Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/101-110

La bibliothèque libre.
Fascicules du tome 2
pages 91 à 100

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 101 à 110

pages 111 à 123


BUABIN. s. m. Idole des peuples du Tunquin. Ce dieu préside aux maisons dans l’idée des Tunquinois, & ils l’invoquent, quand ils en veulent bâtir quelqu’une. Ils font dresser un autel, & appellent des Bonzes pour sacrifier à ce dieu. Après le sacrifice on prépare un festin de viandes qui ont été sacrifiées, puis on présente au dieu plusieurs papiers dorés, où l’on a écrit quelques paroles magiques ; ensuite on les brûle avec des parfums devant l’Idole pour l’engager par cette cérémonie à empêcher qu’il arrive jamais aucun malheur dans la maison qu’on va bâtir. Tav. Voyage des Indes, cité par Mar.

☞ BUADE. s. f. Terme de Manège. Bride à longues branches droites & non coudées.

BUANDERIE. s. f. Espèce de salle au rez de chaussée, où il y a un fourneau & des cuviers pour faire la lessive. Officina lavandis, purgandis linteis comparata. Il s’en trouve dans toutes les Communautés, & dans la plûpart des maisons de campagne.

BUANDIER. s. m. BUANDIÈRE. s. f. Celui ou celle qui fait le premier blanchiment des toiles neuves. Blanchisseur est celui qui les blanchit, à mesure qu’on s’en sert. On le dit encore dans quelques provinces en Bretagne & dans les provinces voisines, pour Blanchisseur & Blanchisseuse faisant la lessive que l’on appelle buée. Lixiviæ administer, vel administra. ☞ L’observation critique des vocabulistes qui relèvent ceci comme une erreur capitale, n’est que risible.

☞ BUARCOS, ville de Portugal, dans la province de Beira, à l’embouchure de la rivière de Mondego.

BUB.

BUBALE. s. m. Animal qui tient un peu du cerf & de la vache. Aristote, en parlant du Bubale, dit qu’il ressemble au cerf. Pline dit qu’il ressemble à un cerf & à un veau. Oppien dit qu’il a des cornes recourbées en arrière. Toutes ces particularités se trouvent dans l’animal que nous appelons aujourd’hui vache de Barbarie : ce qui a donné occasion à Aldrowandus de dire que c’est le Bubale des Anciens.

BUBASTE. Ancienne ville d’Egypte, capitale d’une province ou canton qu’ils appeloient Nonius, Bubastus. Le P. Kirker, Œd. Æg. Tom. I, pag. 31, dit que Βούβαστος signifie, le pas d’un bœuf. Il faut en ce sens qu’il vienne de βοὺς, bœuf, & βαίνω, je vais, je marche. Il ajoute que d’autres le dérivent de βούς, bœuf, & ἄστυ, ville ; la ville du bœuf, en Cophre Baub ast, signifie deux bœufs, parce que c’est là que les deux fameux bœufs de l’Egypte, l’un appelé Apis par les habitans de Memphis, & l’autre Mnevis par ceux d’Héliopolis, apparurent d’abord, & qu’ils apprirent aux hommes l’agriculture. On honoroit Diane à Bubaste. D’où lui vient le nom de Diane bubaste, qui signifie Diane la chate, parce qu’elle se transforma en chate, lorsque les dieux se réfugièrent en Egypte.

BUBE. s. f. Petite élevure ou bouton qui se forme sur la peau. Tumor, pustula. Il vient des bubes sur les lèvres, quand on boit dans un verre qui n’est pas net.

Ce mot, aussi-bien que celui de Bubon, vient du grec βουβὼν, espèce de tumeur.

BUBERON. s. m. Le peuple dit buberon, pour biberon.

BUBON. Terme de Médecine & de Chirurgie. C’est une tumeur qui vient aux glandes des aînes & des aisselles, avec inflammation & douleur. Il provient d’un sang épanché dans les glandes joint à quelque humeur dépravée. Bubo. Il y a deux sortes de bubons. On appelle les uns benins ; & les autres malins. Les malins se divisent en pestilentiels, & vénériens. Les pestilentiels surviennent dans les fièvres & maladies pestilentielles : les vénériens sont une suite d’un commerce impur, & bien souvent des avant-coureurs de la vérole. On appelle ordinairement ces derniers, poulains. Quand un bubon est entouré d’un cercle de différentes couleurs, comme l’arc-en-ciel, c’est une marque qu’il est pestilentiel, & le plus souvent mortel.

BUBONE. s. f. Nom d’une fausse divinité. Bubona. S. Augustin, Liv. IV, de la Cité de Dieu, ch. 34, dit que Bubone étoit chez les Romains une Déesse que l’on croyoit être chargée du soin des bœufs. Les Juifs, leur dit-il, en se moquant de tant de divinités, ont eu des blés sans la Déesse Ségétie, des bœufs sans bubone, du miel sans Mellone, & des fruits sans Pomone. Quelques éditions disent Bobona.

BUBONOCÈLE. s. m. Terme de Chirurgie. Tumeur qui arrive à l’aîne, & qui est causée par la chute de l’épiploon ou de l’intestin. Bubonocele. C’est une espèce d’hernie, qu’on appelle incomplette. Les femmes sont moins sujettes au bubonocèle, que les hommes.

BUC.

BUCCAL, ALE. adj. Qui appartient à la bouche. Buccalis, e. En Anatomie les glandes buccales sont des glandes qui parsement toute la face interne des joues du côté de la bouche. Ce sont des grains glanduleux, qui s’ouvrent par de petits trous ou orifices à travers la membrane interne de la bouche & qui séparent du sang, la salive qui sert à la mastication & à la digestion. Winslow.

☞ Il y a aussi un nerf buccal interne & un externe : & une artère buccale, qui se distribue au muscle buccinateur.

☞ BUCCANE, ou BOUCHARIE, grand pays d’Asie dans la Tartarie, qu’on divise en grande & en petite Boucharie, ou Buccarie. La grande comprend précisément la Sogdiane & la Bactriane des anciens avec leurs dépendances. Elle se divise en trois autres provinces, le Maouvenner, qui a pour capitale Samarkand. La grande Boucharie proprement dite, qui a pour capitale Bouchara, (Bochar) & celle de Balck, qui a pour capitale, une ville de même nom.

La petite Boucharie, est le même pays que le royaume de Gaschgar. Voyez ce mot.

☞ Les sujets du grand Mogol & les Persans, appellent communément Usbecks, les Tartares qui habitent ce pays.

BUCCELLAIRE. Nom d’une espèce de Soldats que les Empereurs Grecs entretenoient dans les provinces & dans les campagnes. Buccellarii, Βουϰελλάριοι. Le nom de Buccellaire vient de bucca, bouche, & buccella, bouchée, d’où l’on a fait Buccellarius à Rome, & Βουϰελλάριος à Constantinople. Les Buccellaires furent ainsi appelés parce qu’ils étoient entretenus par l’Empereur : C’étoit l’Empereur qui faisoit leur dépense de bouche : ils étoient dans les provinces ce que sont à la Cour ceux qui ont bouche à la Cour, qui sont commensaux. Les Buccellaires, dans la marche d’une armée où étoit l’Empereur, marchoient devant & après l’Empereur pour le garder. Voyez Maurice, Cujas, Tournebœuf. Il y avoit encore une autre sorte de Buccellaires sous les Empereurs Grecs ; c’étoient des Grecs de Galatie, Ἑλληνο γαλάται qui fournissoient du pain aux soldats. Voyez Constantin Porphyr. Les Buccellaires pris dans le premier sens étoient, selon quelques-uns, des gens dont l’Empereur se servoit pour faire mourir en secret certaines personnes.

Les Glossæ Nomicæ l’interprètent, Envoyé, qui porte quelque chose ; & encore, Soldat stationnaire, ou qui demeure chez quelqu’un, & qui est à son service. La même explication se trouve au Livre 60 des Basiliques, où il est dit que ce mot vient de βούϰα ; c’est-à-dire, bucca, qui, dit-on, signifie pain, ἄρτος ; & les Buccellaires, continue-t-on, étoient ainsi appelés, parce qu’ils mangeoient le pain d’une personne, à la charge de demeurer chez lui.

Chez les Visigoths on appeloit Buccellaire en général tout client, tout vassal, parce qu’ils vivoient aux frais de leur Seigneur. C’est en ce sens que le prennent les loix des Visigoths dans Papias, Liv. V, tit. 3, §. 1, & Anastase le Bibliothécaire dans la vie du Pape Zacharie. Voyez sur ce mot M. du Cange, les Macri, Hoffman, & le Glossaire de Cedrenus, Constant. de Th. orient. 15, 6, & de admin. Imp. c. 51, Curopal p. 839.

Au reste, les Empereurs d’Orient ne sont pas les seuls qui ont eu des Buccellaires ; & d’autres que les Empereurs en avoient. En effet, on trouve au milieu du Ve siècle un Buccellaire du fameux Aëtius dans Grégoire de Tours, Hist. Franc. Lib. II, cap. 8, à moins qu’on ne voulût dire que c’est une prolepse ou anticipation de cet Historien ; ce qui ne paroît pas. D’ailleurs l’origine & la forme latine de ce nom persuadent aisément qu’il a passé de Rome à Constantinople plutôt que d’être venu de Gréce en Italie.

BUCCELLATION. s. f. Quelques Chimistes se servent de ce mot pour signifier une division en gros morceaux. Harris. Buccellatio, divisio in buccellas, id est, in partes majores. Division de différentes substances, comme par bouchées, pour les travailler.

☞ BUCCHANTE. s. f. C’est ainsi qu’on appelle une plante fort commune aux environs de Montpellier. C’est une espèce de Conyze. Voyez ce mot.

BUCCIN. s. m. Terme de Conchyologie. Voyez Trompe.

BUCCINATEUR. adj. m. Pris substantivement. Terme d’Anatomie. C’est une épithète qu’on donne au second des muscles communs des lèvres, qui est ainsi nommé, parce que c’est lui qui s’enfle & fait la joue grosse en souflant ou en sonnant de la trompette. Buccinator. On l’appelle aussi trompetteur.

☞ Le Buccinateur occupe latéralement l’espace qui est entre les deux mâchoires. Il sert dans la mastication à remuer les alimens, & à les faire entrer dans la bouche en aplatissant les joues.

Buccinateur, pourroit se dire aussi des Joueurs de buccines, qu’on appeloit autrefois Buccinatores. Les Tritons, selon les Poêtes & les Peintres, sont des Buccinateurs marins, ou les Buccinateurs de Neptune. Il y avoit chez les Romains un Esclave public qu’ils appeloient Buccinateur des noms, Buccinator nominum, qui accompagnoit toujours le crieur publis, appelé Præco. Il est parlé de ce Buccinateur des noms, Leg. ilt. ff. De jure immunit, & dans une ancienne Inscription.

Ce mot vient du latin buccina, trompette.

BUCCINE. s. f. Buccina. Ce mot se trouve dans Nicot. C’étoit un instrument de guerre, ou plutôt, un instrument de musique martiale & guerrière ; un instrument de musique servant à la guerre. Nous le prenons communément pour une espèce de trompette. Festus confirme ce sentiment en définissant la Buccine une corne recourbée, dont on joue comme d’une trompette. Végétius, au Liv. III, De re militari, c. 5, dit aussi que la buccine se recourboit en cercle, & différoit par-là de la trompette, tuba. Varron dit qu’on les nommoit cornes, cornua, parce que dans les commencemens c’étoient des cornes de bœuf, dont on se servoit, comme font encore nos Pastres en bien des endroits de la campagne. Servius, sur le VIIe Lib. de l’Eneide, v. 518, semble dire qu’on en faisoit aussi d’abord de cornes de boucs ; & l’écriture appelle les instrumens dont les Hébreux se servoient dans le temple & à la guerre, קרן יובל, Keren Jobel : c’est-à-dire, corne de bélier, Josué VI. 3, & שפרות היובלים, Sopheroth hajobelim, qui signifie buccines de béliers, Jos. VI, 4 & le son de instrumens. Voyez encore I, paralop. XXV, 5, & Bochart, Hieroz. Part. I, Liv. II, c. 32. Les instrumens de musique servant à la marche guerrière sont les buccines, les trompettes, les litues, les clairons, les cors & cornets, les fifres, les arigots, les tambours, les attabales, les nacaires, les tymbales, &c. Les buccines marines que les Poëtes & les Peintres donnent aux Tritons sont des coquillages en forme de limaçon.

Les cloches sont, tambourins & doucine,
Harpes & luths, instrumens gracieux,
Hautbois, flageolz, trompettes & buccine,
Rendans un son si très-solacieux. Marot.

Ce nom vient de Bucca, bouche, parce qu’il faut emboucher ces instrumens pour en jouer, que c’est de la bouche qu’on en joue. Ainsi buccine proprement, & selon son origine, devroit être un nom générique de tous les instrumens qui s’embouchent ; mais l’usage l’avoit déterminé en particulier à celui que nous avons dit.

BUCCULA. s. f. Terme latin, qui signifie petite bouche, ou selon M. Dionis, petite gorge. Les Anatomistes donnent ce nom à la partie inférieure du visage, qui comprend le dessous de la lèvre inférieure, le menton, & la partie charnue sous le menton.

BUCENTAURE. s. m. Espèce de Centaure qui avoit le corps d’un bœuf ou d’un taureau, au lieu que les Centaures ont communément le corps d’un cheval. Il y en a aussi qui ont le corps d’un âne. Nous avons des monumens qui représentent Hercule combattant un Bucentaure. Le Héros n’a ni massure, ni aucune sorte d’arme. Il embrasse le Bucentaure par le milieu du corps, & semble l’étreindre pour l’étouffer.

Bucentaure, est aussi le nom d’un grand & magnifique vaiseau dont se servent les Vénitiens tous les ans, lorsque le Doge fait la singulière cérémonie d’epouser la mer le jour de l’Ascension. Pierre Justiniani, dans son Histoire de Venise, Liv. XIV, donne une description très-détaillée du Bucentaure, & il ajoute que l’on en rapporte l’origine à l’an 1311, de Jesus-Christ ; que d’autres nénamoins remontant plus haut disent qu’il la faut rapporter à l’arrivée de l’Empereur Frédéric Barberousse à Venise en 1177 ; lorsqu’il y vint pour faire la paix avec le Pape Alexandre VII, & la République. Cet Empereur avoit obligé le Pape de sortir de Rome, & de se retirer à Venise. Choqué de ce que les Vénitiens donnoient un asile à Alexandre, il envoya contre eux sa flotte sous la conduite de son fils Othon, qui fut défait, pris & renvoyé à son pere, auquel il persuada d’aller à Venise pour faire la paix, qui y fut en effet heureusement conclue. Le Pape, en reconnoissance du secours qu’il avoit reçu des Vénitiens, leur accorda plusieurs privilèges, & fit présent au Doge d’un anneau d’or ; c’est l’origine de l’anneau que le Doge jette dans la mer.

Ce mot vient du grec βουϰενταῦρος, composé de βοῦ, particule d’augmentation, dont on se sert pour marquer une grandeur énorme ; & de Κένταυρος, Centaurus, Centaure. Justiniani ajoute encore deux étymologies à celle-ci. La première tire ce nom de bis, & de Taurus, ou plutôt Centaurus, nom d’un des vaisseaux d’Enée dans Virgile. 2°. D’autres veulent qu’on ait dit Bucentaurus, pour Ducentaurus, mot forgé pour signifier un vaisseau, qui peut tenir deux cens hommes, ducentorum hominum capax. La première etymologie que l’on a rapportée ici, paroît être la véritable.

BUCÉPHALE. s. m. qui signifie tête de bœuf, du grec βοὺς, bœuf & ϰεφαλὴ, tête. C’étoit la coutume autrefois d’imprimer quelques marques aux chevaux. Les plus communes étoient un Σ, sigma, un Κ, Kappa, & une tête de bœuf. Ceux qui étoient marqués du Σ s’appeloient Συμφόραι ; ceux qui avoient le Κ, Κοππατίαι ; & l’on donnoit le nom de Bucéphales, Βουϰέφαλοι à ceux auxquels on imprimoit une tête de bœuf. Cette tête de bœuf se mettoit sur la croupe du cheval, & sur ses armes ou son harnois. C’est le Scholiaste d’Aristophane dans les Nuées, Act. 1 Sc. 1, & Hésychius au mot Βουϰέφαλος, qui nous apprennent ceci. Voy. Saumaise sur Solin, pag. 893 & suiv.

Bucéphale, fut en particulier le nom du cheval d’Alexandre, ainsi nommé, si l’on en croit le Scholiaste d’Aristophane, parce qu’il étoit marqué de la tête d’un bœuf. D’autres disent parce qu’il avoit le front large, ou un regard farouche ; mais le Scholiaste d’Aristophane, à l’endroit que j’ai cité, dit qu’on n’appeloit point ainsi les chevaux à cause de leur forme ou figure, mais seulement à cause de la marque qu’on leur imprimoit.

Freinshemius dit que Philippe ayant fait consulter l’Oracle de Delphes, pour savoir qui seroit son successeur, l’Oracle répondit que ce seroit celui qui monteroit Bucéphale ; que ce Bucéphale étoit un très-beau cheval, bien tourné, mais très-farouche, qu’un certain Philonicus de Thessalie avoit vendu à Philippe 12 talens ; c’est-à-dire 13000 livres selon la supputation de Budé, qui met le petit talent à 1000 livres ; ou 17329 livres si c’étoit de grands talens, que Budé évalue à 1333 livres de notre monnoie. Aulu-Gelle dit qu’il fut vendu 13 talens, & donné à Philippe, ce qui revient selon lui à 312 sesterces monnoie Romaine, & selon le P. Proust, dans le Commentaire d’Aulu-Gelle, ad usim Delphini, à 13650 livres de notre monnoie. Quoi qu’il en soit, Philippe l’ayant fait enfermer long-temps, & enfin ayant ordonné qu’on le laissât aller à l’abandon, parce que personne ne le pouvoit monter ; Alexandre s’écria, Quel cheval leur ignorance ou leur délicatesse leur fait perdre ! Et l’ayant flaté quelque temps, il eut l’adresse de le monter, & enfin de le domter. Quand il en descendit, Philippe l’embrassant, cherchez, lui dit-il, mon fils, un Royaume digne de vous. La Macedoine ne vous suffit pas. Depuis ce temps-là Alexandre monta Bucéphale ; & s’en servit dans tous ses combats. Onésicrite & Arrien, Liv. V, chap. 3. disent qu’il mourut de vieillesse, après avoir vécu 30 ans, selon le premier de ces Auteurs. Plutarque assure qu’il mourut quelque temps après la bataille de Porus des blessures qu’il y reçut. C’est dit Hoffman, le sentiment commun. Voyez Bucéphalie. Quand Bucéphale étoit sellé & armé pour le combat, il ne souffroit point que personne le montât qu’Alexandre.

On emploie quelquefois ce nom pour signifier dans le discours familier, ou burlesque, un beau cheval, grand, vigoureux, un cheval de parade. Il parut monté sur un Bucéphale.

On dit aussi quelquefois en badinant des chevaux ordinaires, ou mêmes des rosses, ou mauvais chevaux : J’étoit sur mon Bucéphale, qui alloit assez bon train ; pour dire, sur mon cheval. Ah quel Bucéphale vous avez là ! pour dire, quel mauvais cheval ! par ironie.

BUCÉPHALIE. s. f. Ville bâtie dans les Indes par Alexandre quelque temps après la victoire remportée sur Porus, & nommée ainsi en mémoire du cheval Bucéphale, que ce Prince avoit perdu. Quint-Curce la nomme Bucephalon, ou Bucephalum, aussi-bien qu’Aulu-Gelle ; Ptolomée, Bucephala ; le Scholiaste d’Aristophane, sur la Ie Scène du premier Acte de la Comédie des Nuées, la nomme Alexandrie. Aulu-Gelle, Liv. V, ch. 2, dit que pendant la guerre des Indes, Alexandre dans un combat s’étant jeté trop imprudemment au milieu d’un gros d’ennemis, on lança sur lui une grêle de flèches, dont Bucéphale, sur lequel il étoit, fut blessé à la tête, & au flanc ; que malgré ses blessures, n’en pouvant plus, & ayant perdu presque tout son sang, il tira cependant son Maître de la mêlée, & l’emporta avec une extrême vigueur jusque dans un lieu où il fut hors de danger, & que là il tomba mort. Ce fut en ce même endroit, ajoute cet Auteur, qu’Alexandre fit bâtir la ville de Bucéphalie. Samson & d’autres après lui la prennent pour Lahor, ville de la Province de Pengad sur l’Hydaspe.

☞ BUCH. Pays de France, dans les landes de Bourdeaux, près de Medoc.

☞ BUCHAN ou BUGAN. Province d’Ecosse qui a pour bornes à l’orient & au septentrion, la mer d’Allemagne, à l’occident & au midi, les Provinces de Murray & de Marr.

BUCHAW, BUCKAU. Nom d’une ville de Suabe en Allemagne. Buckovia. Elle est sur le lac de Feder. C’est une ville Impériale. L’Abbaye de Buchaw. Les Chanoinesses de Buchaw. Cette Abbaye fut fondée sur la fin du IXe siècle par Adelinde, fille d’Hildebrand Duc de Suabe. L’Abbesse de Buchaw est Princesse de l’Empire, & les Chanoinesses doivent être non-seulement nobles, mais Comtesses ou Barones, c’est-à-dire, filles de Comtes ou de Barons.

BUCHE. s. f. Morceau de bois de chauffage, de grosseur & longueur déterminée. Plusieurs de ces morceaux forment la corde. Voy. Bois, stipes, truncus, caudes. Mettre une buche au feu.

Du Cange dérive ce mot de busca, qu’on a dit dans le même sens en la basse latinité.

On appelle figurément un homme stupide, une grosse buche. Stipes. Et on dit d’un homme pesant, qu’il ne se remue non plus qu’une buche ; qu’il vaudroit mieux parler à une buche.

Buche. Il y a une ferme du Roi qu’on appelle le gros de la buche. L’imposition de la buche, ou le droit de buche est un droit qui s’est levé à Paris sur les buches. Par Arrêt du Grand-Conseil du 13e Juin 1546, il est déclaré que les Secrétaires du Roi sont exempts du droit de buche. Et par un Jugement des Requêtes de l’Hôtel, du 9e Mars 1546, ils sont déclarés exempts du droit de buche, & le Fermier est appelé le Fermier de l’Imposition de la buche en la ville de Paris. Voyez l’Histoire de la Chancel. Liv. II. p. 101 & 102.

On appelle réparation à la buche, en termes d’eaux & forêts, les jugemens portant condamnation d’amende contre ceux qui ont commis des délits dans les bois du Roi en abattant & enlevant des arbres. L’Ordonnance a fait un tarif de la réparation civile, suivant la grosseur & la nature des arbres furtivement coupés, & l’on a coutume d’appeler ces sortes de jugemens des réparations à la buche. Journal du Palais. On en juge de même pour la réparation civile entre particuliers ; mais cette réparation n’est pas estimée à la buche sur le tarif de l’Ordonnance. On l’arbitre par l’affectation & par la destination du maître, Idem T. II.

On appelle Controlleurs de la buche, en termes de Police, de petits Officiers établis sur les ports de la ville de Paris, pour veiller à ce que les bois soient de la longueur & grosseur réglées par les Ordonnances, selon leur sorte & qualité.

Buche, en termes de marine, est une espèce de flibot dont les Hollandois & les Anglois se servent pour la Pêche du hareng.

Buche, en jardinage : on appelle ainsi la tige des orangers étêtés qui nous viennent de Provence & de Genes.

☞ BUCHEN. Petite ville d’Allemagne, au Cercle Electoral du Rhin, Evêché de Mayence.

BUCHER. v. a. absolu. Abattre du bois dans les forêts ; & en faire des buches. Ligna cædere. Il n’est plus en usage.

BUCHER. s. m. Pyramide faite de bois, sur laquelle on mettoit autrefois les corps morts pour les brûler. Bustum, pyra, rogus. Didon pria sa sœur de lui faire dresser un bucher, sur lequel ensuite elle se tua. Crœsus étoit sur le bucher, quand il prononça les paroles de Solon qui le sauvèrent.

Les Romains avoient pris des Grecs la coutume de brûler les corps : cela se faisoit avec beaucoup de cérémonie. Le mort couronné de fleurs, & revêtu de ses habits les plus magnifiques, étoit posé sur le bucher : les plus proches parens l’allumoient avec des torches, en détournant le visage, pour témoigner qu’ils ne lui rendoient qu’avec répugnance ce triste & dernier espoir. Dès que le bucher étoit consumé, des femmes préposées pour recueillir les cendres, les renfermoient dans une urne, que l’on portoit dans les tombeaux. ☞ C’étoit la mere, les sœurs ou les parentes du défunt qui ramassoient ses cendres & les os. Elles étoient vêtues de noir. Les fils recueilloient les restes de leurs peres ; au défaut d’enfans, ce devoir étoit rendu par les autres parens, ou par les heritiers. Les Consuls ou les premiers Officiers des Empereurs ramassoient leurs cendres. La cérémonie finie, l’assistance crioit au défunt, Vale, vale, vale ; nos te ordine qui naturâ permiserit cuncti sequemur. Adieu, adieu, adieu. Nous te suivrons tous quand la nature l’ordonnera. On brûloit les pauvres sans tant de cérémonies dans de grands lieux enfermés, nommés ustrina. Voyez Ustrinum.

Bucher, est aussi un lieu à rez de chaussée, où l’on serre le bois dans les maisons des particuliers. Cella lignaria. Chez les Princes on l’appelle fourrière.

☞ BUCHEREST, BUCHOREST, ou BUCKEREST. Ville de la Turquie en Asie, dans la Valchie, résidence ordinaire du Hospodat de Valachie.

☞ BUCHERI. Ville d’Italie, en Sicile, dans la Province de Noto, avec titre de Principauté.

BUCHERON, ONNE. s. m. & f. Quelques-uns disent mal Boscheron. Lignator. Homme de journée qui abat du bois dans les forêts & fabrique le bois de chauffage.

BUCHETTE. s. f. Menu bois que les pauvres gens vont ramasser dans les forêts, & qui reste après qu’on a mis le bois en ouvrage, ou en fagots. surculus aridus, cremium.

☞ BUCHORN. Petite ville d’Allemagne, au Cercle de Suabe, dans l’Algow, sur le lac de constance.

BUCIOCHE. s. m. sorte de draps de Provence & de Languedoc, que les vaisseaux François portent à Alexandrie & au Caire.

☞ BUCK ou BUSK. Ville de la petite Pologne, sur la rivière de Boug, au Palatinat de Belz.

BUCKINGHAM, BUKINGAM, BOUKINGHAM, BOUQUINGHAM. ville d’Angleterre, sur la rivière d’Ouse, capitale d’une Province ou Comté à laquelle elle donne son nom.

☞ BUCKINGHAMSHIRE. Province d’Angleterre, dans l’intérieur de l’Île, au Diocèse de Lincoln.

☞ BUCKOR. Ville d’Asie, dans l’Indoustan, à l’extrémité de la Province du même nom, dont elle est capitale. Cette Province est sur le grand Fleuve de l’Inde qui la coupe en deux parties, l’une au levant, l’autre au couchant.

BUCOLE. s. m. nom de certains lieux en Egypte, & de ceux qui les habitoient. Bucolium, Bucolus, Bucolicus. Les Bucoles étoient certains quartiers de l’Egypte, nommé apparemment ainsi parce qu’on y nourrissoit beaucoup de bœufs. Les habitans à qui on donne le nom de Bucoles, ou Bucoliques, étoient tous barbares & sauvages. Tillem. Voyez S. Jérôme dans la vie de S. Hilarion. Julius Capitolinus, dans Marc Auréle, les appelle soldats, Bucolini milites, à ce que quelques-uns ont cru ; mais il n’entend par-là que les soldats de ces contrées-là.

Ce mot vient de βοῦς, bos, & κόλον, cibus. On dit βουκολέω, boves paco ; & βουκόλος, qui paît les bœufs, bouvier, bubulus.

☞ BUCOLIASME. s. m. Chanson en usage parmi les bergers ou pasteurs de l’ancienne Grece, qu’ils chantoient en conduisant le bétail aux champs.

☞ On donnoit encore ce nom à un air à danser qu’on jouoit sur la flute. Encyc.

BUCOLIQUE. adj. Ce mot veut dire Pastoral, & se dit des Poësies qui regardent les bergers & les troupeaux. Bucolicus. Poëme bucolique. Poëtes bucoliques. Moschus & Bion sont les plus agréables Poëtes bucoliques de l’antiquité. Théocrite a quelquefois le style un peu trop bucolique. Fonten. La Poësie bucolique est la plus ancienne de toutes les poësies. Id. Quelques-uns croient que ce genre de Poësie a pris naissance dans la Sicile, parmi les divertissemens des bergers. Elle fut inspirée par l’amour & l’oisiveté. On ajouta ensuite des régles à ces divertissemens champêtres, & l’on en fit un art. Le soin des troupeaux, les beautés de la nature, & les plaisirs de la vie rustique, en faisoient les plus nobles sujets. Id.

Il est des Auteurs qui attribuent l’invention de la Poësie bucolique à un Pasteur nommé Daphnis, d’autres à Bucolius fils aîné de Laomedon. Tout cela paroît fabuleux.

Bucolique. Soldat bucolique. Voyez Bucole.

Bucolique. Ce mot est aussi quelquefois s. f. auquel sens il ne se dit qu’au pluriel. Il signifie, Poëme pastoral. Bucolica. Les bucoliques de Virgile sont de certains Poëmes le plus souvent en forme de dialogue, où des bergers s’entretiennent ensemble.

Bucoliques. s. f. plur. Plusieurs hardes, menues choses, ou papiers, qu’une personne a apportées pour faire voir à quelqu’un. Je ne veux point acheter tout ce fatras, remportez toutes vos bucoliques. Dans ce sens il est du style très-familier.

Ce mot vient du grec βουκόλος, qui paît les bœufs.

BUCORNE. s. m. Terme de mythologie. Nom qu’on donne à Bacchus, parce qu’on lui met quelquefois à la main une corne de taureau, comme le symbole d’un vaisseau à boire.

☞ BUDAIS. Plaine de la Tartarie en Europe, entre la bouche du Nieper & celle du Danube, l’une de celles qui sont comprises entre le Budziack & l’Uckraine, ce qui fait que ceux qui l’habitent sont appelés tartares Budziacks. Ces tartares sont libres & ne reconnoissent ni le Kan ni le Turc.

BUD.

BUDE. Ville capitale de la Basse-Hongrie, & de tout le Royaume. Il y a des sources d’eau chaude, où l’on cuit des œufs en très-peu de temps, quoiqu’on y voie nager des poissons vivans. Elle est sur le Danube à 42 lieues de Vienne. Buda, Aquincum.

☞ BUDELICH. Petite ville d’Allemagne au Cercle Electoral du Rhin, Archevêché de Treves, sur la petite rivière de Traen.

BUE.

☞ BUDINGEN. Ville d’Allemagne dans la Weteravie, au Comté d’Isembourg, sur le Nidder.

☞ BUDOA. Ville épiscopale de Dalmatie, à dix milles d’Antivari. Elle appartient à la République de Venise.

☞ BUDZIAC. La même chose que Bessarabie. Voyez ce mot.

☞ BUECH. Nom d’une rivière de France, qui a sa source en Dauphiné, & se jette dans la Durance à Sisteron.

BUÉE. s. f. Vieux mot, qui signifioit autrefois la lesive, & dont on se sert encore dans les Provinces, où l’on appelle Buandièr, la blanchisseuse ; & Buanderie, les lieux où l’on blanchit les toiles neuves. Lixivia. Faire la buée, la lessive.

Buée, bui, ou Buie, est une mot dont se sont formés dans la suite ceux de Buandier & de Boue, & qui s’applique à tout ce qui est mouillé, humecté, détrempé. Descript. Géogr. & Hist. de la Haute-Norm. T. I, p. 159.

BUENOS-AYRES. Ville de l’Amérique méridionale, appelée aussi quelquefois Nuestra Senora de Buenos-ayres ; c’est-à-dire, Notre-Dame des bons airs, ou du bon air. Pedro de Mendoza la fit bêtir en 1535 sur la rive méridionale de la rivière de la Plate, vis-à-vis des Îles de S. Gabriël, dans la Province des Sauvages, nommés vulgairement Morocotes. Corn. Ces noms sont espagnols, mais notre langue les a adoptés dans ce nom propre. Nous ne disons que Buenos ayres, sans mettre Nuestra Senora de. Maty écrit Bonayres, mais on doute qu’il soit en usage. Cette ville est à 34° 34’ 38” de latitude méridionale. Le P. Feuillée.

BUENS. adj. m. pl. Vieux mot. Qui est accommodé à son aise.

BUER. Vieux mot. Laver, lessiver. Faire la lessive. Lixiviam sacere. Elles filent & buent, & ont la cure de tout l’Hôtel. Villon s’est servi du verbe buer. La pluie nous a bués & lavés. C’est dans la Ballade de lui & de ses compagnons pendus. Ménage, Dict. Etym. au mot Buée, lessive. Ce vieux mot est encore en usage dans quelques Provinces. A Dijon, un homme maubué, est un homme en linge sale, dont on ne blanchit le linge que rarement. La langue françoise n’a point d’adjectifs qui puissent représenter celui-là. Glossaire bourguignon au mot Maubué, où l’on dit que buer est un vieux mot qui signifie mettre à la lessive. Il y a à Paris dans le Quartier de Saint Martin une rue qui s’appelle Maubuée. Ce mot est aussi dans Nicod.

BUF.

BUFFE. s. f. Vieux mot, qui signifie, Soufflet. Alapa. On le trouve dans les Pseaumes de Marot.

Qui de buffes renverses
Mes ennemis mordans.

BUFFET. s. m. Meuble qui sert pour mettre les pots & les verres, la vaisselle & autres choses nécessaires pour le service de la table. Armarium. Autrefois c’étoit un meuble de bois orné de menues colonnes, & séparé par un plancher, au-dessous duquel se mettoient les brocs & les bouteilles, & au-dessus les verres & la vaisselle. Depuis on a mis au milieu une petite armoire pour y serrer le linge, ou le couvert d’un bourgeois ; & enfin on en a fait une grande armoire avec plusieurs tiroirs & volets, l’on enferme ce qu’on a de plus précieux, & qu’on appelle aussi cabinet. Un buffet ou cabinet d’ébène, de bois de cedre, d’écaille de tortue, &c.

On a appelé autrefois un buffet, dressoir. En la Salle où il mangeoit (le Duc Philippe de Bourgogne) étoit un buffet, ou dressoir, à quatre degrés ou pans, tout meublé de vaisselle d’or ou d’argent doré, riche sur riche, aux deux coins duquel étoient deux précieuses licornes de prix indicible. Parad. p. 853.

Buffet, maintenant se dit seulement d’une table longue où l’on met la vaisselle d’argent, les verres & les bouteilles, pour le service de la table. Supellex argentaria. Il faut aller boire au buffet ; se rincer la bouche au buffet. On étale sur les buffets non-seulement les choses nécessaires pour la table ; mais aussi tout ce qui peut servir à faire paroître la magnificence de ceux qui les ont. Pourquoi faut-il que vos buffets gémissent sous le poids de tant de vases précieux que vous étalez, & qui ne servent qu’à étaler votre vanité, & à irriter celle des autres. Flech. Les Italiens le nomment crédence ; il est placé chez eux dans le grand salon, & enfermé d’une balustrade à hauteur d’appui. Les buffets des Princes & des Cardinaux sont sous un dai d’étoffe.

Buffet, se dit aussi des Officiers ou Valets qui servent au buffet. Supellectili argentariæ præpositi. Quand on croit avoir bû trente bouteilles, le buffet en a bû la moitié.

Buffet, se dit aussi de la vaisselle d’argent qu’on met sur le buffet pour le service de la table, ou seulement par parade & par ostentation. Argentim expositum. Cet Ambassadeur a un buffet de vermeil doré qui vaut cinquante mille écus.

Buffet, se dit aussi de la menuiserie d’un jeu d’orgues, & de celle qui contient chaque jeu en particulier. Le buffet du grand jeu, qu’on appelle le grand corps. Le buffet du positif ou du petit jeu. On le dit aussi de l’orgue entiére ; c’est-à-dire, le buffet & tout ce qu’il contient, tuyaux, soufflet, clavier. Quand elle est dans des maisons particuliéres, on l’appelle cabinet. Je vien d’acheter un joli buffet d’orgues.

Buffet d’eau. C’est une demi-pyramide d’eau adossée contre un mur, ou placée dans le fond d’une niche, avec plusieurs coupes & bassins qui forment des nappes.

BUFFETER. v. a. Terme de fauconnerie, qui exprime l’action de l’oiseau, quand il donne de la tête en passant contre la tête du plus fort, par exemple contre le duc ou contre l’aigle, ou contre la tête du lièvre, quand on le fait battre aux oiseaux. Le faucon a buffeté la proie.

Buffeter. Signifie encore boire au tonneau. Apposito ad dolium ore vinum sugere. Ce qui se dit des Voituriers qui percent les tonneaux avec un forêt, & appliquent la bouche contre le tonneau pour y boire.

Buffeter, est aussi un vieux mot qui signifioit, exciter quelqu’un, le tourmenter. Vexare, exagitare, colaphos impingere, incutere. De-là vient que l’on trouve encore dans les vieilles Traductions du nouveau Testament ces paroles de S. Paul : j’avois un Ange de Satan qui me buffetoit. Ce mot est venu de ce qu’autrefois on disoit buffe pour soufflet. On disoit aussi buffier & buffoier.

BUFFETEUR. s. m. Voiturier qui boit au tonneau sur les grands chemins. L’Ordonnance enjoint aux Juges de punir ces Voituriers buffeteurs, & de les condamner aux Galères.

Tous ces mots, selon du Cange, viennent de buffetagium, qui signifioit un impôt mis sur le vin bu en taverne, par corruption de buvetage.

BUFFETIN. s. m. Juste-au-corps fait de cuir d’un jeune buffle. Thorax è bubulo corio.

BUFFLE. s. m. Animal sauvage ressemblant au bœuf, mais plus long & plus haut. Bubalus. Il a la corne fort noire, & devient furieux en voyant de l’écarlate. Son corps est fort gros, & sa peau dure. Il est du reste fort maigre. Il a le poil fort court & très-noir. Il n’en a presque point à la queue, mais il en a beaucoup sur le devant de la tête, laquelle est fort petite en comparaison du corps. Ses cornes sont fort larges, son cou fort gros, & long à proportion, sa queue fort petite, & ses cuisses grosses & courtes. Le buffle aime l’eau jusques à y demeurer long-temps couché, de manière qu’il ne fait paroître que la tête hors de l’eau ; c’est de-là que les Turcs lui ont donné le nom de bœuf, ou vache d’eau, sousighit en leur langue.

Il se trouve force buffles dans le Royaume de Congo. Ils ont la peau rouge, & les cornes noires comme de la poix. C’est une bête fort dangereuse, quand quelque blessure l’a mise en furie ; sa chair est grossière ; les Portugais la coupent en tranches, la font sécher, & en nourrissent leurs esclaves. Dapper.

Le buffle n’est point le bubalus des Anciens, puisque le bubalus est un animal d’Afrique, & fort petit en comparaison de celui-ci. Ce qui a donné occasion à l’erreur de quelques-uns est la ressemblance des noms. Martial néanmoins, ou quiconque est l’Auteur du livre de l’Amphithéâtre, ou des spectacles, se sert de ce mot, pour signifier celui de buffle. Les Allemands l’appellent buffel, d’ est venu notre mot françois & l’espagnol bufano. Il y a beaucoup de buffles en Italie & en Allemagne ; ils y servent à l’agriculture, l’on en mange la chair ; mais elle est dure & mauvaise. De la Mare.

En termes de Blâson, on appelle les ’buffles bouclés, parce qu’on les représente avec une boucle. En vieux gaulois bugle signifioit un bœuf.

Buffle, se dit aussi d’un juste-au-corps fait de la peau d’un buffle, qui est fort épaisse, & qui étant bien préparée, sert d’une arme defensive. Thorax è bubulo corio. Tous ces Gendarmes avoient de beaux buffles, des colletins de buffle. ☞ On donne le nom de buffle à la peau de cet animal quand elle a été passée à l’huile comme le Chamois. Les peaux d’Elans, de bœufs & autres animaux de la même espèce, préparées comme celles du buffle, prennent le même nom.

On dit figurément, qu’un homme est un vrai buffle ; pour dire, qu’il est un stupide ; & qu’il se laisse mener par le nez comme un buffle ; pour dire, qu’il est aisé à tromper, qu’on le mène comme on veut : parce qu’on a coutume de passer un cercle de fer, ou d’autre matière, au travers des narines de cet animal, pour le mener où l’on veut

BUFFLETIN. s. m. On le dit également, & du Buffle, quand il est encore jeune, & de la peau des jeunes buffles apprêtée & passée à l’huile.

BUFFOI. s. m. Vieux mot. Vanité, orgueil. On a dit aussi, sans buffoi ; pour dire, sans moquerie.

BUFFOIER, vieux verbe act. qui se trouve dans le petit Glossaire du P. Labbe, pour souffleter, alapare.

BUG.

BUGA. Ville de l’Anatolie, dans la haute Caramanie, près de la source du Madre.

BUGANACH. Nom d’une montagne de Languedoc. La hauteur du Buganach, au-dessus du niveau de la mer a été déterminée, par trois différentes manières, de 648 toises. Le Baromètre sur le haut du Buganach se tenoit suspendu à 23 pouces 8 lig. & un tiers, en même temps qu’il se tenoit à l’Observatoire à 27 pouces 3 lignes. Maraldi, Acad. des Sc. 1703. Mém. p. 231.

BUGARAC. Nom d’une montagne de France. Le sommet du Bugarac est à 19° 53’ 35” de longitude & 42° 41’ 17” de latitude. Cassini.

☞ BUGEN, petite ville du Japon, capitale du Royaume de ce nom, dans l’Île de Ximo.

Bugen, (Pays ou Royaume de) ou partie du Japon, dans l’Île de Ximo, ainsi nommé de sa Capitale.

BUGEY. Buguia, Bugesia. Pays de France, que l’on renferme souvent dans la Bresse propre & le Rhône, qui le sépare du Dauphiné & de la Savoye. Il confine vers le nord avec la Franche-Comté & le pays de Gex. Belley est la capitale du Bugey. Le Bugey fut cédé au Roi par le Duc de Savoye dans le Traité de Lyon, à la réserve de la partie qui est au-delà du Rhône. Samuel Guichenon, Avocat au présidial de Bourg en Bresse, a fait l’Histoire de Bresse & de Nugey, imprimée à Lyon en 1650. in-fol.

☞ BUGIE. Ville maritime d’Afrique, sur la côte de la Méditerranée, au royaume d’Alger, entre Gigery & Alger, capitale de la Province qui porte son nom. Cette Province est une contrée de la Barbarie, au royaume d’Alger, presque toute entourée de montagnes.

☞ BUGIENS. Peuple d’Afrique, au royaume de Sennar ou de Nubie, entre le Nil & la Mer rouge ; Nation errante & sans Villes.

BUGLE. s. m. Vieux mot. Bœuf. C’est de-là que vient buhler, ou beugler ; pour dire, mugir.

Bugle. s. f. Bugula, ou consolida media. Plante vulnéraire. Sa racine est fibreuse, chevelue, astringente au goût, & donne des feuilles semblables à la paquerette, ou bellis, mais plus larges, plus courtes, d’un vert luisant en dessus, dentelées sur ses bords, & comme crenelées. Du milieu de ses feuilles naissent deux sortes de tiges ; les unes sont droites & portent des fleurs, les autres sont couchées, & ne donnent que des feuilles vertes, semblables aux premières par leur figure, plus petites, & disposées par paire d’espace en espace, velues ; ces dernières tiges donnent des filamens fibreux, qui portent des nœuds d’où naissent les feuilles, & servent à multiplier l’espèce : les tiges à fleurs sont aussi garnies de quelques paires de feuilles, & terminées par un épi de fleurs en gueule, bleues, quelquefois de couleur de chair, d’autres fois cendrées, ou cannelées & verticillées. Chaque fleur est un tuyau long de trois lignes environ, évasé par un bout, & prolongé en une lèvre découpée en trois parties, la moyenne desquelles est échancrée. La place de la lèvre supérieure est ordinairement occupée par deux petites pointes. Le calice, qui est un godet de deux lignes de long, bleuâtre, velu & coupé en cinq parties, renferme dans son fond quatre petites semences presque rondes. Les fleurs de bugle sont douces au goût, é remplies dans leur fond d’une liqueur mielleuse. La bugle vient communément dans les endroits humides, dans les prés & dans les bois. Elle s’emploie dans les décoctions vulnéraires, pour les ulcères, les chûtes, les duretés du fois, & pour les rétentions d’urine.

On dit vulgairement, qui connoît la bugle & la fanicle, fait aux Chirurgiens la nicque ; pour dire, qu’en ayant la connoissance de quelques plantes vulnéraires, on pourra se passer des Chirurgiens pour la guérison des blessures.

BUGLOSE. s. f. Terme de Botanique. Buglossum. Plante qui vient ordinairement dans les jardins & dans les bonnes terres. On l’a ainsi appelée de βοῦς, bœuf, & γλῶσσα, langue, à cause de la figure de ses feuilles, ou parce qu’elles sont rudes comme la langue du bœuf. Sa racine est vivace, longue, branchue, noirâtre en dehors, blanche en dedans, & visqueuse au goût. Elle pousse plusieurs feuilles longues, étroites, terminées en pointe, charnues, d’une couleur de verd cendré également, & hérissées de poils qui la rendent rude. De leur milieu, s’éleve une ou plusieurs tiges hautes d’un pied & demi environ, rondes, épaisses de trois lignes, couvertes dans toute leur longueur d’un poil court & rude, branchues à leurs extrémités, & garnies de feuilles semblables à celles du bas, mais plus courtes, de l’aisselle desquelles partent les branches. Ses fleurs naissent aux extrémités des tiges & des branches ; elles sont le plus souvent bleues, plus rarement blanches, ou de couleur incarnat. Chaque fleur est un entonnoir à pavillon, découpé le plus souvent en cinq parties obtuses. Cette fleur est soutenue par un calice vert fendu en cinq pièces, qui renferment dans leur fond quatre semences semblables à la tête d’une vipère.

La buglose a à-peu-près les mêmes usages que la bourrache. Ses fleurs sont du nombre des fleurs cordiales. Il y a plusieurs espèces de buglose qui différent de celle-ci, qui est l’ordinaire, par leurs fleurs, ou par leurs feuilles. Dans ce nombre on y renferme une espèce d’orcanette qui a ses fleurs bleues, ou de couleur de pourpre, ses tiges couchées sur terre, ses feuilles petites & un peu âpres, & qui a ses racines couvertes d’une écorce fort rouge. Elles sont employées pour donner une belle couleur rouge aux teintures de pharmacie & aux pommades. La buglose ne se multiplie que de graine, qui est si semblable à celle de la bourrache, qu’on ne la sauroit distinguer. La Quint. P. VI, p. 279. Voyez au mot Bourrache.

BUGNE. s. f. Vieux mot, qui signifioit autrefois tumeur, élévation de chair, contusion. Tumor. On le dit encore en quelques Provinces.

BUGRANE, ou BUGRATE. s. f. Terme de Botanique. Plante qu’on appelle autrement arrête-bœuf. Voyez Arrête-Bœuf.

BUGY. Voyez Bugey.

BUGY. s. m. Nom d’une espèce de poire qui se conserve jusqu’au mois de Février & de Mars. Le bugi, à qui on donne régulièrement le surnom de bergamotte, & de bergamotte de Pâque, à cause que dans sa couleur verte & dans sa grosseur il a quelque air de la bonne bergamotte d’Automne, étant pourtant beaucoup moins plat du côté de l’œil, & un peu plus long du côté de la queue ; le bugi, dis-je, est une poire tiquetée de petits points gris, qui jaunit un peu dans sa maturité, & dont la chair participe en même temps du ferme & du tendre, & est presque cassante, quelquefois pâteuse & farineuse, ce qui arrive quand on la laisse trop mûrir, ou qu’elle est venue dans un fond trop humide ; son eau, qui est assez abondante, a un je ne sais quoi d’aigrelet, dont un peu de sucre est le remède. Elle ne mûrit que dans le Carême. La Quint.

BUH.

BUHOR. s. m. M. Du Cange croit que ce mot vient de behours, qui veut dire joûtes, parce que ceux qui payoient le droit de buhor, avoient permission de faire des behours ou joûtes.

BUHOT. s. m. Nom qu’on donne en Picardie, sur-tout dans les manufactures d’Amiens, à ce qu’on appelle communément Espouille, qui est un petit canon, ou tuyau fait de roseau, en manière de petite bobine sans bords, qui se met dans la poche de la navette, & sur lequel buhot on devide une portion du fil destiné à former la trame d’une étoffe.

Ce terme est aussi en usage à Abbeville, pour signifier une partie de la chaîne dont les étoffes sont composées.

BUHOTS. s. m. pl. Terme de Plumassier. Ce sont des plumes d’oie peintes, qui servent d’étalage & de montre sur les boutiques des Plumassiers.

BUI.

BUJALEUF. s. m. C’est le nom qu’on donne en Angoumois à la poire de virgoulé. La Quint. Voyez Virgoulé.

BUIES. s. m. & pl. Boii. C’est, selon M. de Valois, le nom qu’on donne aujourd’hui aux peuples qui habitent en Gascogne le pays des anciens Boiens. Voyez Boien.

BUIRE, ou BUYE. s. f. Espèce de broc d’argent, ou d’étain, pour mettre des liqueurs. Hydria, urceus.

☞ BUIS. s. m. On disoit autrefois bouis ; & ce mot s’est conservé dans quelques phrases proverbiales. On s’en sert encore pour exprimer un instrument de Cordonnier. Voyez Bouis.

Buis, (le) Buxum ou buxus, est un arbre de moyenne grandeur, & qui est toujours couvert de feuilles. Sa racine est ligneuse, noueuse, fort dure & bien veinée ; c’est pourquoi on la recherche pour les ouvrages du tour. Elle donne quelques jets de différentes grosseur & hauteur suivant leur âge, branchus & couverts d’une écorce raboteuse, blanchâtre & très-amère. Le bois en est très-dur, sans moëlle, d’une couleur tirant sur le jaune & fort pesant. Ses branches sont garnies de feuilles opposées près-à-près, portées par des queues assez courtes ; elles sont vertes, oblongues, séches, fermes, d’une odeur & d’un goût assez désagréables. De leurs aisselles naissent des bouquets de fleurs, dont les unes sont stériles & les autres fertiles ; les stériles sont composées de trois à quatre étamines à sommets jaunes qui naissent des échancrures d’une rosette coupée en quatre quartiers, & soutenues par un calice à trois ou quatre petites feuilles d’un jaune tirant sur le vert. Les fleurs fertiles n’ont point d’étamines & poussent de leur centre un fruit qui ressemble en quelque manière à une marmite renversée, verdâtre, gros comme une petite noisette, & divisé en trois loges, dans chacune desquelles il y a une capsule cartilagineuse, qui par sa contraction pousse ordinairement avec violence ses semences noirâtres & luisantes. Les feuilles du buis sont quelquefois panachées de jaune ou de blanc.

Il y a une espèce de buis qui ne s’éleve jamais plus haut d’un pied ou deux : ses feuilles sont plus arrondies que celles du grand buis : comme on se sert de cette espèce pour les bordures des parterres, on l’a nommé ’buis à parterre. Le buis ordinaire s’éleve dans les jardins, & on le taille en pyramide ou en boule. ☞ On en fait aussi des palissades, des allées, des labyrinthes. Le buis se trouve communément aux environs de Lyon, du côté de Genève, de Nantua, de S. Claude, & au pied des montagnes du Dauphiné. On a cru que le bois de buis & sa rapure étoient aussi bons que le gayac pour les tisanes dessiccatives. On recommande l’huile de buis pour les maux de dents. On dit couleur de buis, d’une couleur jaune qui approche de celle du bois de buis.

Ce mot buis vient du latin buxus, d’où s’est fait d’abord bux, ensuite buix, & enfin buis, ou bouis, en prononçant l’u en ou. De bouis, ou buis, se sont formé les noms de Boucey, Bussy, Poussy, Poissy, Poussey, Possey, la Bussiére, Busserole, Bouquesolle, Boussigny. Buxetum. Buxiacum, Buxaria, Buxariola, Buxaliola, Buxiviacum. Huet. Le P. Pezron prétend que buis vient de beus & box mots celtiques. Voyez Bouis.

Chez les Anciens, le buis étoit consacré à Cibèle, parce qu’on en faisoit des flûtes, comme on en fait encore. Stace, L. IX, de sa Thebaïde, p. 479, semble aussi à Pitiscus marquer qu’il étoit consacré à Bacchus ; mais il se trompe. Cum Bacchica mugit Buxus, signifie seulement les flûtes, dont on jouoit aux fêtes de Bacchus, & buxus est pris là pour flûtes, comme la matière ordinaire dont on les faisoit, & non pour un arbre consacré à Bacchus. Vossius, De Idol. L. V, C. 48, dit que le buis étoit aussi consacré à Cérès chez les Romains.

☞ Le jour des Rameaux, on porte à l’Eglise, en guise de palmes, des branches de buis bénis.

BUIS. s. m. Contrée de France dans le Dauphiné, appelée communément le Bailliage de Buis, ou les Baronnies. Bruxiensis, tractus, ou ager, Baroniæ. Voyez Baronnies.

Le Buis, Buxium, petite ville qui est un des principaux lieux du Buis, & lui donne son nom.

BUISART, ou BUSART. s. m. Oiseau de proie. Buteo. Voyez Buse.

BUISINE. s. f. Vieux mot, qui signifioit autrefois un instrument de musique. Buccina pastoritia. Quelques-uns prétendent que c’est un fifre, comme on le trouve en quelques Dictionnaires : d’autres que c’est une trompette, & le dérivent de buccina, de bucca & de cano : d’autres que c’est un hautbois, & le derivent de buis, dont il est fait. Quoi qu’il en soit, c’étoit un instrument qui faisoit beaucoup de bruit, & dont les anciens croyoient que se serviroit l’aAnge de l’Apocalypse qui annonceroit le jugement.

BUISSE. s. f. Petite branche d’arbre que le peuple nomme buchette.

Buisse. s. f. Terme de cordonnier. Billot de bois dans lequel est un creux qui sert à donner la forme aux semelles de souliers qu’on bat sur ce billot avec un marteau.

BUISSERIE. s. f. Espèce de mairrain, propre à faire des muids, & autres ouvrages de tonnellerie.

☞ BUISSON. s. m. Ce mot signifie proprement une touffe d’arbrisseau sauvages épineux. Dumus, dumetum. Buisson d’épines, de houx, de genêts. Dieu apparut à Moyse dans un buisson ardent.

Buisson, se dit encore, par opposition à forêt, d’un bois qui n’a pas assez d’étendue pour être appelée forêt : & l’on appelle boqueteau celui qui est moindre que le buisson. Silvula. Les Vocabulistes observent que le buisson ne doit pas avoir au de-là de quinze cens arpens. Il faut avouer qu’un bois de cette étendue fait un assez joli buisson.

Buisson ardent, ou Pyracanthe. Arbrisseau épineux qui porte de petites baies ou fruits d’une belle couleur de feu, d’où lui vient son nom. On le cultive par cette raison dans les jardins, & l’on en fait des palissades, ou on les laisse en boule. Plusieurs Botanistes l’appellent aubépin, & en latin axyacantha Dioscoridis. Les Rabbins disent que le buisson en feu que Moïse vit, étoit d’aubépin, d’où cet arbrisseau a pris son nom.

Buisson. Terme de Jardinier. Arbre que l’on tient bas & petit, & que les Jardiniers, par le moyen de la taille, obligent à prendre la figure qu’ils veulent. Arbor coactæ brevitatis. Voilà des buissons bien conduits. Ces buissons sont tout estropiée. Des buissons de romarin, de chévrefeuil, &c.

On le dit sur-tout des arbres fruitiers, que l’on nomme autrement arbres nains, arbres en buisson & que quelques Provinciaux appellent arbres en bouquet. Les buissons ont cinq ou six pouces de tige, & on leur donne de l’ouverture au milieu, de l’étendue sur les côtés, pour en faire des arbres d’une agréable figure. C’est ce qui les distingue des grands arbres fruitiers, qu’on appelle à plein vent. Un buisson, pour être d’une belle figure, doit être bas de tige, ouvert dans le milieu, rond dans sa circonférence, & également garni sur les côtés : de ces autres conditions la plus importante est celle qui prescrit l’ouverture du milieu ; comme le plus grand défaut est celui de la confusion de trop de bois dans ce milieu. La Quint. Resserrer un buisson qui s’évase trop. Id.

☞ A la chasse, on appelle buisson un amas de broussailles & d’arbres qui ne s’élevent point ; & l’on dit que les cerfs prennent buisson, quand ils vont choisir un lieu secret pour faire leurs têtes après qu’ils ont mis bas. On dit aussi que les cerfs & les sangliers prennent buisson, quand ils quittent la compagnie des autres ; ce qui se fait au tiers an. Battre les buissons pour faire lever le gibier.

On dit proverbialement, qu’un homme a battu les buissons, & qu’un autre a pris les oiseaux ; pour dire qu’un homme recueille le profit du travail d’un autre. On dit aussi qu’on a trouvé buisson creux, lorsqu’on n’a pas trouvé dans une affaire, ou dans un lieu, ce qu’on espéroit d’y rencontrer. Ce proverbe est figuré, & tiré de la chasse, où l’on dit qu’on a trouvé buisson creux, quand on n’a rien trouvé, ou qu’un cerf s’en est allé de l’enceinte. On dit, il n’y a si petit buisson qui ne porte ombre, pour dire que le plus pauvre peut nuire.

BUISSONNET. s. m. Diminutif. Petit buisson. Dumus.

Où pas-à-pas le long des buissonnets
Alloit cherchant les nids des Chardonnets. Marot.

BUISSONNIER, IÈRE. adj. Paresseux, qui va se cacher ou se reposer derrière un buisson, au-lieu de faire sa besogne. Segnis, ignavus, iners. Cela n’est guère en usage.

☞ Dans l’usage ordinaire, & en style de rôtisseurs, on appelle lapins buissonniers, ceux qui ont leur terrier dans quelques buissons, qui sont nourris dans quelque clos parmi les haies & les buissons, par opposition aux lapins de Garenne.

☞ Faire l’école buissonnière, en style de collège, c’est aller se divertir au-lieu d’aller en classe.

Buissonnier, est aussi un Officier de ville, ou Garde de la navigation, qui doit donner avis aux Echevins des contraventions qui se font aux réglemens ; qui doit dresser des procès-verbaux de l’état des ponts, mouloins & pertuis, & de l’état des rivières, s’il y a aucuns orbillons, ou coursons en fond d’eau qui puisse blesser les bateaux.

☞ BUISSURES. s. f. pl. Terme de Doreur. On appelle ainsi les ordures que le feu a rassemblées sur une pièce que l’on a fait cuire, & qu’on ôte avec la gratte-boësse.

BUL.

BUL. s. m. Sceau. Sigillum. On donna le bul, c’est-à-dire, le sceau de l’Empire à Numan Couprougly. Volt. C’est-à-dire, qu’on le fit grand Visir.

☞ BULACH. Ville d’Allemagne, au cercle de Suabe, au Duché de Wurtemberg.

☞ Il y a aussi un bourg de ce nom au canton de Zurich, en Suisse.

☞ BULAGUEN. Ville d’Afrique, au Royaume de Maroc, dans la province de Duquela, sur le fleuve d’Ommirabi.

BULBE. s. f. Terme de botanique. C’est une racine oblongue ou presque ronde, composée de plusieurs peaux, ou tuniques appliquées les unes sur les autres, & emboîtées, pour ainsi dire, les unes dans les autres. Bulbus. Elle jette par sa partie inférieure quantité de fibres. Les racines de l’oignon commun, du narcisse, de la jacinte, &c. sont appelées des bulbes. On donne quelquefois ce même nom à des racines tubéreuses, composées d’une substance solide & continue, quoiqu’elles n’aient point de peaux appliquées les unes sur les autres. Ainsi les racines du safran & du colchique sont appelées bulbeuses. Voyez Oignon, Racine.

Bulbe, se dit aussi de plusieurs plantes, dont quelques-unes sont des espèces d’ornithogalum. Celle qu’on appelle bulbus eriophoris orientalis a beaucoup de feuilles longues, presque semblables à celle de la jacinte ; mais moins succulentes, plus dures, vertes & de mauvais gout. Ses fleurs sont composées de six petites feuilles disposées en rond, sans odeur, de couleur bleue. Sa racine est grosse, bulbeuse, blanche & cotonnée. Il y a une espèce de bulbe, qu’on nomme bulbe sauvage, qui a les feuilles comme les porreaux, mais en petit nombre, car elle n’en a qu’une ou deux. Ses fleurs sont jaunes, composées de six petites feuilles, & disposées aussi en rond. Il y a plusieurs autres sortes de bulbes.

Bulbe. M. Winslow, dans son anatomie, fait ce nom masculin. Le bulbe de l’urétère, tissu spongieux qui n’entoure pas d’abord le canal de l’urétère. Il forme auparavant un corps oblong en manière de poire ou d’oignon ; qui ne s’attache qu’à la face intérieure de la convexité du canal, & un peu après se fend de côté & d’autre, & l’embrasse tout autour. On appelle ce corps particulier le bulbe ou l’oignon de l’urétère. Winslow. Près du bulbe. Id. La cloison du bulbe. Id.

BULBEUX, EUSE. adj. Qui participe de la nature d’une bulbe, ou qui en vient. Bulbosus. Une racine est appelée bulbeuse, lorsqu’elle participe de la nature d’une bulbe. Une plante est aussi appelée bulbeuse, lorsqu’elle vient d’une racine bulbeuse.

BULBOCASTANUM. s. m. La racine de cette plante est un tubercule gros comme une grosse noix, charnu, dur, & de couleur blanchâtre, jetant plusieurs fibres de sa base & de ses côtés. Les feuilles inférieures sont aîlées, partagées en plusieurs segmens, plus minces & plus petites que celles du saxifrage des prés. Ses tiges ont plus d’un pied de haut, & poussent de leur milieu une feuille ; elles soutiennent à leurs sommets des ombelles ou parasols garnis de petites fleurs blanches auxquelles succèdent deux graines menues, un peu longues & lisses. Cette plante croît aux lieux sablonneux. Voyez le Dict. de James.

BULBO-CAVERNEUX. adj. Terme d’Anatomie. Bulbo-cavernosus. Les muscles bulbo-caverneux, communément dit accélérateurs, forment d’abord un muscle penniforme par un tendon mitoyen attaché au bas du ligament inter-osseux des os pubis, & à l’union des muscles transverses avec les sphincters cutanés de l’anus. De-là ils passent largement sous le bulbe de l’urétère, & couvrent ce bulbe & l’urétère même avec une espèce d’adherence jusque vis-à-vis la naissance du ligament suspensoire, de manière que le tendon mitoyen répond à la cloison du bulbe. Ensuite les deux plans charnus se séparent & vont obliquement l’un à droite & l’autre à gauche, de derrière en devant, & de bas en haut, en embrassantes deux corps caverneux, & s’attachent l’un au côté de l’un des corps caverneux, & l’autre au côté de l’autre. Wins.

BULBONAC. s. m. Terme de botanique. Lunaria, ou viola lunaria. Plante ainsi nommée à cause que la racine de l’espèce ordinaire est noueuse & grumelée ; d’où s’éleve une tige haute de deux à trois pieds, grosse comme le petit doigt au plus, d’un vert blanchâtre, rougeâtre, quelquefois velue, branchue dès son milieu, & garnie de feuilles semblables à celles de la violette, mais plus grandes, d’un vert plus clair & plus gai, velues, & plus dentelées sur leurs bords. Ses fleurs naissent aux extrémités des tiges & des branches, & sont en croix, pareilles à celles de la Juliane & purpurines. Leur calice est de mêle lavé de pourpre ; elles n’ont pas beaucoup d’odeur : il leur succède à chacune un fruit plat, arrondi quelquefois, & quelquefois alongé, formé par le pistil qui occupe le centre de la fleur, & composé de trois peaux appliquées les unes sur les autres parallélement ; les deux extérieures couvrent la moyenne, à laquelle sont attachées de part & d’autre ses semences qui sont plates, lenticulaires & taillées en pin. C’est de cette membrane, qui est d’un blanc si luisant, ou argenté, que sont venus les noms d’herbe aux médailles, de passesatins & de lunaire, que l’on donne à cette plante. On peut manger ses racines comme celles de la raiponce ; elles ont le même gout. Toutes les plantes qui portent le nom de lunaria sont recherchées par les Chimistes. Ils ne parviendront cependant jamais à leur grand œuvre prétendu par le mêlange du règne végétal avec le minéral, puisqu’il n’y a aucune plante qui puisse changer la tissure des parties essentielles des métaux. On range parmi les lunaria quelques plantes qu’on nommoit anciennement Alvsson.

BULGAR, ou BOLGAR. Royaume de la Tartarie Moscovite. Bulgaria. Il est le long du bord oriental du Volga, ayant au nord le Royaume de Cazan, au sud celui d’Astraca, au levant le Pascatir, & les Tartares Kalmouck. Maty. On croit que les Tartares de Bulgar sont les restes des Orgases, peuples de la Scythie, qui se jeterent avec les Alains sur les terres de l’Empire. Les Tartares de Bulgar sont soumis aux Moscovites, depuis le Czar Jean Vasile qui les assujettit. Ils logent sous des tentes de peaux, dont ils forment des hordes, ou villages qu’ils transportent d’un lieu en un autre selon le besoin. Voyez Audiffret, Davity, Corneille, Maty, Baudrand.

BULGARE. s. m. & f. Bulgarus, a. Nom d’un peuple d’Europe qui habitoit dans la Mœsie inférieure, sur le bord du Danube ; mais bien des gens prétendent qu’ils étoient venus de plus loin, qu’ils étoient originairement Scythes ; que leur nom, ainsi que Volaterran l’a cru, vient de celui du Volga, des rives duquel ces peuples partirent l’an 499, & vinrent s’établir dans l’ancienne Mœsie, qu’ils enleverent aux Empereurs Romains, & à laquelle ils donnerent le nom de Bulgarie, qu’elle a toujours gardé depuis. D’autres disent que c’étoit une branche des Gétes & des Gépides. Il est néanmoins plus probable que les Bulgares sont Scythes ; qu’eux & les Turcs ont tiré leur origine du Royaume de Bulgar, ou Bolgal, dont nous avons palré ; & la preuve est, outre la ressemblance parfaite du nom ; qu’ils ont la même langue, les mêmes mœurs, & la même manière de combattre. Cela confirme l’étymologie de Volaterran. Quoi qu’il en soit, l’an 500 ils étoient établis dans la Mœsie, & ils firent cette année-là un traité de paix avec l’Empereur Anastase. Quoique Telerich leur Roi eut embrassé la foi dès 779 & Boger en 845 les Bulgares ne se firent Chrétiens qu’en 970.

Les Bulgares donnerent dans la suite dans les erreurs monstrueuses, & dans toutes les abominations des Manichéens, qu’ils répandirent même dans bien des endroits de l’Europe & jusqu’en France, où on les appela communément Albigeois, ainsi que nous l’avons dit sur ce mot. De-là vient que dans bien des Auteurs depuis le XIIe siécle. Bulgare, ou Bugare, est un nom de secte, qui signifie la même chose que Manichée, ; & que la manichéisme s’appelle l’hérésie des Bulgares. On voit en effet dans Matthieu Paris à l’an 1223 que les Bulgares avoient un Pontife qui demeuroit en Bulgarie, aux environs de la Croatie & de la Dalamatie, proche de Hongrie, & que les Algigeois vrais manichéens alloient le consulter, & recevoir ses décisions. Ce fut au IXe siécle, vers l’an 871, que les Manichéens ou Pauliciens d’Arménie envoyerent de Tibrique ou Téfrique leur capitale, des prédicateurs en Bulgarie, pour séduire ces peuples nouvellement convertis. Ils y réussirent, l’hérésie des Manichéens s’insinua & s’établit en Bulgarie, y jeta de profondes racines, & de-là s’étendit dans le reste de l’Europe.

Leurs crimes détestables firent encore que leur nom devint un nom odieux, un nom de débauche, de sorte que Bulgare, ou, comme on trouve dans quelques Auteurs, Bugare signifie un Sodomite, un Crenobatre, & un usurier, parce qu’ils se livroient à tous ces vices. Malgré tout cela les Protestans reconnoissent les Bulgares pour leurs peres, & n’ont point de honte de prouver par eux la succession prétendue de leur église. Quelques relations disent Bulgariens, mais mal ; l’usage est pour Bulgare.

BULGARIE. Pays qu’ont occupé les Bulgares, & auquel ils ont donné leur nom. Bulgaria. Ce pays étoit une partie de la Mœsie inférieure, comme nous avons dit. Aujourd’hui la Bulgarie, est une province de Turquie en Europe, qui a pour bornes au nord la Valaquie, à l’occident la Servie, au midi la Macédoine, & la Thrace en partie ; & à l’orient le Pont-EUxin & la même Thrace. Sophie est la capitale de la Bulgarie. La Bulgarie a eu ses Rois, & titre de Royaume, qui fut subjugué par les Rois de Hongrie, auxquels les Turcs l’ont enlevé.

☞ BULGOLDA, pierre qu’on trouve dans la tête d’un animal de même nom, à laquelle les Indiens attribuent les mêmes propriétés qu’au Bezoar. On la dit fort rare. Ferdin. Lopez. Hist. des Indes.

☞ BULIMIE. Voyez Boulimie.

BULITHE. s. m. Pierre que l’on trouve non-seulement dans la vésicule du fiel, mais encore dans les reins & dans la vessie du bœuf. Aristote paroît donc s’être trompé, lorsqu’il a avancé, Sect. 10 Prov. 42, que l’homme est le seul animal sujet à la pierre. Βούλιθος, de βοῦς, bœuf, & λίθος pierre. Dict. de James.

BULLAIRE, s. m. est un recueil de plusieurs bulles des Papes, ramassées d’abord en trois volumes par Cherubin : il compose aujourd’hui dix volumes.

☞ BULLE. s. f. Bulla. C’étoit autrefois un ornement des habits que l’on donnoit aux enfans de qualité. Tarquin l’ancien, suivant Pline, fut le premier qui donna une bulle d’Or à son fils, qui n’ayant encore que 14 ans, tua un ennemi dans un combat contre les Sabins. Il remarque pourtant que quelques-uns prétendent qu’avant ce tems-là Romulus en avoit donné au fils d’Hostus, le premier né des filles Sabines, après leur elevement, qui fut depuis appelé Tullus Hostilius. Cet ornement étoit ou rond, ou en forme de cœur, & on le portoit sur la poitrine. Il avoit été en usage chez les Egyptiens, & il n’y avoit chez les Romains que les fils des Magistrats Curules qui le portassent. Ils le prenoient à 14 ans, & le quittoient à 15. Quoiqu’il n’y eut que les enfans des Magistrats Curules qui eussent droit de porter la bulle d’Or, ceux qui recevoient les honneurs du triomphe prenoient aussi cet ornement. Bulla gestamen erat triumphantium, quam in triumpho præ se gerebant, dit Macrobe. Mais cette bulle étoit plus grande que celle des enfans. La grande vestale en portoit par distinction, & les Dames Romaines comme parure.

☞ On étendoit ce nom de bulle à plusieurs autres ornemens de la même figure, que l’on mettoit, ou sur les habits, ou sur les armes, ou sur les portiques : on le donnoit encore aux tables exposées en public, sur lesquelles on marquoit les jours de fête.

☞ Dans les siècles suivans on a donné le nom de bulles aux actes des Princes, qui étoient scellés d’un sceau d’or, d’argent, ou de plomb, soit à cause que ce sceau étoit semblable aux bulles anciennes que portoient les enfans, soit par allusion à ces tables exposées en public, dont nous venons de parler. Il convenoit particulièrement aux ordonnances des Princes qui concernoient le bien public, parce qu’elles étoient patentes & seulement scellées, au-lieu que les lettres qui regardoient les particuliers étoient fermées & signées.

☞ Ce nom de bulle a été long-temps propre aux édits des Princes, & a depuis passé aux concordats faits entre les Souverains, autorisés par leur sceau. C’est ainsi qu’on appelle encore l’édit donné par l’Empereur Charles IV, pour régler les droits de l’Empire, la bulle d’Or : mais dans les derniers temps ce nom est devenu particulier aux décrets solennels des Papes, que l’on nomme communément bulles, parce qu’elles ont un sceau de plomb (il étoit quelquefois anciennement d’or.)

Bulle. Expédition de lettres en Chancellerie Romaine, scellée en plomb, qui répondent aux édits, lettres-patentes, & provisions des Princes séculiers. Pontificiæ Litteræ, Pontificium Diploma, vulgò Bulla. Si les bulles sont lettres gracieuses, le plomb est pendant en lacs de soie ; & si ce sont lettres de justice, & exécutoires, le plomb est pendant à une cordelle de chanvre. Les Jubilés s’octroient par bulles. On ne sacre point les Evêques qu’ils n’aient leurs bulles. En Espagne on expédie des bulles pour toutes sortes de bénéfices. Mais en France on n’a que de simples signatures en papier, à la réserve des Evêchés, Abbayes, Dignités & Prieurés conventuels. La bulle est la troisième sorte de rescrit Apostolique, qui est le plus en usage, tant pour les affaires de justice, que pour les affaires de grace : elle est écrite sur parchemin, à la différence de la signature qui est écrite en papier. La bulle est proprement une signature étendue, & ce qu’elle contient en peu de paroles la bulle l’étend ; néanmoins elle ne doit pas être, quoiqu’étendue, plus ample que la signature, si ce n’est pour les clauses qu’on a coutume d’étendre selon le style. La bulle, en la forme qu’elle doit être expédiée, se divise en quatre parties, qui sont la narration du fait, la conception, les clauses & la date. Dans la salutation le Pape prend la qualité d’Evêque serviteur des serviteurs de Dieu. N. Episcopus servus servorum Dei. Auboux.

La bulle n’est proprement que le sceau & le plomb pendant qui donne son nom au titre, parce qu’il lui donne son autorité ; & généralement tout rescrit où il y a plomb pendant s’appelle bulle. Ce plomb représente d’un côté les têtes de S. Pierre à droite, & de S. Paul à gauche ; de l’autre côté est écrit le nom du Pape regnant, & l’en de son Pontificat. Auboux. Jean Ciampini, Référendaires des deux signatures, remarque, dans son Traité du Vice-Chancelier de l’Eglise Romaine, que les bulles sont écrites d’un caractère qui ressemble aux caractères françois, c’est-à-dire, d’un caractère rond ou gothique, & que cet usage s’établit lorsque les Papes tenoient leur siége à Avignon ; que les brefs au contraire, dont l’origine est bien après celle des bulles, sont écrits d’un caractère italique.

☞ La différence essentielle qu’il y a entre les bulles & les brefs ou autres rescrits apostoliques, est que ces derniers ne sont scellés qu’en cire, avec ce qu’on appelle l’anneau du pécheur, ou simplement signés par un Cardinal dataire, ou par un Secrétaire des brefs.

Les bénéfices dont le revenu excède vint-quatre ducats ne sont possédés que sur des provisions qui s’expédient par bulles, & non pas par simples signatures, suivant une règle de la Chancellerie. La France n’a point voulu se soumettre à cette règle, & à l’exception des bénéfices qui sont taxés dans les livres de la Chambre Apostolique, elle s’est conservée dans le droit de n’exprimer le revenu du bénéfice qu’on impétre, qu’en général, en cette manière. Cujus & illi forsan annexeorum fructus 24 ducatorum auri de camera, secundùm communem æstimationem, valorem, annuum non excedunt. Les bénéfices à l’égard desquels on est obligé de lever à Rome des bulles sont. 1°. Tous les bénéfices qui se trouvent taxés aux livres de la Chambre Apostolique, comme Evêchés, Abbayes, quelques Prieurés conventuels. 2°. Les premières dignités des Eglises Cathédrales, qui s’expriment ainsi, Dignitas post pontificalem major. 3°. Les principales dignités des Eglises Collégiales. 4°. Enfin les monastères de filles. Ce n’est pas que dans le cas où l’on demande des Bulles à Rome, les suppliques ou signatures simples ne fussent reçues en France ; mais les Officiers de la Cour de Rome sont si attentifs, qu’ils ne relâchent jamais les suppliques, que les Bulles n’aient été expédiées. Castel.

Quand le Pape est mort on n’expédie plus de Bulles, durant la vacance du siège jusqu’à l’élection du successeur ; ainsi, pour prévenir les abus qui pourroient se glisser aussi-tôt que le Pape est mort, le Vice-Chancelier de la sainte Eglise Romaine va prendre le sceau des Bulles, puis il fait rompre en présence de plusieurs personnes le nom du Pape qui vient de mourir ; il couvre d’un linge le côté om sont les têtes de S. Pierre & de S. Paul, il y met son sceau, & donne ce sceau des Bulles ainsi enveloppé au Camérier pour le garder, afin qu’on n’en puisse sceller aucunes lettres. Ordre des Rits Ecclés.

On dérive ce mot Bulle de bullare, qui signifie cacheter des lettres ; ou de bulla, qui signifie aussi ampoulle, ou vessie qui se forme sur l’eau quand l’air en veut sortir. Un vieux glossaire manuscrit cité par le P. Rosweid, p. 1019, dit Bullæ cerà sigillatæ. Bulles, c’est-à-dire, cires marqués d’un sceau, & bullare, sigillare, buller, c’est sceller. Les Grecs récens ont aussi dit βούλλα, & βουλλίνειν, & βουλονειν. Voyez le Glossaire qui est à la tête de Nicétas de l’édition du Louvre. D’autres le dérivent du grec βουλὴ, qui signifie, conseil, parce qu’il faut délibérer avant que d’en donner les expéditions. Le P. Pezron prétend qu’il est tiré du Celte buill, & bul, qui signifie une boule, une bouteilles ronde qui se forme sur l’eau ; mais où a-t-il trouvé que buil, ou bul, fut un mot celtique qui eût ce sens ?

La Bulle in Cœna Domini, est une Bulle qu’on lit tous les ans le Jeudi-Saint à Rome en présence du Pape, & qui contient plusieurs excommunications contre les Hérétiques, les désobéissans au S. Siège, ceux qui troublent, ou qui veulent restreindre la Juridiction Ecclésiastique, & plusieurs cas réservés. On la trouve dans la Pratique Bénéficiaire de Rebuffe. Elle n’est pas reçue en France. Le Concile de Tours, en 1510 déclara cette Bulle insoutenable, en ce qui concerne les droits du Roi & les libertés de l’Eglise Gallicane. En 1580 quelques Evêques, pendant le temps des vacations, tâcherent de faire recevoir dans leurs Diocèses la Bulle in Cœnâ Domini, laquelle excommunie entre-autres les Magistrats, les Conseillers & Procureurs-Généraux, qui maintiennent la juridiction des Princes, contre celle des Ecclésiastiques. Le Procureur-Général s’en étant plaint, le Parlement ordonna que tous les Archevêques & Evêques qui auroient reçu cette Bulle, & ne l’auroient pas publiée, eussent à envoyer à la Cour ; que ceux qui l’auroient fait publier fussent ajournés, & cependant leur revenu saisi ; & que quiconque s’opposeroit à cet arrêt, fut réputé rébelle & criminel de lèze-majesté.

Fulminer des Bulles, c’est en faire la publication ou vérification par l’un des trois Commissaires auxquels elles sont adressées, soit qu’il soit Evêque, soit qu’il soit Official. On s’oppose quelquefois à la publication des Bulles, ou des Rescrits du Pape. Mais quand il s’y trouve de l’abus, l’on a pour lui le respect de n’appeler pas directement de la concession de la Bulle ; on interjette simplement appel comme d’abus de l’exécution ou fulmination de la Bulle. C’est un expédient pour ne point choquer le Pape, en ne se plaignant que de la procédure, & de la partie qui a obtenu la Bulle. Cependant il y a des cas importans, dans lesquels on appeleroit sans détout comme d’abus de la Bulle du Pape ; par exemple s’il prononçoit l’excommunication contre la personne du Roi ; s’il entreprenoit sur le temporel du Royaume ; s’il disposoit des bénéfices dont la nomination appartient au Roi par le Concordat, &c. Voyez le Traité de l’abus par Fevret.

Les Bulles qui viennent de Rome en France sont limitées & modérées selon les usages du Royaume, avant que de les enregistrer. On n’y reçoit aucunes, qu’après avoir bien examiné si elles ne contiennent rien qui soit contraire aux libertés de l’Eglise Gallicane. Il suffit en France que ces mots, proprio motu, c’est-à-dire, de notre propre mouvement, se trouvent dans une Bulle, pour la rejeter toute entière. Les Espagnols ne reçoivent point non plus aveuglément les Bulles des Papes. Elles sont examinées dans le Conseil du Roi ; & si l’on trouve qu’il y ait des raisons pour ne les pas mettre en exécution, l’on en donne avis au S. Pere par une Supplique ; & par ce moyen ces Bulles demeurent sans effet. Cette manière d’agir avec Rome est établie dans la plupart des Etats & des Royaumes. On en trouve plusieurs exemples dans un livre imprimé à Liége, qui a pour titre, Jus Belgarum circa Bullarum Pontificialium receptionem, c’est-à-dire, le droit des Flamans à l’égard de la réception des Bulles du Pape.

Les Bollandistes ont fait plusieurs remarques