Dictionnaire de théologie catholique/CANON DES LIVRES SAINTS V. Décret du concile de Trente De canonicis Scripturis.

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 2.2 : CAJETAN - CISTERCIENSp. 142-148).

V. Décret du concile de Trente De canonicis Scripturis. —

I. TEXTE ET TRADUCTION < ! --Latin et français vérifié par Sica-->

Sacrosancta cecumi nica et generalis Tridentina synodus, in Spiritu Sancto legitime congregata, præsidentibus in ea eisdem tribus apostolicæ sedis legatis, hoc sibi perpetuo ante oculos proponens, ut sublatis erroribus, puritas ipsa Evangelii in Ecclesia conservetur, quod promissum ante per prophetas in Scripturis sanctis, Dominus noster Jesus Christus Dei Filius, proprio ore primum promulgavit ; deinde per suos apostolos tanquam fontem omnis et salutaris veritatis et morum disciplinæ omni creaturae prædicari jussit ; perspiciensque hanc veritatem et disciplinam contineri in libris scriptis et sine scripto traditionibus… ; orthodoxorum Patrum exempla secuta, omnes libros tam Veteris quam Novi Testamenti, cum utriusque unus Deus sit auctor, necnon traditiones ipsas… pari pietatis affectu ac reverentia suscipit, et veneratur. Sacrorum vero librorum indicem huic decreto adscribendum censuit, ne cui dubitatio suboriri possit, quinam sint qui ab ipsa synodo suscipiuntur. Sunt vero infra scripti : Testamenti Veteris, quinque Meysi, id est, Genesis, Exodus, Leviticus, Numeri, Deuteronomium ; Josue, Judicum, Ruth, quatuor Regum, duo Paralipomenon, Esdrae primus, et secundus qui dicitur Nehemias ; Tobias, Judith, Esther, Job, Psalterium Davidicum cetum quinquaginta psalmorum, Parabolæ, Ecclesiastes, Canticum canticorum, Sapientia, Ecclesiasticus, Isaias, Jeremias cum Baruch, Ezechiel, Daniel ; duodecim prophetae minores, id est, Osea, Joel, Amos, Abdias, Jonas, Michæas, Nahum, Habacuc, Sophonias, Aggæus, Zacharias, Malachias ; duo Machabæorum, primus et secundus. Testament Novi, quatuor Evangelia, secundum Matthæum, Marcum, Lucam et Joannem ; Actus npostolorum a Luca evangelista conscripti ; quatuordecim Epistolae Pauli apostoli, ad Romanos, duae ad Corinthios, ad Galatas, ad Ephesios, ad Philippenses, ad Colossenses, duae ad Thessalonicenses, duae ad Timothæum, ad Titum, ad Philemonem, ad Hebræos ; Petri apostoli duæ Joannis apostoli tres, Jécobi apostoli una, Judae apostoli una, et Apocalypsis Joannis apostoli. Si quis autem libros ipsos integros cum omnibus suis partibus, prout in Ecclesia catholica legi consuaverunt, et in veteri vulgata latina editione habentur, pro sacris et canonicis non susceperit et traditiones prædictas sciens et prudens contempserit ; anatbema sit. Omnes itaque intelligant, quo ordine et via ipsa synodus, post jactum fidei confessionis fundamentum, sit progressura, et quibus potissimum testimoniis ac præsidiis in confirmandis dogmatibus, et instaurandis in Ecclesia moribus, sit usura. Sess. IVe

Le très saint concile de Trente œcuménique et général, légitimement assemblé sous la enduite du Saint-Esprit, les trois mêmes légats du siège apostolique y présidant, ayant toujours devant les yeux de conserver dans l’Église, en détruisant toutes les erreurs, la pureté même de l’Évangile, ce qui, après avoir été promis auparavant par les prophètes dans les saintes Écritures, a été ensuite publié premièrement par la bouche même de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Fils de Dieu, et puis par ses apôtres à qui il a ordonné de l’annoncer à toute créature comme la source de toute vérité qui regarde le salut, et du bon règlement des mœurs ; et considérant que cette vérité et cette règle morale sont contenues dans les livres écrits et dans les traditions non écrites… ; suivant l’exemple des Pères orthodoxes, reçoit et vénère avec un égal sentiment de piété et un égal respect tous les livres tant de l’Ancien que du Nouveau Testament, puisque l’unique Dieu est l’auteur de l’un et de l’autre, aussi bien que les traditions elles-mêmes. Mais pour que personne ne puisse douter quels sont les Livres saints que le concile lui-même reçoit, il a pensé qu’il fallait joindre à ce décret le catalogue de ces livres. Or ce sont les suivants : De l’Ancien Testament, les cinq livres de Moïse, à savoir, la Genèse, l’Exode, le Lévitique, les Nombres, le Deutéronome ; les Juges, Ruth, les quatre livres des Rois, les deux des Paralipomènes, le premier d’Esdras, et le second qui est dit de Néhémie ; Tobie, Judith, Esther, Job, le Psautier davidique qui contient cent cinquante psaumes, les Paraboles, L’Ecclésiaste, le Cantique des cantiques, la Sagesse, l’Ecclésiastique, Isaïe, Jérémie avec Baruch, Ezéchiel, Daniel ; les douze petits prophètes, à savoir, Osée, Joël, Amos, Abdias, Jonas, Michée, Nahum, Habacuc, Sophonie, Aggée, Zacharie, Malachie ; deux livres des Machabées, le premier et le second. Du Nouveau Testament, les quatre Evangiles, selon Matthieu, Marc, Luc et Jean ; les Actes des apôtres, écrits par l'évangéliste Luc ; les quatorze Epitres de l’apôtre Paul, aux Romains, deux aux Corinthiens, aux Galates, aux Ephésiens, aux Philippiens, aux Colossiens, deux aux Thessaloniciens, deux à Timothée, à Tite, à Philémon, aux Hébreux ; deux de l’apôtre Pierre, trois de l’apôtre Jean, une de l’apôtre Jacques, une de l’apôtre Jude et l’Apocalypse de l’apôtre Jean. Si quelqu’un ne reçoit pas pour sacrés et canoniques ces mêmes livres en entier avec toutes leurs parties, tels qu’on a coutume de les lire dans l’Église catholique et tels qu’ils sont dans l’ancienne édition latine de la Vulgate, ou méprise avec connaissance er de propos délibéré les traditions dont il a été parlé, qu’il soit anathème. Que tous sachent donc dans quel ordre et par quelle voie le concile lui-même, après avoir établi le fondement de la confession de foi, doit procéder, et de quels témoignages et secours il doit particulièrement se servir pour confirmer les dogmes et restaurer les mœurs dans l’Eglise.

II. COMMENTAIRE.

Occasion du décret.

Ce furent les erreurs protestantes qui provoquèrent la réunion du concile de Trente et l'élaboration, dans l’assemblée conciliaire, du décret qui nous occupe. Les protestants, exaltant l’Ecriture, faisaient d’elle l’unique règle de la foi et méconnaissaient les traditions apostoliques et l’autorité même de l'Église. D’autre part, les premiers réformateurs refusaient d’admettre les livres deutérocanoniques de la Bible. En 1519. à Leipzig, dans sa controverse avec Jean Eck, Luther rejetait l’autorité de II Mach., xii, 44, au sujet du purgatoire, parce que ce livre des Machabées n’est pas dans le canon ; il écartait aussi l'Épitre de saint Jacques, parce qu’elle n’est pas d’accord avec saint Paul sur la foi justifiante ; il n’acceptait pas non plus son témoignage en faveur de l’extréme-onction. Carlstadt défendit contre Luther les deutérocanoniques du Nouveau Testament. Dans les préfaces de son Nouveau Testament, imprimé en 1522 Luther écartait l’Epitre aux Hébreux, celles de Jacques et de Jude, et l’Apocalypse. Ce n'étaient pas des livres principaux du Nouveau Testament, qui devaient poser le fondement de la foi. Leurs auteurs n'étaient pas des apôtres. La lettre de saint Jacques est une

« épître de paille » ; elle n’a pas la manière de l’Evangile.

L’esprit de Luther ne peut s’accommoder de l’Apocalypse, où le Christ n’est ni honoré ni connu : S. Berger, La Bible au XVIe siècle, Paris. 1879, p. 86107. Luther traitait plus mal encore les deutérocanoniques de l’Ancien Testament. Reuss, Histoire du canon des saintes Écritures, p. 360-352. Melanchthon n’attachait qu’une moindre importance aux deutérocanoniques du Nouveau Testament ; Brentz les mettait au méme rang que les apocryphes de l’Ancien ; Flacius les déclarait douteux, alors que ceux de l’Ancien Testament 1595 CANON DES LIVRES SAINTS 4596

étaient pour lui apocryphes et sans autorité. Reuss, op. cit., p. 351-356. Zwingle rejetait les uns et les autres. S. Berger, op. cit., p. 107-109. Le concile de Trente avait à se prononcer sur les erreurs des protagonistes de la Réforme. Or, quatre articles, extraits des œuvres de Luther, ont servi de base aux discussions préalables à la IVe session. Les deux premiers, concernant l’Ecriture, seule règle de la foi, et les livres deutérocanoniques, ont été condamnés par le décret De canunicis Scripturis. Sarpi, Hist. du concile ds Trente, 1. II, n. 43 ; Le Plat, Monumenta ad hist. conc. Tridents Louvain, t. iii, p. 386. Le concile avait donc à décider d’abord qu’elles étaient réellement les sources de la révélation, et il affirma que les vérités révélées se trouvent dans les traditions aussi bien que dans les Ecritures. Voir Tradition. Il devait déclarer quels livres rentraient dans le corps des Écritures et avaient une pleine autorité pour établir le dogme et la morale, et il adjoignit au décret un catalogue des Ecritures canoniques. Il avait enfin à définir que les traditions et les Écritures dans leur intégrité devaient être envisagées comme la règle objective de la foi et des mœurs, et il le fit en terminant son décret par une définition solennelle avec anathème contre les contradicteurs.

Nature et critérium de la canonicité des Écritures.

Dès le début de ses délibérations, le saint concile, légitimement assemblé sous la conduite du Saint-Esprit et présidé par trois légats du siège apostolique, résolut de déclarer sur quelles autorités il s’appuyerait pour affirmer les dogmes et condamner les hérésies. C’est pourquoi à la congrégation générale du 8 février 1546, on proposa de définir quels Livres saints étaient reçus dans l’Eglise. Theiner, Acta genuina ss. œcum. conc. Trident., in-4°, Agram, s. d. (1874), t. i, p. 49. Le concile entendait donc, en définissant la canonicité des Livres saints, déterminer le principe régulateur de la foi. Severolo, Diarium, dans Merkle, Concilium Tridenlinum, Fribourg-en-Brisgau, 1901, t. i, p. 28-29 ; Massarelli, Diarium II, III ibid., p. 434-473. D’ailleurs, le but, la teneur et la dernière clause du décret le montrent bien. Dans les congrégations particulières ou commissions, on examina, le 11 février, la manière dont on recevrait les Livres saints : serait-ce purement et simplement, ou en faisant étudier au préalable la question du canon par les théologiens en vue de résoudre les objections des adversaires ? Dans la 2e commission, présidée par le cardinal de Sainte-Croix, plus tard Marcel II, les avis furent partagés. Les uns voulaient qu’on étudiât les preuves de la canonicité des deutérocanoniques, non sans doute parce qu’on doutait de leur canonicité, mais plutôt parce qu’on voulait par là affermir la foi des simples et des ignorants. La majorité fut d’avis qu’on reçût les Livres saints purement et simplement. On ne revient pas sur les choses décidées et on peut renvoyer aux ouvrages des théologiens, de Jean Cochlée en particulier, pour justifier la canonicité des livres contestés. Theiner, op. cit., t. i, p. 49-51 ; Merkle, loc.cit., p. 30, 434, 478. A la congrégation générale du lendemain, le cardinal del Monte résuma les conclusions des congrégations particulières. Le concile reconnaissait deux sources de la révélation, l’Ecriture et les traditions, et admettait, comme le concile de Florence, tous les livres de l’Ancien et du Nouveau Testament. Après discussion, on fut unanimement d’avis de les recevoir purement et simplement, mais les divergences s’accentuèrent au sujet de savoir si on exposerait les preuves de la canonicité ; on ne put conclure et on renvoya la solution de cette question à la congrégation suivante. Elle eut lieu le 15 février. 16 Pères se prononcèrent pour l’indication des arguments favorables à la canonicité ; 24 furent pour leur omission. La majorité décida ainsi que les Livres saints seraient reçus sans examen ni discussion de preuves, mais par une simple énumération, comme avait fait le concile de Florence. Theiner, op. cit., t. I, p. 51-53 ; Merkle, loc. cit., p. 30-32, 434-435, 478-480. Les théologiens du concile, consultés à ce sujet le 28 février, émirent, eux aussi, des avis différents, qui n’influèrent pas sur la chose déjà jugée. Theiner, p. 54. Le concile se bornait donc à affirmer la foi de l’Église touchant l’autorité canonique des Livres saints ; il s’appuyait sur les décisions ecclésiastiques, rappelées par le cardinal de Sainte-Croix, et il suivait l’exemple des Pères orthodoxes ; aussi laissait-il aux théologiens le soin de justifier cette autorité contre les attaques des protestants.

Égale autorité reconnue à tous les livres canoniques.

Cependant, au cours des discussions, quelques Pères proposèrent d’établir une distinction entre les Livres saints. Le 11 février, à la seconde commission, l’évêque de Fano et le général des augustins opinèrent qu’il fallait distinguer les livres authentiques et canoniques, dont notre foi dépend, des livres simplement canoniques, bons pour l’enseignement et utiles à lire dans les églises. Cette distinction avait été faite autrefois par les Pères de l’Église, entre autres par saint Jérôme dans le Prologus galeatus. Mais cette distinction ne fut approuvée par aucun autre membre. A la congrégation générale du lendemain, le cardinal de Sainte-Croix exposa la distinction proposée dans la commission qu’il présidait. Il plaçait les Proverbes dans la seconde catégorie, La distinction résulterait du contenu des livres ; elle serait d’ailleurs très difficile à établir, n’ayant pas encore été fixée par l’Église, quoique saint Jérôme et saint Augustin en aient parlé. Le cardinal de Jæn s’y opposa. L’évêque de Fano concéda que, si elle était utile, elle n’était pas nécessaire. La majorité fut d’avis qu’il fallait l’omettre. La question ne serait pas tranchée ; elle serait laissée en l’état où les Pères l’avaient laissée. On approuverait les Livres saints sans distinction comme la tradition l’avait fait, et le général des servîtes ajoutait cette raison, que le concile ne voulait pas juger des choses sur lesquelles saint Jérôme et saint Augustin avaient été en désaccord. Theiner, op. cit., 1. 1, p. 51-52 ; Merkle, loc. cit., p. 30, 31, 32. Cette distinction, dans la pensée de beaucoup, portait non pas sur l’autorité canonique des Livres saints, mais plutôt sur la diversité de leur contenu. C’est pourquoi le livre des Proverbes était placé par le cardinal de Sainte-Croix dans la seconde catégorie. La diversité d’autorité canonique vint bientôt se greffer sur cette différence intrinsèque. A la congrégation générale du 15 février, on eut à examiner an aequaliter et pari reverentia omnes libri sacri recipiendi essent cum inter alios magna sit différentia. La majorité approuva leur réception pari pietatis affectu ; mais aucune décision ne fut prise. Theiner, p. 53 ; Merkle, p. 481. Aux congrégations particulières du 18 et du 23 février, on s’occupa spécialement des traditions, et on résolut de ne porter qu’un seul décret pour elles et pour les Ecritures. A la congrégation générale du 20 février, on désigna les députés qui rédigeraient ce décret. Le 22 mars, le projet de rédaction fut remis aux Pères du concile pour être examiné le lendemain dans les commissions. Theiner, p. 66 ; Merkle, p. 33-35, 435, 483-485, 490-493, 496-497. Le procès-verbal nous renseigne sur les discussions de la seconde commission. L’évoque de Castellamare voudrait faire quelque différence entre les livres reçus et les livres canoniques. L’évêque de Feltre lui oppose le canon du concile de Laodicée, qui nomme canoniques tous les livres de la Bible : De son côté, le général des augustins réclame la distinction des livres sacrés et des livres canoniques. Theiner, p. 68-69 ; Merkle, p. 522, 523, 534. A la congrégation générale du 27 mars, l’évêque de Fano renouvela sa critique des expressions : pari pietatis affectu, qui furent défendues et maintenues par les autres Pères. Le cardinal de Sainte-Croix réitéra son désir de voir établir la distinction des livres dogmatiques, édifiants ou simplement historiques. L’archevêque de 1597 CANON DES LIVRES SAINTS 1598

Matera riposta aussitôt qu’il avait été décidé dans une congrégation générale qu’on omettrait à dessein d établir une différence entre les Livres saints propter hujus rei difficultatem.., hoc prsetertim tempore. Le général des augustins signalait une contradiction du décret : en approuvant les traditions apostoliques, on recevait les canons des apôtres, qui admettaient l’Ecclésiastique, non pas comme un livre canonique, mais seulement comme livre de lecture pour les jeunes gens ; d’autre part, on affirmait sa canonicité. Merkle, p. 38, 39, 40. Comme les avis étaient différents sur diverses questions, on résolut de rédiger des doutes qui seraient soumis à l’examen des Pères. Merkle, p. 40, 529, 530. Deux se rapportent à notre sujet : 7° Faut-il maintenir ou effacer les mots : pari pietatis affectu ? 13° Comme il a déjà été décidé en congrégation générale qu’on n’établirait pas de distinction entre les Livres saints et qu’on les énumérerait purement et simplement comme au concile de Florence, reviendra-t-on sur ce sujet ? Les Pères émirent leur avis sur ces doutes à la congrégation du 1 er avril. Notons les plus intéressants. Le cardinal de Trente désirerait qu’on fit la distinction des livres et qu’on établit quelque degré entre eux ; l’énumération serait faite comme au concile de Florence, sed per gradus, ut inter eos aliqua distinctio appareat. Le cardinal de Jæn estime qu’il n’y a pas à revenir sur les questions déjà tranchées. Deux ou trois Pères disent expressément qu’il ne faut établir ni distinction ni degré. Le sommaire des votes signale que la majorité s’est prononcée sur le 13° doute et a conclu qu’il n’y avait pas à revenir sur ce qui avait été décidé en congrégation générale. Theiner, p. 73-77. Elle se prononçait donc de nouveau contre toute distinction à faire entre les livres canoniques, et le projet de décret ne fut pas retouché à ce propos.

M. Loisy, Histoire du canon de l’A.T., p. 199-201, a cependant prétendu que les Pères avaient laissé dans cette congrégation générale la question libre et que plusieurs d’entre eux avaient voté contre l’admission des deutérocanoniques désignés par eux sous le nom d'apocryphes. Quoique le texte du procès-verbal, obscur par endroits, paraisse favoriser cette conclusion, l’étude attentive des Acta la rend inadmissible. L’examen du projet de décret avait, on s’en souvient, provoqué un grand nombre d’observations, qui furent résumées en 13 capita dubitationum. Or, dans la commission du 23 mars, l’évêque de Sinagaglia avait demandé que le dernier livre d’Esdras et le IIIe des Machabées soient expressément rejetés. Celui de Castellamare voulait aussi l’exclusion expresse du IIIe et du IVe livre d’Esdras et du IIIe des Machabées. A la congrégation générale du 27 mars, le même Père parlait encore du IIIe livre de Baruch (?), du IIIe et du IVe des Machabées. Theiner, p. 68, 72 ; Merkle, p. 521, 522. Ce sont évidemment ces observations qui ont donné lieu au 4e doute, exprimé en ces termes : An libri qui appellantur apocryphi, conjungi soliti in omnibus vulgatis Bibliae codicibus, cum libris sacris, sint per hoc decretum nominatim resecandi, an silentio preetereundi ? Theiner, p. 72. Le doute consistait donc à savoir si, comme dans le canon du pape Gélase, la liste des Livres sacrés contiendrait nommément ou pas les livres apocryphes qui leur sont ordinairement joints dans les manuscrits bibliques, Selon la teneur du procès-verbal, beaucoup de Pères répondent : « Que les apocryphes soient reçus ou ne soient pas reçus avec les autres livres canoniques ; qu’ils ne soient pas exclus ; qu’ils soient inscrits prout ab Ecclesia recepti sunt ou bien recipiantur ut in aliis concilius ; ou encore, de apocryhis dicatur prout in decreto. » Il semblerait bien que ces avis concernent les deutérocanoniques. Mais cette interprétation, fondée seulement sur une rédaction obscure du secrétaire ne lient pas en face d’autres sentiments, plus clairement exprimés. Beaucoup disent qu’il faut sous silence les apocryphes ; qu’il ne faut pas les rejeter spécialement, expressément. Le cardinal de Jæn, qui ne veut pas que les apocryphes soient revus au même degré que les autres livres canoniques, avait déclaré tout d’abord qu’on ne devait pas revenir sur les décisions prises. Les évêques de Sinigaglia et de Castellan peu favorables aux deutérocanoniques, disent cependant que les apocryphes soient reçus et en même temps qu’on ne fasse pas de distinction entre les Livres saints. Se contrediraient-ils donc ? Il vaut mieux interpréter les votes dans le sens indiqué par le résumé : 4l voix se sont prononcées pour que les apocryphes soient passés sous silence, 4 pour qu’ils soient désignés, 8 sont douteuses. Cette interprétation répond mieux a l’énoncé du doute posé et au résultat obtenu. Si, en effet, on acceptait l’explication de M. Loisy, il en résulterait que 41 voix ont décidé de passer sous silence dans le décret les deutérocanoniques, qui pourtant sont mentionnés. On a seulement décidé de ne pas mentionner les apocryphes, qui étaient ordinairement joints aux Livres canoniques dans les manuscrits bibliques.

Le 5 avril, le décret corrigé fut lu en congrégation générale. Le cardinal de Trente, non par esprit de contradiction, mais pour dire sa pensée, observa que, puisqu’on recevait tous les Livres saints sans tenir compte des distinctions faites par saint Augustin, saint Jérôme et les autres Pères, on plaçât au moins les livres qui avaient une autorité moindre en dernier lieu. Le livre de Tobie, que saint Jérôme rangeait parmi les apocryphes, passe dans le décret avant plusieurs autres sur lesquels il n’y a jamais eu de doutes. Le cardinal de Jæn ne désapprouvait pas cette observation. L’évêque de Castellamare exprime aussi son sentiment personnel : Dubito, dit-il. an libri Baruch et Machabæorum debeant recipi pro canonicis ; posset dici quod sunt de canone Ecclesiae. Un autre Père se rallie à cet avis. Enfin le général des carmes dit qu’il lui plairait que les Livres sacres fussent distingués des apocryphes comme saint Jérôme les distinguait. Theiner, p. Si. S.") ; Merkle, p. 45. Le lendemain, on examina une dernière fois dans les commissions les termes du décret. L’évêque de Castellamare désapprouvait les mots : pro sacris et canonicis, « à cause du livre de Judith et de quelques autres qui n’étaient pas dans le canon des Hébreux. On devrait dire qu’ils sont dans le canon de l’Église. » Le président lui répliqua : « Bien que vous disiez vrai, nous suivons le canon de l’Église et non le canon des Hébreux ; si donc nous employons le mot « canonique » , nous l’entendons du canon de l’Église. » Theiner, p. 86. A la session solennelle du 8 avril, le décret, qui avait été approuvé la veille, fut promulgué dans sa teneur actuelle. L’évêque de Fiésole renouvela encore la protestation qu’il avait faite en congrégation générale. Malgré les réclamations constantes de quelques Pères, le concile proclamait sacrés et canoniques, sans faire aucune différence entre eux. les protocanoniques et les deutérocanoniques. Non seulement il les mélanges comme l’avaient fait les documents antérieurs ; il affirme encore que l’Église les reçoit avec un égal respect.

Tous les théologiens ont reconnu dès lors que les deutérocanoniques ne diffèrent pas des protocanoniques au point de vue de la canonicité. Les uns et les autres sont sacrés, c’est-à-dire inspirés ; ils sont aussi canoniques et capables de fournir des témoignages en faveur des dogmes ; ils sont également pour leur part la règle de la foi et des mœurs. Cf. Melchior Cano, De locis theologicis t, I. II, c. XI, dans Cursus completus theol., de Migne. t. i. col. 124 ; Bellarmin, De verbe Dei, I. I. c. iv. x. Controv. , Milan. 1721, t. i. p. 10, 32 ; Sixte de Sienne. Bibliotheca sancta, Venise. 1556, t. i. p. 9 ; Stapleton Controv., v. q. ii. a. 3. Anvers. 1596, p. 510 : F. Sonnius, De verbo Dei, c. xiii. dans Demonstr. relig. christ., 1599 CANON DES LIVRES SAINTS 1600

Cologne, 1563, p. 14 ; Hosius, Confutatio prolegomenon Brentii, 1. III, Opera, Paris, 1562, p. 190 ; Léonard Le Coq, Examen præfationis monitoriae Jacobi 1, p. 197 ; Alphonse de Castro, Adversus hæreses, 1. I, c. il, 1534, p. v-vii ; A. Duval, Tract. de fide, q. I, c. ii, a. 5 ; c. iii, a. 1, Paris, 1656. etc. Seuls Bernard Lamy et Jahn ont fait quelque différence. Lamy, Apparatus biblicus, 1. II, c. v, 1723, p. 238-241, affirme seulement en passant que les deutérocanoniques, bien que réunis aux protocanoniques dans le décret du concile de Trente, ne sont pas de la même autorité. Jahn, Einleitung, 2e édit., t. i. p. 240, est plus explicite et prétend, d’après les déclarations des Pères de Trente, que la différence entre les protocanoniques et les deutérocanoniques n’a pas été enlevée et ne pouvait l’être. M. Loisy, qui cite ces deux écrivains, Hist. du canon de l’A. T., p. 232-231, soutient ce sentiment, p. 212-215, 235-241. Il admet, au moins, que tous les livres de l’Ecriture ne sont pas égaux en valeur et en autorité ; toutefois l’inégalité résulte non pas d’une différence intrinsèque et essentielle entre les protocanoniques et les deutérocanoniques au point de vue de la canonicité, les uns et les autres étant inspirés et canoniques au même titre, mais bien de leur contenu, qui de sa nature propre a un rapport plus ou moins direct avec le dogme et la morale. Or cette différence de contenu existe dans les protocanoniques autant que dans les deutérocanoniques. Elle concerne d’ailleurs plutôt les effets de l’inspiration dans les Livres saints que leur canonicité, celle-ci ne changeant rien à la nature des enseignements des livres canoniques. Voir Inspiration. Cf. Franzelin, Traclatus de divina traditione et Scriptura, 3e édit., Rome, 1882, p. 402-407 ; Bulletin critique, du 15 mars 1892, p. 104-105 ; Vacant, Etudes théologiques sur les constitutions du concile du Vatican, Paris, 1895, t. i, p. 394-399.

Intégrité de la canonicité.

Le concile de Trente oblige non seulement à recevoir tous les Livres saints pari pietatis affectu ; il oblige encore à les recevoir ipsos integros cum omnibus suis partibus. —

1. Elaboration de la formule conciliaire.

Ces mots et ceux qui les expliquent ne se trouvaient pas dans le projet de décret distribué aux Pères le 22 mars. Ce projet se terminait ainsi : Si quis auteni libros ipsos et prædictas traditiones violaverit, anathema sit. Theiner, t. i, p. 66. On en lit l’examen à la congrégation générale du 27 mars. Le cardinal Pacheco, évêque de Jæn, demanda que certaines particules des Évangiles de saint Luc et de saint Jean, contestées non seulement par les protestants, mais même par des catholiques, fussent expressément mentionnées. Il visait évidemment la mention de la sueur de sang, Luc, XXII, 43-44, et l’épisode de la femme adultère, Joa., vii, 53-viii, 13, dont Érasme avait nié l’authenticité. Un des rédacteurs du projet, l’archevêque de Matera, répondit qu’on avait décidé d’imiter le concile de Florence, qui ne les mentionne pas, et on n’avait pas voulu non plus donner aux faibles, qui ignoraient ces discussions, occasion de scandale. On pourrait d’ailleurs faire un décret particulier sur ces passages. Theiner, p. 71 ; Merkle, p. 38. L’avis de Pacheco donna occasion de rédiger deux questions qui furent remises à tous les membres du concile le 28 mars : « Comme quelques-uns ont contesté des particules des Évangiles, à savoir le dernier chapitre de Marc, le xxiie chapitre de Luc et le viiie de Jean, faut-il, dans le décret de réception des Évangiles, citer nommément ces parties et ordonner de les recevoir avec le reste ? Ou bien, faut-il, pour assurer le même résultat, exprimer dans le décret même le nombre des chapitres des Évangiles ? » Theiner, p. 72. Cette rédaction imparfaite supposait que les pas indiqués formaient chacun un chapitre distinct à tel point que l’indication du nombre des chapitres aurait suffi à affirmer expressément que l’Église les recevait. A la congrégation du 1er avril, chaque Père exprima son sentiment. Les avis furent assez divergents. Trois voix seulement demandèrent qu’on indiquât le nombre des chapitres ; quarante-trois furent pour la négative, et six votes demeurèrent douteux. Dix-sept se prononcèrent pour la mention expresse des fragments ; trente-quatre y furent opposés. Quelques Pères demandèrent un décret particulier, ou au moins une mention dans les Actes du concile. Theiner, p. 73-77. Toutefois le texte du projet fut retouché. On ajouta une formule suggérée par l’évêque d’Ascoli, p. 74, à savoir : Evangelia prout in ecclesia leguntur. Mais à la congrégation générale du 5 avril, le cardinal de Trente fit judicieusement remarquer que cette formule avait l’inconvénient de paraître restreindre l’acceptation des Évangiles aux seules parties lues dans les églises. Plusieurs Pères approuvèrent cette observation. L’évêque de Lanciano proposa cette variante : prout in Ecclesia acceptantur. Theiner, p. 84 ; Merkle, p. 45. Le décret fut de nouveau corrigé et soumis aux commissions. Il contenait donc cette finale : Si quis libros ipsos, prout in vulgata editione habentur… Theiner, p. 86. Nous manquons de renseignements sur la suite des débats, et quand le texte est présenté à l’approbation définitive des Pères, cette formule est développée dans la teneur officielle : Si guis autem libros ipsos integros cum omnibus suis partibus, prout in Ecclesia catholica legi consueverunt et in veteri Vulgata latina editione habentur, pro sacris et canonicis non susceperit… Cette rédaction affirmait la canonicité, non plus seulement des passages des Évangiles dont il avait d’abord été question, mais de tous les Livres saints en entier avec toutes leurs parties. Elle exposait aussi la règle suivant laquelle on devait les accepter pour sacrés et canoniques. Cette règle était la conduite de l’Église catholique qui les lisait, el leur présence dans l’ancienne Vulgate latine dont l’Église romaine se servait depuis des siècles.

2. Parties des Livres saints dont la canonicité est définie. —

L’interprétation de la formule officielle du décret a été diversement donnée par les théologiens. —
a) Le cardinal Franzelin, Tract, de divina traditione et Scriptura, 3° édit., Rome, 1882, p. 525-526, parle des théologiens anciens qui prétendaient qu’en vertu du décret de Trente, toutes les phrases et toutes les assertions de la Vulgate latine sans exception appartenaient à l’Écriture et étaient canoniques. C’étaient les partisans de l’authenticité absolue de cette version. Cf. p. 553. Ils se rencontraient surtout en Espagne. Basile Ponce, Quæst. expositivœ, publiées en 1600, disait que c’était le sentiment commun de son temps. Migne, Cursus completus Script, sac, t. i, col. 880. Cf. Jean de Saint-Thomas, In IIam IIae, disp. III, a. 3. Mariana, Dissert, pro editione Vulgata, c. XXII, dans Migne, Cursus completus Script, sac, t. I, col. 675, nous apprend que les théologiens espagnols appuyaient leur sentiment sur de nouvelles interprétations des décrets du concile de Trente. Il fait évidemment allusion à la célèbre déclaration faite par la S. C. du Concile, le 17 janvier 1576. On ne peut plus douter de son authenticité, depuis que M. Batiffol, La Vaticane de Paul III à Paul V, Paris, 1890, p. 73, l’a retrouvée dans un commentaire des canons du concile par le cardinal Carafa. Il y explique ainsi les mots cum omnibus partibus : Propter hujus-modi verba S. C. Concilii censuit incurri in pomas vel si sola periodus, clausula, membrum, dictio, syllaba, iotave unum quod repugnat Vulgatae editioni immutatur… Cf. Vacant, Études théologiques, t. I, p. 135-456. Cette interprétation est depuis longtemps abandonnée. Voir Vulgate. —
b) Le cardinal Bellarmin, De verbo Dei, I. I, c. vii, ix, xvi, prit comme moyen de détermination des parties canoniques la lecture dans les offices liturgiques. Il prouve ainsi la canonicité des Sept derniers chapitres d’Esther, des passages deutérocanoniques de Daniel, de la finale de Marc, du récit de la femme adultère et du verset des trois témoins célestes. llîOl

CANON DES LIVRES SAINTS

1002

Cf. lettre à Sirlet, publiée par Uatiflbl, La Vatleane, p. 32-33. La formule prout m ecclesia leguntw laquelle il s’appuie, avait été proposée au concile par le cardinal Madruce ; mais elle a été justement remplacée p ir une formule plus complète et plus explicite. — c Le cardinal Franzelin expose, op. cit., p. 526-527, el réfute,

p. 533-535, Il pinion plus récente et, à sou sens, trop

C’est celle du P. Charles Vercellone, barnabite, Sulla authenticilà délie singole parti délia Biblia VoU 66 ; trad. franc., dans la Revue callwlique de Louvain, 1866, 1867, p. 641 sq., 685 Bq., 1-1 i. Selon lui, la distinction entre les textes dogmatiqui li t< xtes non dogmatiques, vraie en soi et établie par l>- concile de l’imte au sujet de l’interprétation de l’Écriture, n’a pas été faite par lui à propos de la canonicité (1rs Livres saints. Le décret De cationicis Scripturis ne la suppose ni dans sa teneur ni dans son but, qui était seulement de déterminer les fondements de la foi et les sources de la révélation. Cette distinction n’est pas même possible, lorsqu’il s’agitde fixer l’étendue de l’authenticité de la Vulgate, car cette version reproduit la substance du texte original dans toutes ses parties sans distinction de parties dogmatiques ou non dogmatiques. Quant aux partes, dont parle le concile de Trente, ce ne sont pas, disait Vercellone, les passages deutérocanoniques du Nouveau Testament, mais ceux de l’Ancien, qui étaient alors contestés par les protestants. Les passages deutérocanoniques du Nouveau Testament étaient sans doute authentiques au point de vue critique ; mais leur canonicité n’a pas été définie par le concile de Trente, et on pourrait la nier sans être hérétique. Les Actes du concile de Trente montrent clairement que cette assemblée, qui n’a pas parlé des parties deutérocanoniques de l’Ancien Testament, visait au contraire certains passages du Nouveau contestés par les catholiques aussi bien que par les protestants. L’opinion du P. Vercellone ne peut donc se soutenir, au moins sur ce point particulier. — d) Le futur cardinal Franzelin concédait que tous les passages de la Vulgate n’étaient pas reconnus par le concile de Trente comme étant certainement canoniques, puisque le concile connaissait les imperfections de la Vulgate et en ordonnait une correction. S’appuyant sur le Lut du concile, qui était de déterminer à quelles sources il puiserait les dogmes qu’il voulait définir, le célèbre théologien romain estimait que les parties de la Vulgate, qui étaient déclarées canoniques, étaient seulement les passages dogmatiques, c’est-à-dire ceux qui affirment une vérité dogmatique ou morale. Le décret de Trente obligerait, sous peine d’anathéine, à regarder comme certainement canoniques tous les passages directement dogmatiques ; il n’obligerait pas à recevoir à ce litre bs passages qui affirment des faits historiques et qui n’ont qu’un rapport indirect avec le dogme et la morale. La canonicité de ces derniers passages n’est pas déterminée par voie d’autorité ; sa détermination est du ressort de la critique. Tract, de div. traditione et Scriptura,

  • " édit.. Rome, 1882, p. 527-540. Cf. Mazzella, De

virintibiis infusis, p. 562-561 ; Corluy, dans La controverse, 15 mai 1885, p, 55-63 ; Cornely, Introductio generai

    • , 2 1’édit., Paris, 1894, p. 173. Lien que le concile

de Trente, dans son décret, se proposât de déterminer quelles étaient les sources de la révélation, il ne voulait

pas, en parlant de l’intégrité de la canonicité des Livres saints, restreindre les parties canoniques aux passages

directement domatiques. Il s’était, en effet, préoccupé

des passages contestés des Évangiles, qui ne sont pas directement dogmatiques. Il ordonne, d’ailleurs, de

recevoir tons les livres énumérés dans leur entier, quel qu’en soit le caractère, el s’il ajoute qu’on doil aussi

recevoir toutes leurs parties, il l’entend de tous 1rs

passages, qui sont lus dans l’Église catholique et qui se trouvent dans la Vulgate. — e) Le chanoine Jules Didiol,

ayant étudié les Actes du concile de Trente, fixe plus

ints dont la canoni cité est définie par le concile de Trente. Il n’admet au cunedeopinionprécédentes. Il estime qi nie :

. um vtit partit » ’presque

1 1 répétition de libros ipso » integros. Eli m ment les 1 contes ! s, dont il avail été question

au concile ; mais elle va plus loin et atteint les li tout entiers et tout s leurparties. Il ne s’agit ni d’un mot, ni d’un membre de phrase, a moins qu’il ne soit essentiel, ni même d’une phrase courte et peu importante, mais peut-être d’une phrase longue et importante, et certainement du récit d’un fait, de l’exposé d’une doctrine, de l’énoncé d’un précepte. Une partie de livre, c’est encore, si l’on veul, un alinéa, un p graphe, un article, un chapitre ; c’est une ode ou un chant ; c’est une strophe peut-être dans une pièce lyrique. Ces parties canoniques sont celles di I saints tels qu’ils sont lus dans l’Église et tels qu’ils se trouvent dans la Vulgate. Commentaire théologique de la I V* session du concile de Trente, danla Heine des sciences ecclésiastiques, mai et juin h v 190-492 ; Logique surnaturelle subjective, Paris et Lille, 1891, p. 124-133 ; Traité de are,

Paris et Lille, 1894, p. 186-187. M. Vacant. El t/iéologiquet, t. 1, p. 409-423, a approuvé cette interprétation ; mais il l’a développée, en insistant sur les deux règles que le concile a ajoutées pour déterminer l’intégrité de la canonicité des Livn Ces livres,

en effet, doivent être reçus pour sa< moniques

dans leur entier et avec toutes leurs parties, prout in Ecclesia catholica legi consueverunt et in veteri Vulgata latina éditions habentur. Ces règles, fondées sur l’autorité de la pratique et de la croyance communes de l’Église, étaient, dans la pensée du concile, identiques et toujours d’accord. La première est tirée de la pratique et de la croyance communes en vigueur dans l’Eglise catholique depuis un assez long temps ; la seconde l’est de la présence des Livres saints et de leurs parties dans la vieille Vulgate latine. Elles n’obligent de recevoir les parties des Livres saints en usage dans l’Église que dans la mesure où la croyance commune est favorable à leur canonicité. Elles visent l’ensemble des Livres saints et chacune de leurs parties un peu notables. Les passages deutérocanoniques sont certainement du nombre des parties déclarées canoniques. Toutefois, parce que le concile n’a pas voulu parler du seul l’ait matériel de l’usage des Livres saints dans Limais de la pratique et de la croyance réunies. li. Vacant pense que le concile n’a pas expressément défini li canonicité des passages deutérocanoniques de la Bible, et qu’il l’a simplement affirmée sans en faire un dogme de foi. Selon lui, le concile a imposé de recevoir comme certainement canoniques les parties îles Livres saints communément admises sans la moindre h tion, et il a prescrit seulement de recevoir les autres comme plus probablement canoniques. « Touh parties de l’Ecriture, en faveur desquelles il y a accord unanime dans l’Église, s’imposent donc à notre foi ; celles pour lesquelles cet accord n’existe pas (et il en est ainsi de quelques passages deutérocanoniques…), méritent d’autant plus de respect que la pratique et la croyance des Églises, et en particulier de l’Église romaine, leur sont plus favorabl -t-. p. 48I Quant aux passages deutérocanoniques, on est tenu de les accepter dans la mesure suivant laquelle ils ont i té

communément reçus dans l’Église catholique. Cependant, s’il n’est pas de foi qu’ils soient eanoniques.il est théologiquement plus sur de les n mine par ties intégrantes de l’Écriture, puis, pie la pratique de

Il..lise leur est favorable. Il y aurait même

ter une témérité plus ou moins grande, suivant leur

importance et la faiblesse des difficultés qu’a soué

et que soulève leur authenticité. Cf. Loisy, Histoire du canon du N. T., p. 260-263.

5° L’authenticité des Livres saints rentre-t-elle dans l’objet de la définition du concile ? — Non ; elle est seulement affirmée comme une vérité que les Pères estimaient certaine. Voir t. i, col. 2592-2593. Cf. Loisy, Histoire du cation du N. T., p. 250-260.

Caractère dogmatique du décret.

Porté par un concile, légitimement assemblé sous la présidence des légats du siège apostolique et confirmé plus tard par le pape Pie IV, le décret De canonicis Scripturis remplit toutes les conditions requises pour obliger en conscience tous les fidèles. D’autre part, il est terminé par une définition de foi ou anatbème qui concerne les traditions et les Livres saints. Tandis que les décrets antérieurs des papes ou des conciles, qui dressaient la liste des livres canoniques reçus par l’Église, affirmaient seulement la canonicité de ces livres, sans en faire une vérité de foi catholique, le concile de Trente définit, lui, comme de foi catholique, que tous les livres, dont il a rédigé le catalogue, sont sacrés, c’est-à-dire inspirés, et canoniques, c’est-à-dire du nombre de ceux que l’Église reçoit comme règle de la foi et des mœurs. Il avait à se prononcer de manière à ne laisser aucun doute sur les sources de la révélation ; aussi, dès la congrégation générale du 15 février 1546, la majorité décida d’ajouter un anathème au futur décret De canonicis Scripturis. Thciner, op. cit., t. i, p. 53. Cependant, plus tard, quand on discuta la première rédaction du texte, le général des ermites de Saint-Augustin, voulant imiter les conciles et les canons antérieurs qui n’ont pas d’anathème, en demanda la suppression. Jbid., p. 69. Aussi le neuvième des doutes, examiné le I e1’avril, demandait si l’anathème décidé déjà en principe devait porter sur les traditions et les Livres saints tous ensemble ou sur ces livres seulement, lbid., p. 73. L’anathème fut maintenu par la majorité pour les deux points, lbid., p. 77. Nier que tous ces livres soient sacrés et canoniques fut donc dès lors, non plus une erreur, mais une hérésie. Aussi aucun théologien n’a suivi le sentiment de Melchior Cano, De locis theol., 1. II, c. IX, Cursus completus tlieologix de Migne, t. i, col. 104-105, qui regardait la négation de la canonicité de Baruch et des autres deutérocanoniques de l’Ancien Testament, non comme une hérésie, mais comme une erreur qui touche à l’hérésie. Toutefois, M. Chauvin, distinguant l’inspiration des Livres saints, qui est un fait divin, de leur canonicité. qui repose sur un fait historique, à savoir sur le jugement implicite ou explicite de l’Église constatant, avec l’assistance du Saint-Esprit, que les Livres saints ont été inspirés, a prétendu que la canonicité n’était pas de foi divine et catholique. Le fait de la reconnaissance officielle de l’inspiration des Livres saints par l’Église n’appartient pas à la révélation divine, ni par conséquent à l’objet même de la foi. C’est un fait dogmatique qui est du ressort de l’histoire ecclésiastique. Quand l’historien a constaté la déclaration de l’Église, conférant aux Livres saints la canonicité, le fidèle doit admettre cette canonicité. Il serait hérétique s’il niait l’inspiration des livres canoniques que supporte et qu’affirme leur canonicité ; mais s’il niait seulement leur canonicité, il ne serai) pas, de ce chef, hérétique ; il serait plutôt suspect d’hérésie, car on serait en droit de soupçonner qu’il nie ou l’inspiration du livre déclaré canonique ou l’infaillibilité de l’Église le déclarant canonique. Leçons d’introduction générale, Paris, s. d. 1898), p. 71 ! -71. Cette distinction est juste dans l’abstrait,

maia elle ne répond pas a la pensée des Pères du concile de Trente Ils ne voulaient pas définir le fait de la reconnaissance officielle de l’inspiration par l’Église ; ils accomplissaient ce fait. L’objet de leur définition, M. Chauvin ne l’ignore pas, op. cit., p. 152, était de déterminer quelles étaient les sources de la révélation.

Or ces sources de la révélation font certainement partie elles-mêmes de l’objet de la révélation et appartiennent ainsi à la foi divine. Elles peuvent par conséquent devenir par la définition de l’Église objet de la foi catholique, et elles le sont devenues par la définition du concile de Trente. Il y aurait donc péché d’hérésie à nier que les Livres saints soient tous et en entier canoniques, c’est-à-dire règle de la foi et des mœurs. Sans doute, pour dresser la liste complète des Livres saints, le concile de Trente s’est appuyé sur la pratique de l’Église catholique, pratique qui est infaillible ; il ne s’est pas fondé sur la critique historique, dont les principes ne font pas partie de la révélation. S’il l’avait fait, il n’aurait pas donné une définition dogmatique. Le théologien et le fidèle peuvent se servir et se servent de la critique historique pour constater le fait de la réception des Livres saints par l’Église. Mais ce n’est pas à cause des conclusions de la critique historique, c’est uniquement à cause du témoignage de Dieu et de l’Église, que les Livres saints sont l’objet de notre foi. Le concile de Trente entendait promulguer une définition dogmatique, puisqu’il porte anathème contre ceux qui ne recevraient pas les Livres saints comme sacrés et canoniques.

111. CONFIRMATION DU DÉCRET DU CONCILE DE TRENTE PAR LE CONCILE DU VATICAN ET PAR LÉON NUI. — 1° Le

concile du Vatican dans sa IIIe session, tenue le 27 avril 1870, a confirmé le décret de Trente sur les sources de la

révélation.

Hœc porro supernjturalis

revelatio, secundum universels

lisEcclesiœfidem a sancta Tri dentina synodo declaratam,

continetur in libris scriptis

et sine scripto traditionibus.

Qui quidem Veteris et Novi

Testamenti libri integri cum

omnibus suis partibus, prout

in ejusdem concilii décréta re censentw, et in veteri Vulgata

latina editione habentur, pro

sacris et canonicis suscipiendi

sunt… Const. Dei Filius, c. il.

Si quis sacrx Scriptnra*

librus integros cum. omnibus

suis partibus, prout Mus

sancta Tridentina synodus

recensuit, pro sacris et cano nicis non susceperit…, ana thenia sit. Can. 4.

Selon la foi de l’Église universelle affirmée par le saint concile île Trente, cette révélation surnaturelle est contenue dans les

livres des Écritures et sans

écriture dans les traditions…

Pour ces livres de L’Ancien i

du Nouveau Testament, ils

doivent être reçus comme sacrés

et canoniques en entier avec

toutes leurs parties tels qu’ils sont énumérés dans le décret

du concile de Trente et contenus dans l’ancienne édition Vulyule

latine.

Anathème à qui ne recevrai !

pas pour sacrés et canoniques

les livres de la sainte Écriture

en entier avec i oui es leurs] arties

ce io le saint concile de Trente

les a énumérés…

Dans ce canon, le concile du Vatican renouvelle donc l’anathème porté à Trente contre quiconque refuserait de reconnaître les livres de la Bible pour sacrés et canoniques. Au c. Il de la Constitution, il se réfère au catalogue des Livres saints dressé par le concile précédent, A la congrégation générale du 4 avril, Mï’Casser expose, au nom de la députation de la foi, le but de la définition : « Nous déclarons quels sont les livres sacrés ou canoniques : ce sont nommément ceux qui sont énumérés dans le décret du concile de Trente sur les Écritures canoniques ; et quant à ces livres considérés en eux-mêmes, ce sont ceux que la Vulgate latine contient en entier avec toutes leurs parties, o Collectio Lacensis, Pribourg-en-Brisgau, 1890, t. vii, col. 138. Min d’enlever toute espèce de doute au sujet de quelques versets, qui ne sont pas dans certains manuscrits 1res anciens et Ire,

lions de la Vulgate, mais qui se li veiil dans l’édition

Clémentine de celle version, un l’ère avait pro]

modification du texte : et m Vulgata editione Clemenhs VI II auctoritate promulgata habentur. lbid., col. I i I-I i. Mb’(lasser lii observer que ce1 amendement ne pouvait être admis., n effet, la Vulgate décl irée authentique par le concile de Trente diffère de l’édition corrigée 1605

CANON DES LIVRES SAINTS - CANONS DES APOTRES

publiée par Clément VIII, qui n’eat pai parfaite el laquelle on s laissé des butes. Le décret tut voû dans le sens indiqué par M 1, Gasser. Le concile du Vatican s’est donc borné à renouveler la définition de Trente. Il a cependant expressément défini l’inspiration des Livres saints et indiqué la nature de cette inspiration. Voir Inspiration.

2° li.nis son encyclique Providentitsimva Detu du 18 novembre 1893, Léon XIII ne s’est pas content de rappeler la doctrine définie par les conciles de Trente et du Vatican sur la canonicité et l’inspiration des Livres saints ; il a encore affirmé que l’autorité complète de la sainte I. eriture ne peut être démontrée nisi ex vivo et proprio magisterio Ecclesise, et justifié l’autorité- infaillible du magistère ecclésiastique. Il a aussi affirmé l’inspiration de tous les livres sacrés et canoniques, rems par l’Église et une inspiration égale en tous. Le souverain pontife a ainsi repoussé comme contraire à l’enseignement unanime des saints Pères toute opinion qui admettrait un degré inférieur d’inspiration pour les livres deutérocanoniques : professi unanimes (Paires el doclores) libros eos et integros et per partes a divino œque esse af/Jatu. Voir Inspiration.

En dehors des ouvrages spéciaux déjà indiqués pour l’histoire du canon de l’Ancien et du Nouveau Testament, on pourra consulter les introductions générales qui traitent toutes du can n des Livres saints. Sur les questions théologiques relatives à la canonicité, on lira les traités De locis theologicis qui tes exposent. Nous ajoutons ici des ouvrages qui embrassent dans leur contenu le canon des deux Testaments : J. Cosin, A scholastical history of the canon of the Holy Scriptures, in-4° Londres, 1657, 1672, 1083 ; H. Hody, De Bibliorum textibus originalibus, etc., infol. Oxford, 1704 ; J. Bianchini, Vindicte canonicarum > turarum Vulgatx lutiuæ editionis, in-fol., Rome, 1740 ; J. S. Semler Abhandlungen von freyer Untersuchtmg des Canons, 4 in-8 Halle, 1771-1776 ; 2’édit., 1776 ; C. F. Schmid, Historia antiqua et vindicatio canonis eacri V. S. que Testamenti, in-8 Leipzig, 1775 ; A. Alexander, Canon of the 0. and JV. T. ascertained, in-12, Princeton, 1826 ; Londres, 1826, 1831 ; J.-B. Malou, La lecture de ta sainte Bible en langue vulgaire, in-8-, Louvain, 1816, t. il, p. 1-201 ; Vieusse, La Bible mutilée parles protestants, in-8-, Toulouse, 1847 ; G. A. Credner, Zur Geschichte des Kanons, in-8 #, Halle, 1847 ; Gaussen, Le canon des suinter Écritures au double point de vue de la science et de la foi, 2 in-8°, Lausanne, 1860 ; S. Davidson, The canon of the Bible, its formation, history and fluctuations, in-8°, Londres, 1877 ; 3e édit., 1880 ; E. Preusclien, Analcrta. hurzere Texte zur Geschichte der alten Kirche und des Kanons, in-12, Fribourg-en-Brisgau et Leipzig, 1893, p. 127-171 ; Guidi, /( canone biblico délia Chiesa copta, dans la Bévue biblique, 1901, t. x, p. 161-174. Toutes les encyclopédies, catholiques et prolestantes, contiennent des articles assez développés sur le canon biblique. Voir enfin. Dictionnaire apologétique de la foi catholique, in-’r. Paris, 1909, t. i, col. 435-455. Pour une bibliographie plus complète, U. Ghevalier, Répertoire. Topo-bibliographie, col. 566-568.

E. Mangenot.