Dictionnaire de l’administration française/BÂTIMENTS CIVILS

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BÂTIMENTS CIVILS. 1. On entend par bâtiments civils, les maisons, hôtels, palais et monuments autres que les bâtiments militaires, les édifices diocésains, les prisons et les monuments historiques. Nous consacrons des articles spéciaux à chacun de ces mots et ne parlons ici que du service des bâtiments civils proprement dits.

Sont compris parmi les bâtiments civils : les ministères, les écoles, musées et bibliothèques de l’État, l’observatoire, certaines églises et la plupart des monuments de Paris (colonnes Vendôme, de Juillet, monument de Henri IV, Louis XIII et Louis XIV, maréchal Ney, l’obélisque, les châteaux et palais, certains hospices, les Quinze-Vingts, Charenton, etc.), en tout au nombre de 95. On en trouve la liste complète dans l’Annuaire du ministère des travaux publics, ainsi que le nom de l’architecte qui est chargé de chaque bâtiment.

sommaire.

chap. i. organisation et attributions, 2 à 12.
chap.ii. règlement du service et comptabilité, 13 à 24


CHAP. I. — ORGANISATION ET ATTRIBUTIONS.

2. Après 1789, ce fut au ministère de l’intérieur qu’on attribua la direction des travaux des monuments et édifices publics à Paris et dans les départements. Sous l’Empire, les autres départements ministériels prirent une certaine action sur les travaux qui s’exécutaient dans leurs attributions respectives. Il fut créé, en outre, pour l’entretien des édifices dépendant de la liste civile, un service spécial sous le nom d’intendance des bâtiments de la couronne, qui a subsisté, sous différents titres, jusqu’à la révolution de février 1848, et puis de 1852 à 1870.

3. Les grands travaux d’embellissement qui, en 1811, furent exécutés à Paris, amenèrent la formation au ministère de l’intérieur d’une direction des travaux de Paris. Conservée en 1830, cette direction, après avoir appartenu au ministère de l’intérieur, passa, en 1841, dans les attributions du ministère des travaux publics, tout en restant à la disposition des autres départements ministériels pour l’examen des projets de bâtiments civils ressortissant à leurs attributions. En 1852 (D. 18 févr.) ce service fut de nouveau attribué au ministère de l’intérieur, puis, par décret du 30 juin 1853, au ministère d’État ; il passa ensuite au ministère de la maison de l’empereur, enfin, en 1869, au ministère des beaux-arts. Le 4 septembre 1870, il fut rendu au ministère des travaux publics.

4. Le service en question se compose de la direction des bâtiments civils, du conseil général et d’un personnel extérieur composé d’inspecteurs généraux, d’architectes, d’inspecteurs, sous-inspecteurs et conducteurs des travaux. La direction est chargée de présider aux constructions et réparations ainsi qu’aux travaux d’entretien des bâtiments de l’État ; elle dispose, pour ce but, de fonds inscrits au budget du ministère des travaux publics.

Depuis le 4 septembre 1870, le service des palais nationaux, qui avait fait partie du Domaine de la couronne, a été réuni à celui des bâtiments civils.

5. Mais la direction des bâtiments civils n’est pas seulement chargée de la conduite des travaux dans les monuments qui sont de sa compétence directe, elle est aussi appelée à donner son avis aux autres services publics qui peuvent le lui demander.

6. Elle est secondée dans cette tâche par le conseil général des bâtiments civils. Ce conseil est présidé par le ministre, et, en son absence, par le secrétaire général du ministère, ou aussi par le directeur du service ; il comprend quatre inspecteurs généraux à 6,000 fr., quatre architectes à 3,000 fr., deux auditeurs à 1,200 fr., un contrôleur à 6,000 fr. et un secrétaire à 5,500 fr. Les architectes sont seulement membres temporaires du conseil : ils sont renouvelés par moitié au commencement de chaque année, et ceux qui sortent ne peuvent rentrer que deux ans après. Les auditeurs sont pris parmi les anciens pensionnaires de l’académie de France à Rome et sont nommés pour deux années.

7. L’organisation et les attributions du conseil ont été successivement déterminées par les arrêtés ministériels des 1er octobre 1812, 15 avril 1838, 9 janvier 1840, 20 décembre 1841, mars 1848, les deux premiers émanant du ministre de l’intérieur, les trois autres du ministre des travaux publics. Voici les dispositions qui sont actuellement en vigueur.

8. Le conseil a pour mission d’éclairer l’administration sur le mérite des projets qu’elle fait exécuter. Il examine les plans, devis et cahiers des charges qui lui sont soumis par les diverses administrations de l’État, des départements et des communes. Il apprécie le système de construction, la qualité des matériaux, les conditions de la main-d’œuvre. Il s’assure si toutes les pièces qui composent le projet sont étudiées de façon à garantir la bonne exécution des travaux.

9. Il examine les plans généraux d’alignement des villes, les plans partiels pour la formation de nouvelles rues, places ou promenades.

10. Il juge les concours ouverts par l’administration pour l’exécution des projets d’édifices publics.

11. Il examine les difficultés qui surviennent entre les administrations locales, les architectes et les entrepreneurs au sujet de la rédaction des projets, de l’exécution des travaux, des règlements de compte, de l’interprétation des marchés.

12. Les projets et les questions d’art et de contentieux sont l’objet d’un rapport et d’un avis qui sont transmis aux administrations qui ont consulté le conseil.

Des instructions très-détaillées du ministre des travaux publics, sur la rédaction des projets qui doivent être soumis à l’examen du conseil des bâtiments civils, sont datées des 15 avril 1842 et 1er février 1848.

CHAP. II — RÈGLEMENT DU SERVICE ET COMPTABILITÉ.

13. Le dernier règlement du service est du 25 janvier 1862. Il prescrit que les travaux des bâtiments civils doivent être exécutés d’après des projets rédigés par les architectes désignés par le ministre.

Ces projets, après avoir subi l’examen du conseil général des bâtiments civils, font l’objet, soit d’adjudications publiques, soit exceptionnellement de soumissions directes présentées par les entrepreneurs. Toutefois, les travaux d’entretien peuvent être exécutés à prix de règlement. (D. 25 janvier 1862.)

14. Les travaux, dirigés par les architectes, sont suivis par des inspecteurs, sous-inspecteurs et conducteurs, lesquels veillent à la bonne fourniture des matériaux et à leur mise en œuvre selon les règles de l’art et les ordres de l’architecte. Ils dressent, en outre, les détails d’exécution du projet, et tiennent les carnets d’attachement sur lesquels ils inscrivent tous les ouvrages qui ne sont pas destinés à rester visibles, ou dont l’appréciation ne serait plus possible lors de la vérification (art. 2).

15. Les carnets sont délivrés par les architectes qui en numérotent les feuilles avant de les remettre aux agents, et qui visent chaque feuille au fur et à mesure de la constatation des travaux. Les attachements figurés, dont les dimensions ne permettent pas le tracé sur les carnets, sont dessinés sur des feuilles séparées qui sont rappelées sur ces carnets par un numéro d’ordre (art. 3).

16. Les travaux exécutés font l’objet de mémoires dressés par les entrepreneurs, d’après les prix de la série acceptée par eux, et dont les numéros sont rappelés en regard de chaque article (art. 4).

17. Les mémoires sont produits en double expédition, dont une sur papier timbré destinée à être jointe au mandat de paiement. Cette production aura lieu à la fin de chaque trimestre pour les travaux d’entretien, et à la fin de chaque mois pour les travaux neufs et les grosses restaurations, conformément aux indications données par l’architecte (art. 5).

18. Les mémoires présentés par l’entrepreneur à l’architecte sont remis au vérificateur attaché à l’agence, qui est chargé spécialement de leur examen. Cet agent, après avoir consulté les carnets d’attachement, vérifie si les mémoires reproduisent exactement les travaux exécutés et les conditions des marchés (art. 6). Les mémoires vérifiés sont arrêtés par l’architecte et transmis à l’administration centrale, qui en opère la révision et en propose le paiement (art. 7).

19. Les mémoires sur papier libre, qui sont destinés à rester dans les archives de l’administration des bâtiments civils, indiquent tous les détails arithmétiques des opérations et tous les articles de dépenses. Les mémoires sur papier timbré mentionnent les quantités obtenues pour les articles de même nature, les prix avec leurs numéros de série, et les sommes qui en résultent. Les uns et les autres comprennent les demandes des entrepreneurs et le règlement du vérificateur arrêté par l’architecte.

20. Lorsque des circonstances exceptionnelles ne permettent pas d’établir les mémoires aux époques déterminées ci-dessus, il peut être délivré des à-compte aux entrepreneurs après une autorisation spéciale du ministre, et alors l’architecte dresse un état sommaire des travaux sur lesquels il propose l’à-compte qui, dans aucun cas, ne peut excéder la moitié du montant des travaux exécutés. Il ne pourra être fait un nouveau paiement avant que les entrepreneurs n’aient justifié des à-compte par la production d’un mémoire qui sera réglé dans les formes déterminées ci-dessus (art. 9).

21. Les architectes et les vérificateurs sont payés au moyen d’honoraires proportionnels déterminés par les règlements. À cet effet, il est dressé un état sommaire indiquant le montant des travaux dirigés ou vérifiés, et faisant ressortir les sommes proportionnelles qui leur sont dues[1].

Les inspecteurs, sous-inspecteurs et conducteurs reçoivent des indemnités mensuelles ou des traitements fixes, et sont payés sur les états que l’architecte transmet chaque mois à l’administration centrale, et qui sont visés par le chef du service des bâtiments civils (art. 10).

22. Des inspecteurs généraux, membres du conseil des bâtiments civils, sont chargés d’exercer un contrôle supérieur sur les travaux dépendant du service des bâtiments civils. Ils veillent à la bonne exécution des projets approuvés et à la tenue régulière de toutes les pièces qui doivent servir à la constatation des dépenses. Ils examinent les réclamations qui peuvent être élevées par les entrepreneurs, donnent leur avis, et adressent au ministre des rapports sur toutes les questions qui intéressent les travaux (art. 11).

23. Dans les départements, toutes les pièces de dépenses sont remises aux préfets qui les soumettent au ministre après les avoir visées et en avoir consigné les résultats dans leurs écritures. Ces pièces sont révisées par le service des bâtiments civils, approuvées par le ministre et renvoyées aux préfets, qui en mandatent le paiement sur les crédits mis à leur disposition. À Paris, toutes les pièces sont adressées directement au ministre (art. 12).

24. En fin d’exercice, le service des bâtiments civils établit le compte général de toutes les dépenses de bâtiment faites pendant cet exercice (art. 13). (Voy. Architecte, Beaux-Arts, Édifices diocésains, Monuments historiques, etc.)

  1. L’arrêté du ministre des travaux publics, du 30 juin 1849, encore en vigueur, fixe ainsi les honoraires et rétributions dans les deux articles ci-après :

    Art. 1er. Constructions et grosses réparations des bâtiments civils. Les honoraires des architectes et des vérificateurs chargés de la direction et de la vérification des travaux de construction et grosses réparations des édifices publics sont invariablement fixés à 4 p. cent du montant de la dépense desdits travaux, savoir 3 p. cent pour l’architecte, et 1 p. cent pour le vérificateur, quel que soit le montant de la dépense. Les architectes cesseront de recevoir les traitements fixes déterminés par l’arrêté du 22 juillet 1832 qui devaient leur tenir lieu de frais de bureau.

    Les inspecteurs, sous-inspecteurs, conducteurs, gardiens et portiers seront rétribués au moyen d’appointements fixes imputés sur un crédit affecté spécialement au personnel des travaux, lequel crédit s’élevant à 2 p cent du montant du chapitre du budget affecté aux constructions et grosses réparations formera à l’avenir le dernier article dudit chapitre.

    Art. 2. Travaux d’entretien et réparations ordinaires des bâtiments civils et palais nationaux. Les honoraires des architectes et vérificateurs chargés de la direction et de la vérification des travaux d’entretien et de réparation ordinaire des édifices publics, sont fixés à 5 p. cent du montant de la dépense desdits travaux, savoir : pour l’architecte 4 p. cent, et pour le vérificateur 1 p. cent.