Dictionnaire de théologie catholique/IMMACULÉE CONCEPTION II. Dans l'Eglise grecque après le concile d'Ephèse. III Doctrine des byzantins du XIè au XVè siècle

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Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané (Tome 7.1 : HOBBES - IMMUNITÉSp. 475-485).

III. Doctrine des byzantins, du XIe au XVe

    1. SIÈCLE##


SIÈCLE. — La consommation du schisme entre l’Église romaine et l’Église grecque sous Michel Cérulaire n’exerça aucune influence immédiate sur le développement de la théologie mariale chez les byzantins. Cette théologie continua sa marche pacifique jusqu’à la chute de Constantinople. C’est à peine si, à partir du xiYe siècle, le contact de la théologie occidentale l’oblige à préciser ses termes, et si l’on devine comme une influence de l’école dominicaine sur la pensée de deux ou trois auteurs. Autant que nous pouvons en juger, les byzantins restèrent à peu près étrangers à la célèbre controverse qui mit aux prises, en Occident, les flls de saint François et ceux de saint Dominique, à propos du privilège mariai.

1° Théologiens des.T/ « , sii<= et xiii’e siècles. — Le premier panégyriste de l’immaculée que nous rencontrons autour de Michel Cérulaire est son ami intermittent, le célèbre polygraphe Michel Psellos († 119 ?), qui fut théologien à ses heures. Il nous reste de lui un discours encore inédit sur l’annonciation, qui se trouve dans le cod. 1630 du fonds grec, à la Bibliothèque nationale de Paris, xiV siècle, fol. 240-244. Commentant la salutation angélique et développant le parallèle classique entre Eve et Marie, Psellos écrit : « L’ange ajoute : Tu es bénie entre les femmes. L’expression fait pendant à la malédiclion, puisque la Vierge est introduite à la place d’Eve, comme Dieu à la place d’Adam. De même qu’au paradis, la transgression fut suivie de la malédiction, de même ici, la bénédiction s’attache à l’obéissance. Et jusqu’à la Vierge, notre race a hérité sans interruption de la malédiction de la première mère. Puis la digue contre le torrent a été construite, et c’est la Vierge qui est devenue le rempart qui a arrêté le déluge des maux. Bénie es-tu parmi les femmes, toi qui n’as ni goûté de l’arbre de la science ni transgressé le commandement, mais qui as été déifiée, et qui as déifié notre race, » La : |j.cu.£vr|7.£ |j. : /s’. Tr, ; -apOÉvoj toû’to oy, to yivoç y.Ar, f ovo|j.oCiv it^’i aoàv

7|Ç -c.M ; j.r, TOf o :. Elta (ôLoSoarîOïi to’épyaa ttjç Èrripporjç

Lal li-^o’ii’/ è~.T£ ; "/t3ULa f, -apGévo ; Tf| ; tûv y.T.y.ihPcr. : ’LJiiy, .)vJL0Yr| ; j.5vi) OJ èv y’J*’?^"’K [J-Vs toj çjXoj vE-j^aaivr) -f, i vv(j’)a=f.)ç, [xr[xi ::apa6âŒa Tr, v £v : oLr, v, f) ajTrj T£ OifoOai’^a zaî TO y£vo ? O^t’iiaioc. Loc. cil., fol. 242-243.

C’est bien de rexeinplion de la faute originelle que parle ici Psellos. Notons aussi cet autre passage sur l’absolue pureté et sainteté de la Vierge : « Loin de contracter tpiclque impureté de son union avec la matière, l’âme de Marie conununifpiait à son corps une beauté toute spirituelle. Seule entre toutes les Ames humaines, cette âme brillait dans son corps immaculé connue une splendeur i-élestc. I-^lle le contenait plutot qu’elle n’était contenue par lui. et lui conununiquait son propre éclat, plongée qu’elle était tout entière en Dieu. On aurait dit un dieu avec un corps, ij.fjvi, yàp a^Tr, ; rj OcOc’.oîjtoctti’ij’/ï), )7~ep T’.ç’j’jÇT/ix r"’iXr], -iï> ày.T, paT(|> £L£ ; v(i) i~i’xj.~t Sfôaati, fol. 241. Ce corps immaculé de la Vierge fut, du reste, formé de la plus piire substance des éléments et préparé pour être le sanctuaire de l’âme, » to £Z£ ; vT, ; gcô’jia 5I. zps’TTOvoç tt, ; tiôv z-.O’./ ibn’i oùjt’a ; Tj|x-c-r|XTa’., za’. utiT.i^j [iwi x’rj-.iri ttJ’-fJ/f, ’Lt’iaxEÛiiTa’. . Ihid. Comme les autres théologiens de Hyzance, notre orateur n’ignore pas <iue Marie a été l’objet, au moment de l’incarnation du Verbe, d’une certaine purification ; mais, comme eux, il l’enlend d’un surcroît de grâce et de lustre surnaturel donné à son unie par les irradiations de l’Hsprit-Saint, ày.at^ov tijv « J71v ajTf, ;, ’vix |j.âLXov’i'7-.’A’lfr^ Lai -p’J ; Grooi/TiV Toj A’iyoj TriXi-jvï-jTEpa’^-Tf " affirme positivement que, bien avant le salut de l’ange, la Vierge était remplie de la grâce de Dieu, Lî/apiT’oTo y » P "àÀatt, ciXj) rpoixyax3’.[j.6VTi Weo). Il va même jusqu’à lui

accorder la jouissance de la vision béatiliquc antérieurement à la conception de Jésus, ûrÈp -à iJspaç ;

j., L%
-piv ï] 3jÀÀao£tv, ôpùijx (-)cOv.

Jean Mauropus, métropolite d’Euchaïte, qui paraît avoir vécu dans la seconde moitié du xie siècle, a laissé un long discours sur l’Assomption, publié par A. Bal-Icrini, op. cit., t. ii, p. 549-G02. Plusieurs passages de cet écrit montrent que son auteur se faisait de la sainteté de Marie la même idée que les théologiens antérieurs et contemporains. Il dit, d’une part, que, grâce à Marie, « nous ne sommes plus soumis aux châtiments originels, que nous ne sommes plus les esclaves de la malédiction et de la corruption et que la mort n’a plus d’empire sur nous, » Ballerini, op. cit., p. 600, et de l’autre, il appelle Marie l’immortelle, rj àOava-oç, les prémices de la vie, f, à-ap/r ; -f, ; T’of ;  ;, la noblesse originelle, le type idéal de la nature humaine, f, tou yivo’j ; £j-|’£V£’.a, le produit excellent de la création et le fruit magnifique du monde, r, £jçop(a ttjç y.-’.'jZ’Mz, TO |J.£ya yj y.oiwj y£’opyiov, la beauté incomparable de l’univers, -Cyt iv Loa ; ji.t.) to LaÀÀ’.axov. Parlant de sa mort, il s’écrie : « Non, la terre ne saurait retenir ce qui est céleste, ni la corruption entamer ce qui est immaculé. Aussi le corps tout incorruptible de la Vierge se réunit sans retard à son âme tout immaculée, » oj yàp rJveyLEv f] yfj to o’jpâviov o’jo’f| oOopà TO àLr[paTOv. "EvO£v toi i|uyriv oÀw ; aij.’.> ; j.ov oXm ; xsOxpTOv ctou.a u.£Tao’.fôL£ ;. Ibid., p. 577. Qu’on remarque que, dans ce dernier passage, l’exemption de la corruption du tombeau, de ce fruit du péché originel, est mise en relation avec la pureté immaculée de l’âme et du corps de la Vierge. Comme tant d’autres théologiens. Jean ISIauropus admet en ]SIarie une augmentation de sainteté, au moment de l’incarnation du Verbe : « Par la voix de l’ange, Dieu la proclame bénie et pleine de grâce. Hénie, pleine de grâce, elle l’était déjà ; elle va l’être davantage sur l’heure, » îJÀoyrjiAÉvrjV ts -poj£17 : (ov y.a L£y_aptffi)[Ji£vrjV y.aXîia ; Tr, ’/ zaî r^po-jnîp/ouaav Taixa La ; -apaypfjaa -Àiov j-otpfojjav. Ibid., p. 5(52.

C’est vraisemblablement aussi vers la fin du xie siècle qu’a vécu ce.lacques le Moine dont.. Ballerini a publié cinq homélies mariales, en plus de celle qu’avait déjà éditée Combefis, P. G., t. cxxvii, col. 543-700. C’est un écrivain diffus et sans originalité, qui s’est beaucoup inspiré de ses devanciers, particulièrement de Georges de Nicomédie. On trouve chez lui à peu jjrès tous les lieux communs de la rhétoritiuc mariale. Signalons les expressions qui insinuent ou supposent la sainteté originelle de Marie. (>elle-ci est appelée r, à-£ ; poLaLo ;, ’r, à-£’; paTo : LaLiaç, celle qui a ignoré le mal et le péché. In Deiparæ Visit., loc. cit., col. (505 ; In Annunt., col. 049. Dieu a conservé sa servante à l’abri de tout reproche et de toute condamnation, àzaTâyvoaTov t7 ; v oi’Lét’.v csoj oi£Trjp7-, aaç. In Visil., col. 005. l-^lle embellit la laideur de la nature, et fait disparaître par sa maternité l’ignominie que cette nature tient de la transgression originelle, aiiTr, to àLa/, À£ç i^LoiXh » -iXii ttj ; çùgimç, y.ai -r)v èz -apa^aii’-i ; r : poiy£vo|jL£VY|V àooçiav -t^i oiV.êt’w SoÇâtct Toz » ;). Ibid., col. 681. Elle est les prémices, les seules prémices du genre humain, les iirémiccs de la bénédiction. / ; Tr, : sJXoyiaç i-T-V/r], In Visit., col. 081 ; cf. col. 504 ; le rejeton verdoyant et non dégénéré de notre race, le seul rejeton qui ait été l’objet d’un amour souverain, r ; EJIaLri ; -apasjiç, f, £jy : vf, ç jraçaiuàç Toj yivoj ; to [j.O’/ov Tf, ; ^J^E ».) ; î)-£pT|yazT|a£vov [iXi^Trjjjia, In Nalivit., col. 58 » ; In Prwscnl., col’. 028, 029 ; ’la source non bourbeuse, f, àOoPoToç "TiyT, ’. In Visil., col. 677..Sa beauté n’a pas été altérée. Tr, v àvoOsuTov rîp’.L-iu.Évr| rlipaioTTiTa. In yativ., col. 589. La concupiscence n’a eu aucune prise sur elle, et l’nmour divin a progressé en elle parallèlement à la croissance a

du corps. In Anniutt., col. 037, 649 ; In Visit., col. 076. Nous trouvons une doctrine plus explicite chez Théopliylacte, lU-chevêcjue de Bulgarie (f fin du xi’e siècle). Dans son honu^lie sur la Présenlalion de la Vierge au temple, il aflinue positivement que Marie lut justifiée des le sein maternel : « Il fallait, dit-il, cjue celle qui, par sa pureté et sa sainteté, l’emportait sur toute la nature, et qui avait été justiliée dés le sein maternel, éciiappât à la sévérité d’une loi qui n’était jias faite pour le juste, mais pour les seuls pécheurs » (il s’agit de la loi qui interdisait l’entrée du saint des saints). rriv iiT.lo zàaav tv’çûaiv àytacrfhïaxv ty ; LaÔapoTrj-i -La. : 8rLa (oOstaav iI. ; j.rÎTpa ;. In Præscnt. B. Mariée, P. G., t. cxxvi, col. 137. L’expression h. arjxpaç, ab utero, est vague par elle-même, et peut s’entendre de tout le temps de la gestation. La justification È/c [j.r ; Tfa ; peut tout aussi bien signifier la justification in primo instanti conceptionis que la sanctification in utero matris, sed post conceptionem. Les Pères disent que l’union du Verbe avec la nature humaine a eu lieu vI. ij-rj-paç, c’est-à-dire dès le premier instant de la conception. Cf. S. Cyrille d’Alexandrie, Commonitorium ad Cœlestinum papam, P. G., t. lxxv, col. 85, 87 ; pseudo-Athanase, Contra Apollinarium, t. I, c. l, P. G., t. xxvi, col. 1097. Par contre, la liturgic grecque emploie la même expression en parlant de la sanctification postérieure à la conception, de la sanctification in utero de saint Jean-Baptiste et de plusieurs autres personnages comme Samuel, Jérémie. Euthyme le Grand. Cf. les Menées au 20 janvier, au 1° mai, etc. Quel sens Théophylacte donne-t-il, dans le cas présent, aux mots : o.LaifoOsïcrav iI. (jrj-pa ; ? Nul doute, d’après nous, qu’il ne veuille dire ce que nous a déjà dit le moine Théognoste, à savoir que Marie a reçu la grâce de la justification dès le premier instant de sa conception, et que, par conséquent, elle n’a pas contracté la tache originelle. Cette interprétation n’est pas seulement dans le sens général de la pensée byzantine, à l’époque où nous sommes arrivés. Elle est aussi commandée par le contexte et par d’autres passages des écrits de Théophylacte. Qu’on remarque, en effet, que les mots : 81xa’.f’)0Ei(iav sx ; j.rjTpa ;, sont précédés de l’afFirmation de la sainteté et de la pureté de Marie au-dessus de toute créature. Comment la mère de Dieu aurait-elle surpassé en pureté toute créature, si elle avait contracté, dès le premier instant de son existence, la souillure des enfants d’Adam, pour en être purifiée peu après par la grâce justifiante ? Voici du reste un autre passage de la même homélie sur la Présentation qui nous indique suffisamment la véritable pensée de l’archevêque de Bulgarie : « La mort, escortée par le péché, qui lui prêtait main forte, étendait partout son empire et exerçait contre nous un pouvoir absolu. Conçus dans l’iniquité et enfantés dans le péché, nous devions nécessairement devenir la proie de la corruption. Aussi fallait-il que la génération liumaine fût sanctifiée, et que le torrent de la mort, coulant par la vallée de la génération, fût arrêté dans son cours par le grand rempart de la sainteté. Puis donc qu’il en était ainsi, puisqu’il fallait que la voie qui nous introduit dans cette vie mortelle fût d’abord sanctifiée par la grâce : afin que le début et le terme se répondissent, celle qui doit enfanter le Verbe incarné est choisie, embellie de toutes les vertus et élevée au-dessus de toute créature. Elle naît de la tribu royale de.Juda. A ses parents elle apparaît comme un fruit donné de Dieu… Elle les surpasse par la grâce et la sainteté autant que le mode d’habitation de Dieu en elle l’a emporté sur le mode d’habitation de Dieu en eux, » tva y.ct.l xi xD.f] TOUTOi ; â ;  : axoXo’jOrîar) zaxàXXTjÀa, èxXÉysTai xai r^ jioôç, -ov Toxov u-T|pETaouCTa, T : (xaai ; yapÎTfoÛEtaa lau àcETXÏ ; xa ! r-dir, : y.-<.n-t<ii j-ipiyouaa… xaprro ; avaça vEiaa 0 : 030070 :. 7Z)irf., col. 132-133. Notons enfin que^ commentant les paroles de la salutation angélique et s’arrêtant sur le mot ::JLo-)’Y| ; j.£vi, . benedicla, Théophylacte lance, en passant, cette afiirmation : Eve avait été maudite, Marie est bénie, » zr.v. 8= zExaT/Îpato r, EJa, £jLoyï| ; j.5VT| a-jT7j iy.oJi :. Enarralio in Evanf/elium Lucse, P. G., t. cxxiii, col. 701.

Dans un discours sur la Dormition de la sainte Vierge .lean Phournés, qui vivait au début du xii'e siècle, énumère parmi les merveilles dont Marie a été l’objet de la part de Dieu la suivante : " A cela il faut ajouter qu’aucune pensée coupable n’a jamais euaccès dans son cœur, à cause de sa pureté éminente… Sirach dit : Qui pourra se glorifier d’avoir un cœur pur, et qui pourra se proclamer en toute sincérité innocent de tout péché’?(Prov., xx, 9.) Comme la Vierge toute sainte appartenait à la famille humaine, elle aurait dû, elle aussi, comme les autres, être comprise dans cette sentence, mais parce que l’Esprit-Saint et bon et miséricordieux habitait dans son cœur et le sanctifiait, jamais elle ne fut assaillie d’aucune pensée coupable… Acausedeladésobéissanced’Adam, notreàme setrouve divisée comme en deux parties ; la partie intérieure subit la tyrannie des passions ; la partie supérieure aspire aux choses célestes. Parl’action du Saint-Esprit, notre âme redevient une et peut s’attacher au bien par un élan indivisible. Mais si cet effet se produit en nous, qui sommes tout entiers de la terre et du limon fangeux, que faudra-t-il dire de celle qui est devenue la demeure de la divinité, après être née de la promesse, , après avoir été donnée à ses parents comme un fruit sacré de leur prière, de celle que le Saint-Esprit forma et éleva dès le berceau, qu’il nourrit d’une nourriture céleste dans le Saint des saints ? » v. 8e -o’j-o es’f/jiàjv, Tcôv Tfj ; yfjç oXtov ovtojv y.al Trj ; [jOp|jOptô80-j ; îXûoç xa ; aîaOr^aE’oç, -J. ypri -Epi Trjç Iko-.r^-oi SûyE ?ov i-Evo ; x£vir)ç^ eÇ ÈJtayyE^iaç çuELarj ; Trpo’TEpov xa ; xap-ôç e’j/^ ; ’-Epo ; ÎEpwv yEvvT|TOpf’)v ojar, ;, r^v t6 rivsïijLa -o ayiov vi, 7 : idŒV Su-Xaac xa ; È-a’.oâywyrjaE. In Dormitionem Dciparse, édité à la fin des homélies de Théophane Kéramcus par G. Palamas : HEoçavoO ; -qXi Kzpaij-Éojç’rj’xù.[a.<. eiî EjayyÉÀ’.a x’jpiaxà xa ; ÉopTa ; to3 oÀo-j Evia-j-roO, Jérusalem, 1860, p. 272. Phournés, on le voit, met clairement en relation l’impeccabilité de Marie et son exemption de la concupiscence avec sa sainteté originelle, due à une intervention spéciale de Dieu. Marie n’est pas, comme nous, de la terre et du limon fangeux. Sa naissance a été sainte. Elle est le fruit sacré de la prière.

C’est par l’exemption de la tare originelle que le même orateur explique le privilège de l’assomption glorieuse, dont la mère de Dieu a été l’objet : « Dès l’origine, dit-il, les deux corps de nos premiers parents devinrent la proie de la corruption, à cause de la transgression qui causa leur chute ; d’eux le virus mortel de cette corruption s’est transmis à nous tous. Voilà pourquoi maintenant, pour la première fois, deux corps, secouant la corruption, sont devenus les prémices de l’incorruptibilité que nous attendons, » o-.à toOto xa ; yjv 8’JO ao’jiiaTa rrpohw ; -r{^ çOopàv àTCOT’.vaçâiiEva, à-apyT] Tr, ; ÈÀ-iro[j. ; vïj ; àcpflaptjîa ; ysyôvaai. Ihid, , p. 273. Adam et Eve pèchent, et leurs corps subissent les premiers le châtiment qui va atteindre leur postérité. Jésus et Marie, parce qu’ils n’ont jamais péché, parce qu’ils n’ont aucune part à la faute originelle, échappent au châtiment qui accompagne cette faute, et leurs corps sont les premiers à revêtir l’incorruptibilité. Jésus et Marie forment donc un groupe à part dans l’humanité. Lui est le nouvel Adam ; elle est l’Eve nouvelle. Tout comme le premier Adam et la première Eve présidaient à l’humanité déchue, ainsi eux deux sont à la tête de l’humanité renouvelée^ qui vit dans l’espoir de l’immortalité glorieuse.

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IMMACULEE CONCEPTION

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Le poète Théodore Prodromes, qui vivait sous les Comnènes, a laissé un Commentaire des canons de saint Cosmas de Jérusalem et de saint Jean de Damas, dans lequel se lit le passage suivant : « Le feu de la divinité ne consuma point le sein virginal, dit le mélode. S’il est vrai, comme dit l’Écriture, que Dieu est un feu qui consume le péché, comment aurait-il pu consumer la Vierge qui le reçut dans son sein ? Il est absolument impossible, en effet, de supposer ou d’imaginer en elle la plus légère trace de souillure ou de péché… Comment, dès lors, ce feu innnalériel, qui dévore les péchés, aurait-il pu consumer le corps saint, immaculé et complètement exempt de toute souillure de la ToujoursVierge" ? Rien dans ce corps qui pût être la proie des flammes divines, rien de peccamineux, » iv Tj oùSîv rj-(oaTic13v p’j-aptaç r àixapTia ; t’/vo ; o-ovoTJaa : t’çavraaGrjvat oÀ’oç âvoÉysta’.. Iltîjç av’scpXîÇî to aa7 : ’.Àfjv y.’xl -avapp’j~ap6v xa ; oi’^'.rrj tv ;  ; aiir.açJti’/ryj aôjaa. H. M. Stevenson, Thendori Prodromi commentarii in carmina sacra melodoium Cosmæ Hicrosolymitani et JoannisDamasceni, ’Rome, 1888, p. 52. Quand Théodore aflirnie qu’il est absolument impossible de supposer ou d’imaginer en Marie la moindre trace de souillure ou de péché, il n’a pas seulement en vue les péchés personnels, mais aussi la souillure originelle. Ce théologien d’aventure, en effet, parle plus de vingt fois de cette souillure dans le commentaire liturgique d’où nous avons tiré le passage qu’on vient de lire. 11 l’appelle « le péché qui se glisse furtivement en nous pour notre malheur, » f) TrapîiïOapcïia y.axojç f| ; j.ïv àaipT’ï, ibid., p. 35 ; la mort, la corruption, la souillure que lave le baptême, la souillure peccamineuse de la nature humaine, ^jâ-T^aaa Lâdapi ;  ; ’j-iy/i -f, : âiiipTia ; Tôiv iy. yf, ; -/ aïOivtfov, — ô âaapTT|T’.zoç -f^ : àvOp’oTTivi, ; fJiitoç pj~oç, p. 76, 79.

L’historien et théologien Michel Gljkas, qui mourut dans les premières années du xiie siècle, a manifesté sa croyance à la conception immaculée de Marie en parlant de son assomption glorieuse. A deux reprises, dans ses Annales, P. G., t. CLXvm, col. 440, et dans sa XXII^ lettre théologique, S. Eustratradès, Mi/ar, / -.r)) V’kMy.i cl’; TΠ; àrop-aç Tr, ; 0 :  ; a ; ypxs ?, ; y.îçâXa’.a, Athènes, 1906, t. i, p. 262, il a transcrit le passage de l’homélie de Jean Phournès sur la Dormition que nous avons cité plus haut, où il est question des deux corps de Jésus et de Marie, prémices de l’incorn’ptibilité, par opposition aux deux corps d’Adam et d’Eve soumis aux ravages de la rorruplion à cause de la transgression.

Nous trouvons aussi un témoin du privilège mariai en Néophyte le Reclus (t vers 1220), qui a laissé un volumineux sermonnairc encore inédit. Le cod. 1189 du fonds grec de la rilbliothècpu’nationale de Paris renferme deux de ses homélies mariâtes i)0ur les fêtes (le la Nativité et de la Présentation au temple. L’homélie s)]r la Nativité contient ce passage significatif : .

ne, flélivrée par le créateur de la nature des liens de la stérilité, conçoit de son éyioux, .loarlilm, Marie, la Fille de Dieu, qu’elle a enfantécaujourd’lmi comme les prémices de notre salut et la mère immaculée de Dieu le Verbe, et comme les prémices de la rénovation de notre nature vieillie et ternie par la transgression du commandement divin, y.% àrap/r, v xa’.voupyi’aç xf, î -a) ai’.>Onîr, : ôià rapa’îâî : ) ; Oî-a ; âvToXf, ; y.ai àçavtlir, ; çjij’o ; f| ; i.(T)v. Imitant la femme de la parabole, qui mêle un peu fie levain à trois mesures de farine pour faire lever toute la pvle, le créateur a renouvelé par ce levain très pur formé de ses mains divines {= la Vierge) toute notre pvle vieillie, fi’.x Tf| ? OsorÀMTOu ÇJ ; j.T, ; Taj-r, ç y.%[ ur.iyLnfiiwj oXov TO T.r’f.x : i<)()’v/ ïJia[/a r/xCiv àva-z.âîa ; ô -Àaa’o-jpyoç èx « iv’/jp7r, a :. Mais voici le plus étonnant, la merveille des merveilles : le Roulanger divin, qui est la bonté

même, s’est mêlé lui-même d’une manière ineffable à ce levain très pur, et, en ayant pris une petite partie, il a travaillé d’une manière admirable toute la pâte et toute la fournée. C’est pourquoi il disait dans la suite : Je suis le pain vivant ; je suis le pain de vie. Celui qui me mange n’aura jamais faim ; » x ? LaOaptoTâTr, Toij-r, Ta-j-ij (j-jvs[j. ; ?£V jauxov àpprjffoç 6 C-îp-y. âOapo ; àp- : o~o : ’j ;, y.x’. s ? ajtr|Ç [J.épo ; -’. avaÀajBo’iJ.îvo ;, ciÀciv TO ijpaaa qacôv y.7.1 oÀr|V ~î]’j ô’.apT ; av ;  ; pvïaa’: û Oa’jaaa : ")ç. Cod. cit., fol. 13 v°. Sous une comparaison vulgaire. Néophyte cache ici une pensée profonde. Il indique bien la raison pour laquelle la Vierge devait être séparée de la masse du genre humain infecté par le péché d’origine. Devant fournir au Verbe une chair immaculée, il fallait qu’elle fût elle-même exempte de toute souillure ; il fallait qu’elle fût les prémices de l’humanité restaurée. C’est pourquoi Dieu est intervenu directement pour former sa future mère, que notre moine appelle un levain pétri de ses mains divines, fiiÔT.Aanxo : ’Çù’j.r^.

Germain 11, patriarche de Constantinople (12221240), a composé, entre autres discours, une longue homélie sur l’Annonciation, qu’a publiée A. Ballerini, Sylloge, t. ii, p. 283-382. Deux passages de cette pièce méritent d’être cités ici. Expliquant les paroles de la Vierge à l’ange : « Comment cela se fera-t-il, puisque je ne connais point d’homme ? « l’orateur s’écrie : « Que tu ne connaisses point d’homme, ce n’est pas là pour toi chose bien considérable. La merveille, c’est que ton esprit est d’une pureté souveraine et reste inaccessible au moindre mouvement déréglé et inconvenant. Tu es un paradis planté par Dieu, et dès que tu as été engendrée d’après les lois particulières qui t’ont donné ta nature. Dieu a chargé les chérubins d’agiter en cercle autour de toi leur épée flamboyante pour te conserver de toute part inaccessible aux embûches du serpent perlide, » -apà3s ; ao ; il Ojo^jtjutoç-y. ixi cÇ fJTO’j toïç ao’.'ç -îifjTOupyrijat ç’j-off~dpoi ; çuacu ; vd ; j.O’. ;, xà XîpO’jSîjj. ïxa’çiv ô Hcdç zaî tï|V çÀoytvf|V poaçaîav Trjv OTpîço ; j13’vr|V y.uLÀoOiv crou aTpeç£cOai, y.a.1 TravToOsv av£-160’jÀs’jTov a’jvxripjîv zy. xoj ooÀidspovoç 058( » ç. Op. cit., p. 370-371. L’idée de la sainteté originelle de Marie et de sa préservation de la tache originelle nous paraît se dégager clairement de ce passage. Germain marque bien que l’intervention spéciale de Dieu dans la formation de sa future mère a eu lieu dès le premier instant de sa conception, : ? dxou -îçjxoupyf |7at xoïç ! TO ! ç çuxoa-fJpoiç çjsj^) ; vo|j.O ! ç. Du reste, la même doctrine est exprimée dans cet autre passage : « Eve a été maudite ; Marie a été remplie de la grâce. La racine est amère ; le fruit est plus doux que le miel. La racine a été ensevelie dans la terre pour y être la proie de la corruption ; le fruit plane au-dessus de la terre par rincorrupliliilité qui vient (le la sainteté ; car là où se trouve la sainteté, là aussi se trouve l’incorruptibilité, LrLaxrjpaxa ! r, IvJ’a, I. :  ; / ap : ’x)xa ! S ; f, Map’.âa- /, L’-Xv- "izpi, '> oi y.ap-oç yL’jxû-Tîpo ; ! jiiX ; xo ; …’.rouyip r, v.^’.i’t’jù’ir, , ky.i’.ii xa ; xo àzr, ’patov. Les premiers membres de notre nature ont été ensevelis dans la terre pour servir de tête (de souche à l’arbre de l’humanité), et ces racines sont devenues la proie des vers. Mais voici qu’enfin le fruit a reçu l’incorruptibilité en partage, et, contrairement à l’ordre de la nature, il infuse cette incorruiilibililé aux racines. Le rejeton régénère ceux qui l’ont porté… La Vierpe, en eflet, surpassant incomparablement par son innocence et sa pureté la nature dont elle est issue, et placée comme au sommet de l’humanit-S a reçu la première la pluie divine qui descend du ciel. » Ibid., p. 308-310.

Théologiens des XI V ci X Y’siècles.

Au xive siècle.

la théologie mariale atteint son apogée, à Ryzance. Tous les grands théologiens fie cette époque rivalisent

de zôle pour honorer la Toute-Sainte par quelque discours parliculièrement soigné. La plupart de ces morceaux sont niallieurcusement inédits. Nous avons pu en consulter quelques-uns. Ils sont en général remarquables pour le fond comme pour la forme, et presque tous formulent d’une manière expresse ou équivalente la doctrine de la conception immaculée.

Signalons d’aliord le discours de Jean Gabras sur la Présentation de Marie au temple, publié dans le m^ volume des Anecdota grieca de Boissonnade, Paris, 1831, p. 71-111, et non encore utilisé par les historiens de l’immaculée conception, Migne ayant oublié de l’insérer dans sa Patrologie. L’intervention spéciale de Dieu dans la naissance de Marie y est particulièrement mise en relief : « De même, dit l’orateur, que, lorsque Dieu créait le ciel et disposait le cours harmonieux des astres, tous les anges le louèrent ; de même, lorsque Dieu créait cette Vierge, lui donnant d’abord les premiers traits encore indistincts, puis achevant de lui donner la forme humaine, tout le chœur de l’armée céleste, instruit par Dieu lui-même de la grandeur du mystère, éclata en hymnes de louange. C’était là, en effet, une grande œuvre, une merveille jetant dans l’admiration les anges et les hommes. Les choses les jikis éloignées les unes des autres se trouvaient réunies. La terre, oublieuse de sa nature, s’élevait miraculeusement jusqu’au ciel, et le ciel, sans rien perdre de sa dignité, s’abaissait vers la terre. La terre fut alors remplie de la connaissance de la gloire du Seigneur (llabacuc, ii, 14) ; l’univers se sentit près de Dieu, et une joie divine s’empara de lui. » Op. cil., p. 82-83. Cette joie apportée par la naissance de Marie, Gabras l’oppose à la tristesse causée aux hommes par la désobéissance d’Adam et d’Èvc, désobéissance qui a attiré sur les hommes la condamnation. Ibid., p. 84. C’est qu’en ciïct Marie doit, d’après les desseins éternels de Dieu, régénérer l’humanité pécheresse. Ibid., p. 100.

De Grégoire Palamas, archevêque deTliessalonique (tl360), soixante-cinq homélies ont été publiées ; cjuarante-trois se trouvent dans la P. G. de Migne, t. cli, vingt-deux autres dans le recueil de Sophoclis, ’l’oj Èv âyt’ot ;  ;  : aTpo ; f, [j.ôjv roïiyoptVju to’j IIavajj.à’j).ùJ.o.i L’p', Athènes, 1861.’La doctrine mariale qui y est contenue, et qui est restée inaperçue, est de tout point remarquable et mérite de retenir l’attention. Quand on parcourt ces pièces, une chose frappe tout d’abord : c’est l’insistance que met le docteur hésychiaste à rappeler l’universalité du péché originel, à dire que Jésus-Christ seul a été conçu sans péché, et qu’il n’aurait pu être immaculé ni un homme nouveau, s’il avait eu un père selon la chair. Il semble que l’idée de la sainteté initiale de la mère de Dieu soit résolument écartée par ces déclarations réitérées. Il n’en est rien cependant. Palamas a f-i une vue très nette de la difficulté à concilier la cotiLeption immaculée de la Vierge avec sa naissance selon les lois ordinaires, difficulté d’autant plus grande pour lui qu’il paraît, à certains endroits, considérer le péché originel comme une sorte de qualité morl.ide se transmettant par la génération. Cette difRcullé, il l’a résolue d’une manière tout à fait inattendre. Voici le texte capital qui nous livre le fond de sa pensée. Il est tiré d’une homélie sur la généalogie du Christ et de sa mère : « Le premier homme, cédant aux suggestions malignes du Méchant, transgressa le commandement divin, perdit l’Esprit, gage de sa Pdiation divine, et traversa ainsi le dessein de Dieu. Mais comme la grâce est sans repentance et son dessein infabillile, un choix est fait parmiles descendants d’Adam, afin qu’après de longs siècles se trouve à la fin u’i vaisseau convenable de cette grâce et de cette divine fdiation pour la réalisation du plan divin, aꝟ. 1 qu’apparaisse un vase d’élection digne de servir à l’union hj’postatique de la nature divine et de la

nature humaine, union qui non seulement élèvera notre nature à un état surnaturel, maLs qui rétablira dans l’état primitif le genre humain tout entier. Ce vaisseau, ce vase d’élection, c’est la fille de Dieu, la Vierge, mère de Dieu, qui l’a été. C’est pourquoi elle a été proclamée pleine de grâce par l’archange Gabriel, comme étai’.t véritablement l’élue des élues et le vase sans tache et immaculé, bien digne de coopérer à l’incarnation et de recevoir la personne théandriquc. Cette Vierge, Dieu se l’est donc réservée avant tous les siècles. Il l’a choisie parmi toutes les générations et lui a départi la grâce dans une mesure supérieure à celle de tous les autres, faisant d’elle-même, avant même son enfantement merveilleux, la Sainte des saints, et lui faisant les honneurs de sa propre maison dans le Saint des saints. » In Christi yciwulogiam, Sophoclis, op. cit., p. 213-214. Palamas explique ensuite en quoi a consisté ce choix de Dieu parmi les descendants d’Adam, et il nomme quelques-uns des ancêtres bénis de la Vierge : Seth, Énos, Hénoch, Lamech, Noé. Puis il continue en ces termes : « L’Esprit-Saint préparait à l’avance la venue en ce monde de la mère de Dieu. Il choisissait dès l’origine’et purifiait la série de ses ancêtres, admettant ceux qui étaient dignes de ce choix, rejetant complètement les indignes. C’est au sujet de ces derniers que le Seigneur dit un jour : Mon Esprit ne restera point dans ces hommes, parce qu’ils sont chair (Gen., vi, 3). C’est qu’en elïet, bien que la Vierge, à qui le Christ a emprunté son humanité, soit née de la chair et de la semence d’Adam, cette naissance ne s’est cependant pas produite sans l’intervention du Saint-Esprit qui, dès l’origine, a, de diverses manières, purifié les ancêtres, les choisissant suivant leurs mérites parmi les générations. Voyez comme il est clair, pour tous ceux dont l’Esprit-Saint illumine l’intelligence, que toute lÉcriture inspirée a été composée à cause de la Vierge, mère de Dieu, > -prjioy.uvoaî ; 8è -La !  ; >// Ta-j-r, ; î : ’ç to £tva’. ~pûo30v ocvojÔîv sxXcydjAEVov zaî àvay.aOaîpov’7 ; ’/ -ou yivouç astpiv,, . liî yàp Laï è/, aapzoç -La ! a-spuaTo ; ’7à[j. r, riapOivoç, à ? tjç x6 zatà ci(, y.a. Xptaxo ;, àÀÀ’àz FlvïûijLaTo ; àyLOu, "Lay.£vou "oXusiotï) ; avfoOîv zaOatooaivo’j, Tojv L(xz’a. ysvsà ; àpii-ivSTjV ÈLÀEyoaévov, Ibid., p, 216. Voilà donc comment Dieu s’y est pris pour écarter de sa futuremère, élue avant tous les siècles, la souillure originelle, qui aurait dû l’atteindre, en vertu de sa descendance d’Adam. Il a pris soin, dès l’origine, de lui choisir des ancêtres dignes d’elle. Il les a purifiés, de manière à ce qu’à la fin, sic -iXoc, poussât sur cette souche ainsi sanctifiée une tige immaculée, la Vierge, fille de Dieu, digne par sa pureté de devenir sa mère, car « il est une chose impossible à Dieu : c’est de s’unir à ce qui est impur, avant de l’avoir purifié. C’est pourquoi il fallait de toute nécessité, pour concevoir et enfanter l’ami et l’auteur de toute pureté, une Vierge très pure et parfaitement immaculée, » o’.à to3to y.a ! à|j.oÀjvTOu -iXioi : za’. y.aOap(’)T(XTr, ç 5 ; àvayzf, ; ’iost TrapOivoj, In Præsent. Deiparæ, Sophoclis, p. 123. Pour restaurer le genre humain, dit encore Palamas, le Verbe devait s’unir hypostatiquement à la nature humaine, et il lui fallait une chair qui fût à la fois nouvelle et tirée de notre masse pour nous renouveler nous-mêmes par nous-mêmes. Il a trouvé en la Vierge Marie une parfaite coopératrice pour réaliser son dessein. C’est elle qui lui a fourni de sa propre substance une nature immaculée. Ibid., p. 120. On ne voit pas très bien en quoi a consiste au juste cette sorte de purification progressive des ancêtres de Marie. Mais l’important pour nous est que Palamas affirme une intervention spéciale du Saint-Esprit pour préserver la Vierge de la souillure originelle, afin qu’elle pût donner au Verbe une chair tout immaculée, une chair à la fois nouvelle et nôtre, sapzo ; La’-vv ;  ; ô|jLoij za ! qa£Tipa ?,

Le docteur hesychiaste exprime de plusieurs autres manières la sainteté originelle de la mère de Dieu. Il l’appelle un monde nouveau et un paradis merveilleux, et l’image non mensongère de la noblesse primitive de l’humanité, Tf, ; avo)0£V àvÛp(o : tivi, ; £-Jy£V£Îaç à’iîjor, ; àyavaa. Sophoclis, p. 6. « Voulant créer une image de la beauté absolue et manifester clairement aux anges et aux hommes la puissance de son art. Dieu a véritablement fait Marie toute belle. Il a réuni en elle toutes les beautés partielles, qu’il a distribuées aux autres créatures, etl’aconstituéele commun ornement de tous les êtres visibles et invisibles ; ou plutôt il a fait d’elle comme un mélange de toutes les perfections divines, angéiiqiics et humaines, une beauté sublime embellissant les deux mondes, s’élevant de terre jusqu’au ciel et dépassant même ce dernier… Elle est aux frontières du créé et de l’incréé, aj-rri aovi, OLîOdoio’v èot ; Ltio’t ;  ; za ; àLTisTO’j çja£’) ;. In Dormit. Deiparæ, P. G., t. cli, col. 468, 472. Seule parmi tous les hommes, Marie est apparue parfaite en tout, ne manquant d’aucune perfection à n’importe quel point de vue, aovr|V tôjv àvOp(o ::’i)v âÇ aîdivo ; ultiÔîvo ; èXÀi-tj zaxà ; /t, 0£v çavsïaav. In Prsesent., Il, Sophoclis, p. 142-143.

Se faisant de la sainteté de Marie une idée si sublime, Palamas ne pouvait évidemment entendre que d’une augmentation de sainteté cette purification du jour de l’annonciation dont parlent certains anciens textes : « Tu es déjà sainte et pleine de grâce, ô’Vierge, dit l’ange à Marie ; mais le Saint-Esprit viendra de nouveau sur toi, t’apportant une augmentation de sainteté comme préparation au mystère divin qui va s’accomplir en toi, » 0’.' àY’.aa|j.oij -c.oa0rjy.ï, ; j’iTiÂQ-iça ; i-(y.’j.6X.’jy La ; rpozaTaoTt’Cov tï]’/ âv ao ; Osouçy^av. In Annunl., P. (, ’, ibid., col. 176.

Les louanges que Nicolas Cabasilas († 1363) donne à la Toute-Sainte ne sont pas inférieures à celles que nous venons d’entendre sur les lèvres de Grégoire l’alamas. Dans trois homélies mariales encore inédites et conservées dans le cod. 1213 du fonds grec de la liibliothèque nationale de Paris, ce théologien développe surtout cette pensée que « Marie est le type idéal de l’humanité, c|u’elle seule a pleinement réalisé l’idée divine de l’homme ; qu’clle est l’homme par excellence. » Il parle d’abord d’une intervention toute spéciale de Dieu pour former le corps et l’âme de sa future mère. Sans doute plusieurs autres saints personnages ont partagé avec Marie le privilège de naître par miracle de parents stériles, à la suite de prières adressées au Seigneur. Mais entre la naissance de la "Vierge et la leur, il y a toute la différence qui existe entre la cause et ses elTels, entre la réalité et la figure : « Marie seule a été véritablement le fruit d’une prière sainte, parce qu’cn elle il n avait rien cjui ])ùl inspirer l’aversion ou la haine. Seule, elle a été un don de Dieu, digne à la fois d’être donné à ceux qui le demandaient, et d’être reçu par eux ; rien, en elTet, dans ce préscnt, qui fiU indigne de la main du donateur et de celle du riestinatairc. C’est pourquoi il était naturel que la nature ne put contribuer en rien à la génération de l’Immaculée, et que Dieu fît tout en cette œuvre, écartant la nature pour former lui-même immédiatcinenl, pour ainsi dire, la Hienheurei’^e, comme il créa le premier homme. VA la Vierge, en elTet, n’esl-clic pas, à proprement jiarltr, le premier homme, la prcmiêre cl la seule qui ail montré en elle la nature humaine ? » i~v. Lai >i.%K’.i-% Ly.’. Ljv-’iiTiTa T.^^Cr.’ii avOf.’.)-oç f, zarJlévfjr, r.y-’nr, L% : |jiovti ttv çji’.v ïfif^i’I. Ilomil. in Naliv. B. Jl/an’a ?, COI-I. ClL, fol. 3 ro.CU’t te dernière pensée, (Cabasilas ne cesse de la répéter : Seule parmi les hommes qui ont vécu ou vivront au cours des siècles, la Vierge a tenu ferme contre riniquité, depuis le commencement de son exi.stencc jusqu’à la fin ; seule,

elle a remis à Dieu dans son intégrité la beauté qu’il nous donna, xa ; -oi (^sôi to r.io olJtou So6£v r^ij-îv ày.r^patov à-Éoojy.E -LctÀXoç ; seule de tous les hommes qui ont vécu dans le passé ou qui vivront dans l’avenir, la bienheureuse Vierge a gardé la forme humaine dans toute sa splendeur, pure de toute forme étrangère. Aucun des autres, dit le prophète, n’est exempt de souillure, Tr, ’/ àvOp’Djrsfav iosav atoiaia La ; ji-ptï) ; £ ; ’oo3ç s^’À'.zpivJ] ravTO ; àXÀOTpiou [ao’vïi -(ùv y£voij.£vo)v za ; Twv ï-£ct’iioaivtov àvOp(Ô7 : tov r, aaxaiia -apOivor. Ihid., fol. 4 v".

La pureté absolue de Marie et son exemption de la faute originelle sont proclamées en plusieurs autres endroits des mêmes homélies : « Le mur de séparation, la barrière de l’inimitié n’existaient pas pour elle, et tout ce qui tenait le genre humain éloigné de Dieu était enlevé de son côté. Avant la réconciliation commune, elle seule fit sa paix ; ou plutôt elle n’eut jamais, en aucune manière, besoin de réconciliation, ayant, dès l’origine, tenu la première place dans le chœur des amis. Mais c’est pour les autres hommes qu’elle fut médiatrice de paix, aàÀÂov oï az&vocôv âxsivr) u."£v ojôaaài ;

Ci’jS£-(Ô-Ci’: £ £5£r|0T|, ZOGUSaïoÇ ï 0.y/fli iv T(0 TÔJV Ç ! À0)V

ŒTa ; x£VY| yo’pi ;). » In Annuniiaiionem, fol. l’7v<’. Le rôle

de la Vierge a été tout pareil à celui de l’arche, qui, lors du naufrage universel de la terre, sauva l’homme et sa postérité, et échappa elle-même à la catastrophe commune. Ibid. Marie, dit encore Cabasilas, est la terre nouvelle et le nouveau ciel : elle est terre, parce qu’elle tire son origine d’ici-bas ; mais c’est une terre nouvelle, parce que par aucun endroit elle ne tient de ses ancêtres, et cju’elle n’a pas hérité de l’antique levain. Elle est, selon l’expression de saint Paul, une pâte nouvelle, et commence une race nouvelle, yy ; a : v ot ;, iziiOcV zaïvr] Zï, ci" ; toï ; ~Goydvo ; ç ojoor. ; jLfJO£v 7 : poaf|Z£v, ’rjoï xr, ; raXaià ? £y.X71povo[j.T, 5e Xl[J.1^i, àXX’ « ’jxYi, zaxà tov -jrj IlaûXo-j Xo’yov, çûpaaa v : ov zaTsaiT, , zat vifjj zv/ôi rjpÇaTO yivouç. In Dormilionem, fol. 37 v". La Vierge est l’épouse toute belle des Cantiques, en qui il n’y a aucune tache : « Le ciel lui-même, dit l’Écriture, n’est pas pur devant toi, Seigneur (Job, xv, 15). » Mais l’amie de Dieu, la Vierge, n’est pas seulement pure de tout m’ai ; elle est belle ; et pas simplement belle, mais toute belle : Tu es toute belle, est-il écrit (Cant., iv, 7). De même que la lumière que nous voyons, tout en embellissant les choses visibles, ne se trouve pas en elles toutes, mais seulement dans le’disqne du soleil ; de même la beauté de l’humanité, et toute la noblesse et la grâce qui ornaient notre nature avant qu’elle perdît Dieu, et tout l’éclat (lu’elle aurait eu, si elle axait observé la loi, la sainteté qu’elle axait, et celle qu’elle n’a lias eue et qu’elle aurait dû avoir se sont concentrées dans la bienheureuse Vierge seule. Ibid., fol. 38 v ». Personne n’a été saint avant la bienheureuse Vierge ; elle a été la prcmière et la seule à être absolument exempte de péché. l- ; ile s’est montrée sainte, et sainte entre les saints et plus encore, oJOîiçyip ayioç -ptv £lvat ttiV [jaza p’.av, ïALa -p(i)xr| y.ai ij-ovi, tr, ; i. ; j.apT

zOi’, //, ay

j.ivr„sa’jTï|V T£ iyt’avïoî’.ç ;, y.i i.y ; av iyi’ov za ; £’. t ; [j.£iÇov.

Ibid., fol. 40. Si c|uclques saints docteurs ont dit qu’elle avait été préalablement puriliée jjar le Saint-Esprit avant de ilevenir la mère du Sauveur, il faut croire cpi’ils ont entendu cette purification dans le sens d’une augmentation de grâces. Les docteurs parlent, en effet, des anges de la même manière, et disent qi’ils sont purifiés, bien c|u’il n’y ait en eux rien de mauvais. TV, ’/ zà()ap3 ; v -poaOrLT|V yap ; Tfi)V aÙTOï ; [JoûXîoOa ; ypT, v’, |x{r£ ! v, o ; ’zaî Toùç ayyÉ/f/j ; tov -pd-ov tootov ça » ; zaOa ; &£cOa ; r-ao’o ;  ; oùBîv -f)VT|OÔv. In Nativit. Deiparæ. fol. 7 V.

Nicolas Cabasilas ne se contente pas d’affirmcr la l)arfaite pureté et sainteté de Marie. Il donne les rai

sons <le ce privilège. La preniit^re de ces raisons est ainsi formulée : « Il n’est pas vraisemblable que Dieu n’ait pas orné sa mère de tous les biens, qu’il ne l’ait pas laite aussi bonne, aussi bellc, aussi parfaite que possible, o’j-.i -fjv Hîov v.L’o : -r^v ij.T, -ï£pa -f, v éajTCii ai-, r.ii : zojafj’jai TOtç ayaOot ; y.a.1 ;  : pû ; tov -âvT’ov ap’.atov Z7. ! v.’jj’h'.’j-’}-) za ; TîXst.kaTov -ki’j’y.’. -rporrov. » In Annunt., fol. 20 v°. Dieu ne pouvait s’incarner que dans une créature tout à fait innocente. Si la Viertie avait eu la moindre accointance avec le péclié, il ne serait pas descendu. In Natii>., io]. 6 °.

La seconde raison qui postulait pour Marie l’exemption de tout péché et de toute souillure est l’honneur même du créateur considéré comme tel. Dieu portait dans son intelligence l’idée de l’homme parfait, de l’homme pleinement conforme à ses desseins. En créant Adam, il avait voulu réaliser cet idéal, mais le péché avait contrecarré son plan. Pour la gloire de l’artiste divin, pour l’honneur du législateur suprême, il fallait qu’une créature humaine, au moins une, produisît au dehors dans toute sa splendeur le concept divin ; il fallait un homme pleinement homme montrant par l’exemple de sa parfaite obéissance que le législateur n’avait ]ias manqué de sagesse et n’avait pas imposé une loi imiiossible à observer. Le second Adam ne pouvait être cet homme pour deux raisons : tout d’abord, étant Dieu par nature, il ne pouvait montrer en sa personne notre nature dans sa simplicité. Par ailleurs, étant absolument impeccable, il ne se trouvait pas dans la condition de l’homme ici-bas, il ne pouvait choisir entre le bien et le mal. Cet homme idéal, c’est la Vierge qui l’a été, en vertu des décrets divins. Ibid., fol. 8-9.

La troisième raison est aussi fort ingénieuse. Il fallait, dit notre théologien, qu’avant de s’unir dans la personne du Verbe, les deux natures, la divine et l’humaine, fussent manifestées séparément dans leur intégrité respective, i/pv/ çavr|Va ! -çoTîpov izaT^cov axpatifvÉç. Ibid., fol. 9 V".

Enfln, pour réaliser son grand dessein de réformer notre nature et de la couronner par la merveille de l’union hypostatique. Dieu attendait un aide digne de lui être associé. Cet aide, il l’a trouvé en Marie : « L’Immaculée n’a pas créé l’homme, mais elle l’a trouvé dans la perdition. Elle ne nous a pas donné la nature, mais elle l’a conservée. Elle a prêté son concours à l’artiste pour réaliser son chef-d’œuvre. A ce chefd’œuvre elle a rendu ce qu’il était’auparavant ; l’artiste, lui, lui a ajouté ce cjuil n’était pas ; mais il n’aurait pas fourni ce second élément, s’il n’avait trouvé le premier. » Ibid., fol. 10 r ».

Mathieu Cantacuzène, empereur de Constantinople (1354-13.5()), a laissé un commentaire du Cantique des cantiques, dans lequel on trouve plusieurs atlirmations indirectes de l’absolue sainteté de Marie. Non seulement la Vierge est l’épouse toute belle en laquelle il n’y a point de tache, P. G., t. oui, col. 1037, mais encore elle a été la première à échapper aux liens des démons, zctÔTr, ’/ - : / ; v -apOivov Toùç âzsîvov 8’.açuyoÙ ! jav ocG|j.o’Jç, ibid., col. 1040 ; elle seule est venue au monde comme étant du principe de la foi, où ijlo’vt), <’)ç O-Tz’CL^yTi ; -rv^, ; T.îc^ ; i’) : rrjaa, ÈÀï’jrjr ; T.po ; xov [ilov. Ibid. Après la malédiction, la terre produisit des épines, source d’amertume pour les hommes. La cause de cette malédiction a été supprimée, quand a paru le doux fruit de vie ; mais avant lui, devait s’épanouir la fleur, parmi les femmes qui ont eu la tristesse en partage. Ibid., col. 1016.

Nous retrouvons la doctrine de Nicolas Cabasilas dans les homélies mariales de l’un de ses successeurs sur le siège de Thessalonique, Isidore Glabas († 1397). Comme Cabasilas, Isidore voit en Marie le type idéal de l’humanité. C’est à cause d’elle que Dieu a dit, en

formant l’homme : « Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance, » car ni Adam ni aucun autre n’a réalisé pleinement l’idée divine de l’homme, oùol yàp’, Sà[j., o’jy. aXXoç t ; ç tcôv s ; £x. : t’vo ; to to5 avOp’o7 : £tou rxirpov r.17 : Xr’, y >I. ! ’/ s/zzhTt : j’^ouç. Homilia in Annunt., Balierini, Sijllogc, t. ii, p. 426-427. Elle est l’homme tout à fait nouveau, o Laîvôta-ro :, créé à la ressemblance divine pour coopérer avec Dieu au salut des hommes. Ibid., p. 428-429. « Du haut du ciel Dieu regardait, cherchant s’il trouverait sur terre quelqu’un qui fût selon son cœur et qui parût capable de délivrer les hommes. Et il n’en découvrait pas un seul : tous n’étaient bons à rien ; tous étaient infectés du venin du serpent. Mais voici qu’après de nombreuses générations apparaît la TouteImmaculée, ce chef-d’œuvre sublime dont la vertu, pour employer l’expression du prophète, a couvert les cieux, et dont l’éclat a rayonné sur toute la terre, au point d’éclipser l’astre qui nous éclaire. Dieu alors opère par la Vierge de grandes merveilles. Il délivre les captifs des mains du tyran et rend maîtres ceux qui étaient esclaves. Ibid., p. 396-397.

Isidore, parle à maintes reprises de l’intervention spéciale de Dieu dans la formation de sa future mère, intervention qui a eu pour effet d’écarter d’elle la souillure originelle : « .Joachim et Anne sont magnifiquement exaucés dans leur demande, et ils engendrent ce fruit merveilleux qui est apparu comme la beauté et l’ornement de toute la terre… Il convenait, en effet, que des personnages à l’âme si élevée, qui étaient parvenus au sommet de la perfection, qui préféraient Dieu à toute chose terrestre, dont l’esprit brillait d’une lumière divine, ne devinssent pas les parents d’une autre que de cette bienheureuse Vierge, et il convenait aussi que celle-ci, dont la grandeur est ineffable, ne fût pas la fdle d’autres que de ceux-là. Il fallait de plus que la cause première et déterm.inante de l’union dans laquelle la Vierge devait être conçue ne fut pas autre chose qu’un entretien avec Dieu, afin que, de la manière que cela était possible, la Toute-Immaculée seule put échapper à la loi dont parle le prophète et affirmer d’elle-même : « Je n’ai pas été conçue dans l’iniquité : » je suis la seule dont lanière n’a pas conçu dans le péché : et cela même est compté au nombre des merveilles que le Tout-Puissant a opérées en moi, ïv’(oç ofo’v ts r^v, f, -âvayvrj ; ï/o : u.o’vr| xatTO r.pozTfXrLrr/ âLsîvo -îtai’jyîîvLa’. oùx âv àvoij.{a ; ç ŒuviÀrlçOriv, O’jy. èv àaapTÎa !  ; Èy.LŒ3T|g£ |j.£ jxôvrjv r, (J-tIty^p [jlo-j, 7 : £pi âa’Jtï ;  ; çotejy.c’.v, £Z£tv(|) zaï xo’jiou a’jijL7 : £pi£ ! X-)f)(jL(jL£Vou toi za-aÀoy(i), (i)V ij.o : [j.£yaÀ£ ; ’fiiv £roir)7£v 6 o-jvatô ;. nln Prsesentalionem Deiparæ, Balierini, op. cit., p. 443-445. De ce passage il convient de rapprocher cet autre, tiré de l’homélie sur la Nativité : « Comme les justes (Joachim et Anne) persévéraient dans leur prière, voici que l’ange apparut à l’un et à l’autre : « Votre prière » a été exaucée, dit-il ; il vous naîtra une enfant dont « la gloire se répandra par toute la terre. » L’effet suivit la parole de l’ange, et la fille de Dieu, la nouvelle créature, to za’.vov nXâsaa, fut engendrée… Elle était véritablement un rejeton de la prière et de la crainte du Seigneur, cette enfant de salut, que Dieu de sa propre main embellit de grâces inénarrables. » Op. cit., t. I, p. 233-234.

L’intervention sanctificatrice de Dieu en faveur de Marie est encore marquée dans les homélies de notre orateur par les expressions suivantes : la Vierge est un rejeton sacré que Dieu a formé, <}iojç, j : y.t->-7.-o-/ )"ivvTjrj.a, ibid., ]). 247 ; un vase façonné par ses mains, TO 0£o-oîr, Tov ayyo :. 7/ ! Præscnt., t. ii, p. 451. Dieu a toujours été avec elle, avant de s’incarner en elle. In Nativ., t. i, p. 247. Elle est une créature céleste ; elle vient du ciel comme Jésus. Ibid., p. 222-224. Elle n’a participé à rien de ce qui, chez les hommes, n’est

pas digne de loiiansc. Seule plus sainte que les anges, elle devait seule n’avoir aucune part à l’infortune commune, zaî ao’vï|V é/priv ; j./) toïç aÀÀoi ; Tr, ; y.O’.vf, ; z’y'.v’ovîïv Sj^y-ÀYipia ;. 76(d., p. 240. Si elle est morte, c’est pour imiter son divin Fils et pour montrer qu’elle appartenait réellement à la nature humaine. La mort, d’ailleurs, n’a, par elle-même, rien de déshonorant, tov ào’.â6’Àr|Tov vd|j.ov. Ibid., p. 211.

Après avoir entendu ces afhrmations si nombreuses et si explicites de la sainteté originelle de la mère de Dieu, toutes emiirnntées aux trois homélies sur la Nativité, la Présentation et l’Annonciation, on n’est pas peu surpris de rencontrer à la fin de la iv^ homélie inariale d’Isidore, qui est consacrée à la Dormition, le passage suivant : « La Vierge, comme fille de l’homme, naquit de sa propre mère. C’est pourquoi il n’y avait aucun moyen pour elle d’éviter l’antique épaisseur, je veux dire le péché originel, avec lequel elle naquit et qu’elle reçut involontairement. C’est de ce péché <lont parle David, quand il dit : « Ma mère m’a conçu « dans Je péché. » C’est avec ce seul péché qu’elle vint à la vie et apparut au genre humain. De tout autre fardeau, c’est-à-dire de toute autre souillure, elle resta apsolument indemne. Et non seulement cela, mais elle se hâta de rejeter loin d’elle cet héritage funeste du premier père, » t, naoOivo ; r.ooî^kiii ijlèv Trjç îOiaç’rf-.’Jji. fo-j-ip avOp’Dno ?" xai oCx toûto. to àpyaïov

— dtyo ;. Ài’i’f.) o ; tt, ’/ -poyov’.L>|V ijjiapTiav. uïO’r, ; îysvvrjOr, . TJv "c aLo-j7 ! ’fo ; iCk-i^zi. O’.aç’jyîi’v -i xoôr.ot -i^^i ouo^î :. oùo’; ur5p|3f, va’.. In Dormilioncm, op. cit., t. ii, p. 0(58. Ces paroles, on le voit, forment l’antithèse parfaite du passage que nous avons cité plus haut de l’homélie sur la Présentation. Conmient expliquer cette contradiction’? Le seul manuscrit, à notre connaissance, qui contienne les homéhes mariales d’Isidore est le Vaticaniis r/ra’cus 6'>1. Il est du xv siècle et ne présente aucune trace d’interpolation ru passage qui nie l’iiiiiuaculée conception. L’homélie sur la Dormition y est mise sous le nom d’Isidore comme les trois autres. Bien plus, dans son homélie sur la Nativité, l’orateur renvoie à son discours sur la Dormition. Op. cit., t. I, p. 212. Celui-ci paraît donc, de ce chef, tout à fait authentique. Mais l’examen interne laisse une impression de doute, surtout pour les derniers paragraphes, où l’on remarque un décousu complet. F^n particulier, le § 33 de l’édition de Balleriui, qui renferme la négation de l’immaculée conception, est un développement parasite de fort mauvais goût. qu’on peut supprimer en entier, sans que la suite du discours en souffre. Que conclure de là ? Prise dans s-on ensemble, l’homélie nous paraît bien être l’œuvre d’Isidore ; mais elle a dû siibir des remaniements et des interpolations de la part de quelque copisle. Avec Hippolyte ]Iarrac(n, Mnrialr Isidori, p. 145 ; Ballcrini, op. cit., t. II, p. (103-()0(i. et Migne, P. G., t. r.xxxix, col. 117, nous sommes porté à considérer comme une de ces interpolations tout le § 33. Si par hasard la critique interne nous égarait ici, il faudrait dire que Cilabas a changé d’opinion sur la sainteté originelle de la mère de Dieu, et ((u’après avoir débuté par la négation, il a terminé par l’aflirmation la plus catégoricfue.

(^elle seconile h>pothèse n’est pas complètement invraisemblable. Déjà, avant Isidore. Nicéphore Calliste Xanthopoulos avait osé aller contre la croyance générale de ses contemporains, en insinuant <|ue jusqu’au jour de l’annonciation, Marie avait pu être soumise au péché originel. Cette opinion se trouve fornuilée flans le commentaire que cet auteur a composé du Iropaire mariai commençant par les mots : Ti, v -ij. : ’; -iç, y, ’i. Ce commentaire a été édfié pour la première fois à.lénisalem, en 18f12, pariCyrille Anastasladès dans l’ouvrage intitulé : ’ICpjvrJvr.a si : toJ

àvaCjaOaoJç tïJç’()L-. r>r[/oj. Mais cette édition ne concorde pas de tout point avec le texte de deux manuscrits contemporains de N’icéphore, c’est-à-dire de la première moitié du xive siècle, le cod. M iscellaneus 379 et le end. Roc de la Bodléienne d’Oxford. Nous avons pu consulter ces deux manuscrits ; et dans les deux on lit le passage suivant : « La sainte et bienheureuse Vierge n’engendra pas de la corruption, iL o’.aiOocàç. mais par la parole de l’archange Gabriel, après que le Saint-Esprit fut survenu en elle, et qu’il l’eut purifiée de la souillure originelle, si par hasard cette souillure se trouvait en elle jusqu’à ce moment, aXÀà Toij -avayioj IIv : J ; j.7.- : o : îr :  ; LOovTo ; aJT^. /a ; xoîj "poyovrLoj p’J~oy. Et’Ttç xif^K. a7 : oLaOipavT’vç. -C> ôn^uaT’. Tû3 àp/ayyiÀoj TaSpirlX. Cod. Mise. 79, fol. 192 ; cod. Roc, fol. 147 v". Ce qui est curieux, c’est qu’à la fin de son commentaire, cod. Roc, fol. 190 r", Nicéphore Calliste fait amende honorable à l’immaculée, et déclare qu’il a bien pu dévier du droit chemin, en prenant le parti de parler de la souillure au sujet de la Toute-Immaculée, y.’i’i -. : to3 ôcovto ; -apsasâXT, v. ô P’jttoç ~pl z9]i oÀr, ; àcr :  ; Àfrj Àiyj’.v iÀoajvo ;. Cet aveu est bon à retenir. Nicéphore Calliste a conscience d’innover et de prendre une position peu sûre, en osant parler de la souillure originelle à propos de la Vierge immaculée. De fait, à parcourir ses autres écrits et spécialement son Histoire ccclesiastique, il paraît bien qu’il n’a pas toujours admis l’opinion qu’il formule ici, et qu’il a professé la doctrine unanimement reçue à Byzance : « La bienheureuse Vierge Marie, dit-il, fut trouvée digne d’être la demeure <ie Dieu le Verbe. Elle avait été consacrée à Dieu, même avant sa naissance, et était venue à l’existence connue un fruit donné par Dieu, née d’un sein vieilli et ne connaissant plus la passion, Laï r.orj y-viaEto ; jikv àva-EŒtij.ivïi ir)zG>, h. |j. ; Àiov Si yr|paÀ£o)V zai -o’pp’i) twv tf ;  ; çjaEfD ; xpaij.â--T’ov. oià -’. ; zap-o ; fJEû’aooTO ;  ;  : poTiyij. : vT|. » H. E., 1. I. c. vii, P. G., t. cxLV, col. (îSl. La manière dont il parle de Marie, lorsqu’elle fut présentée au temple, suppose qu’elle était déjà sainte à ce moment. De même, la raison qu’il donne de sa mort ne diffère pas de celle que l’on rencontre communément dans la théologie byzantine : Marie devait mourir pour être conforme à Jésus, i~zl -r^v ravayiav -oj (-Isoîl Aoyou ar|-îpa OavâTd’j aETaayEÏv’sost (ot ; y£ za’. û TaJTYiÇ Vioç. zupcôv To avOp’o-oç slva ; i’k àArfito :). Op. cit., t. II, C. XXI, col. 809. Dans des tropaires inédits en l’honneur de la Vierge, qui se trouxent dans le même cod. Misccll. 79 de la Bodléienne. fol. 201, Nicéphore dit de Marie c|u’elle est sans aucune souillure », coîi. tïJç ôùr.ryj o’/a -avToç, et fol. 20(i " : < Le Dieu très pur et le seul beau. t’ayaut trouvée, toi, la seule pure, est descendu dans ton sein pour sauver le monde, » |j.fJvT, v zaOapâv as É)paz( !) ; ijlo’voç (’)paFoç zaOapiÔTaTÔç TE ("> : o ; IJ-T/tpa -7^ c-^ ï^-j. () : ’/, ».)’/ JwTati xôv Z’icarjv.

On voit la portée des négations cpie imus venons de rencontrer sous la plumede Nicéphore Calliste et d’Isidore Olabas. Elles constituent un lihénomènc isolé dans la chaîne de la tradition grecque. Si Isidore a nié l’immaculée conception — ce qui est loin d’être sûr — il a renon(-é ensuite à cette doctrine, (tour professer en termes exprès et directs le privilège nuirial. Si Nicéphore a osé découvrir une tache dans la Tonte-Inunaculée, il s’en est comme excusé, et a déclaré qu’il pouait bien se tromper. Peut-être même s’est-il explicitement rétracté. En tout ca< !. on peut aflirmer ((u’il n’a pas fait école, comnu’nous allons le constater en interrogeant les autres théologiens de la fin du xive siècle et ceux de la première moit^ du xv<".

Voici d’abord l’illustre Démétrius Cydonès. une des gloires citlioliques de la Byzance schismatique, converti au catholicisme par la lecture des Pères et des écrits de saint Thomas d’.qiiin, dont il traduisit

en grec les deux Soinincs. Ce fervent disciple de l’angle de l'école, qui était bien au courant de la théologie latine, ne suit pas son maître préféré sur la question de l’iminaculée conception Dans son long discouis sur l’Annonciation, encore inédit, il résume la doctrine thomiste sur l’incarnation telle qu’elle est exprimée dans la III" partie de la Somme Ihéologiquc. Mais lorsqu’il en vient à parier de la mère du Sauveur, loin de dire, comme saint Thomas, II I", q. xxvir, a. 2, ad 2'"", que Marie a contracté le péché originel, il écrit : « Quand vint la plénitude des temps dont parle Paul, le Verbe de Dieu trouva en Marie le digne séjour de sa divinité. Dès l’origine, il avait mis dans la création plusieurs emblèmes, il avait caché dans le culte mosaïque plusieurs symboles et représentations de cette Vierge, qu’il fit aussi annoncer à plusieurs reprises par la bouche des prophètes, et dont il fit proclamer la gloire et les louanges dans l’univers entier. A cette Vierge, sans retard et avant sa naissance, il communiqua le Saint-Esprit ; il l’embellit du don de la sainteté, se préparant ainsi à l’avance un palais digne de sa royauté, » taûtr) s-jûj ; ijljv zai 7 : po tt, ; y£vvr|as(' ; ç, Hv£-j|j.aTO ; àyîou iaï-j80)Le, Lai tt) xJi ây.toajvri ; âLâ ; j.71puv ; Stopsà. x : o’pp’oO : v Trj ; saoTùS [JaiiÀïia ; aÇiov to fJacicÀs^ov âTO'.aâÇfDV. Cod. 1213 du fonds grec de la Bibliothèque nationale de Paris, fol. 340 v". Car s’il choisit Jéiémie avant sa formation dans le sein maternel, et s’il le sanctifia avant qu’il en sortît ; s’il remplit Jean du Saint-Esprit, alors qu’il reposait encore dans les entrailles maternelles — et pourtant il ne devait habiter en ces personnages que par sa grâce, sans rien leur emprunter pour lui-même de leur substance — combien plus éclatant, combien plus saint devait-il rendre son propre temple, je veux dire cette Vierge, en laquelle il devait habiter corporellement, de la substance de laquelle il voulait se former un corps à l’abri de tout péché, -oao) ÀaijL7 : po’T£pov -i a ; j.a Lal âj'.iDZiorj^/ Tov : xjTo3 vaov àjrosat’vstv ky^f]v. Jbid. Et après cju’elle fut venue au monde, il ne laissa pas la nature agir seule en elle, cette nature qui incline plus ou moins violemment les hommes au péché, et dont la faiblesse est pour tous une source de fautes ; mais il se fit lui-même le gardien vigilant de la pureté de son âme, empêchant qu’aucune laideur partant du corps n’en vîntternir l'éclat, au demeurant, la laissant pour tout le reste soumise aux lois communes. Ainsi, dans le corps de cette Vierge, la loi du péché était enchaînée et ne pouvait faire la moindre incursion déshonorante dans le sanctuaire de Dieu, (oais âv tcô awiiatt TaÛTT|ç ô t% àjxaptiaç vo’ij.o ; èSeosto, s : ' ; tÔ xrrj 0ôo3 Ti[j.£voç uêpi’a-at xc ; j.Yj8aij.w ; a-jy/fDpoûaîvoç. S’il est vrai que la vertu des parents est glorieuse pour les enfants, il est incontestable aussi que leurs tares portent atteinte à l’honneur de leurs descendants. Comment, dès lors, s’arrêter à l’idée que la mère ait pu, par le péché, souiller la pureté et la gloire du Fils ? Et si, d’après Salomon, la sagesse ne peut résider dans un corps soumis au péché, comment supposer que la Sagesse de Dieu ait consenti à faire son séjour dans un corps esclave du péché, plus que cela : à tirer de ce corps le sien propre ? Mais il est clair que Dieu conserva de toute façon la Vierge dans une pureté immaculée, comme cela convenait à celle qui devait contracter avec Dieu l’union la plus étroite et devenir le siège des mystères surnaturels, àÀÀà orjXov (j'>ç TïavtayoOîv 6 Wsci ; à/^pav-civ t/jv TTapOivov êXTj’pYiCTEV, ol’av si’Lo ; sivat tViv s'. ; aLpov 0£Û xotv’ovrj^o’jcav Laï tcov (jtzïo zacav çûiiv èao|j.ivï|V Soysïov, Ibid. Telles furent les prérogatives de la Vierge avant son enfantement : une virginité véritable, dont il est impossible de trouver le prototype, et qui a brillé en elle pour la première fois, et en elle seule ; une pureté surpassant celle même des anges.

Et l’on pense bien que le chœur entier des autres vertus ne lui faisait pas défaut. Bref, tout était digne de Dieu et de sa mère, rvi-t ui Hv>> La ; Trj ; aJToi

j.ï, Tpo ; 'il'.-j.. /ftirf., fol. 311.

En écrivant ces lignes, Démétrlus Cydonès avait sous les yeux les questions xxvii et xxviii de la III » partie de la Somme théoloç/ique. Il en reproduit fidèlement la doctrine, comme on peut le constater par la comparaison des deux textes. iNIais il y a divergence sur un point. Tandis que saint Thomas affirme que Marie contracta, pendant quelques instants au moins, la tache originelle, Démétrius déclare qu’elle reçut la communication du Saint-Esprit et la grâce de la sainteté tout de suite et avant sa naissance, ; jOJ ; La ! rco yEvvr^as’o ;. Tout, dans le contexte, suggère que cet sJOJ ; désigne le premier instant de la création de l'âme de la Vierge. Sans doute, notre auteur n’explique pas comment Dieu s’y est pris pour préserver sa future mère de la tache qu’elle devait régulièrement contracter par le fait de sa conecption, mais il laisse suffisamment entendre, par tout ce qu’il dit, qu’au moins, l'âme de Marie a toujours été à l’abri de la souillure : de toute façon, de tous côtés, -av-ra/'iO : /, Dieu a conservé Immaculée la Vierge Marie. Tout en elle, avant son enfantement, a été digne de Dieu et a échappé aux lois communes, ; ij-. ^ ti -y) Toi -ijL'.-j Toj ; LO'.vou ; vô ; j.o-jç Èçiç'jv ; 'L

Du reste, la pensée de Démétrius se fait encore jour dans le passage suivant : « Par ta joie, dit l’ange à Marie, tu dissiperas toute tristesse au ciel et sur la terre, et l’on verra les hommes se relever de leur chute et les anges se réjouir de leur retour à Dieu. Aussi, -comment ne serais-tu pas bénie au-dessus de toutes les femmes ? Car celles-ci ont tiré d’Eve la malédiction et la douleur, comme étant devenues pécheresses à cause d’elle, <> : iv -apaSâiîi o : ' iLî'vi, '/ (l'/oy.vjt :  ; mais toi, tu as communiqué à toutes la confiance. Ta giâcc, en effet, non seulement a plaidé leur cause au tribunal de la justice divine, mais encore leur a valu une gloire ineffable. Il n’y a pas de proportion entre ta grâce et leur faute ; pécher est le fait de l’humaine faiblesse ; mais ta grâce vient de la puissance divine, à laquelle rien n’est comparable, u oj yàp (oar.^p to sov yâp'.a’j.a. ojTto La ; to âLîîvov 7 : apâ~T(o[jia. Ibid., fol. 343-344. '

L’empereur Manuel II Paléologue (1391-1425), un élève de Démétrius Cydonès, enseigne la même doctrine que lui sur la sainteté originelle de Marie, dans un discours sur la Dormition, dont Jean Mathieu Caryophvlle a publié une traduction latine, reproduite dans la P. G. de Migne, t. clvi. col. 91-108. Le texte original se trouve dans plusieurs manuscrits, notamment dans le Valic. graccus 1619, du xive siècle, qui nous a été accessible. Voici le passage principal, où la doctrine catholique est clairement exprimée : o Marie supporta pendant quelque temps, non sans douleur, d'êtnt séparée corporellement de son Fils bien-aimé. Elle se réjouissait cependant de le voir retourner au ciel, et lui restait très unie par la pensée et le cœur, comme lui continuait invisiblement de viTe avec elle. D’ailleurs, dès que la bienheureuse Vierge fut née, je dirai même dès qu’elle fut conçue, celui qui l’avait choisie pour sa future mère la remplit de sa grâce ; oui, avant de naître d’elle, il était avec elle… Aussitôt qu’elle commença d’exister dans le sein stérile d’Anne, il n’y eut aucun moment où Jésus ne fût uni à elle, » oJ ar.v àÀXà La ! àaa xCj YjysvvfjaÛa ; -y'/ |jLaLap ; av iï-O'.u.'., o' a'/x.'J.l TM a-jv3 ! À-?|10at. ô TaJTr, v -poopiaa ; a-jTOj ijLT(Tipa -f, ; l'ôia ; yip'.-oi Èvï-i’ijL-Xa, tj.àÂ), ov 6s Lai — p6 "où tôLou. irj’vry vLiï'/oç aÙT ? ; … oùI. T)v 0£ cIts oJI. t{v aj-rj a’jvï|[A|jLSvo ; cjOj ; Àaôoûar] Ta ; il : to sivat TrpiÔTaç àpyàç èv t^ yaJTpi Tr, ; aisipa ; [ir-.zôz. Cod. Vat. græcus 1619, fol. 6 V ». La précision avec laquelle l’impérial théologien parle

de la sanctification de Marie in primo inslanli ferait croire qu’il eut connaissance de la controverse agitée à son époque dans les universités de l’Occident. L’hypothèse n’a rien que de très vraisemblable. On sait, en efïet, que Manuel fit, do 1399 à 1402, un lon.u voyage en Italie, en France et en Angleterre. Il passa à Paris pi es de deux ans, et les historiens nous apprennent qu’il aimait à s’entretenir avec les membres du clergé français, notamment avec les moines de Saint-Denis. Il réfuta longuement un écrit sur la procession du Saint-Esprit que lui présenta un membre de la Sorbonne. Le débat sur l’immaculée conception qui mettait alors aux prises franciscains et dominicains dut, sans doute, lui être signalé. Et ce ne fut pas dans l’école thomiste, mais chez les disciples de Scot qu’il retrouva la doctiine de son Église. Comme eux, il affirma que la Vierge Marie avait été pleine de grâce dès le premier instant de son existence.

C’est la pure tradition byzantine à l’exclusion de toute influence étrangère, que nous entendons dans les homélies mariâtes de Joseph Bryennios (t vers 1435) dont les œuvres publiées par Eugène Bulsaris, au xvine siècle, voir Bryennios (Joseph), t. ii, col. 11561161, sont restées inaperçues en Occident. Bryennios exprime de mille manières la sainteté originelle de la mère de Dieu et fait de nombreux emprunts aux théologiens qui l’ont précédé. Deux textes sulliront pour montrer qu’il a bien enseigné le privilège mariai. Voici d’abord un passage tiré de la troisième homélie sur l’Annonciation : « En plusieurs endroits de l’Évangile, Jésus-Christ s’appelle le Fils de Ihomme avec l’article, c’est-à-dire de cet homme sans péclié, de cet honmie vierge, de cet homme tel qu’il était avant la transgression d’Adam. C’est pour garantir cette vérité qu’il a pris une chair toujours-vierge vierge d’une femme toujours-vierge vierge, » r.rikXa.Pyj Toii syayy ; -Àîoj Éa-jtov jiov "OÙ àvOçti’)-oj, [j.STà T7, ç’VJ àpOpoj KcoafJrjLT, ; ôvoaâÏJiTTjTÉaTt, tou àvau.apTr|TO-j avOpo) ;  : o’j ïy.ibt(it. Toj -ac.O ; v’.j. tou "Oo "rj ; ~apa[bâŒï(oç Aôàiji Ll’v ; s ;  ; -{affoîj’.v -.7 : j-(^qI "T^ ; ivvoi’a ;, âj actrapOÉvtj "apOivoj "apOivov as ; TapOîvov ïâpLa îauTw cuvsaTrJaaTO. Homil., iii, in Annunl., E. Bulgaris, ’locÀiÇ aova/oj Toû Bpjîvvîo’j Ta eupT|0 ; v : a. Leipzig, 1768, t. ii, p. 241. Être vierge, c’est être dans l’état d’Adam avant le péclié, être impeccable comme lui. Marie a toujours possédé cette virginité parfaite. Elle est la vierge toujours-vierge qui a donné à Jésus une chair vierge toujours-vierge.

A deux reprises, dans la première de ses homélies sur la Nativité et dans la seconde sur l’Annonciation, notre théologien se demande pourtiuoi Marie a été dioisie entre toutes les femmes pour devenir la mère du Fils de Dieu, et quelle qualité supérieure elle possédait pur être préférée aux autres. Voici sa réponse : t Une autre ne lui a pas été préférée parce que Dieu, les connaissant toutes à l’avance, a sanctifié dès le sein maternel celle qui devait être plus digne et plus pure que les autres. Il a rejeté, cela va de soi, celles qui étaient indignes d’un si grand honneur. Quant au mérite souverain qu’elle possédait, c’était d’avoir été purifiée par anticipation parle Saint-Esprit, et d’avoir été préparée pour devenir le digne séjour de la divinité, » aXÀr) jjLïv -aJTr, ; oj -pOT£’{|j : r|-a[, OTi ~aaa ; 6 (")£0ç

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[xi^Tpa : riftaaï.., apéTtôv ol r : aiôjv û-îpTc’pav ty.iy.ir[-fj to TCpoy.apOap’jTJva’. T<7) I ! v£j|jiaT !, xa ! ooyîUjy STOtijLaoOrjva ! hiK-.’./Ji’i -j, ; àr.yj’ji-.’yj flt’r.r-.o ;. Op. cit., t. il, p. 152 ; t. iii, p. 11. Le sens précis de l’expression éz

j.iî-
p7 ; r, yi%’7t ne peut, ici, faire de doute. Il s’agit

bien de la sanctification in utero a primo inslanli. De même, l’expression -o rpozaOap’ifiVa ! -ôt IIvcûfxaK désigne non l’augmentation de sainteté apportée à la

Vierge par la descente du Saint-Esprit, au moment de l’incarnation du Verbe, mais bien une purification anticipée, c’est-à-dire la préservation de la souillure originelle. Bryennios jiarle, en effet, d’une qualité possédée par Marie antérieurement au salut de l’ange, qualité unique qui l’emporte sur tous les autres mérites et qui a déterminé le choix divin.

Le successeur d’Isidore Glabas sur le siège de Thessalonique, Gabriel, est l’auteur d’un recueil d’homélies encore inédit, contenu dans le cod. 38 de la bibliothèque de l’Ecole theologique ile Halki. D..ns une liomélic )iour la fête de la Dormition, qui est la xxxviii « de la strie, se lit le passage suivant : <- C’est une embarrassante question que celle-ci : Comment la mort a-t-elle triomphé même de cette nature immaculée (la Vierge Marie), de celle qui fut la demeure de Dieu aussitôt qu’elle fut formée dans le sein maternel et dès le berceau ? Comment lamort a-t-clle fait en elle sonouvrage, comme elle le fait sur l’honnne transgresseur ; et comment cette mort, fille du péché, a-t-elle pu trouver place en elle, en elle, inaccessible à toute volupté, supérieure à toute passion" ? » -ôiç zai TaÙTT, ; ttJ ; àjjLd)[j.rl-ryj çùaîwç zaî ToO s/, [ipiçryjç s’JO-j ;. Laï âz azapyâvjov a-J-o)V oi’zYiTrJptov û’jaï| ; WjoCÎ. -^ptsyivîTO 6 fJâvaTo ; zai (’)3-£p £-L TÔi 7 : apa[îâvT[ avÛp())-to, oJzw -Lai £7 : 1 -aû-rj Ta o ; ’y.£ta £vr|pyr, j£ ; et l’orateur répond en empruntant les paroles du mélode Cosnias : Marie est morte pour imiter son Fils.

Le célèbre Siméon, archevêque de Thessalonique († 1429), n’a pas laissé d’homélie mariale. Mais la manière dont il parle, en passant, de la Vierge Marie, prouve qu’il admettait la doctrine reçue touchant la perpétuelle sainteté de la Toute-Sainte, Marie est pour lui la seule Toute-Immaculée, y, iEatpiTO) ; -/ai [jLo’vri -yi’/i’j.t'>'j.o ;, la seule Toute-Sainte, r, ijlo’vt) zavayia, la seule "i’oujours-Viergc, r, ; j.ovt, aj’.-apOivo :. P. G., t. CLV, col. 569, 668, 801. Dieu a toujours été avec elle par ses dons et ses illuminations, avant d’être avec elle par l’incarnation, TrpoTEpov ^b/ y£yovo) ; èvu ;  : oaTa-T (j)ç èv ao ;. 7 : avT0T£ 0£ Taiç 8fop£a !  ; za ; âXXâix’j’Eaiv. Passage tiré d’une prière à la Vierge, publiée par I-^ von Dobschiitz, dans son étude intitulée ClirisiusbUdcr, Untcrsuchungen ziir christlichen Légende, Leipzig, 1899, p. 148-149, t. m de la nouvelle série des Texte und Unlcrsucimngen.

Le dernier et le plus grand théologien de Byzancc schismatique, Georges Scholarios, qui survécut à la prise de Constantinople par les Turcs, et occujia pendant deux années (1454-1456) le siège patriarcal sous le nom de Gennade, clôt dignement la série des panégyristes de l’immaculée quenous avons entendus jusqu’ici. Son témoignage est particulièrement remartjuable et ne laisse rien à désirer pour la précision théologique. Nous l’avons trouvé dans une homélie inédite sur la Dormition, qui est contenue dans deux manuscrits autographes de Scholarios, les cod. 1289 et 1294 du fonds grec de la Bibliothèque nationale de Paris. Le cod. 1294 fut transcrit en 14()8, dans un monastère près de Serrés, en Macédoine, où rex-patriarchc))assa ses dernières années. Au fol. 139 v" de ce manuscrit nn lit : (I Tout comme Jésus, la Vierge n’eut pas à progresser péniblement dans la vertu, (^ene fut point par des purifications successives qu’elle atteignit au degré de pureté qu’on lui connaît, et ce no fut point par ses seuls eflorts qu’elle parvint à mener dans la chair une vie tout angéliquc, même avant de devenir la demeure du Seigneur des anges. Sans retard, et avant qu’arrivât le temps où devait s’accomplir le mystère, Dieu la prépara à être le digne instrument d’un si haut dessein, qui réclamait non seulement la purctéde l’âme et du corps, mais aussi un certain développement du corps. Aussi celui qui devait recourir à son ministère prit-il soin tout d’abord de la préparer, attendu qu’au

cune àine ne pouvait, par ses seules forces, se disposer conveimblenient à remplir (’et ofïice, encore moins aucun corps. C’est pourquoi Dieu ne se contenta pas, comme il le fait pour les autres saints, de coopérer et de tendre la main à sa bonne volonté ; il lui accorda bien plutôt d’agir d’une manière appropriée à la préparation infuse qu’elle avait reçue ; de sorte que son action se pro(luisait sans doute en harmonie parfaite avec sa volonté, en vertu de l’habitude et de la puissance donnée d’en haut ; mais cette liabitude elle-même ne venait pas d’une lonj^ue répétition d’actes sagement ordonnés par une volonté éprise de perfection. C’était Dieu qui l’avait jetée dans la nature pour qu’en cette "Vierge on ne découvrît pas le moindre vestige des déficits de notre nature. Et ce que la conception virginale opéra en celui qui est né d’elle, cela même, la grâce divine l’opéra en celle qui naquit de la conception charnelle, afm qu’une pureté sublime resplendît dans les deux, pureté plus glorieuse, dans le Fils, parce que découlant de la nature soustraite à toute occasion de souillure ; pureté seulement de grâce dans la mère, qui devait être toute pure dès le premier instant de son existence, parce qu’elle devait enfanter le Très-Pur, mais qui avait, unie à sa nature, une occasion de contracter la souillure (= qui était exposée, par sa naissance, à contracter la souillure), » où Tofvjv a’jvrjpyst [j.o’vov zaî y^ipa r : ap3Ï/£ x^ xaÀ^ -ooy.’.pi’jS’., y.a6âr ; p iv toTç aXÀoiç <j-o-j(Jy.io’. :, kXk’èoîSou jjiàXÀov àÇ »  » ; -cfj ; èyLTiaŒÎar, ; aù-v^ -apa^/surj : èvspycïv… (’) ; av oj-to (ArjoT/voi ; - : "ùJvvriçç’j’Ji’j) : j7T£pY] ! J.â--tijv xauTT) CT-jv^. Kai o~ip ïj <j7 : i^’j.x-rjç àvî’j aûÀÀTj’^L ; àv Tcp Tïap’aùxrj ; ycvvïjOivTi, tout’aùx-^jZai ôii a-ipjj.axo ; yjvvr|st’(j7], 7] Ojîa ydpii ; vr[py£ !, (îj ; av r] xa ! £vàij.sotvyj -LaGapoTri ; ÇeviÇouda, io> (aèv âÇ a’jtYJ ; ^ewtou-Évo) za ; otà œûaiv ÈvôûÇûTcpo ;, o’josaîav p’j-ou -pdçaaiv’s'"/ouaa’t’^ os ~o^~ov yîvvdjaï) Laxà -/i^’M "poaTJ [j.dvrjv zaî r, zaSapfDxâTïi y£v-VYiOsïaa sùGùç, (îj ; <yi ij.iÀXo’jja tov zaOapfÔTaTOv TiV.T ;  : v, zat-Tot ToCf pÛTTOu -po’saaiv "Éyo’jtJx xr ; çûasi auvojaav.

Scholarios, on le voit, marque fort exactement la différence qui existe entre la conception immaculée de Jésus et la conception immaculée de Marie. La première découle de la nature même ; la seconde est un privilège gratuit et revêt le caractère d’une préservation. Le théologien byzantin exprime dans son langage à lui ce que nos théologiens entendent par le debitam auquel la Vierge était soumise comme fille d’Adam. Il importe de noter qu’avant de formuler d’une manière si explicite le privilège de Marie, Scholarios avait posé un principe qui paraissait l’exclure absolument : « Si, afïîrmait-il, le Christ avait eu un père selon la chair, il n’aurait pu éviter la souillure qui, par la génération, atteint tous les hommes, » iy. <j~.io’xa~(ji 5’av ysvo|j. : v(o o’jI. av oiov x rjv u-ïj "Lai Tov ÈzsîOsv ryjTzoy cjvEÏva ;, TCiv iI. : ’.'6sv ràj’.v avOp(o7 : o : ç t-, to’.auxr ) 81a3û/fj xaxto’vTa. Ibid., fol. 138 v". Grégoire Palamas, Démétrius Cydonès, Gabriel de Thessalonique avaient énoncé, avant lui, le même axiome théologique. Et cependant, comme lui, nous lavons constaté, ces mêmes théologiens ont soustrait la mère de Dieu à la souillure originelle. D’où il suit qu’on n’est pas sérieusement fondé à considérer un auteur comme adversaire de l’immaculée conception par cela seul qu’il affirme que le péché originel accompagne nécessairement la génération charnelle.

Le témoignage de Scholarios revêt une importance capitale, à un autre point de vue. On y trouve la mention explicite des dons infus dont Dieu orna gratuitement l’âme de sa future mère, dès le premier instant de son existence. Plusieurs théologiens byzantins laissent dans l’ombre le rcMe de la grâce dans la préparation de Marie à la maternité divine, et insistent surtout sur le mérite personnel et la sainteté acquise de la Vierge. Scholarios, qui connaissait la théologie latine

et avait lu saint Thomas et Scot, complète la doctrine de ses devanciers et montre bien la part qui revient ; i la grâce infuse dans la sainteté exceptionnelle de la mère de Dieu.

.’5 » Conchiaion sur cette sccunde période. — Les fquelques témoignages que nous venons de citer sur la croyance des byzantins à la sainteté originelle de Marie ne sont certes pas les seuls qui nous soient parvenus. Beaucoup se cachent encore dans les manuscrits (les bibliothèques, et attendent qu’on les produise à la lumière. Ceu.x que nous avons mis sous les yeux du lecteur suffisent cependant, à notre avis, à établir que, contrairement à ce qui s’est passé en Occident, la doctrine de la conception immaculée, transmise par l’ancienne tradition, s’est conservée pacifiquement dans l’Église grecque jusque vers la fin du xve siècle, et a môme acquis des précisions nouvelles, à partir du XI'e siècle. Cette doctrine, personne ne l’a sérieusement contestée. La négation timide et à moitié rétractée de Nicéphore Calliste est restée inaperçue, et n’a exercé aucune influence sur les théologiens venus après lui. Cet enseignement explicite de l’Église byzantine n’a été connu jusqu’ici que très imparfaitement des théologiens occidentaux. Quant aux grecs modernes, pourtant les héritiers naturels de cette tradition, ils l’ont presque complètement perdue de vue, à partir du XVI » siècle, pour des motifs divers, dont nous dirons un mot tout à l’heure.