Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 2/541-550

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Fascicules du tome 2
pages 531 à 540

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 2, pages 541 à 550

pages 551 à 560


☞ CHILLY, Village de l’Île de France, sur le chemin d’Orléans, près de Lonjumeau.

CHILMINAR ou CHEMINAR, ou, comme prononcent les voyageurs, TECHELMINAR, terme de Relation, est le plus beau morceau d’Architecture qui nous reste de l’antiquité. Ce sont les ruines de ce fameux Palais de Persepolis, auquel Alexandre, pris de vin, mit le feu, par complaisance pour la Courtisane Thaïs. Il y en a une description exacte dans l’Ambassade de Dom Garcias de Silva Figueroa, & une autre dans Piétro della Vale. Voici en abrégé ce que c’est que Chilminar. On voit les restes de près de quatre-vingt colonnes dont les fragmens ont au moins six piés de haut ; mais il n’y en a que dix-neuf qu’on puisse dire entières, avec une autre toute seule éloignée des autres d’environ cent cinquante pas. Une roche de marbre noir fort dur servoit de fondement à cet édifice. Quatre-vingt-quinze marches portent au premier plan du Palais elles sont taillées dans le roc. L’entrée du Palais, a environ vingt piés de large ; d’un côté est la figure d’un éléphant, & de l’autre celle d’un Rhinocéros haut de trente piés, & tous deux d’un marbre luisant. Proche ces animaux, il y a deux colonnes, & pas loin de là la figure d’un Pégase. Après avoir passé cette entrée, on rencontre quantité de fragmens de colonnes de marbre blanc, dont les reste font voir la magnificence de l’ouvrage. Les moindres de ces colonnes ont quinze coudées de haut, les plus grandes en ont dix-huit : elles ont quarante cannelures larges chacune de trois grands pouces, d’où l’on peut juger de toute leur grosseur, & des autres proportions. Assez proche de l’entrée, on voit une inscription gravée sur un carreau de marbre noir, uni comme une glace ; elle a environ douze lignes, les lettres sont d’une figure extraordinaire, elles ressemblent à des triangles, ou à des pyramides. Ces restes précieux de l’antiquité, où les oiseaux font aujourd’hui leur nid, sont si beaux & si magnifiques, qu’ils attirent l’admiration de tous ceux qui les voient. Antiquités de Persepolis. Il y a encore beaucoup d’autres inscriptions en caractères tous différens de ceux qui sont formés en triangles ; quelques-uns approchent des caractères hébreux, chaldaïques ou syriaques ; d’autres ressemblent aux caractères arabes ou persans ; d’autres enfn sont grecs. Voyez les Transactions Philosophiques, les voyages du Chevalier Chardin, & le livre intitulé Les beautés de la Perse. M. Hyde, qui a expliqué l’inscription qui est en grec, en suppléant quelques mots qui sont effacés, dit que ces inscriptions sont gravées avec beaucoup de négligence, & peut-être par quelques soldats ; ou si elles l’ont été par un Graveur, il croit qu’il étoit de Palmyre, & qu’ainsi les inscriptions de Persepolis sont en langue phénicienne ; il ajoute que puisqu’elles sont à la louange d’Alexandre, elles n’ont été faites que depuis le temps où ce Conquérant a vécu.

Ce mot vient du persien Tcheleminar, c’est-à-dire, quarante tours, ou colonnes, à cause des quarante colonnes d’une grosseur prodigieuse que l’on voit parmi ces ruines.

CHILOÉ. s. f. Île de la mer du sud, dans l’Amérique méridionale. Chiloe. L’Île de Chiloé est sur la côte du Chili, & dépend de ce Royaume. Elle a cinquante lieues de long, & sept de large. Elle a la forme d’un arc, & n’est point carrée, comme les Géographes le marquoient. Sa pointe méridionale touche presque au continent, & n’est est séparées que par un détroit fort petit. La pointe septentrionale se retire plus en haute mer : le pays y est fort inégal & plein de montagnes, de forêts & de marais ; il est sujet à des froids excessifs, étant au de-là du 43e degré de latitude australe. Il y règne l’été des ouragans très-froids, & qui diffèrent peu des tempêtes d’hiver.La froideur du climat & les chaleurs de l’automne, trop foibles & trop mêlées de pluies, font que jamais les fruits n’y mûrissent. A quatre doigts en terre, on trouve par tout un sable rouge, si sec, que les semences que l’on y jette, meurent presque toutes. Cependant il y a dans les forêts des arbres fort hauts & fort gros ; mais du reste, l’Île est si stérile, que les habitans qui y sèment je ne sais quelles racines ou légumes insipides, s’estiment fort heureux, s’ils retirent le quintuple de ce qu’ils ont semé. Les Espagnols avoient bâti dans la partie septentrionale de l’Île, une ville qu’ils nommèrent de Castro ; mais les Corsaires anglois la détruisirent vers l’an 1600. Les naturels du pays ne vivoient que de ce que la mer jetoit sur les bords ; de là vient qu’ils habitoient tous sur la côte. Tout l’habit des Insulaires consistoit en une espèce de petit jupon de coquillages attachés les uns aux autres, en forme de cotte de mailles, du reste, ils sont tout nus. Quand les Espagnols y abordèrent la première fois, ils y trouvèrent quinze mille familles d’Indiens. Ils ont des pyrogues ou canots faits de trois planches liées ensemble avec une grosse corde. Ils en bouchent les fentes avec des écorces d’arbres macérées, ce qui ne peut empêcher qu’on ne courre grand risque, en s’exposant sur ces sortes de barques. Del Techo. Hist. Parag. L. III, ch. 18. Les Insulaires naturels y avoient vingt-cinq Villages. Ibid. ch. 20.

CHILONE. s. & adj. m. & f. C’est ainsi qu’on appelle ceux qui ont de grosses lèvres. Labrosus, chilo. Tous ceux de la maison d’Autriche sont chilones. Ce mot vient de Chilon, l’un des Sages de la Grèce qui les avoit ainsi.

☞ CHILONGO. Province d’Afrique, dans la basse Ethiopie. Elle s’étend depuis les frontières de celle de Majumba, jusqu’à la rivière de Quila. C’étoit autrefois un Royaume particulier. Elle est aujourd’hui tributaire du Roi de Lovango.

CHILPELAGUA. s. m. On donne ce nom à une des quatre sortes de poivre de Guinée.

CHILTERPIN. s. m. C’est une des quatre sortes de poivre de Guinée.

CHIMARIOT, OTE ou CHIMERIOT. s. m. & f. Qui est de la ville ou de la contrée de Chimère. Ceraunius, Chimeræ incola. Les Chimariots sont grecs de religion. Leur Evêque dépend de l’Archevêque de Lépante. Sûrs dans leurs montagnes inaccessibles, ils n’ont point encore payé de tribut au Turc. Ils passant pour être de grans voleurs. On dit aussi Cimariot, & c’est même le plus usité en françois. On dit que les Cimariots descendent des anciens Macédoniens.

CHIMAY. Ville du Pays-Bas dans le Hainaut, érigée en Principauté par l’Empereur Maximilien en faveur de la Maison de Croy. Cimacum, Cimiacum, quelquefois on trouve Chimacum : mais jamais Chimæum. Aujourd’hui les Princes de Chimay sont de la Maison d’Aremberg, Anne Dorothée de Croy, sœur unique & héritière de Charles Duc de Croy, Prince de Chimay, mort en 1610 ayant porté Chimay dans cette Maison par son mariage avec le Comte de Ligne.

CHIMÈRE. s. m. Terme de Mythologie. Monstre fabuleux que les Poëtes ont feint avoir la tête d’un lion, le ventre d’une chèvre, & la queue d’un serpent, & qu’on dit avoir été défait par Bellérophon, monté sur le cheval Pégase. Chimæra. Le fondement de cette fable est qu’il y a un mont en Lycie du même nom, qui est un Volcan, vomissant des flammes, dont les sommet qui est désert, n’est habité que par des lions ; le milieu où il y a de bons pâturages, est abondant en chèvres ; le pié, qui est marécageux, est plein de serpens. Ainsi, dit Ovide,

Mediis in partibus hircum,
Pectus & ora leæ, caudam serpentis habebat.

Parce que Bellérophon fut le premier qui alla habiter cette montagne, on a feint qu’il avoit tué la Chimère. Pline dit que le feu de cette montagne s’allume avec de l’eau, & qu’il ne s’éteint qu’avec de la terre ou du fumier. Quelques-uns ont dit que ce monstre avoit trois têtes, l’une de lion, l’autre de chèvre, & l’autre de dragon. On voit diverses figures imaginaires qui servent dans l’architecture gothique de gargouilles, & de corbeaux, & qui ne sont que des productions des Sculpteurs ignorans de ces temps-là.

Chimère, se dit figurément des vaines imaginations qu’on se met dans l’esprit ; des terreurs & des monstres qu’on se forge pour les combattre ; des espérances mal fondées que l’on conçoit, & généralement de tout ce qui n’est point réel & solide. Vigilantium somnia, vana & inania commenta, figmenta, deliramenta. En Philosophie on les appelle êtres de raison. Autrefois l’amour & la valeur romanesque étoient la chimère des Espagnols. S. Evr. L’antiquité est un cahos ténébreux, où l’on peut placer des chimères impunément. Jaq. Il y a de certaines chimères qu’on autorise en les combattant gravement, & qu’on ne droit entreprendre de détruire qu’en se jouant. Ab. de Villars. Les contemplatifs se paissent quelquefois de chimères stériles, & de vaines spéculations. Pourquoi sacrifier les plus agréables mouvemens du cœur à cette chimère de bienséance & d’honneur ? Vill. Une imagination échauffée par des vapeurs sombres & lugubres, se forge des chimères qui l’effraient & qui l’effarouchent. S. Evr. Les gens du monde n’estiment que ce qui flatte les sens : les biens de l’ame passent chez eux pour chimère. Nic.

En vain vous vous parez des vertus de vos pères ;
Ce ne sont à mes yeux que de vaines chimères.
Faisons plus. Livrons-nous à d’aimables chimères.
La sagesse le veut ; elles sont nécessaires.
C’est par elles qu’un bien que l’on n’obtiendroit pas,
Se laissant espérer, brille de mille appas ;
Sans elles malheureux, pleins de notre indigence,
Nous n’avons du plaisir que la seule apparence.

Nouv. choix de vers.

☞ L’existence des êtres finis est si pauvre & si bornée, que quand nous ne voyons que ce qui est, nous ne sommes jamais émus. Ce sont les chimères qui ornent les objets réels, & si l’imagination n’ajoute un charme à ce qui nous frappe, le stérile plaisir qu’on y prend, se borne à l’organe, & laisse toujours le cœur froid.

Chimère. En parlant de certaines origines fabuleuses de maison, on dit, que c’est la chimère d’une telle maison. Acad. Fr.

Chimère, est aussi un nom de lieu. Chimæra. Acroceraunia. Chimère est une ville de Turquie en Europe, sur la côte de l’Epire ou de la mer Ionienne, située sur la croupe d’un rocher escarpé de toutes parts. C’est aussi le nom d’une petite contrée, dont cette ville est capitale. Les Cartes marines de la Méditerranée faites par Berthelot, Michelot & Therin, l’appellent La Cumara. Le Cap de la Chimère, autrement de la Languette, ou la Lengua, comme parlent les mêmes Cartes, est celui qui avec le Cap d’Otrante fait l’entrée & l’endroit le plus étroit du Golfe de Venise. Les montagnes de la Chimère, Chimæræ montes, Acroceraunia juga, Ceraunii montes, entre l’Albanie & l’Epire.

CHIMÉRIQUE. adj. m. & f. Plein de chimères, d’imaginations ridicules & vaines. Esprit chimérique. On le dit aussi des choses qui n’ont d’existence que dans l’imagination, des craintes ou des espérances qui n’ont aucun fondement solide & réel. Prétention chimérique, espérance chimérique. Vanus, inanis, commentitius. Le dessein de la Monarchie universelle est un dessein chimérique. Homme, esprit chimérique. Espérance, demande, prétention chimérique.

Aux portraits que je fais, savant & savant critique,
Le seul vice est réel, le reste est chimérique. Vill.

CHIMÉRIQUEMENT. adv. D’une manière chimérique, fabuleuse visionnaire. Ficte, inaniter, fabulose. L’opinion que gens-là ont eu de leurs grandes qualités, leur a fait chercher chimériquement une origine différente de la nôtre. S. Evr.

CHIMÉRISER. v. n. Se repaître de chimères. On dit qu’il faut raffiner & chimériser sur les plaisirs. M. de Fontenelle.

CHIMIE. s. f. Art qui enseigne à séparer les différentes substances qui se trouvent dans les mixtes, savoir dans les végétaux, les minéraux & les animaux. Chimia. La Chimie est un art dont l’objet est de faire l’analyse des corps naturels, de les réunir à leurs premiers principes, d’en découvrir les propriétés cachées, & de démontrer leur harmonie intérieure, & le centre dans lequel toutes les substances corporelles concourent ; ou bien en deux mots, la Chimie est l’Anatomie des corps naturels par le moyen du feu. Ainsi l’a défini Hanneman, dans une Dissertation qu’il publia à Kiel en 1707.

Quelques Auteurs remarquent que Dioclétien, après la prise d’Alexandrie, fit chercher & brûler les Livres de Chimie que les Egyptiens avoient écrits autrefois pour avoir de l’or & de l’argent, ne voulant plus que les Egyptiens s’enrichissent par cet art, afin qu’ils n’eussent plus le moyen de se révolter. Tillem.

Ce mot vient du grec χυμὴς (chumês), c’est-à-dire, suc ; ou de χέειν (cheein), qui signifie fondre. Voyez au mot Alchimie les étymologies. Quelques Auteurs qui font Cham fils de Noé inventeur de la Chimie, tirent ce mot du nom de Cham, ils appuient leur opinion sur la signification du mot חם Cham, qui en hébreu veut dire chaleur, chaud, noir, tous mots qui ont rapport aux opérations de la Chimie ; mais, outre que l’on avance sans preuves que Cham est inventeur de la Chimie, il est visible que cette étymologie n’est pas naturelle.

Les Chimistes ont ajouté la particule arabe al, au mot de Chimie, quand ils ont voulu exprimer la plus sublime, qu’ils appellent Alchimie. On donne aussi à la Chimie, les noms de Sparigie, d’Art Hermétique, Pyrotechnie.

C’est la Chimie qui nous a donné un grand nombre de très-belles connoissances que nous avons de la nature. Jean-Joachim Bécher a expliqué les termes les plus obscures, & les principes de la Chime, dans un livre qu’il a intitulé Oedipus Chimicus. Il y a un Lexicon Chimicum, qui explique aussi les termes les plus obscurs de la Chimie, composé par Guillaume Johnson, Chimiste Anglois. Martinus Rullandus en a fait un autre sous le titre de Lexicon Alchemia. Pierre Borel a donné un recueil de tous les Auteurs qui ont écrit de la Chimie, qu’il appelle Bibliotheca Chimica. On trouve quantité d’opérations de Chimie rangées par ordre alphabétique dans un livre imprimé à Leiden en 1684, intitulé Collectanea Chimica Leidensia. Nous avons aussi plusieurs Traités françois de Chimie où les opérations sont clairement décrites. Les meilleurs sont Le Févre, Glaser, La Faveur, Charas, Lémery. Il y a dans la Bibliothèque du Duc de Bavière un Traité de Chimie sous le nom de Cléopatre, Roi de Chimie.

Il y a une autre sorte de Chimie qui consiste dans la transmutation chimérique des métaux. C’est ce qu’on appelle chercher la pierre philosophale. Voyez Alchimie. C’est le nom que l’on donne plus communément à cette prétendue science.

CHIMIQUE. adj. m. & f. Qui appartient à la Chimie. Chimicus. Les remèdes Chimiques ne sont nullement dangereux, quand ils sont bien préparés & donnés à propos. Les Opérateurs s’appellent Médecins Chimiques & Spagiriques.

CHIMISTE. s. m. Celui qui fait la Chimie, qui fait les opérations de Chimie, ou qui a écrit de la Chimie. Chimicus, Chimiæ peritus. Leur peuple fait un grand mépris des Chimistes, parce qu’il n’en juge que sur le pié de certains ignorans, gueux & affronteurs, qui disent qu’ils ont trouvé la pierre philosophale. C’est la même chose que s’il jugeoient des Astronômes par les faiseurs d’Almanachs, des Poëtes & des Musiciens par les Chanteurs du Pont-neuf : au lieu qu’on doit à la Chimie l’invention des choses les plus nécessaires à la vie, comme la préparation des métaux & de la plûpart des remèdes.

☞ Il faut pourtant convenir que la Chimie, malgré toutes les découvertes, est encore bien éloignée de la perfection, & qu’il est même impossible d’arriver à ce point là. Dans la décomposition, le feu change souvent les principes des choses : les végétaux par l’analyse donnent des résultats presque semblables, puisque les plantes les plus salutaires rendent à peu-près les mêmes principes que les plus vénimeuses. On sait d’ailleurs que le feu ne fait rien sur plusieurs espèces de pierres, de terres & de sables. Beaucoup de minéraux ne peuvent être analisés par cet élément, qui emporte & subtilise plutôt leurs corpuscules, qu’il ne les divise en leurs principes. Tels sont le mercure & le souffre, quand on ne les brûle pas à l’air libre. Il n’est pas moins difficile de détruire le gluten de certaines pierres, & les gangues sauvages sont indestructibles. Oryct.

☞ CHIN. Ville de la Chine dans la Province de Honan, au département de Caufung, par les 34d 48’ de lat.

☞ Il y a un fameux lac de même nom dans la Province de Junnan, à la place duquel il y avoit autrefois une grande ville qui fut abymée par un tremblement de terre.

CHINAGE ou CHEMAGE. Terme de Coutumes. Droit qui se paye à raison des charrettes qui passent dans les bois. Chinargium.

☞ CHINEA. Grande & agréable vallée, dans le Diocèse de Lima au Pérou, assez près de celle de Lunaguana.

☞ CHINCHEN. Ville de la Chine dans la Province de Huquang, sur les frontières de celle de Quanton.

☞ CHINCHIAN ou CHINKIANG. Ville de la Chine, cinquième métropole de la Province de Junnan, son département comprend vinq villes : sous le 24e degré 19’ de latitude, elle est de 14d 4’ plus occidentale que Peking.

Chinchian ou Chinkiang. Ville de la Chine, sicième métropole de la Province de Kianguan ou Nanquin, sous le 32d 49’ & de 2d 28’ plus orientale que Peking.

CHINCHILLA. s. m. Petit animal qui se trouve dans le Pérou. On estime fort son poil, qui est fin & poli. Il est de la grosseur d’un écureuil.

☞ CHINCHINTALAS. Province de la Tartarie entre celles de Camul & de Suchur. On trouve dans une montagne de cette Province un minéral singulier, qu’on appelle Salamandre, & dont on fait du linge qui se conserve dans le feu, comme le lézard appelé salamandre, suivant l’opinion mal fondée de quelques Naturalistes. Voyez Salamandre.

CHINE. Grand Royaume de l’Asie, qui occupe la région la plus orientale de notre continent. Sina, Sinarum regio, China. La Chine, selon le P. Le Comte, dans ses nouveaux Mémoires, T. I, p. 36, s’étend du Sud au Nord depuis le 23e degré jusqu’au 4e. C’est 18 degrés, qui font 450 lieues communes. Son étendue d’Orient en Occident n’est guère moindre. D’ailleurs la Chine est presque ronde, de sorte qu’elle a près de quatorze cens lieues de tour. Ces mesures sont justes, dit ce Pere, & fondées sur des observations exactes. Au reste, on ne comprend point dans ce que nous venons de dire plusieurs Îles de la Chine, qui seules feroient un grand Empire, ni le Leauton, qui est hors de la grande muraille. Pour la Corée, le Tunquin & Siam, ils doivent à la vérité un tribut réglé à l’Empereur, qui outre cela en nomme les Rois, ou les approuve, quand ils prennent possession de la couronne ; mais néanmoins tous ces Etats ont leur gouvernement particulier, & sont très-différens de la Chine. Abulpharage, dans sa première Dynastie, compte les Chinois parmi les six premières nations du monde. Il les appelle Sin, & dit qu’ils habitent le plus Oriental de la terre habitable, & qu’ils s’étendent depuis la ligne équinoctiale, jusqu’au dernier des sept climats vers le Septentrion ; il ajoute qu’ils surpassent toutes les autres nations dans les Arts méchaniques & la Peinture. Telle est l’idée qu’on en avoit en Orient dans le XIIIe siècle qu’Abulpharage écrivoit.

La Chine est si bien cultivée par l’industrie & le travail de ses habitans, qui ont applani toutes les campagnes, converti des montagnes mêmes en plaines, par les terrasses qu’ils t ont faites jusqu’au haut, comme en amphithéâtre, par les canaux qu’ils ont conduit dans toutes les Provinces ; qu’il n’y a presque pas un pouce de terre inutile, & que les campagnes ressemblent à des jardins. D’ailleurs, outre que la Chine produit tous nos fruits d’Europe, à la réserve des amandes, elle e a beaucoup d’autres que nous ne connoissons point en ce pays-ci. Malgré tout cela, la terre suffit à peine à la nourriture de ses habitans, tant elle est peupéle, & les peres & meres exposent tous les jours une infinité d’enfans, après qu’ils sont venus au monde, parce qu’ils ne pourroient les nourrir.

Les Provinces de la Chine sont au Nord, le Pekeli, le Xansi, le Xenzi, Xatung ou Xanton, le Honan & le Suchuen ; & au Sud le Huquang ou Huquam, le Kiangsi, celle de Nankin, le Chekiang, le Fokien, le Quantung, le Quandsi, le Queicheu & Junnan ou Yunnan. Les fleuves de la Chine les plus considérables sont le Hoangs, ou la rivière jaune, le Kiang, ou la rivière bleue, & le Canton, ou le Ta. Les villes de la Chine sont ou villes de guerre, ou villes de police. Chaque espèce de ces villes est distinguée en plusieurs ordres. Il y a plus de mille villes de guerre du premier ordre, & beaucoup plus du second & du troisième. Pour les villes du premier ordre, il y en a plusieurs plus grandes, ou aussi grandes que Pekin. Le P. Le Comte dit qu’il en a vû lui seul plus de sept ou huit. Il y en a plus de quatre-vingt du premier ordre, qui sont comme Lyon & Bourdeaux. Parmi deux cens du second ordre, il y en a plus de cent, comme Orléans ; entre douze cens du troisième, on en trouve plus de six cens aussi considérables que la Rocemme & Angoulême ; sans parler d’un nombre prodigieux de villages, qui surpassent en grandeur & en nombre d’habitans les villages de Marene & S. Jean de Luz.

L’Empereur de la Chine est absolu, & les loix lui donnent une autorité presque sans bornes. Il a deux Conseils, l’un ordinaire, composé des Colaos, qui sont les Ministres d’Etat ; l’autre extraordinaire, composé des Princes du sang. Il y a six Tribunaux souverains à Pekin ; le Lipou, pour ce qui regarde les Officiers de l’Etat, que nous nommons Mandarins, le Houpou, pour les finances ; le Lipou, pour la religion, les anciennes coutumes, les sciences, les arts, les affaires étrangères ; le Pinpou, pour la guerre ; le Himpou, pour les affaires criminelles ; le Compou, pour les ouvrages publics. Les Mandarins sont tous Docteurs. Il y en a 13647 de neuf ordres différens.

Il y a quatre principales religions à la Chine. L’ancienne qui est celle de l’Etat, & qui ne reconnoît qu’un dieu, souverain maître du ciel & de la terre, sans idoles, ni statues. L’Idolâtrie est la seconde. Elle y fut apportée par Fohe, ou Fohi, Philosophe Indien, 32 ans avant la naissance de Jesus-Christ. Il y a aussi un fort grand nombre d’Athées. Enfin, la Religion Chrétienne y a pénétré. S. Xavier dit dans la 3e Epitre du Livre II de ses Lettres, que bien des gens croient que saint Thomas y avoit prêché l’Evangile, qu’avant que les Portugais connussent les Indes, l’Eglise Grecque y envoyoit des Evêques ; & que leur tradition étoit que ce saint Apôtre y avoit converti bien du monde. Le P. Le Comte a rapporté les preuves de cette tradition, T. II, p. 196. Ce qu’il y a de certain, c’est que des Missionnaires Syriens de Mosul & de Bassora, qui suivoient les Caravanes de Samarcand, de Bochara & des autres grandes villes de la Tartarie, prénétrèrent jusques à la Chine vers l’ans 737 de J. C. & y portèrent le Christianisme. Fleury.

Dans ces derniers temps S. Xavier tâcha d’y entrer, & mourut à la porte de ce vaste Empire en 1552. Depuis le P. Roger y entra en 1581, & le P. Ricci ensuite, & après bien des peines & des travaux, ils obtinrent des Magistrats en 1584, la permission de s’y établir. La Religion y a fait de grands progrès, depuis sur tout que l’Empereur qui régnoit en 1715, par un Edit très-honorable & très-favorable à la Religion, a permis qu’on la prêchât & qu’on l’embrassât librement. En 1625, on trouva proche de Signanfou, capitale de la Province de Chensi, un monument qui contient un abrégé de la Doctrine Chrétienne, & qui marque que ces Missionnaires venoient de Judée, que l’un s’appeloit Olopouen, & l’autre I-ho ; qu’Olopouen, après bien des dangers courus sur mer & sur terre arriva à la Chine l’an 636 de J. C. que les Empereurs favorisèrent fort la Religion en dépit des Bonzes qui excitèrent de grandes persécutions : & qu’enfin ce monument fut érigé l’an 782 de J. C. Ce sont les Bonzes qui gardent ce monument dans une Pagode proche de la ville de Signanfou. Le P. Kirker rapporte & explique ce monument dans son China Illustrata. Toph. Spizelii de Re Litteraria Sinensium Commentarius.

Porcelaine de la Chine, encre de la Chine, vernis de la Chine. Voyez ces mots en leur place. Un cabinet de la Chine, du papier de la Chine. L’Empereur de la Chine. L’Empire de la Chine. Les Missionnaires & les François qui sont à la Chine, disent, aller en Chine, demeurer en Chine : mais en France nous disons, aller à la Chine, être à la Chine.

Nous avons sur la Chine, le China Illustrata du P. Kirker, l’Atlas Sinicus de Martinius, qui fait le VIe Tome du Grand Atlas de Blaeu, Spizelius De Re Litteraria Sinensium, le P. Nic. Trigault Jesuite. Regni Chinensis Descriptio, la Relation de Semedo ; le Sina & Europa de Preyelius ; & une Relation de la Chine par un Moscovite nommé Nikiposa, les Mémoires du P. Le Comte ; la nouvelle Description de la Chine par le P. Duhalde, &c.

Le nom Chine n’est point en usage à la Chine, & ce n’est point celui que les Chinois donnent à leur patrie. Ils l’appellent Chungoa ; c’est-à-dire, Royaume du milieu, & Chunque, Jardin du milieu ; parce qu’ils disent que la Chine est au milieu du monde. Les Tartares appellent la Chine Mangin, nom qui signifie Barbare. Ils lui donnent aussi le nom de Han ou Catay ; d’autres disent que le Catay ne renferme que les Provinces du Nord, & le Mangin celles du Midi. A Siam & à la Cochinchine, &c. la Chine est appelée Cin, du nom de la famille Impériale Cin, qui régnoit vers le temps de Crésus, 550 ans environ avant J. C. C’est de-là que s’est fait le nom de Chine, & celui de Sina en latin, parce que, selon la conjecture de quelques Savans, la Chine commença alors à être connue.

CHINE. s. f. Idole des Chinois. Idolum Sinicum. Les Chines ou Idoles des Chinois, sont faites en forme de pyramides ouvragées. Moréri, Edit. de 1712. Les naturels du pays craignent fort ces Chines. Id. Je ne sais si ce mot se trouve ailleurs, jusqu’ici je ne l’ai vpu dans aucun autre Auteur françois.

CHINE. s. f. Voyez Squine. Chine n’est pas françois. Il y a une fausse racine de Chine qui croît dans les Antilles. P. du T. T. I, p. 96.

☞ CHINER. v. a. Terme nouvellement inventé dans les Manufactures. Chiner une étoffe, c’est donner aux fils de la chaîne des couleurs différentes, & disposer ces couleurs sur ces fils de manière qu’elles représentent un dessein sur l’étoffe.

Chiné, ée. part. Etoffe chinée.

☞ On dit aussi chiner, s. m. de l’art de travailler ainsi les étoffes. Le chiner est une des manœuvres les plus délicates qu’on ait imaginées dans les arts. Encyc.

CHINFRENEAU. s. m. Coup qu’on reçoit à la tête, soit en se heurtant par hazard contre quelque corps, soit en se battant contre un ennemi. Illisus, offensio, offensus. Il marchoit à tâtons, & il s’est donné un vilain chinfreneau contre une porte. Il reçut en ce combat un vilain chinfreneau. Ce mot est populaire & vient apparemment de chanfrein par corruption.

☞ CHINGAN. Ville de la Chine, dixième Métropole de la Province de Quangsi, par les 24 degrés de latitude.

☞ CHINGTIEN. Ville de la Chine dont elle est la quatrième Métropole, par le 32 degré de latitude.

☞ CHINGTU. Ville de la Chine, capitale de la Province de Suchuen, sous le 30 degré 47’ de latitude.

CHINGULAIS, AISE. s. m. & f. Habitant ou originaire, naturel de l’Île de Ceïlan. Ceilanus, Ceilanensis, Chingulanus. C’est ainsi qu’il faut dire, & non pas Ceylanois. Les Chingulais sont originairement Malabares & Chinois, si l’on en croit les Auteurs Portugais : les Malabares exiloient en cette Île ceux qui avoient commis quelque crime qui méritoit l’exil. Les Chinois, maîtres de tout le commerce de l’Orient, fréquentant fort ces mers, quelques-uns de leurs vaisseaux furent portés sur les basses du détriot de Chilao, & y échouèrent. Les équipages se sauvèrent dans l’Île, & ayant trouvé le pays beau & fertile, ils s’y établirent. En peu de temps ils s’allièrent avec les Malabares exilés qu’ils y trouvèrent, & qu’on nommoit Galas. Ils se confondirent ainsi, & ne firent qu’un seul peuple, que des deux noms, Cin & Galas, l’on appela Chingalas, & puis Chingulais. Les Chingulais sont presque tous idolâtres : ils sont de deux sortes : les uns sont tout-à-fait sauvages ; on les appelle Bedda ou Waddahs : ils demeurent éloignés des habitations. Les autres sont plus civilisés. Voyez ce qu’on en a dit au mot Ceïlanois. Les Chingulaises portent ordinairement une camisole de toile de coton blanche qui leur couvre tout le corps, qui est parsemée de fleurs bleues & rouges, & qui est plus ou moins longue, selon la qualité des personnes. Les Chingulais reconnoissent plusieurs Dieux, dont il y en a un supérieur & souverain, qu’ils appellent Créateur du ciel & de la terre, & qui envoie les autres pour exécuter ses ordres : les autres Dieux sont, disent-ils, les ames des gens de bien. Ils croient l’immortalité de l’ame, la résurrection, & une autre vie, &c.

Quelques-uns disent Cingale pour Chingulais, & les appellent les Gentilhommes de l’Île de Ceïlan.

☞ CHINGYANG. Ville de la Chine, quinzième métropole de la Province de Huynand, par les 33d de lat.

☞ CHINKIANG. Nom de deux villes de la Chine, l’une dans la Province de Junnan, l’autre dans celle de Kiangnan.

☞ CHINNAN. Ville de la Chine, dans la Province de Junnan, au département de Cuhiung, par les 24d 40’ de lat.

☞ CHINNING. Ville de la Chine, troisième cité de la Province de Queicheu, à 25d de lat.

CHINOIS, OISE. s. m. & f. Sina, Sinensis. Habitant de la Chine, naturel de la Chine. Les Chinois, dit Abulpharage, surpassent toutes les autres nations par leur nombre, par la grandeur de leur Empire, & par la vaste étendue des terres qu’ils possèdent. Ils l’emportent encore sur les autres par leur habileté dans les arts méchaniques & dans la peinture. Abulpharage n’entend parler que du coloris & du vernis de la Chine ; car pour le reste, les Chinois n’entendent rien en peinture. Selon le même Auteur, les Chinois sont un des sept premiers peuples du monde. L’histoire populaire des Chinois compte plus de quarante mille ans depuis la fondation de leur Empire ; mais suivant celle dont tous les Savans conviennent, & qui est si suivie, si bien circonstanciée, établie par une tradition si constante, qu’on ne peut en douter parmi eux, sans passer pour ridicule, & comme ils s’expriment eux-mêmes, pour des hérétiques, suivant cette histoire. Il y a beaucoup plus de quatre mille ans que la Chine avoit ses Rois. Tillemont, Hist. des Emp. T. III, p. 519, prétend que les Seres qui envoyèrent des Députés & des présens à Aurélien en 173, avec plusieurs autres Orientaux, sont les Chinois.

Selon M. d’Herbelot, les Chinois ont reçu des Indiens la plus grande partie des Sciences. Confucius fut instruit dans la Philosophie par les Docteurs Indiens. Pythagore étoit plus ancien que Confucius, si on le fait naître 605 ans avant J. C. avec le Docteur Bentley, & certainement contemporain de Confucius, si on place sa naissance à l’an 567 ou 568 avant J. C. avec Dodwelle & Stanley, puisque Confucius, suivant le P. Couplet, est né l’an 551 avant J. C. Essai sur les Hieroglyph. p. 503.

Un Savant du Nord, nommé Eccard, prétend que les Chinois sont les Argipéens d’Hérodote ; qu’ils habitoient alors les montagnes, & que depuis ils sont descendus dans la plaine. Cela est difficile à accorder avec leur histoire.

CHINOIS, OISE. adj. Qui est de la Chine, qui appartient à la Chine. Sinensis. A l’orgueil près, il faut avouer que la nation Chinoise a eu de grandes qualités ; beaucoup de douceur & de politesse dans l’usage du monde, du bon sens & de l’ordre dans leurs affaires, du zèle pour le bien public ; des idées justes pour le gouvernement ; de l’esprit, médiocre à la vérité, dans les science spéculatives, mais droit & sûr dans la morale. P. Le Comte. La langue Chinoise n’a aucune analogie avec toutes celles qui ont cours dans le monde. Elle ne contient que 330 mots tous d’une syllabe, ou qu’on prononce au moins d’une manière si serrée, qu’on n’en distingue presque jamais qu’une. Le même mot prononcé avec inflexion de voix plus forte, ou plus foible, a diverses significations. Ainsi la langue Chinoise, quand on la parle exactement, est une espèce de musique, & renferme une véritable harmonie, qui en fait l’essence & le caractère particulier. Id. Ce qui touche les caractères Chinois, n’est pas moins singulier que leur langue. Ils n’ont point d’alphabet comme nous, qui contienne les élémens & comme les principes des paroles. Au lieu d’Alphabet, ils se sont servi au commencement de leur monarchie, de hiéroglyphes. Il y en a plus de 80000. Id. Théophile Spizélius a fait un Traité de la littérature Chinoise, Théoph. Spizelii, de Re litteraria Sinensium Commentarius. André Cleyer, premier Médecin de la Compagnie des Indes à Batavia, donna en 1682 à Francfort un Essai de la Médecine Chinoise en latin, Specimen Medicinæ Sinicæ, sive Opuscula Medica ad mentem Sinensium.

Il n’y a aucune lettre Chinoise qui n’ait sa signification, lorsqu’on la joint avec d’autres ; Tsai, par exemple, qui veut dire malheur, calamité, est composé de la lettre Mien, qui signifie maison, & de la lettre Ho, qui signifie feu, parce que le plus grand des malheurs est de voir sa maison en feu. Les lettres Chinoises sont dont autant d’hiéroglyphes qui forment des images, & qui expriment des pensées.

Chaque idée a sa marque distincte de l’écriture Chinoise ce qui fait qu’elle continue aujourd’hui d’être commune à différentes nations voisines de la Chine, quoiqu’elles parlent des langues différentes comme l’étoit le caractère universel de l’écriture en peinture. Les lettres Chinoises servent à désigner les choses, & non les mots. Les caractères de la Cochinchine, de Tongking, du Japon, sont les mêmes que ceux de la Chine, & signifient les mêmes choses, sans toutefois que ces peuples, en parlant, s’expriment de la même sorte. Ces caractères sont en cela comme les chiffres d’arithmétique. Plusieurs nations s’en servent ; on leur donne différens noms, mais ils signifient par-tout la même chose. L’on compte jusqu’à quatre-vingt mille de ces caractères. Cette écriture n’est qu’un hiéroglyphe abrégé & raffiné, qui dérive de la première méthode si simple de peindre les idées humaines.

Chinoise. (la) Terme de Fleuriste. C’est un œillet tricolor rare. Son blanc est de lait, tranché de gros panaches bruns comme s’ils étoient noirs, & de couleur de rose, sa fleur est large. Morin. C’est aussi une tulipe, colombin grisâtre, rouge & chamois. Id.

CHINON. Ville de France en Touraine. Chino, Chinonum, Chinonium. Chinon est sur la Vienne, à dix lieues de Tours. Quelques-uns croient que c’est le vieux Cisomagensis de Grégoire de Tours. Quelques-uns l’appellent Caino ; & c’est sur cela que Rabelais, qui étoit de Chinon, a dit que cette ville avoit été bâtie par Caïn. Voyez Du Chesne, Antiquités des villes de France, L. I, C. 120, & Valois, Not. gall.

CHINQUER. v. n. Terme populaire, qui signifie, boire par excès en choquant les verres les uns contre les autres, & en se portant des santés pour s’exciter à boire. Potare largius, pergræcari frequentioribus poculis, cyathos cyatis illidere. On connoît aux paroles & aux actions de cet homme qu’il a chinqué aujourd’hui. Ménage dérive ce mot de l’Allemand schenken, qui signifie, verser à boire, & qui vient de schink, qui signifie échanson.

CHINTAL. s. m. Sorte de poids dont les Portugais se servent à Goa. Il revient à 105 livres, poids de marc.

CHINTE-SERONGE. s. f. Toile blanche de coton, propre à être imprimée, & mise en couleur, qui se fabrique aux Indes orientales.

☞ CHINTING. Ville de la Chine, dans la Province de Peking, dont elle est la quatrième métropole 48d 40’ de lat.

☞ CHINY ou CHISNY. Petite ville des Pays-Bas, dans le Luxembourg, Chef-lieu d’un Duché démembré de l’ancien Comté d’Ardenne, vers les confins de la Lorraine, de la Champagne & du Duché de Bar.

☞ CHINYVEN. Ville de la Chine, dixième métropole de la Province d’Iunnan, à 24d 37’.

☞ CHINYVEN. Ville de la Chine, quatrième métropole de la Province de Quiecheu. Lat. 27d 34’.

CHIO. s. m. Chios, Chius. Île de l’Archipel. Il faut dire Sio. Voyez ce mot.

Terre de Chio. Espèce de terre qui vient de l’Île de Chio. C’est une espèce de terre sigillée, qui est grasse, croûteuse, blanche, cendrée. Elle est astringente, & efface les taches & les cicatrices de la peu ; mais comme elle est rare, Lémery dit qu’on lui substitue la terre sigillée.

CHIOCADAR ou CHIOHADAR. s. m. Officier du Grand-Seigneur que Vigenère appelle portemanteau. Mais il ne porte point le manteau du Prince. C’est un Azemmoglan c’est-à-dire un enfant d’honneur ou Page, qui, par tout où va le Prince, porte une valise, où il y a un habillement complet, & du linge pour changer, s’il en est besoin. Ephebus vestis mutatoriæ gerulus.

CHIONS DE MARTICLES. Voyez Marticles.

☞ CHIOURLIC, CHIOURLI ou TURZUL. Ville de la Turquie en Europe, dans la Romanie, sur une rivière du même nom, siége d’un Evêché grec, arrosée par une rivière du même nom, qui se perd dans la mer de Marmara. Son ancien nom latin est Turullus ou Tyrallos.

CHIOURME. s. f. Les galériens ou forçats, qui font mouvoir une galère à force de rames. Triremis remiges. On le dit aussi des bonovoglies qui se louent pour ramer. La chiourme est différente de l’équipage, & l’équipage ne comprend pas les forçats qui composent la chiourme. P. De Laval. Jés.

Ce mot est purement Italien, & signifie une multitude de personnes viles & de néant : il a été fait du latin turma : mais en France il est restreint à la signification des rameurs d’une galère. On a dit aussi le mot de ciurma en la basse latinité dans le même sens.

Chiourme, est aussi le lieu où les forçats sont assis pour ramer. Transtra.

☞ CHIOZZA ou CHIOGGIA. Ville d’Italie dans l’état de Venise, avec un Evêché suffragant du Patriarche de Venise, dans une petite Île, près des Lagunes.

CHIPOTER. v. n. ☞ Faire lentement, & à plusieurs reprises ce qu’on a à faire. On le dit particulièrement de ceux qui mangent peu & à petits morceaux. Esitare. En Normandie, dans le Lionnois, & en bien d’autres lieux, chipoter, veut dire, barguigner, vétiller. Il est du style familier, même populaire, dans toutes ces acceptions.

Après avoir baffré comme de vrais Goujats,
Ils mangèrent encor, si l’Auteur ne radote,
Jusqu’à leurs tables même. Ici nos savantas
Commentateurs, engeance qui chipote,
Sont à suer d’ahan pour expliquer le cas…

Du Cerc.

CHIPOTIER. s. m. Celui qui vétille, qui chicane, qui conteste sur un rien, qui chipote. Il est familier.

CHIPPAGE. s. m. Apprêt que les Tanneurs donnent à de certaines peaux. Voyez Chipper.

CHIPPÉ, ÉE. part. Basanne chippée. C’est celle qui a reçu de l’ouvrier un apprêt particulier qui la distingue des autres basannes.

CHIPPER. v. a. Terme de Tanneur. ☞ Chipper des peaux, leur donner une préparation qui consiste à les pénétrer de tan par le moyen de l’eau chaude. Voici comment il s’y prend. Après que les peaux ont été un mois ou bien six semaines dans le plain, & qu’on en a fait tomber la laine avec la chaux, on les jette dans une cuve remplie d’eau chaude, mêlée de tan, qui est une espèce de coudrement ; lorsqu’elles ont resté quelques temps dans cette cuve, on les en retire, pour les coudre tout autour avec de la menue ficelle, le côté de la chair en dedans, en manière de sacs, que l’on remplit de tan, & de l’eau de la cuve encore chaude par le moyen d’un entonnoir ; & après que l’entrée en a été fermée, on les prend par les deux bouts que l’on remue fortement, pour bien faire pénétrer le tan. On les rejette ensuite dans la cuve, d’où on les retire pour les découdre & les faire sécher à l’air.

CHIPRE. Voyez Chypre.

☞ CHIPROVAS. Petite ville de la Bulgarie, Province de Turquie en Europe, aux confins de la Servie.

☞ CHIQUE. Petit insecte fort commun dans les pays chauds de l’Amérique. C’est une espèce de Ciron, sautant comme la puce. Il s’insinue dans la chair, & occasionne de cuisantes démangeaisons. Il croît & s’étend, si on néglige de le tirer. Pour s’en garantir, l’on frotte la peau de tabac ou de quelque herbe amère, ou d’eau dans laquelle on a fait infuser des feuilles de tabac.

CHIQUE. Tasse à café de la plus petite espèce. Je te vais faire apporter du chocolat ; j’en ai déjà pris deux chiques, & j’en prendrai une troisième pour l’amour de toi. Vérités Satyriques.

☞ CHIQUE. s. m. Dans les manufactures en soie, mauvais cocon de soie où le ver est mort ou fondu, & qu’il est défendu de mêler avec les bons cocons.

CHIQUE. Petite boule de marbre ou de terre cuite, qui n’est d’usage qu’à des jeux d’enfans.

CHIQUE, pour chicane. Voyez Chic.

CHIQUENAUDE. s. f. ☞ Coup que l’on donne du doigt du milieu, lorsqu’après l’avoir plié sur le pouce, on le lache sur le nez, sur le visage, &c. Talitrum. Il lui a donné une chiquenaude sur le nez. C’est un visage à chiquenaudes. Tibère étoit si fort, qu’avec une chiquenaude, il faisoit un trou dans la tête d’un jeune homme.

Ce mot vient des Bas-Bretons, qui disent chicanuden, pour signifier la même chose. Men. Mais il oublie de remarquer que Chiquenauden signifie le chignon du cou, où il faut qu’on ait commencé à donner les chiquenaudes.

On dit proverbialement, & par exagération, pour dire, qu’on n’a point battu ni maltraité une personne, qu’on ne lui a pas seulement donné une chiquenaude.

CHIQUET. s. m. Petite partie d’un tout. Sectio. Ne sait-on pas bien qu’il ne vit qu’au jour la journée, que par emprunt, qu’à chiquet, que misérablement, & peu s’en faut que je ne dise parasitice, & aliena quadra ? Mascur.

☞ CHIQUETER. v. a. Terme de Cardeur. Déchirer la laine, la demêler en l’alongeant.

☞ CHIQUETER. Terme de Patissier. Faire des espèces d’ornemens avec un couteau sur une pièce de patisserie.

☞ CHIQUIRO. Ville de l’Amérique méridionale, dans le gouvernement de Santa Cruz.

CHIRAGRE. s. m. Prononcez chi, comme ki. Goutteux, qui a la goutte aux mains. Chiragra laborans. On le dit aussi de la maladie, & alors il est féminin. Chiragra. La chiragre affecte le carpe, ou la partie externe de la main, ou les jointures & les ligamens des doigts.

☞ Ce mot qui est tout grec n’est guère d’usage que parmi les Médecins, & en Fauconnerie.

Chiragre, en termes de Fauconnerie, est une maladie aux mains des oiseaux où il se fait quelque amas de mauvaises humeurs ☞ qui causent de petits nœuds aux jointures, & qui empêchent le libre mouvement.

Ce mot vient du grec Χεὶρ (Cheir), & ἆγρα (agra), main & capture.

☞ CHIRIBIQUOIS. Peuple de l’Amérique méridionale, près de la nouvelle Andalousie.

☞ CHIRIGUANOS. Peuple nombreux & féroce, au sud de Sainte Croix de la Sierra, & à l’orient de la ville de Chuquisaca. Il appartient à la Province de Los Charcas.

☞ CHIRISONDA. Ville de Turquie, dans la Province d’Amasie, sur la mer noire.

CHIRITE. s. f. Pierre figurée représentant la paume de la main avec des formes de doigts & des ongles de couleur blanche, & de la nature du Gyps.

☞ CHIROBALISTE. Voyez Chierobaliste.

CHIROGRAPHAIRE prononcez chi, comme ki. adj. m. & f. Terme de Palais. Chirographarius. C’est un créancier dont la dette n’est fondée que sur un billet, ou une écriture privée & non reconnue en justice, & qui par conséquent n’a point d’hypothèque, ☞ à la différence des dettes fondées sur des actes passés devant Notaires, ou reconnus en justice, ou sur quelque jugement, que l’on appelle hypothécaires. Dette chirographaire, créancier chirographaire.

☞ CHIROGRAPHE. s. m. Acte qui par sa nature demandoit d’être fait double.

Du Cange dit qu’on a appelé chirographe, une espèce de contrat dont on a parlé ci-dessus au mot de chartepartie. On écrivoit deux fois sur une même feuille de parchemin, & à contre sens, & dans l’intervalle on mettoit une colonne de lettres capitales, ou d’autres caractères, selon la fantaisie ; puis on coupoit cette colonne en deux, & chacun emportoit un côté de ce contrat, ce qui étoit un moyen sûr d’éviter les faussetés. Car quand on avoit quelque difficulté sur l’exécution, il falloit rapporter ces deux parties séparées, & en les rapprochant, voir si les lettres capitales se rapportoient. On a appelé ces actes Singraphe, où deux personnes signoient ensemble ; & cartæ indentatæ, ou partitæ. Voyez aussi Cirographe.

Ce mot vient du grec χειρ (cheir), main, & de γράφω (graphô), j’écris.

CHIROMANCE, & mieux CHIROMANCIE, & dans l’un & l’autre le chi se prononce comme ki. s. f. Chiromancia, ars divinandi ex manuum inspectione. ☞ L’art de deviner la destinée, le tempérament, les inclinations de quelqu’un par l’inspection des lignes qui se trouvent dans la paume de la main. Science vaine & absurde. Taisnerus est celui qui a le mieux écrit, & plus amplement, de la Chiromance. Il y en a aussi un Traité dans Robert Flud Anglois. Artemidore a écrit aussi de la Chiromance & des augures. M. de la Chambre a aussi fait un traité sur les principes de la Chiromance. Il prétend que par l’inspection de la main on peut connoître les inclinations des hommes, parce que les parties de la main ont rapport aux parties internes de l’homme, le cœur, le foie, &c. d’où dépendent en beaucoup de choses les inclinations des hommes. A la fin de son traité il avoue que les regles & les préceptes de la Chiromance ne sont pas bien établis, que les expériences qui les soutiennent ne sont pas bien vérifiées ; il ajoute qu’il faudroit de nouvelles observations faites avec justesse & plus d’exactitude, pour donner à la Chiromance la forme & la solidité que l’art & la science demandent. Jean de Indagine a écrit de la Chiromance, son ouvrage est traduit en françois. La chiromancie est propre à amuser & à duper la populace.

Ce mot vient du grec χεὶρ (cheir), manus, & de μαντεία (manteia), divinatio.

CHIROMANCIEN. s. Celui qui fait profession de deviner par l’inspection de la main. Chiromantiæ peritus, in Chiromantia versatus. C’est un fou ou un fripon.

☞ CHIRON. Nom d’un Centaure qui passoit pour avoir inventé la médecine, qu’il enseigna à Esculape. Achille chanté par Homère fut aussi son élève.

CHIRONIEN. adj. Epithète qu’on donne aux vieux ulcères malins qui ne peuvent se cicatriser que fort difficilement, & dont les bords sont durs, calleux, & tuméfiés. Chironium ulcus. Ils sont ainsi appelés de Chiron, ancien Médecin, qui est le premier qui les ait guéris.

☞ CHIRONOMIE. s. f. Mouvement du corps, mais sur tout des mains, par lequel les comédiens, sans le secours de la parole, désignoient aux spectateurs les êtres pensans, dieux ou hommes, soit qu’il fût question d’exciter les ris à leurs dépens, soit qu’il s’agit de les désigner en bonne part.

☞ C’étoit aussi un signe dont on usoit avec les enfans pour les avertir de prendre une posture de corps convenable.

☞ C’étoit encore un des exercices de la Gymnastique. Encyc.

Chironomie, dans Quintilien, est l’art de bien porter ses bras ; la regle des gestes, soit en parlent, soit en dansant, &c. χεὶρ (cheir), manus, νομος (nomos), lex, regula. Chironomus, maître à danser.

CHIROSCOPE, s. m. Chiroscopus. Un Auteur françois appelle chiroscopes ceux qu’on appelle communément Chiromanciens.

Ce mot vient de χεὶρ (cheir), main, & de σϰοπέω (skopeô), je considere.

CHIROTONIE. Prononcez Kirotonie, s. f. Terme de Liturgie. Imposition des mains qui se pratique en donnant les ordres.

Ce mot de Chirotonie vient de Grec χειροτονία (cheirotonia), qui veut dire, action par laquelle on étend les mains ; & parce que les Anciens dans les assemblées populaires donnoient leur suffrage en étendant la main, ils appeloient du nom de chirotonie les élections des Magistrats, les Plébiscites, les Ordonnances, &c. Cet usage se trouve établi d’abord chez les Grecs, comme il paroît par l’oraison de Démosthenes contre Néxra, & par celle d’Eschine contre Crésiphon. Il passa ensuite chez les Romains ; Cicéron en parle dans l’Oraison pour Flaccus. Les Auteurs Ecclésiastiques ont employé le mot de Chirotonie dans le même sens que les Auteurs profanes ; savoir, pour l’élection faite par le peuple, ou suffrage du peuple. On peut voir Balsamon sur le canon V. du Concile de Laodicée, & Zonaras sur le premier canon des Apôtres ; mais le nom de Chirotonie a été principalement attribué à l’imposition des mains qui se fait dans les ordinations, & il signifie l’ordination même. Saint Chrysostôme s’en sert en ce sens dans l’homélie 14. sur les Actes, & ailleurs. Philostorge, dans son Histoire Ecclésiastique, L. X. Zonaras, sur le premier canon des Apôtres, s’en servent aussi.

CHIRURGICAL, ALE, adj. Qui appartient à la Chirurgie. Chirurgicus. Opérations Chirurgicales. Les maladies Chirurgicales.

☞ CHIRURGIE, s. f. Il n’y a que la populace qui dise CHIRUGIE. Science qui apprend à connoître & à guérir les maladies extérieures du corps humain, & qui traite de toutes celles qui ont besoin, pour leur guérison, de l’opération de la main & de l’application des topiques. C’est une partie de la médecine. Chirurgia. Pour l’étimologie, voyez Chirurgien.

La Chirurgie se divise en Chirurgie spéculative, & en chirurgie pratique ; celle-ci fait effectivement, ce que celle-là apprend à faire. Toutes les opérations de Chirurgie se réduisent sous quatre espèces, dont la première rejoint ce qui a été séparé, & se nomme synthèse ; la seconde divise les parties dont l’union est contraire à la santé, & celle-là s’appelle le diérèse ; la troisième, qu’on a comprise par le mot d’exérese ; & la quatrième, qu’on appelle prothèse, ajoute ce qui manque. Dionis.

Les Règlemens de Police ordonnent qu’aucunes personnes, de quelque qualité & condition qu’elles soient, ne pourront exercer la Chirurgie dans la ville & fauxbourgs de Paris, soit en boutique, en chambre, ou autres lieux particuliers, privilégiés, ou prétendus privilégiés, pour quelque cause ou occasion que ce soit, s’ils ne sont membres de la communauté des Maîtres Chirurgiens de Paris, & reçus ou agrégés en icelle ; qu’ils feront deux années d’apprentissage, & serviront les Maîtres pendant six autres années ; que ceux qui desireront parvenir à la Maîtrise n’y seront admis qu’après avoir fait le grand chef-d’œuvre, qui sera composé d’un acte pour l’immatricule, d’une tentative, d’un premier examen, de quatre autres examens : le premier d’Ostéologie, le second d’Anatomie, le troisième des saignées, & la quatrième des Médicamens ; & enfin d’un dernier examen, & de la prestation de serment. Comme les effets de la Chirurgie sont plus évidens que ceux de la Médecine, qui sont plus incertains, on la cultiva beaucoup plutôt, & Esculape lui-même excella dans cet art. Le Cl. Le propre de la Chirurgie est de couper, cautériser, trépaner, réduire les fractures & luxations, &c. Jean Scultet a fait un beau livre où il a décrit tous les instrumens de Chirurgie, intitulé Armamentarium Chirurgicum, imprimé à Ulm in-fol. & à la Haye in-octavo : il a été traduit en françois, & imprimé à Lyon in-quarto. Ambroise Paré & Fabricius ab Aquapendente en ont aussi décrit. Depuis ce temps-là très-grand nombre d’Auteurs ont donné des traités de Chirurgie, & ont beaucoup perfectionné cet art, en ce qui regarde l’anatomie, & les opérations chirurgicales ; c’est-à-dire, ce qui regarde la théorie & la pratique. Voyez Thevenin, Diemerbrock, Dionis, Saint Hilaire, De Marques, Gelée, Fièrabas, Gourmélen, Lamy, Delaunay, Verduc, Besse, Tolet, &c. Les François ont écrit avec beaucoup de succès sur la Chirurgie.

On dit qu’Apis, Roi d’Egypte, fut l’inventeur de la Chirurgie. Esculape fit aussi un Traité des plaies & des ulcères. Ensuite on vit quantité de fameux Chirurgiens, comme Pythagore, Empédocles, Parménide, Démocrite, Chiron, Péon, Cléobruntus, qui guérit l’œil d’Antiochus. Voyez Agrippa, De Vanit. scient. cap. 85. Rochef. La Chirurgie fut cultivée avec plus de soin par Hippocrate, que par les Médecins qui l’avoient précédé : elle fut perfectionnée en Egypte par Philoxène, qui en composa plusieurs volumes Gorgias, Sostrates, Héron, les deux Apollonius, Ammonius d’Alexandrie ; & à Rome Tryphon le pere, Evelpistus & le savant Meges la firent fleurir chacun en leur temps. On a imprimé en 1714 à Paris, un Index funereus Chirurgorum Parisiensium, qui est une espèce d’histoire de la Chirurgie françoise.

CHIRURGIEN. s. m. Celui qui fait la Chirurgie, & qui en fait les opérations. Chirurgus. Un bon Chirurgien doit être excellent Anatomiste. L’Ordonnance de Blois, art. 87, dit qu’il ne sera passé aucun maître Chirurgien ès villes où il y aura Université, que les Docteurs Régens en Médecine ne l’aient approuvé.

On dit chez le Roi, le Premier Chirurgien de sa Majesté, son Chirurgien ordinaire. Les Chirurgiens servans par quartier, qui sont huit, les quatre Chirurgiens de l’Ecurie, & les quatre Chirurgiens suivans la Cour ; de même à proportion chez les Princes. Des lettres patentes du 8 Janvier 1701, portent que les Chirurgiens du Roi, ceux de la Maison & Famille Royale, les quatre Chirurgiens suivans la Cour, & les huit Chirurgiens de l’Artillerie, seront unis & agrégés à la Communauté des Chirurgiens Jurés. ☞ Aujourd’hui les Chirurgiens ne peuvent être reçus maîtres qu’ils ne soient auparavant maîtres ès arts.

On dit compagnon Chirurgien. Un Edit de 1666, enjoint à tous compagnons Chirurgiens qui travaillent en chambre, de se retirer incessamment chez les Maîtres, à peine de confiscation de leurs outils de Chirurgie, & de 100 liv. d’amende pour la première fois.

Ce mot vient du grec Χειρουργὸς (Cheirourgos), comme qui diroit, celui qui opere de la main. Ceux qui veulent ravaler les Chirurgiens disent, que ce mot traduit littéralement ne signifie autre chose que manœuvre. C’est une manière basse & puérile de ravaler un art si nécessaires aux hommes. Pour connoître la signification des mots, il ne faut pas consulter seulement l’étymologie, mais la signification que l’usage a déterminé dans certains mots ; autrement il faudroit appeler Chirurgiens, ou manœuvres, tous ceux qui travaillent de la main, les Peintres, les Sculpteurs, les Ingénieurs qui tracent un plan, les Canonniers, qui pointent un canon, &c. & pour bien connoître l’excellence des Arts, il en faut juger par l’utilité qu’on en retire.

Chirurgien de robe longue, est un Chirurgien qui a étudié en Médecine, & qui a droit de porter la robe. Vulnerum medicus ; au lieu que le Barbier Chirurgien, est un Chirurgien qui fait la barbe, & autres menues opérations de Chirurgie. On les distinguoit autrefois par les enseignes. Ceux de robe longue, avoient des boëtes, & les Barbiers, des bassins. Maintenant ils sont réunis, & ne font plus qu’une Communauté à S. Côme, sous le titre d’Académie Royale de Chirurgie.

Il y avoit autrefois à Paris deux corps de Chirurgiens, l’un étoit le Collège des Chirurgiens de robe longue, associé à l’Université & à tous ses privilèges & immunités, & l’autre les Barbiers-Chirurgiens. Ces deux corps furent réunis en l’an 1656 ; mais cette union fut cause qu’en 1660, les Chirurgiens furent exclus de l’Université, avec ordre d’effacer l’inscription qu’ils avoient fait mettre sur la porte de leur école, & qui étoit conçue en ces termes : Collegium Regium MM. DD. Chirurgorum Parisiis juratorum a Sancto Ludovico anno D. 1206. instauratum, &c.

☞ L’état de la Chirurgie a été fixé par l’Arrêt du Conseil d’Etat du 4 Juillet 1750.

Arcabuto fut le premier Chirurgien que les Romains reçurent en la République ; mais ils l’eurent bientôt en horreur, à cause qu’ils lui voyoient couper & trancher des membres, de sorte qu’ils le lapidèrent au Champ de Mars.

Chirurgien Bandagiste, Chirurgien Hernier. C’est celui qu’on appelle Faiseur de brayers. Chirurgus herniæ coercendæ. Les Chirurgiens Bandagistes sont incorporés avec les autres Chirurgiens, & sont reçus à S. Côme.

Chirurgien major, est celui qui est préposé dans les Armées, dans les villes de guerre, sur les vaisseaux du Roi, pour préparer les médicamens, panser, traiter les malades, faire les opérations, les visites, les rapports, &c. Archi-Chirurgus.

On dit communément : Jeune Chirurgien, vieux Médecin. On ajouter quelquefois & riche Apothicaire.

Chirurgien. Poisson qui se pêche dans les mers de l’Amérique. Le Chirurgien est long d’un pié ou pié & demi. Il ressemble assez à la tanche, quant à la forme, à la couleur de la chair, aux écailles & au goût. Ce qu’il a de particulier, sont deux arrêtes fort tranchantes & plates comme des lancettes qu’il a à côté des ouïes, ce qui apparemment lui a fait donner le nom de Chirurgien. Le P. Labat.

CHIRURGIQUE. adj. Qui appartient à la Chirurgie. Chirurgicus. Une opération Chirurgique.

CHISE. s. f. Espèce de poivre qui croît dans le Mexique. Dans la composition du Chocolat, il entre deux grains de chise, sur un cent de cacao. Lorsqu’on n’a pas de chise, on y met du poivre des Indes.

CHISTE ou plutôt Kiste. s. m. Voyez KISTE.

CHISTIRA. s. f. Espèce de natte de paille, qui se fabrique à la Chine.

CHITES. s. f. pl. Toiles de Coton des Indes, imprimées & peintes, extrêmement belles, dont les couleurs ne durent pas moins que les toiles mêmes, sans rien perdre de leur éclat. Il y avoit autrefois grand commerce entre Siam & Laos. Il venoit de Laos de l’Or, du Musc, du Benjoin & de la Soie ; en échange on donnoit des toiles de Chites, des Panes, &c. Abbé de Choisi.

CHITOME ou CHITOMBE. s. m. Terme de Relation. C’est le Chef de la Religion parmi les Nègres. Il est révéré de ces peuples comme Dieu lui-même. C’est le Grand-Prêtre des Idoles du Congo. P. Labat.

☞ CHITOR. Ville d’Asie, dans l’Indoustan, capitale d’une Province de même nom. Thevenot la place dans la Province de Malva.

☞ CHIT-POUR. Ville d’Asie dans l’Indoustan, dans le royaume d’Agra, fameuse par le commerce des toiles peintes qu’on appelle Chites.

☞ CHITRO. Cithrum ou Pydna. Petite ville épiscopale de Macédoine, dans le Coménolitari, sur le golfe de Salonique.

☞ CHIT-SE, s. m. Grand & bel arbre de la Chine, dont le fruit est très-estimé. La chair en est rougeâtre, la saveur aigre-douce. Il est de la grosseur de nos orangers.

CHITTIM. C’est le nom d’un fils de Javan, dont l’Ecriture parle, Gen. X. 4. C’est aussi dans l’Ecriture celui des peuples qui descendirent de ce Patriarche ; sur quoi il y a différens sentimens. Les Septantes traduisent כתים par Κιτιους, Κιτιεις, Κιτιαίους (Kitious, Kitieis, Kitiaious) ; & Josephe prétend que ce sont les Cypriots, parce qu’il y avoit dans l’Île de Chypre une ville nommée Citium. Le même Josephe dit que toutes les Îles & les lieux maritimes s’appeloient en grec χετὶμ. S. Epiphane, S. Jérôme, Eustathius d’Anthioche, le Prêtre Victor, ont suivi Josephe. L’Interprète arabe est de même sentiment. D’autres prétendent que les Chittims sont les Siotes, ou habitans de l’Ile de Sio, Chios. Olympiodore, & S. Jean Chrysostome les prennent pour une nation des Indes ; d’autres pour les peuples de Cilicie, dont une grande partie est appelée Cetis par Ptolomée, & par Basile de Séleucie, dans la vie de sainte Thecle, Liv. I. Les deux Paraphrases chaldéennes traduisent Chittim par Aczaja ou Aczia, qui ne signifie rien ; mais Bochart croit qu’il faut lire אכייא, c’est-à-dire, l’Achaïe. Plusieurs croient que les Chittims de l’Ecriture sont les Macédoniens, parce que 10. l’Auteur du premier Livre des Macchabées est de ce sentiment, C. I, v. 1. C. VIII, v. 5. 2°. Isaïe XXIII, 1. prédisant la destruction de Tyr, attribue ce malheur aux Chittims, ce que l’on interprète du siége de Tyr, par Alexandre. 3°. La Macédoine s’est appelée autrefois Macetia, comme Hesichius & Aulugelle nous l’apprennent. 4°. Il paroît par Homere, Odyss. Liv. II, que les Chittéens étoient des peuples voisins de Macédoine. Bochart préfere le sentiment de ceux qui prennent les Chittims pour les peuples d’Italie. Ses raisons sont, 1°. Que Daniel appelle Alexandre, Roi de Javan ; si les Chittims sont aussi les Macédoniens, on confondra Javan & Chittim. 2°. Que le même Prophète appelle les Romains Chittims, C. XI, v. 29 & 30. aussi-bien qu’Ezéchiel, XXVII, 6. 3°. Qu’en Italie il y avoit une ville appelée Κετία, Caïte, dont parle Denis d’Halicarnasse, Liv. VI, 6. 8. 10. Une autre nommé Ἐχετια, Echetia, & proche de Cimes un fleuve nommé Κετός, Cetus. Cocinthus est encore חק כתים, Choq Chittim, c’est-à-dire, le terme des Chittims ; 4°. Que Num. XXIV, 24. les Romains sont appelée Chittims. Enfin d’autres prétendent que ce nom se donne également dans l’Ecriture & aux Macédoniens, & aux peuples de l'Italie. Car, outre les raisons qu’on vient d’apporter pour ces deux différens peuples, ils disent que les peuples d’Italie tiroient leur origine des Macédoniens ou Citiens ; que Chittim signifie la même chose que Latium ou Latini, c’est-à-dire, Cache. Ce sentiment paroît le plus vrai. Ce que dit Bochart pour l’infirmer est foible. 1°. Javan & Chittim ne font pas plus de confusion que les Hébreux & Israëlites. 2°. Il y a plus de confusion à prendre les Chittims d’Isaïe, XXIII, 1, pour les Chutéens de Babylonie. Voyez cet Auteur, Phaleg. L. III, C. 5.

CHIVEF. s. m. Espèce de figuier qui croît dans l’Île de Zipangu, dont parle André Thévet. Ses feuilles sont rondes, de la grandeur d’un écu d’or, & d’une couleur fort verte. Son fruit est gros comme un gros melon, de couleur safranée, d’un goût très-agréable, fondant dans la bouche. Il est humectant, rafraîchissant, cordial & pectoral. Il contient des semences semblables à celles de notre concombre. Le mot de chivef, en langue syriaque, signifie un figuier.

CHIUN ou CHION. Selden écrit CIUN & CION. s. m. Nom de Divinité. Chiun étoit une Divinité des Arabes. Amos en parle, V, 26. La Vulgate l’a traduit par imago ; les Septante, & les Versions syriaques & arabes Ρεμφὰν (Remphan), & Saint Etienne de même dans les Actes des Apôtres, VII, 43. La Paraphrase chaldaïque, Aquila & Symmachus, retiennent le nom Hébreu Ciun, כיון. Vossius, De Idol. L. II, c. 23, croit que la différence vient de ce que dans l’exemplaire des Septante, le bas du כ étant effacé, le reste paroissoit comme un resch ר, ainsi ils ont lû ריון, dont ils ont fait Ρεφὰν (Rephan) & Ρεμφὰν (Remphan). Abenezra & les Rabbins disent que Ciun est Saturne, que les Perses & les Arabes appellent כואן. Vossius ne les en croit pas, parce qu’au même endroit Moloch, qui est Saturne, est distingué de Chiun. Il se persuade donc que c’est la Lune ; & si l’on veut que ce soit un Dieu, plutôt qu’une Déesse, c’est Hesperus ; sa raison est que Theodotion, & Théophilacte interprètent Cium par ἀμανροσις σϰοτισμος τύφλωσις, c’est-à-dire, obscurité ; nom qui lui paroît convenir à ces astres ; non pas qu’ils soient proprement obscurité, mais parce que ce sont les astres de l’obscurité, des ténébres, de la nuit. 2°. C’est qu’au rapport d’Herodote, les Arabes ne reconnoissoient que deux Divinités, le Soleil & Uranie, c’est-à-dire, la Lune. Selden traite de ce Dieu, De Diis Syriis. Synt. II, C 14. Le P. Kirker Jésuite croit que Chiun est une idole que quelques Hébreux impies & idolâtres adoroient ; ils donnoient, à ce qu’il croit, ce nom indifféremment à Saturne & à Hercule ; que ce mot signifie proprement image, figure, & qu’ils l’appliquoient par excellence ou par préférence à ces deux Dieux. Voyer Kirker, Œdip. Ægypt. T. I, p. 387.

Un Protestant d’Allemagne, nommé Maius, dans les Thèses qu’il a fait soutenir, & qu’il appelle Selediores, croit que כיון, Chiun n’est point un nom propre, mais un appellatif, qui vient de כין Chin, verbe hébreu, qui, aux conjugaisons Pihel & Hiphil signifie arranger, disposer, préparer. Ainsi le verbal כיון, Chiun signifie arrangement, disposition, suite de plusieurs choses rangées par ordre. Et Amos, V. 26. reproche aux Israëlites qu’ils avoient porté une suite d’idoles rangées par ordre pour représenter la milice du ciel, c’est-à-dire, les astres ou plutôt les Planètes. Mais Saint Etienne, aux Actes, après les Septante, se contente de nommer Remphan, c’est-à-dire, la première & la principale de ces idoles, & la plus élevée entre les planètes, ce sentiment est bien plausible.

CHIURE. s. f. Excrément de mouches, qu’elles jettent particulierement sur la viande, d’où se forment les vers. Muscarum excrementum. ☞ Viande couverte de chiures de mouches : on ne le dit que de l’excrément de ces animaux.

☞ CHIUSA. Petite ville de l’Etat de Venise, dans le Frioul, sur la Fella.

☞ CHIUSI. Petite ville épiscopale d’Italie en Toscane, à vingt milles de Pérouse.

☞ CHITAYE. Ville de la Natolie, à la source d’une rivière à laquelle elle donne son nom.

CHL

CHLAMYDE. s. f. Espèce de manteau des Anciens, retroussé sur l’épaule droite. La chlamyde étoit l’habit militaire des Patriciens : la toge étoit l’habit qu’ils portoient dans Rome.

☞ Il y avoit des chlamydes pour les enfans, pour les femmes, & pour les hommes. C’étoit une espèce de manteau ou casaque attachés sur la poitrine avec une boucle.

☞ CHLANIDION. Voyez HYMATION.

☞ CHLANIS, CHLANIDION ou CHLANE. Ancien habillement qui servoit à garantir du froid : les Grecs & les Romains s’en servoient.

CHLOIES. s. f. pl.Terme de Mythologie. Fêtes célébrées à Athènes en l’honneur de Cérès, à qui on immoloit un bélier. Ce nom qui a rapport à la verdure des champs, convient à cette Déesse ; de χλοὰ (chloa), herbe verte.

CHLORIS. s. f. Terme de Mythologie. C’est le nom grec de la Déesse des fleurs, & dont le nom latin, Flora, s’est formé, si l’on en croit Ovide, Liv. V des Fastes, vers. 195. Chloris. On ne dit point quels furent les pere & mere de Chloris ; mais elle fut mariée à Zéphyre, de qui elle obtint l’intendance sur toutes les fleurs.

On trouve dans la Fable deux personnes de ce nom. La première étoit fille d’Amphion & de Niobé ; elle fut femme de Nélée, & mere de Nestor. Elle fut tuée à coups de flèches, par Apollon & Diane, par ordre de Latone leur mere, à cause que Niobé avoit eu la témérité de préférer ses enfans à ceux que cette Déesse avoit eus de Jupiter. L’autre est la Déesse des fleurs, dont nous avons d’abord parlé, & qui est la même que Flore. Ovide fait mention de l’une & de l’autre dans ses Métamorphoses.

Ce mot est grec, & vient de χλωρὸς, virens, herbidus, formé de χλορὸς, qui signifie la même chose, & est dérivé de χλόα, Herba, gramen. Ainsi Chloris signifie proprement verdure.

CHLORIS oiseau, est une espèce de pinson, ou petit oiseau, gros comme une alouette, tantôt vert, tantôt jaune. Il vit de vers & de semence de moutarde ; son ramage est agréable. On fait prendre cet oiseau en bouillon, ou rôti, pour l’épilepsie. Tringillæ species.

CHLOROSIS ou CHLOROSE. s. m. Sorte de maladie, qu’on appelle autrement fièvres des filles, fièvre blanche, ou jaunisse blanche, plus communément pâles couleurs. Les filles qui en sont attaquées, ont le teint pâle, ou plutôt livide avec un certain cercle violet au dessous des yeux. Elles sont tristes & inquiètes, sans aucune cause. Leurs mois ne sont pas toujours supprimés, & ne s’arrêtent que dans le progrès de la maladie Chlorosite.

Ce mot Chlorosis signifie verdeur : il vient de χλόυ, herbe.

☞ CHMIELNICK ou KMIELNIK. Petite ville de Pologne, à l’extrémité du Palatinat de Podolie, & aux confins de celui de Braclaw.

CHO

CHOACUM. s. m. Emplâtre noire dont Celse fait mention, Lib. V, cap. 19, & qui est composée de litharge d’argent & de resine sèche, de chacune cent drachmes ; mais il faut faire bouillir auparavant la litharge d’argent dans une pinte & demie d'huile.

CHOBAR. Fleuve dont il est parlé dans l’Ecriture. C’étoit un bras de l’Euphrate. Chobar.

CHOC s. m. ☞ ou percussion. Action par laquelle un corps en mouvement, heurte un autre corps qu’il rencontre, le pousse ou tend à le pousser. Ce vaisseau peut résister au choc des vents & des vagues. On ne conçoit qu’à peine que tant de parties du corps si délicates & si déliées puissent résister si long temps au choc des corps étrangers, qui les peuvent si aisement ébranler. Quelques Philosophes modernes soutiennent que le choc, ou la percussion, n’est que la cause occasionnelle du mouvement qui est produit dans les corps choqués ; & que Dieu est la cause efficiente immédiate du mouvement & du corps qui frappe ; cette opinion n’est pas soutenable, pour les terribles conséquences qui en résultent. Borelli a fait un Traité De la force du choc des corps. Ménage tient que ce mot vient de l’espagnol choca, qui signifie joûte.

☞ On le dit aussi de la rencontre & de l’attaque de deux troupes de Gens de guerre. On a de la peine à soutenir le premier choc, le premier effort des François. Oppugnatio, impetus. L’Infanterie fut renversée au premier choc.

Choc se dit au figuré, d’une disgrace qui arrive dans la fortune, d’une attaque fâcheuse dans la santé ; il a reçu un rude choc dans sa fortune, dans sa santé.

Choc est aussi un terme de Chapelier. C’est un instrument de cuivre pour mettre la ficelle au lien du chapeau.

☞ En termes de mines, choc est synonyme à puits. Voyez ce mot.

☞ CHOCOLAT, s. m. Espèce de Tablette composée de différens ingrédiens, dont la base est la noix de cacao, de laquelle on fait une confection ou breuvage. Chocolatum. On le boit chaud. Il est tenu des Espagnols, qui l’ont apporté des Mexicains, chez lesquels ce mot de chocolat signifie simplement confection. D’autres disent que c’est un mot indien, composé de latté, qui signifie de l’eau & choce, mot fait pour exprimer le bruit avec lequel on le prépare, comme témoigne Thomas Gage. La base est le cacao, fruit d’un arbre du même nom : la vanille y entre aussi principalement pour donner de la force & du goût au chocolat. Antoine Colménéro de Lédesma, Chirurgien Espagnol, en a fait un Traité : voici comment il en fait la composition.

Sur un cent de cacao, on mêle deux grains de chise ou de poivre de Mexique, ou en sa place du poivre des Indes ; une poignée d’anis de ces fleurs qu’on appelle petites oreilles, ou dans les pays vinacaxtlides, & deux autres qu’on nomme mecachusie ; ou, au lieu de celles-ci, la poudre de six roses d’Alexandrie, appelées roses pâles, une gousse de campêge, deux drachmes de canelle, une douzaine d’amandes, & autant de noisettes d’Indes, & la quantité d’achiotte qu’il faudra pour lui donner couleur. Toutes ces plantes sont décrite par De Laët. On broie le tout, on en fait une pâte, ou conserve, avec de l’eau de fleur d’orange, qui le durcit fort ; & quand on en veut prendre, on le délaie dans de l’eau bouillante avec un moulinet.

☞ On a depuis perfectionné cette composition brute, & on l’a rendue plus agréable par l’addition du sucre, d’un peu de vanille & de quelques autres ingrédiens.

Il n’en faut pas boire durant les jours caniculaires, ni de celui qui est fait depuis un mois. Quelques Casuistes, & entr’autres le Cardinal François-Marie Brancaccio, qui en a fait un Traité particulier, ont prétendu que le chocolat pris en liqueur ne rompoit point le jeûne, quoique Stabe, Médecin Anglois, ait fait un Traité, où il soutient qu’on tire plus d’humeur nourrissante d’une once de cacao, que d’une livre de bœuf ou de mouton. Les raisons du Cardinal parurent si fortes à Calera, Médecin Espagnol qui avoit soûtenu le contraire dans son Tribunal-Médico-Magicum, qu’il abandonna son sentiment. Ce sentiment n’a point encore prévalu, au moins en France. Le cacao est si commun en la Nouvelle Espagne, qu’il consomme par an plus de douze millions de livres de sucre. Les Espagnols estiment que la dernière misère où un homme puisse être réduit, c’est de manquer de chocolat ; car c’est leur boisson ordinaire : ils ne la quittent que quand ils peuvent avoir quelqu’autre boisson qui enivre. On dit qu’il aide à la digestion, qu’il rafraîchit les estomacs trop chauds, & qu’il échauffe ceux qui sont trop froids. Chaque livre de chocolat vaut au Mexique cinquante-deux sous.

Le Cardinal de Lyon, Alphonse de Richelieu, est le premier en France qui ait usé de chocolat. Il s’en servoit pour modérer les vapeurs de sa rate, & il tenoit ce secret de quelques Religieux Espagnols qui l’apportèrent en France. Ceux qui en ont écrit, sont Thomas Gage, Voyageur Anglois, Barthélemi Marradon, qui en condamne l’usage, & Antoine Colménéro, deux Médecins Espagnols, dont René Moreau, Professeur en Médecine à Paris, a traduit & commenté les Livres. Philippe Silvestre Dufour, Marchand de Lyon, a ramassé dans son Traité du Caffé, du Thé & du chocolat, tout ce que ces Auteurs en avoient dit.

Chocolat est aussi une sorte de petite pâtisserie délicate où il entre du chocolat. Chocolatœum libum.

CHOCOLATIER. s. m. Chocolati propola. Celui qui ne vend que du chocolat. Un riche Chocolatier. A Paris, ce sont les Limonadiers qui vendent le chocolat.

CHOCOLATIÈRE. s. f. Vaisseau d’argent, ou de cuivre, ou de toute autre matière, fait en forme de coquemar, pour délayer avec un moulinet le chocolat, de le faire cuire. Vasculum coquendo chocolato.

Chocolatière. s. f. Femme qui vend du chocolat. M. Rousseau, dans sa Comédie du Caffé, avoit fait dire par le Chevalier à Dorante : Tu n’es pas riche,