est bon d’égayer la tristesse des leçons, & de les déguiser en badinage, & en amusement. Id. En Hollande les femmes sont assez sociables pour faire l’amusement d’un honnête homme, & trop peu animées pour en troubler le repos. B. Rab. Vous pourriez avoir de ces amusemens galans, qui sans avoir les inquiétudes de l’amour, s’élèvent pourtant au-dessus de la tiédeur. S. Evr. Une coquette peut avoir plusieurs amusemens. La Bruy. C’est-à-dire, plus d’une galanterie.

Soins de ma bergerie, amusemens utiles !
Vous n’êtes pas touchans, mais vous êtes tranquilles.

Fontenelle.

Un lecteur sage suit un vain amusement.
Et veut mettre à profit son divertissement. Boil.

Amusement, est aussi une sorte de diversion. Distractio. C’est un amusement qu’il donne à sa douleur. Il y a de certains chagrins auxquels on ne peut donner d’amusemens.

Notre esprit, malgré nous, se répand au dehors,
Et sur d’autres objets cherche à porter sa vue :
De-là viennent ces jeux, ces divertissemens,
Que tout le monde cherche avec des soins extrêmes,
Et qui ne sont au fond que des amusemens,
Dont tous les divers changemens
Savent nous empêcher de penser à nous-mêmes,

De Val.

Amusement, est aussi une espèce de tromperie, pour gagner du temps en faisant de belles promesses, & en donnant de fausses espérances pour éblouir les gens. Ludificatio. Ce créancier est las de tant d’amusemens. Tous ces vains amusemens m’impatientent ; je veux finir.

☞ AMUSER. v. a. Arrêter inutilement quelqu’un, lui faire perdre le temps. Detinere, morari. Cet homme m’a amusé long-temps à me conter son histoire, à me détailler les particularités de son affaire. N’amusez pas ce laquais. Amuser l’ennemi. Il ne faut rien pour l’amuser.

Des Princes amoureux d’un indigne repos
Vous pouvez amuser les premières années ;
Mais je dois me hâter de former des Héros,
Dont l’univers attend ses destinées.

Amuser, signifie aussi divertir par des choses agréables, par des choses capables non-seulement de distraire l’esprit, mais encore de lui procurer du plaisir. On amuse un enfant avec une poupée. On amuse le peuple avec les spectacles. Cet homme a l’art d’amuser agréablement tous ceux qui le vont voir. Cette histoire a amusé tout le monde. En attendant le souper on amusa les convives par un concert. Oblectare, exhilarare.

Dans un roman frivole aisément tout s’excuse :
C’est assez qu’en passant la fiction amuse. Boil.

Amuser, signifie aussi, tromper, repaître les gens de vaines espérances. Ludificari. Les nobles sont sujets à amuser les créanciers, en leur promettant de les payer. Ce jeune homme amuse cette fille de l’espérance de l’épouser. Ils prétendoient nous amuser par des contes en l’air. Mol. On n’amuse pas long-temps le monde par les qualités que l’on n’a point. Wicq.

Amuser, se dit aussi au figuré des maux & des passions auxquelles on tâche de faire diversion, en s’efforçant d’occuper son esprit à quelque autre chose. Distractere, Avertere. On doit dans l’état où il est, faire tout ce qu’on peut pour amuser sa douleur, amuser son amour. Ablanc. Un malade amuse son chagrin, & se soulage en parlant de ses maux. Bell.

S’Amuser, v. récip. signifie quelquefois employer inutilement son temps à quelque chose, perdre son temps. Tempus malè terere. Il ne faut pas s’amuser à discourir quand il faut agir. S’amuser à des bagatelles. Nugari.

☞ Souvent on le dit en bonne part, & il signifie alors s’occuper par simple amusement, & pour éviter l’ennui. Occupari. S’amuser à faire des vers. S’amuser à l’étude de la Physique, de la Géométrie. S’amuser à faire des expériences. S’amuser à analyser des plantes. Oblectare se aliquâ re.

☞ On dit familièrement, à quoi vous amusez-vous de parler à un fou, pour dire, de quoi vous avisez-vous ? Et dans le même sens, ne vous amusez pas à le plaisanter, il n’entend pas raillerie. Acad. Fr.

Amuser, se dit proverbialement en ces phrases. On dit Amuser le tapis ; pour dire, perdre le temps en vaines propositions, & ne rien conclure ; s’arrêter à plusieurs circonstances inutiles, sans venir au fait. On dit aussi, s’amuser à la moutarde ; pour dire, s’arrêter à des choses légères et utiles.

AMUSÉ, ÉE. part.

AMUSETTE. s. f. Petit amusement, bagatelles qui amusent. Nugæ. On ne s’en sert guère qu’en riant, & dans le comique. Il s’applique à mille bagatelles ; c’est pour lui une petite amusette. Les poupées sont des amusettes d’enfans. Crepundia.

AMUSEUR. s. m. Qui amuse, qui trompe par ses délais, ou par ses fausses promesses. Frustrator. Défiez-vous de cet homme là, c’est un amuseur, qui ne donne que des paroles. Il se dit peu, & jamais hors du style familier.

AMUSOIR. s. m. ou AMUSOIRE. s. f. Ils ne sont que dans le style bas. Ils signifient des choses qui amusent.

AMUY. Ville de l’Inde, au-delà du Gange. Amuya, Amuyum. Cette ville est dans les cartes de Samson, près du bord occidental du lac de Chiamay, aux confins du royaume de Kauduana, partie du Mogolistan : mais dans celles de M. De Lisle, le lac est appelé Chaamay. Il n’est point dans le Mogolistan, mais aux confins de l’Yunan, province de la Chine, & l’on n’y trouve ni le royaume de Kauduana, ni la ville d’Amuy.

AMY.

AMYANTE. s. f. Pierre incombustible, laquelle étant bouillie dans une lescive faite avec de l’indigo, autrement de la guesde, perd les parties qui la rendent aride, & après avoir été battue sous le marteau, devient si souple, qu’on la peigne, on la file, on l’ourdit, & on en fait de la toile, qui se nettoie quand on la jette dans le feu. Amiantus. Voyez Amiante.

AMYCLÉE, ou AMYCLES. Une des cent villes des Lacédémoniens. Amyclæ. Elle fut bâtie par Amyclas, fils de Lacédémon, dit Etienne de Bysance ; ainsi c’étoit de lui qu’elle tiroit son nom. C’est que Tyndare tenoit sa cour, & que Castor & Pollux furent élevés. Servius l’appelle Amycla. Est-ce un neutre pluriel, ou un féminin singulier ? c’est ce qu’on ne peut décider par son texte. En grec, c’est un substantif féminin & pluriel.

Amyclée, ou Amycles, étoit aussi une ville ancienne d’Italie. Elle étoit entre Caïéte, aujourd’hui Gaëte, & Terracine, dans ce qu’on appelle aujourd’hui la Terre de Labour. Elle doit son nom au golfe sur lequel elle étoit située : c’est celui de Gaëte, qu’on appeloit le golfe d’Amyclée. Sinus Amyclæus. Elle fut bâtie par les compagnons de Castor & de Pollux, qui lui donnerent le nom d’Amyclée du Péloponèse. Il y avoit aussi en Crète un Amyclæum, ville & port, dit Etienne de Bysance.

AMYCLÉEN, ENNE. s. m. & f. Citoyen, habitant, originaire d’Amyclée. Amiclæus, a. Les Amycléens d’Italie furent la victime de la doctrine de Pythagore. Ils aimerent mieux ignorer les entreprises de leurs ennemis, & s’exposer à périr, comme ils firent, que de rompre le silence.

AMYGDALE. s. f. se dit des petites glandes, qui sont aux côtés de la gorge, & qui ont la figure d’une amande. Tonsillæ. Les Médecins les appellent en grec παρίσθμιον, à cause qu’elles sont auprès d’une partie de la gorge qu’on appelle isime. Elles servent à arroser perpétuellement de salive la gorge, la bouche & la langue. Les amygdales filtrent le sang qui leur est porté par les rameaux des carotides ; elles en séparent les sérosités, & les déchargent dans le fond de la bouche pour humecter le larynx, &c. Dionis.

AMYGDALOÏDE. s. f. Pierre figurée, qui ressemble à un noyau d’amande, ou à une amande.

☞ AMYMONE. L’une des cinquante Danaïdes, mariée à Encelade, qu’elle tua le premier jour de ses noces, selon l’ordre de son pere. Pressée des remords de son crime, elle s’enfuit dans les forêts, où voulant tirer une flèche sur une biche, elle blessa un satyre qui voulut ensuite la violer. Neptune qu’elle implora vint la délivrer du satyre, mais il lui fit la violence qu’elle avoit voulut éviter, & il eut d’elle Nauplius. Quelques-uns placent ses amours avec Neptune avant son mariage.

☞ AMYNTIQUE. adj. Qualification qu’on donne à un emplâtre fortifiant.

AN.

AN. Les noms latins terminés en anus se terminoient autrefois en françois en an. Nos peres disoient Tertullian, Cyprian, Oclavian, &c. M. Fléchier a encore dit Florian dans l’avertissement de la vie de Ximenès, p. 14. Florian Ocampo, Historiographe des Rois Catholiques. Aujourd’hui on écrit & on prononce Tertullien, Cyprien, Octavien, Florien, &c. du même son que bien, rien, tien, &c. La règle est que quand les noms propres latins terminés en anus, ont une voyelle devant anus, comme Marcianus, Jovianus, Tertullianus, &c. on les tourne en françois en en : Marcien, Jovien, Julien, Tertullien ; mais quand il y a une consonne avant anus, on les termine dans notre langue en an : Trajanus, Trajan ; Artabanus, Artaban ; Rabanus Maurus, Raban Maure ; Herculanus, Herculan ; & au contraire Herculianus, Herculien.

AN. s. m. ou ANNÉE s. f. Termes synonymes. Mesure du temps que le soleil, ou la lune emploie pour venir au même point du zodiaque. Annus. L’année solaire est de 365 jours, cinq heures, 49 minutes, & 16 secondes. M. Cassini a donné à l’année solaire apparente 365 jours, cinq heures, 49’, 5”. à l’année moyenne 365 jours, cinq heures, 29’, 12”. C’est précisément l’année Grégorienne. Tacquet donne à l’année apparente 365 jours, cinq heures, 48’, 45”. Et à la moyenne, 365 jours, cinq heures, 48’, 40”. Dans les Nouvelles littéraires de la mer Baltique, 1699. Mars, pag. 83. Joachim Tædius donne à l’année solaire 365 jours, cinq heures, 47’, 50”. 16 . L’année lunaire est de 354 jours, & de 49’, pendant lesquels elle parcourt douze fois le zodiaque. L’an solaire est, ou astronomique ou civil. L’astronomique est, ou tropique ou astral. Le tropique ou naturel, consiste dans le temps que le soleil emploie à parcourir le zodiaque. L’astral est l’espace que le soleil emploie à retourner au même astre d’où il s’étoit éloigné. L’an civil, ou politique, est la forme de l’année que chaque nation a établie pour compter le temps.

Les Astronomes font une autre division de l’année. Ils distinguent l’an planétaire, l’an émergent, l’an climactérique. Lannée planétaire, est le temps qu’une planète emploie à parcourir le zodiaque par son mouvement propre d’occident en orient. Ainsi l’an planétaire de la lune est de vingt-sept jours. L’an du soleil, de Vénus & de Mercure, est de 365 jours. L’an de Mars est de deux ans, l’an de Jupiter de douze ans, & l’an de Saturne de trente ans. Ces années planétaires s’appellent aussi périodes. L’an émergent est l’époque où chaque peuple commence à compter, comme les Grecs par la 1. Olympiade. L’année climactérique est l’espace de 7 ou de 9 ans, pendant lesquels on prétend qu’il arrive quelque changement dans le tempérament de chaque personne. En particulier à l’égard de l’année lunaire on la distingue en commune ou embolismique. L’an lunaire commun est de 365 jours. L’an embolismique est celui où l’on intercaloit un treizième mois lunaire, ensorte que cette année embolismique étoit de 384 jours.

Les hommes curieux de découvrir la cause de la vicissitude des saisons, s’apperçurent bientôt que l’éloignement ou la proximité du soleil, produisoit cette diversité ; & ils appelerent année, tout l’espace de temps que le soleil emploie à parcourir l’intervalle dans lequel il roule sans cesse. Cependant l’on n’a point fait par-tout le même calcul du cours du soleil. Si on en croit Hérodote, les Egyptiens ont les premiers distingué l’année en douze mois, qui faisoient 360 jours. Mercure y ajouta cinq jours : & l’on dit que Thalès institua l’année sur le même pied chez les Grecs. Cela n’étoit pourtant point général dans la Grèce. Il y avoit trop de villes indépendantes les unes des autres, pour convenir d’une règle uniforme. L’année des Hébreux étoit mixte ; car quoiqu’elle fût dirigée selon le cours de la lune, c’est-à-dire, de douze mois lunaires, ils intercaloient tous les trois ans un mois de 30 jours ; & par cette augmentation, leur année se rapprochoit à la mesure de l’année solaire. Voyez le Calendrier des Hébreux traduit par Munster, & imprimé à Bâle en 1527, & dans la Bibliothèque Rabbinique de Bartolocci, Tom. II. pag. 550. & suiv.

Diodore de Sicile, Liv. I. Plutarque dans la vie de Numa, & Pline, Liv. VII. ch. 48 disent que les Egyptiens mesurerent d’abord leurs années par le cours de la lune, & qu’elles n’étoient que d’un mois ; qu’ils les firent ensuite de trois mois, puis de quatre, comme celle des Arcadiens ; puis de six, comme celles des peuples d’Acarnanie, & que c’est pour cela qu’ils comptent un si grand nombre d’années depuis le commencement du monde, & que l’on trouve dans leur Histoire, des Rois qui ont vécu 1000 ou 1200 ans. Mais Hérodote ne parle point de cela ; il dit même que l’année Egyptienne étoit de douze mois, comme nous l’avons rapporté. D’ailleurs, nous savons par l’écriture que dès le déluge, l’année étoit composée de douze mois. Cham & son fils Mizraïm, fondateur de la monarchie d’Egypte, avoient donc cet usage ; il n’est pas probable que ses descendans l’aient changé. Enfin, quoique Pline rapporte absolument, & sans restriction, ce que nous avons dit, Plutarque ne le rapporte que comme une chose incertaine, ne disant pas que cela est vrai, ni qu’il en ait des monumens ou des preuves ; mais seulement qu’on le dit. Bien plus, Diodore de Sicile nous fait entendre que ce n’est qu’une conjecture de je ne sais quels Auteurs qu’il ne nomme point, & qui probablement avoient imaginé ce système, pour ajuster & réduire la chronologie Egyptienne à celle des autres peuples, & la rendre croyable. Ἀπίστου δ’ἴντος τοῦ πληθους τῶν ἐτών ἐπιχειροῦσι τίνες λέγειν ὀτί, &c. C’est-à-dire, ce nombre d’années étant incroyable, quelques-uns tachent, ou entreprennent de dire ; paroles qui montrent évidemment ce que j’ai remarqué. Un Auteur récent a écrit que Varron avoit dit de tous les peuples de la terre ce que ces auteurs disoient des Egyptiens, & il ajoute que Lactance l’en reprend avec sujet. Je ne sais en quels endroits de Varron ou de Lactance, il a vû cela. Ce que je sais, c’est que Lactance, Liv. II. Divin. Inst. c. 13, où il rapporte le sentiment de Varron, ne le fait parler que des seuls Egyptiens ; mais saint Augustin, Liv. XV. De Civit. Dei. ch. 14. montre que les années des Patriarches, marquées dans l’Ecriture, sont semblables aux nôtres, & qu’une des nôtres n’en vaut pas dix des leurs ; & quoiqu’il n’attribue ce sentiment à personne, il semble cependant que quelqu’un l’avoit soutenu, puisque ce Saint le réfute. Au reste, il ne parle point de tous les peuples de la terre ; mais seulement des Patriarches des Hébreux.

Les Romains commençoient leur année aux calendes de Janvier. Romulus peu versé dans l’Astronomie, abrégea l’année en 10 mois, qui s’achevoient en 304 jours. Numa Pompilius corrigea la confusion qu’apportoit cette constitution irrégulière de l’année, & composa les mois de Janvier & Février, des jours qui manquoient à l’année de Romulus, & les plaça devant le mois de Mars, que Romulus avoit mis le premier : en le consacrant au Dieu Mars son pere. Enfin, Jules-César, pour donner une forme certaine à l’année, la régla par le cours annuel du soleil : & pour trouver place aux jours dont l’année solaire surpassoit l’année lunaire de Numa, qui étoit de 355 jours, il les distribua sur les mois qui en avoient le moins. Ainsi l’année fut fixée à 365 jours & six heures. L’année chrétienne est constituée selon la réformation de Jules-César. Cependant, parce que l’année, qui à cause de lui a été appelée Julienne, étoit plus longue de quelques minutes que l’année solaire astronomique, cette erreur presque imperceptible, répétée plusieurs fois, devint considérable ; ensorte que depuis la correction de César, elle formoit 10 jours, & que par-là les équinoxes avoient presque remonté au commencement des mois. Le Pape Grégoire XIII, pour remédier à ce dérangement des temps, qui s’augmentoit tous les ans, convoqua les plus habiles Astronomes ; & pour remettre les équinoxes dans leur place, il ordonna par une bulle, que l’an 1582, on retrancheroit 10 jours qui s’étoient accrus depuis le concile de Nicée, & que l’on compteroit le 15 Octobre, lorsqu’on ne devoit compter que le 5. Cette bulle datée du 6 des calendes de Mars, ou du 24 de Février 1582, qui étoit la dixième année du pontificat de ce Pape, fut publiée à Rome le Jeudi 3 Mars 1582, & confirmée par une déclaration du 7 Novembre de la même année. Sur quoi est intervenu en France l’édit du Roi Henri III, donné à Paris au mois de Novembre 1582, portant que le 9 Décembre suivant étant expiré, le lendemain, que l’on auroit compté le dixième, seroit compté le vingtième du même mois, & le lendemain 21, auquel se célébreroit la fête de S. Thomas, que le jour d’après seroit le 22 ; de sorte que le jour qui auroit été le 15, seroit compté le 25, & qu’on y célébreroit la fête de Noël : que cette année 1582, finiroit 6 jours après la fête de Noël, & que la suivante que l’on compteroit 1583, commenceroit le septième jour d’après la même fête.

L’an, se distingue par différentes marques particulières, qu’on y a attachées. Ans de grâce, sont ceux que l’on compte depuis la naissance de Jésus-Christ 1769. Anni à Christo nato. Ans du monde, ceux qui sont écoulés depuis la création du monde. Anni ab orbe condito.

On le dit aussi des autres époques des temps. Un tel an de la fondation de Rome, de l’hégire, de Nabonnassar, &c. Voyez la différence de ces années au mot Époque, & les Tables de Du Cange pour la réduction de toutes ces années différentes à notre supputation commune.

l’An bissextil, est celui où de quatre ans en quatre ans on insère un jour pour le faire de 366 jours. Annus intarcalaris. Comme l’année Julienne est de 365 jours & 6 heures, César ordonna que l’on composât des 6 heures qui excédent, un jour en quatre ans, & il fit intercaler ce jour après le 23 de Février, qui étoit le 6 des calendes de Mars. Ainsi, parce qu’on comptoit cette année-là bis sexto calendas, on l’appela bissextus ; & de-là vient l’an bissextil. Mais parce que dans la réformation du calendrier par les ordres du Pape Grégoire XIII, on s’apperçut en supputant, qu’il manquoit 11 minutes aux 6 heures dont se formoit le bissexte, & que ces 11 minutes en 134 ans, ou environ, composoient un jour, l’on arrêta qu’en 400 ans l’on retrancheroit trois bissextes. Par conséquent les années 1700, 1800 & 1900 ne sont point bissextiles, parce que l’an 1600 a été bissextil : l’an 2000 le sera.

Année anomalistique, ou périodique. C’est le temps qui répond à la révolution de la terre autour du soleil. Cette année a été conclue de 365 jours 6 heures 9’, 14”.

An de viduité, ou An de deuil ; c’est l’année pendant laquelle une veuve doit s’abstenir de passer à un second mariage. Annus viduitatis. Les lois ont voulu qu’elle rendit ce respect aux cendres de son mari, & que du moins elle honorât son tombeau de ses larmes, & de ses regrets, pendant la première année de son veuvage. Par le droit Romain les veuves qui convoloient à de secondes noces dans l’an de deuil, étoient privées de tous les avantages qu’elles avoient reçus de leurs maris, afin de les obliger à conserver le souvenir de l’amitié conjugale. Cela s’observe encore dans les provinces où le Droit écrit est en usage. Ailleurs on suit plus communément le Droit canonique ; & l’an de viduité n’est qu’une loi de bienséance. Seulement s’il y a soupçon de grossesse, la veuve ne doit pas précipiter son mariage, pour éviter la confusion du sang.

On dit, une prescription de dix ans, de vingt ans, de trente ans, de quarante ans, de cent ans. Denarii, vicenarii, tricenarii, quadragenarii, centenarii anni præscriptio ; denaria, vicenaria, tricenaria, quadragenaria, centenaria usucapio. On dit aussi, an & jour ; pour dire, un an entier & accompli, desorte qu’il y ait même un jour de l’année suivante.

An & Jour, en matière de retrait, est le temps accordé aux lignagers pour retraire un héritage propre qui a été aliéné, & mis hors de la famille. Ce temps court contre toutes sortes de personnes, sans espérance de restitution.

An & Jour, se dit aussi du temps accordé pour former la complainte, & se compte depuis le temps du trouble.

☞ On appelle service du bout de l’an, ou simplement le bout de l’an, le service qu’on fait dans une église pour une personne, un an après sa mort.

☞ On dit le jour de l’an, pour dire, le premier jour de l’an ; & bon jour & bon an, est une façon de parler proverbiale & familière, dont on se sert pour saluer les personnes la première fois qu’on les voit dans les premiers jours de chaque année.

Souhaiter la bonne année, une heureuse année, c’est un devoir de civilité que les amis se rendent mutuellement au commencement de l’année. Cette cérémonie est très-ancienne. On ne s’en tenoit pas seulement aux complimens chez les Romains ; on offroit aussi des présens ou des étrennes, comme nous faisons encore ; & l’on faisoit des vœux aux Dieux pour la conservation de ses amis. Lucien dit que c’étoit une très-ancienne coutume, & que Numa en étoit l’auteur. Ovide indique la même cérémonie au commencement de son premier livre des Fastes.

Postera lux oritur : linguistique animisque favete :
Nunc dicenda bono sunt bona verba die.

Et Pline encore plus clairement, Liv. XXVIII. ch. I. Primum anni incipientis diem lætis precationibus invicem faustum ominamur. Nous voilà donc à l’année qui vient, comme disoit M. de M. Je vous la souhaite heureuse. Me de Sév. écrivant le premier de Janvier 1676.

On dit, qu’une terre rapporte tant, bon an, mal an, lorsqu’on fait compensation des bonnes & des mauvaises années, & qu’on en fait un prix mitoyen, ou une année commune. Ainsi on dit, une bonne année, une méchante année, selon que les moissons ont été abondantes ou défectueuses, ou qu’une charge a été lucrative.

Année, se dit aussi du revenu d’une année. Son fermier lui doit deux années.

On dit, les belles années, pour dire, les années de la jeunesse. Ac. F.

On dit proverbialement, il nous en a donné pour la bonne année, quand on a donné quelque chose en abondance, & plus qu’on n’en avoit de besoin.

Année de Méthon. Voyez Nombre d’or.

Année sabbatique, est la septième année, pendant laquelle les Juifs laissoient reposer les terres, selon la loi de Moyse. Annus Sabbathi. L’an du Jubilé étoit la 49e année. Comme elle étoit la septièmme année sabbatique, les Juifs la célébroient avec beaucoup de solemnité.

Année de probation, est celle du noviciat des religieux, dans laquelle on les éprouve, pour savoir s’ils pourront supporter les austérités de la règle. Annus probationis.

On appelle année d’exercice, celle où l’on exerce actuellement une charge, que plusieurs officiers ont droit d’exercer l’un après l’autre.

On appelle bonne année, une année abondante en blé, en vin, &c.

Année climactérique. C’est celle qui dans la vie de chaque homme revient de 7 en 7 ans, ou de 9 en 9. Voyez Climactérique.

En Jurisprudence on dit, que l’année commencée est tenue pour complète.

A Rome, on appelle l’Année Sainte, celle où on fait l’ouverture du grand Jubilé. Annus Jubilæi. L’année sainte commence le jour de Noël au temps de Vêpres, où se fait l’ouverture de la Porte-Sainte. Les années saintes se célébroient autrefois tous les cent ans. Clément VI les réduisit à 50 ans, Urbain VI à 33 ans, & Paul II à 25 ans, comme elles sont encore aujourd’hui. Ces réductions se sont faites afin que chaque homme pût une fois en sa vie profiter des grâces de l’année sainte. Celles dont on a mémoire, sont l’année sainte célébrée par Boniface VIII en 1300. L’année sainte célébrée par Clément VI en 1350. L’année sainte célébrée par Boniface IX l’an 1390. L’année sainte célébrée par le même Pape l’an 1400. L’année sainte célébrée par Martin III l’an 1423. L’année sainte remise à l’an 50, & célébrée par Nicolas V l’an 1450. L’année sainte fixée à 25 ans par Paul II & célébrée par Sixte IV l’an 1475. L’année sainte célébrée par Alexandre VI l’an 1500. L’année sainte célébrée par Clément VII l’an 1525. L’année sainte désignée par Paul III, & célébrée par Jules III l’an 1550. L’année sainte sous Grégoire XIII l’an 1575. L’année sainte sous Clément VIII en 1600. L’année sainte sous Urbain VIII l’an 1625. L’année sainte sous Innocent X en 1650, sous Clément X l’an 1675, sous Innocent XII l’an 1700, sous Benoit XIII l’an 1725. Voyez l’Histoire des années saintes, par le P. Alfani, Dominicain, à Naples, 1725.

La grande année des Platoniciens, est une révolution de trente-six mille ans, après laquelle ils prétendent que les planètes & les étoiles se retrouveront au même point, & dans le même ordre, ou dans leur première disposition.

Chez les Romains, le commencement & la fin de l’année étoient consacrés à Janus, & c’est pour cela qu’on lui donnoit deux visages, dit S. Faustin, dans un Sermon imprimé par le P. Chifflet, & Bollandus, Tom. I, pag. 2 & 3.

Les premiers Chrétiens n’avoient point d’autre époque pour compter les années, que celle des Romains ou des Païens. C’est Denys le Petit, qui en 525 établit l’ère chrétienne, & commença à compter de la naissance de Jesus-Christ, qu’il fixa à la 45 année Julienne. Eusèbe l’a pourtant placée à l’an 43 Julien, & 3947 du monde. En France l’on ne commença à compter par les années de la naissance de Jesus-Christ que dans le VIII siècle, & le Pape Eugène IV en 1431, a été le premier qui ait employé dans les Bulles l’année de l’incarnation, si l’on en croit quelques Auteurs ; mais le P. Papebroch, dans les Acta Sanct. du mois de Mai, Tom. IV, pag. 13, a montré que long-temps avant Eugène, d’autres souverains Pontifes l’avoient marquée. Il rapporte une bulle de Paschal, datée de l’an 1114 de l’incarnation de notre Seigneur, & il remarque que cette manière de dater étoit très-ordinaire à ce Pape, & à Urbain II son prédécesseur ; que cependant ils ne l’observoient pas toujours ; qu’Honorius II, dans sa Lettre 7, & Innocent II, dans les 3, 9, 12, 31, & les six suivantes, marquent l’année de l’incarnation ; qu’on la trouve aussi dans la 5 & 6 de Lucius II, dans la 9, 10, 66, 70, 71, 72 d’Eugène III, dans la 12 d’Anastase IV, les 30, 38, 39 d’Adrien IV, dans le 52, & d’autres encore d’Alexandre III, & dans la 5 d’Urbain III ; que depuis ce temps-là on n’en trouve aucune dans la collection des Conciles jusqu’à Eugène IV, qui marque l’année de l’incarnation : mais on la trouve souvent dans Wading, in Regesto, sous Grégoire IX, & ses successeurs, depuis 1234 jusqu’en 1269. Après quoi on trouve peu d’actes solennels signés de plusieurs Cardinaux dans un consistoire, & expédiés par le Vice-Chancelier de l’Eglise romaine, qui aient cette date. Dans ce petit nombre, le dernier est de Clément V, signé de quinze Cardinaux en date de l’an 1343. Depuis ce temps on ne la trouve plus jusqu’en 1431 sous Eugène IV, auquel temps, à la représentation de Blondus de Forli, secrétaire du Consistoire, on commença, non pas absolument à dater, mais à dater constamment & toujours les Bulles & les rescrits des Papes de l’année de l’incarnation ; mais dès le Pape Jean XIII, au Xe siècle & depuis, on la trouve quelquefois dans des actes moins solennels.

L’Année françoise commençoit du temps des Mérovingiens, le jour de la revue des troupes, qui se faisoit tous les ans le premier jour de Mars. Elle commençoit d’ordinaire à Noël sous le regne des Carlovingiens, & sous les Capétiens à Pâque ; ainsi cela varioit entre le 22 Mars, & le 25 d’Avril. L’Année ecclésiastique commença encore à Pâque. Ce n’est que depuis l’année 1564, & en exécution de l’Ordonnance de Charles IX de 1563, appelée communément l’Edit de Roussillon, que l’année a commencé au premier Janvier, au lieu qu’elle ne commençoit auparavant qu’à Pâque. Le Parlement ne s’y est conformé qu’en 1566. On dit que c’est le Chancelier de l’Hôpital qui fut auteur de l’Edit dont on vient de parler. On a toujours depuis suivie ce style en France, quoique cet article 39 de l’Ordonnance de Roussillon en Dauphiné, n’ait jamais été enregistré au Parlement.

En Allemagne, en Italie, en Chypre, &c. on a aussi commencé l’année à la Nativité. En Islande on la commençoit de même, si l’on en croit Olaüs Vormius, Fast. Danic. Liv. I, ch. 12 ; mais Suénon, LL. Castr. ch. 7, dit que c’étoit à la Circoncision. Les Pisans & les Florentins ; ceux de Trèves, &c. l’ont commencée à la fête de l’Incarnation ou Annonciation.

En Angleterre, l’Année civile (par exemple, pour les actes du Parlement) ne commence que le 25 de Mars. Stow, Analiste Anglois, remarque que Guillaume le Conquérant ayant été sacré le jour de Noël, ce jour devint le premier jour de l’année pour les Historiens, quoique dans les affaires civiles on retînt l’ancienne façon de compter, qui commençoit l’année au 25 de Mars. Depuis ce Prince, les Diplomes des Rois ne marquent plus que l’année du regne, & les autres actes n’en marquent presque point.

Les Juifs, comme presque toutes les nations de l’Orient, avoient une année civile, qui commençoit à la nouvelle lune de Septembre ; & une année ecclésiastique, ou sacrée qui commençoit à la nouvelle lune de Mars.

Eusèbe dit que les années des Egyptiens ne furent d’abord que de 360 jours, ensuite de 365, & par conséquent toujours défectueuses. Le P. Kirker prétend qu’outre cette année solaire, il y avoit en Egypte quelques Nomes ou Cantons, qui n’avoient qu’une année lunaire ; qu’il y en eut même dans des temps plus reculés, qui prirent la révolution de la lune, c’est-à-dire le mois pour une année ; que d’autres trouvant cette année trop courte, la firent de deux mois, quelques-uns de trois, & enfin de quatre. Voyez l’Œdip. Ægypt. Tom. II, pag. 252, & le Cardinal Noris, de Epoch. Syro-Mac. pag. 206.

Les Macédoniens établis en Syrie commençoient l’année en automne, & le premier mois étoit celui qu’ils appeloient Dius, dont le premier jour, qui étoit aussi le premier jour de l’an, répondoit au 24 de Septembre. Ainsi le commencement de l’année Syro-Macédoine tomboit à peu-près à l’équinoxe d’automne. Voyez le Cardinal Noris au même endroit, pag. 14.

Les Mahométans la commencent au moment que le soleil entre dans le signe d’Ariès ; les Perses au mois Fernandin, qui répond au mois de Juin ; & les Gentils de l’Inde la commencent au premier jour de Mars. Les Asiatiques ne comptent point comme en Europe l’année par le cours que fait le soleil, mais par celui de la lune, qui contient, selon eux, 354 jours, qui font douze lunes ; de sorte que tous les trois ans ils comptent treize lunes pour leur bissexte, & croient par ce moyen les égaler aux années solaires. Marin. Les Arméniens (en Perse en 1619.) célébrent le jour de la naissance de notre Seigneur, selon le calcul du vieux calendrier, le 3 Janvier du nouveau style. Wicq. Amb. de Fig.

Le P. d’Acosta, Jésuite, dans son Histoire des Indes, Liv. VI. ch. 2. rapporte que les Mexicains commencent l’année au 23 Février, selon notre calcul, lorsque les feuilles commencent à reverdir ; qu’ils divisent leur année en 18 mois de 20 jours chacun, ce qui fait 360 jours ; que les 5 qui restent pour accomplir l’année, ils ne les donnent à aucun mois, mais qu’ils les comptent séparément ; que toute affaire cesse pendant ces cinq jours, même les sacrifices ; qu’on ne s’assemble point aux temples, & qu’ils ne s’occupent qu’à se visiter les uns les autres ; qu’ils appellent ces cinq jours les jours fainéans ; qu’ils ont des semaines de 13 jours ; qu’ils ont aussi des semaines d’années composées aussi de 13 années ; qu’une révolution de quatre de ces semaines d’années, c’est-à-dire, de 52 ans, fait leur siècle. Nous pourrons dire le reste aux mots Calendrier, Mois, Semaine. Antoine de Sollis dit la même chose dans son Histoire du Mexique, Liv. III. ch. 17.

Dom Francisco Alvarès rapporte quelque chose de semblable des Abissins dans son Voyage d’Ethiopie. Il dit qu’ils commencent leur année le 26 Août, jour de la Décollation de S. Jean ; que l’année est de 12 mois, & les mois de 30 jours ; qu’après ces 12 mois il reste 5 jours, & les années bissextiles 6, qu’ils nomment Pagomen, c’est-à-dire, fin de l’année. Ludolf, Liv. III. ch. 6. §. 97. dit qu’ils commencent l’année le premier jour de Septembre. Du reste, il convient avec Alvarès, dans le Calendrier Ethiopien, qu’il nous a donné dans son second Tome, p. 389. Il met le premier jour de l’année au 29 d’Août. Voyez aussi Kirker, Lex. Copt. p. 537.

Le P. d’Acosta, au ch. 3. du livre que j’ai cité, dit, que les Peuples du Pérou règlent encore mieux leur année, parce qu’ils ont égard aux lunes. Ils donnent à leur année 365 jours comme nous, & le partagent aussi-bien que nous en 12 lunes, ou mois, dans lesquels ils répartissent les jours qui restent. Avant la conquête des Espagnols sur les collines qui entourent Cuzco, qui étoit la capitale de l’Empire & le sanctuaire de la religion, ils avoient élevé douze piliers de bois, disposés de sorte, & en telle distance, que chaque pilier marquât l’endroit où le soleil se levoit, & où il se couchoit chaque mois. Ils appeloient ces piliers succanga, & marquoient dessus les fêtes de chaque mois, & les temps des semences, de la récolte, &c. Chaque mois avoit son nom propre & ses fêtes particulières. Ils commençoient autrefois l’année comme nous au mois de Janvier ; mais un de leurs Incas, qu’ils nomment Paschacuto, c’est-à-dire, Réformateur du temps, plaça le commencement de l’année dans le mois de Décembre, apparemment pour commencer l’année au temps que le soleil part du dernier point du Capricorne, qui est le Tropique qu’ils voient. Quelques-uns prétendent que les Pérouans & les Mexicains avoient des années bissextiles ; mais le P. d’Acosta dit qu’on n’a rien de certain sur cela. Les Pérouans n’avoient point de semaines.

Les Brames de l’Inde commencent l’année avec la nouvelle lune qui tombe en Avril, auquel jour ils célébrent une fête qu’ils nomment Samwat saradi Paudiga ; c’est-à-dire, la fête du premier jour de l’an. Ceux du Guzarate commencent leur année le 18 de Mars. Les Chinois & la plûpart des Indiens avec la première lune en Mars ; & alors ils se réjouissent aussi, & font de grands festins. Les Brames ont 12 mois en l’année, & une année de treize mois, après le cours de trois ans ; ils joignent entre deux, comme nous, un jour au mois de Février après le cours de quatre ans. Ils ont sept jours, qui tirent leur nom des planètes, comme parmi les Latins. Ils ont aussi un siècle de soixante ans ; & après qu’ils sont achevés, ils recommencent de nouveau. Ceux de la Chine, & les autres Indiens, ont aussi une année de 13 mois, comme les Bramines, ou Brachmanes. Voyez Abraham Roger, de la vie & des mœurs des Bramines.

Le Portugais Barbosa dit, que les habitans de Calecut commencent l’année au mois d’Avril ; qu’ils ont l’année lunaire ; qu’ils divisent leurs mois selon les signes ; & qu’il y en a de 20, de 30 & de 31 jours.

Les Grecs commencent à compter les années du monde par le premier de Septembre. A Rome il y a deux manières de compter l’année : l’une commence à Noël, à cause de la Nativité de Notre Seigneur ; les Notaires usent de cette date, & disent, A Nativitate : & l’autre au mois de Mars, à cause de l’Incarnation ; & c’est ainsi que les bulles sont datées, Anno Incarnationis.

Année Persienne. Golius, dans ses notes sur Alfergan, est entré dans un grand détail sur la forme ancienne & nouvelle de l’année Persienne, laquelle a été suivie de la plûpart des Auteurs Orientaux. Elle étoit de 365 jours, 5 heures, 49’, 31” ; ce qui differe à peine de l’année Grégorienne, que les Européens ou Occidentaux se sont avisés de rechercher plus de 500 ans après les Asiatiques. Mais l’année dont les Auteurs qui ont écrit en Arabe ou Persan, ont fait usage dans leurs Tables astronomiques, est semblable aux années Egyptiennes, lesquelles sont toutes égales, étant de 365 jours sans intercalation. Instit. Astron. p. 600.

Nos anciens Historiens François ont compté les années du jour de la mort de S. Martin, qui arriva en 401 ou 402. C’est l’époque de Grégoire de Tours.

Les Coptes & les Abissins ont une ère, dont les années commencent au temps de la persécution de Dioclétien, comme l’a remarqué Kirker, Prodr. Copt. ch. 2. & Bollandus, T. I. p. 572. & qu’ils appellent les années de grâce & de miséricorde passées depuis la mort des Martyrs.

Les Turcs appellent l’année du serpent, l’année du loup-cervier, ou du léopard, l’année du porc, l’année du lièvre, &c. les années différentes d’un cycle particulier qu’ils ont dans leur calendrier, aussi-bien que les Orientaux.

L’année de l’hégire est l’année de l’ère dont se servent tous les Mahométans, & qui commence, selon eux, le premier jour de la lune de Moharrem, la 5e série, ou selon nos Chronologistes, la 6e qui répond au 15 juillet, prenant le commencement de cette lune depuis le soleil couché du même jour de l’an 622 de Jesus-Christ. Voyez Hégire.

A la Chine les trois premiers jours de l’année se passent dans tout l’Empire en réjouissances. On s’habille magnifiquement, on se visite, on fait des présens à tous ses amis, & aux personnes qu’on a quelque intérêt de ménager. Le jeu, les festins, les comédies, occupent tout le monde. P. Le Comte.

Année, se dit de quelques livres qui contiennent des exercices de piété pour tous les mois, toutes les semaines, & tous les jours de l’année. L’année Chrétienne du P. Suffren, l’Année Chrétienne de M. Le Tourneux. Le P. Croiset, Jésuite, a donné à Lyon une Année Chrétienne en 12 volumes in-12. autant que de mois, & quatre volumes pour les Fêtes mobiles & les Mystères. L’année du Chrétien par le P. Grisset, Jésuite, contient 18 vol. in-12.

Ce mot vient du latin annus, qui vient de la préposition an, qui anciennement se prenoit pour circùm. L’année n’est qu’une certaine révolution de jours. Quelques-uns le font venir du grec ἓννος. Il semble de plus au P. Pezron, que Ennus, vieux mot, le même que Annus, est pris du henn des Celtes, qui signifie vieux & ancien ; parce que l’année vieillit toujours en s’avançant.

ANA.

ANA. s. m. Les livres en ana. Ce mot ne signifie rien, & n’est qu’une terminaison latine de noms adjectifs neutres pluriels ; mais parce que depuis quelque temps on a formé de ces sortes d’adjectifs latins des titres à des livres, même François, qui sont des Recueils de pensées détachées de Contes, de traits d’Histoires ; on appelle ces livres des livres en ana, ou simplement des ana : ainsi l’on dit, tous ces livres en ana, ou tous ces ana me déplaisent fort. Les livres en ana font souvent dire aux gens des choses auxquelles ils n’ont jamais pensé, ou qu’ils devroient n’avoir jamais dites. M. Wolfius a faut l’Histoire des livres en ana dans sa Préface des Casauboniana. Il y dit que si ces sortes de titres sont nouveaux, la chose est fort ancienne ; que les livres de Xénophon des dits & faits de Socrate, & les Dialogues de Platon, sont des Socratiana ; que les Apophthegmes de Philosophes recueillis par Diogène Laërce, les Sentences de Pythagore, celles d’Epictète, les ouvrages d’Athénée, de Stobée, & de plusieurs autres, sont des livres en ana. La Gemare même des Hébreux, plusieurs livres orientaux, dont la Bibliothèque orientale de d’Herbelot est pleine, sont encore de ce genre, selon M. Wolfius.

Les Scaligeriana sont le premier livre qui ait paru avec un titre en ana. Ils ont été faits sur les papiers de Vassant & de Verthunien, qui, à ce que l’on prétend, les avoient recueillis de la bouche de Scaliger, auquel ils étoient attachés. La première édition fut faite à la Haye en 1666 sur les papiers de Vassant, qui les avoit données à M. Pithou. La seconde à Groningue en 1669, sur ceux de Verthunien, que M. Sigone, Docteur en Droit de Poitiers, avoit recouvrés ; & ce fut Tannegui le Fevre qui en eut soin. Ensuite vinrent les Perroniana, les Thuana, les Naudœana, les Patiniana, les Sorberiana, les Menagiana, les Anti-Menagiana, les Fureteriana, les Chevrœana, &c. jusqu’aux Arlequiniana, les plus fades de tous les ana. Les Menagiana passent pour être les meilleurs & les mieux choisis. Les Chevrœana sont des traités composés par M. Chevreau ; les Casauboniana, des remarques écrites & laissées par Casaubon. Wolfius y a ajouté des notes. Burcard Gotthelsius Struvius, dans ses Supplementa ad notitiam rei litterariæ, ch. 7. donne une liste de tous les ana.

A s’en tenir à la première idée qu’on a des ana, ils devroient n’être recueillis que des entretiens, & cela même suffit presque pour les décrier ; puisque tous les défauts qu’on reproche à la langue doivent s’y rencontrer ; légéreté, précipitation, manque d’exactitude, inutilités, médisances, & souvent calomnies. La plume est plus circonspecte ; & par conséquent les lettres sont autant préférables à tous ces ana, que ce qui est pensé l’est à ce qui est jeté au hazard & sans réflexion.

Ana, Ἀνὰ, préposition grecque fort en usage dans les ordonnances des Médecins. On en a donné l’explication sous la lettre Α, où je renvoie le Lecteur. Les Enthousiastes se servent encore du mot ana pour signifier esprit ; & Castelli nous append que c’est le nom d’une certaine idole.

Ana, ou Anah. Ville d’Asie, dans un lieu fort agréable, sur les bords de l’Euphrate. C’est le rendez-vous de tous les brigands qui rendent ce pays si dangereux.

ANAB. Ancienne ville de la Terre promise. Anab. Au temps de S. Jérôme ce n’étoit plus qu’un bourg. Il la place sur les confins d’Eleuthéropolis ; Adrichomius l’en éloigne de huit lieues au midi. Anab étoit sur une montagne.

ANABAPTISME. s. m. Anabaptismus. Hérésie, ou secte des Anabaptistes. L’Anabaptisme s’est insensiblement glissé dans toute l’Allemagne, hormis dans l’Autriche, & dans les Etats de Bavière. Il s’est répandu dans la Bohême, en Saxe, dans les villes Anséatiques, dans les Etats de Brunswick, en Danemarck, en Hollande, en Angleterre & en Ecosse. Jovet. Luther approuva l’exposition de foi des Freres de Bohème, à l’exception de l’articule de l’Eucharistie, & de celui de l’Anabaptisme. Dupin.

Anabaptiste. s. m. Anabaptista. C’est un nom qu’on a donné à certains hérétiques qui prétendent qu’on ne doit pas baptiser les enfans avant l’âge de raison, ou qu’à cet âge il faut les rebaptiser, parce qu’ils soutiennent qu’il faut être en état de rendre raison de sa foi, pour recevoir validement le baptême. Ce mot vient du grec ἀνὰ, qui signifie denuò, une seconde fois, & qui dans la composition des mots signifie réitération ; & de Βαπτίζω, je baptise, verbe dérivé de Βάπτω, mergo, je plonge dans l’eau.

Il y a eu des Anabaptistes dans la primitive Eglise, c’est-à-dire, des Hérétiques qui baptisoient une seconde fois. Tels étoient les Novatiens, les Cataphryges, les Donatistes. Il y eut même au troisième siècle des Prélats Catholiques en Asie & en Afrique, qui prétendirent, que le baptême des Hérétiques n’étoit pas valide, & qu’il falloit rebaptiser ceux d’entr’eux qui se convertissoient. Ceux de Cilicie, de Cappadoce, de Galatie, & de quelques provinces voisines, dans un Concile qu’ils tinrent à Icone, ayant à leur tête Firmilien, & ceux d’Afrique, dans deux Conciles de Carthage, où présida S. Cyprien, le déclarerent ainsi ; mais le Pape Etienne I s’opposa à cette erreur, & elle n’eut pas de suite. Ces anciens Rebaptisans ne sont pas communément appelés Anabaptistes. Au XIIe siècle les Pétrobusiens, les Vaudois, les Albigeois, erroient aussi dans ce point, comme il paroît par S. Bernard, Ep. 24. & Serm. 66. sur le Cantique, & par les écrits du vénérable Pierre. Mais ceux qu’on appelle proprement Anabaptistes, sont une secte de Protestans du XVIe siècle, ainsi nommés pour la raison que l’on a dite.

Cette secte a fait beaucoup de bruit & de ravages en Allemagne dans le XVIe, sur-tout en Westphalie. Ils soutiennent qu’on ne doit point baptiser les petits enfans : qu’il n’est point permis de jurer, ni de porter les armes ; qu’un vrai Chrétien ne peut être Magistrat, &c. On ne sait pas bien quel est l’Auteur des Anabaptistes. Quoique Luther se soit fort déclaré contre ces fanatiques, il est cependant certain que quel que soit leur Chef, il est sorti de son école, & que lui-même y a donné occasion, soit en assurant qu’il faut une foi actuelle pour le baptême, soit en écrivant, dit-on, aux Vaudois, qu’il vaut mieux ne pas conférer le baptême, que de le donner aux enfans. Quelques Auteurs en accusent Carlostad, & d’autres Zuingle. Cochlæus dit que c’est Balthazar Pacimontanus qui commença à l’enseigner en 1527, disant l’avoir puisée dans les ouvrages de Luther : dans la suite il fut brûlé à Vienne en Autriche. Mezorius dit que ce fut Pelargus l’an 1522, & qu’il eut pour compagnons Bodestein, Carlostad, Melanchthon, Westenberg, Quiccou, Didyme, More, &c. Enfin, ou en fait plus communément les Auteurs Thomas Muncer de Zwickau, ville de Misnie, & Nicolas Storch de Stalberg en Saxe, tous deux disciples de Luther, dont ils se séparerent, parce qu’ils ne trouvoient pas sa doctrine assez parfaite. S’ils ne sont pas les inventeurs de cette pernicieuse doctrine, c’est eux au moins qui ont commencé, & qui ont le plus contribué à l’établir, & à la répandre dans le monde.

Sleidan parle de la faction des Anabaptistes en plusieurs endroits de ses Commentaires historiques. Luther avoit si fort prêché la liberté évangélique, que les paysans de Suève & des environs s’attrouperent, & se liguerent contre les puissances ecclésiastiques, sous prétexte de défendre la doctrine évangélique, & de secouer le joug de leur servitude : Obductâ causâ quosi & Evangelii doctrinam tueri, & servitutem ab se profligare vellent. Voyez Sleidan à la fin de son IVe Liv. Il ne fut pas possible d’arrêter leur fureur par d’autre voie, que par celle des armes. Ils opposoient à Luther sa propre doctrine : ils disoient qu’ayant été faits libres par le sang de Jesus-Christ, c’étoit une chose indigne du nom Chrétien, qu’on les eût regardés jusqu’alors comme des serfs : Quòd huc usque sint habiti velut conditione servi. Le même Sleidan, dans son Liv. Ve, rapporte les exhortations que Luther faisoit aux Anabaptistes, pour leur faire mettre les armes bas ; mais toutes ses prédications furent inutiles. Ils publioient par-tout qu’ils n’avoient pris les armes, que parce qu’ils s’y croyoient obligés par un commandement de Dieu. Cet Hérésiarque voyant que ses longues harangues étoient inutiles, publia un Livre, où il convioit tout le monde à prendre les armes contre ces scélérats, qui abusoient ainsi de la parole de Dieu. Il fut obligé d’en écrire un second pour justifier sa conduite, qui paroissoit cruelle à bien des gens.

Ces Anabaptistes étant au nombre de quarante mille, désoloient tous les lieux par où ils passoient. Muncer, qui étoit leur chef, prétendit que Luther n’avoit encore fait que la moitié du chemin pour ce qui étoit de la réformation, & qu’il falloit joindre les révélations divines à l’Ecriture Sainte : Ex revelationibus divinis judicandum esse dicebat, & ex Bibliis, Muncerus. Consultez Sleidan au commencement de son Liv. Ve. En effet, ces Enthousiastes ne croient pas que le seul texte de l’Ecriture suffise pour établir la vérité de la religion Chrétienne, ils ont recours aux révélations.

Cet Historien fait encore mieux connoître au commencement du Xe Livre de ses Commentaires historiques, les excès où les Anabaptistes porterent cette liberté évangélique, qui avoit été prêchée par Luther. Jean de Leyde, fameux fanatique qui se déclara leur Roi, ne marchoit point en public qu’il ne fût accompagné d’un certain nombre de grands Officiers, deux jeunes gens à cheval marchoient immédiatement après lui, dont l’un, qui étoit à la droite, portoit la couronne, & l’autre portoit une épée toute nue. Mais les Anabaptistes d’aujourd’hui, quoiqu’ils soient Fanatiques & Illuminés, sont fort éloignés de ces excès de fureur où étoient leurs premiers maîtres, qui vouloient établir sur la terre le nouveau regne de J. C. par la force des armes ; ils condamnent au contraire les guerres qui sont entre les Chrétiens, & ils ne souffrent point qu’aucun parmi eux porte les armes.

Calvin a écrit contre les Anabaptistes un ouvrage qui se trouve parmi ses opuscules. On y voit qu’il est fort embarrassé à leur répondre sur le baptême des enfans, qu’ils rejettent comme s’il eût été contraire à ces paroles de Jesus-Christ, au ch. 16. de S. Matth. v. 16. Celui qui croira, & sera baptisé, sera sauvé. Comme il n’y a que les adultes qui soient capables de croire, les Anabaptistes inféroient de-là qu’on ne devoit point baptiser les enfans, puisqu’on ne lit aucun passage dans tout le nouveau Testament pour appuyer clairement leur baptême. Calvin, & même tous les autres Protestans, se trouvent fort embarrassés à répondre à cet argument des Anabaptistes. Ils sont obligés de recourir à la tradition avec les Catholiques. Et en effet on voit que le baptême des enfans étoit en usage dès les