Dictionnaire de théologie catholique/UNITARIENS II. Doctrines unitariennes

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 318-321).

II. Doctrines unitariennes. —

Après ce qui vient d’être dit, on comprend qu’il soit malaisé de définir les doctrines unitariennes. Non seulement elles ont beaucoup évolué, mais elles ont toujours plus ou moins renié toute précision systématique. La marque la plus générale de ces Églises, dont chacune revendique son indépendance complète, comme il est de règle chez les congrégationalistes, c’est de rejeter le dogme de la Trinité. Les unitariens n’admettent donc qu’une seule personne en Dieu. Mais, par suite du rejet de la divinité de Jésus-Christ, les dogmes de l’incarnation et de la rédemption, ainsi que le dogme sacramentaire ont revêtu chez eux des formes de plus en plus symboliques. Actuellement on peut ramener à quatre les caractéristiques de leurs croyances : 1. tolérance très large pour toutes les opinions et insistance sur l’absolue liberté de la foi ; 2. appel constant à la raison et à la conscience naturelles comme règles suprêmes en matière de religion ; 3. large développement des préoccupations sociales et philanthropiques ; 4. grand souci de la formation des caractères comme fondement de la vie religieuse.

Tolérance très large et liberté absolue de la foi. —

Ce trait apparaît dès le principe chez les unitariens. Pourtant ils ont toujours combattu pour le maintien d’une foi et répudié toutes les formes de l’incrédulité et du scepticisme. Les premiers maîtres de l’unitarianisme, un Lindsey, un Priestley. même un Channing et un Parker, au début de sa carrière, admettaient une certaine inspiration de la Bible et la réalité des prophéties et des miracles qui y sont rapportés. Pour Channing, la prophétie et le miracle demeurent les deux (’(lionnes de la foi et l’argument décisif contre le Simple déisme. Aussi, lorsque Théodore Parker et Ralph-Waldo Emerson commencèrent à émettre des 216’l.N] I A RIENS. hOCTIt I Ni :

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doutes sur l’infaillibilité de la Bible et à proclamer que c’est surtout dans la nature, dans ses grands spectacles et dans la contemplation de ses lois et de sa beauté qu’il convient de chercher Dieu, y eut-il grand émoi chez les vieux unitariens. Parker fut exclu de la plupart des chaires unitariennes. Kmcrson on l’a vii, s’en était exclu de lui-même. Il se produisit, entre 18 10 et 1850, de très vives controverses dans les journaux et les revues du Massachussets et Parker, violemment pris à partie et traité d’incrédule, se vit presque rejeté de sa propre Église. Ses partisans le soutinrent cependant et ils finirent par l’emporter. De plus en plus, il fut admis que l’on pouvait croire ce que l’on voulait dans l’unitarianisme et que l’on pouvait être en communion avec tous les croyants sincères, à quelque dénomination qu’ils appartinssent, fussent-ils catholiques romains. La tolérance d’un Channing étonna et scandalisa plus d’une fois les autres sectes protestantes, parce qu’elle s’étendait au-delà du protestantisme. « Une Église établie, disait-il, c’est le tombeau de l’intelligence. » Il ne voulait même pas du vocable d’unitarien et préférait la première appellation donnée à son Église, celle d’Église des chrétiens libéraux. Et il définissait le « chrétien libéral » tout homme « disposé à accueillir comme un frère dans le Christ quiconque, au jugement de l’amour, reconnaît Jésus-Christ comme seigneur et maître ». Mais la tolérance de Channing allait plus loin encore car il lui arriva, en 1833, de signer une pétition au gouverneur de Massachussets contre la sentence qui avait frappé le journal l’Examinateur, à la suite d’un article contenant la négation de Dieu. Channing, l’année suivante, prit fait et cause, du haut de la chaire, en faveur d’un couvent catholique qui venait d’être assailli et gravement endommagé par une émeute populaire. Vers la même époque, il saluait avec sympathie le mouvement d’Oxford et les Traités pour le temps présent de Newut an.

En sens contraire, il convient toutefois de rappeler que Parker, successeur de Channing, étant tombé malade à Rome fut transporté en toute hâte, par ses amis, à Florence, presque sans connaissance, afin de ne pas mourir à l’ombre du Vatican !

Avec Emerson, l’évolution vers le rejet de toute formule dogmatique s’achève. Il était encore unitarien, quand il écrivait, avant 1829, ce qui suit : « Il viendra une heure, dans le progrès du monde, où l’élucidation des vérités contestées de la théologie cessera de demander toute la vie et la force des pasteurs. Alors le champion de la croix pourra se détourner de la tâche ingrate, où l’on a passé si inutilement des siècles, d’arracher les voiles complexes sous lesquels les préjugés et l’erreur ont caché la vérité, et arriver enfin au rôle noble et précieux qui consiste à montrer les passages secrets mais touchants de l’histoire de l’âme. » A Memoir of Ratph-Waldo Emerson, t. i, p. 125.

C’est encore au nom de l’unitarianisme que Ralph-Waldo Emerson refuse de continuer ses fonctions de pasteur, à moins que sa congrégation ne renonce à la Cène. Et voici les raisons qu’il en donne : « C’est la vieille objection au dogme de la Trinité, à savoir que le culte véritable a passé de Dieu au Christ et qu’une telle division s’est introduite dans l’âme que nulle part on ne rend à Dieu un culte indivis. N’est-ce pas là l’effet de la Cène ? J’en appelle à la conscience des communiants et leur demande s’il ne leur est pas arrivé d’éprouver une confusion de pensée pénible entre le culte, l’adoration due à Dieu et la commémoration duc au Christ ?… On fait un effort pour garder Jésus présent à l’esprit, alors que cependant on adresse les prières à Dieu. Je crains que ce rite n’ait

pour effet de revêtir Jésus d’une autorité qu’il n’a jamais réclamée et jette une perturbation dans l’esprit de l’adorateur. » Puis faisant allusion à la diversité d’opinions admise chez les unitariens, Emerson poursuit : « Je sais que nos opinions sur la nature, le rôle du Christ et le degré de vénération auquel il a droit diffèrent beaucoup. Pour moi, je suis unit arien au point de croire que l’esprit humain ne peut admettre qu’un Dieu et que chaque effort pour présenter des hommages religieux à plus d’une personne tend à faire disparaître toute idée juste. » The Lord’s Supper, cité par M. Dugard, Ralph Waldo Emerson, Paris, 1907, p. 331 sq. Et à l’appui de son sentiment, il invoque le texte de la / a ad Corinthios (xv, 28), où saint Paul dit : « Lorsque tout lui aura été soumis, alors, le Fils lui-même fera hommage à celui qui lui aura soumis toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous. »

L’exemple qui vient d’être donné fournit la preuve la plus frappante de la faiblesse d’argumentation des théologiens unitariens même les plus illustres, tels qu’Émerson. Saint Paul dit en effet de la façon la plus formelle, dans le texte cité, que Dieu a tout soumis au Christ afin que le Christ lui fît hommage finalement de toutes choses. Il est clair qu’il s’agit ici du Christ en tant qu’homme. Il est clair aussi que c’est Dieu même qui exige qu’un culte soit rendu au Christ, puisqu’il lui a tout soumis.

Sans entreprendre ici une démonstration du fait de la révélation du dogme de la sainte Trinité, on ne peut que se trouver surpris de la condamnation sans appel portée par Emerson contre le dogme chrétien de la divinité du Christ. Parlant aux étudiants de théologie protestante, à l’université américaine de Cambridge, il disait, en 1837 : « Le christianisme historique est tombé dans l’erreur qui corrompt toutes les tentatives pour répandre la religion. Tel qu’il se montre à nous, tel qu’il s’est montré pendant des siècles, il n’est pas la doctrine de l’âme, mais une exagération de ce qui est personnel, rituel. Il s’est appuyé et s’appuie avec une exagération dangereuse sur la personne de Jésus. L’âme ignore les personnes. Elle invite tout l’homme à se répandre jusqu’aux confins de l’univers et ne veut avoir d’autres préférences que celles de l’amour spontané… Mais, grâce à cette monarchie orientale qu’est le christianisme, monarchie qu’ont édifiée l’indolence et la peur, l’ami de l’homme est devenu nuisible à l’homme. La manière dont on entoure son nom d’expressions qui furent jadis des élans d’admiration et d’amour, mais qui sont maintenant pétrifiées en titres officiels, tue toute sympathie généreuse et toute affection. Tous ceux qui m’entendent savent que le langage qui décrit le Christ à l’Europe et à l’Amérique n’est pas celui de l’amitié et de l’enthousiasme pour un cœur bon et noble, mais est exclusif et formaliste, représente un demi-dieu, comme les Orientaux ou les Grecs représenteraient Osiris et Apollon. » An Adress to the Senior Class of in Divinitg Collège, cité par Dugard, op. cit., p. 41-42.

Pour les unitariens, ce langage, qui fit scandale et souleva une tempête de protestations dans le reste du monde protestant, n’était qu’une version nouvelle de l’unitarianisme d’un Lindsey et d’un Priestley. Le premier n’avait-il pas accusé l’Église chrétienne d’idolâtrie ? Le second n’avait-il pas publié, en 1803, en Amérique, un parallèle entre Jésus et Socrate dont l’idée seule était significative ?

De plus en plus donc, les unitariens devaient être amenés à interpréter le rôle de médiateur du Christ d’une façon très vague et à peu près analogue à celui des prophètes anciens et modernes : o Jésus-Christ, disait Emerson, dans la même leçon aux étudiants.

appartenait à la vraie race des prophètes. Il voyait à l'œil nu le mystère de l'âme. Attiré par son harmonie sévère, ravi de sa beauté, il vivait en elle et y avait tout son être… Il a vu que Dieu s’incarne lui-même dans l’homme et continue éternellement à se manifester à nouveau pour prendre possession de sa création. Dans le transport de son émotion sublime, il a dit : « Je suis divin. Dieu agit par moi, parle par moi. a Veux-tu voir Dieu ? Regarde-moi ou regarde-toi « lorsque tu penses comme je le fais maintenant. » …L’entendement a saisi ces paroles sur les lèvres du grand poète et dit dans l'âge suivant : « C'était Jého- « van descendu du ciel. Je vous tuerai si vous dites que « c'était un homme. » Les formes de son langage, les figures de sa rhétorique ont usurpé la place de sa vérité et les Églises ont été bâties non sur ses principes, mais sur ses métaphores. » Cité par Dugard, op. cit., p. 315.

Tous les dogmes spécifiquement chrétiens se trouvent condamnés de la sorte. Les unitariens américains étaient cependant tous des descendants des vieux puritains farouchement attachés aux dogmes calvinistes. Mais Emerson ne craignait pas de dire : « Le calvinisme est condamné aussi, il mourra seulement le dernier ; car le calvinisme se précipite dans l’unitarianisme comme l’unitarianisme se précipite dans le pur théisme. » De fait, l’horreur des dogmes en général aboutit, chez les unitariens, à une sorte de moralisme sentimental, qui affecte les formes d’un prophétisme universel. Calvin avait déclaré que tout vrai croyant reçoit directement de l’Esprit-Saint le sens infaillible par lequel il discerne les Saints Livres des livres profanes, sans qu’il soit nécessaire de recourir à l'Église. Un Emerson dépasse ce point de vue en faisant de tout homme l’organe de l’Esprit de Dieu et en exigeant que tout vrai croyant construise sa Bible personnelle et la communique à ses semblables. De fait, les ouvrages d'Émerson revêtent assez bien la forme d’une Bible des temps modernes : « Le christianisme, disait-il, est la plus forte aflirmation de la nature spirituelle. Mais ce n’est pas la seule affirmation ni la dernière. Il y en aura mille autres… » Cité par Dugard, op. cit., p. 338.

2° Appel constant à la raison et à la conscience naturelles, comme règles suprêmes en matière de religion. Ce prophétisme universel à quoi nous venons de dire qu’aboutissait l’unitarianisme n’est au fond qu’un appel à la raison de l’individu et à sa conscience naturelle. Les unitariens n’ont commencé par rejeter le dogme « le la sainte Trinité que parce qu’ils le croyaient contraire à la raison. Il y avait, dans leur incrédulité sur ce point, un rationalisme d’abord inconscient et timide, tout comme chez les soeiniens. On a dit qu’ils continuaient au début à admettre la prophétie et le miracle et qu’ils s’en servaient pour réfuter le simple déisme. Mais il était inévitable que le rationalisme initial envahit peu à peu toute la doctrine unitarienne. Tel est bien le sens de la parole il ce plus haut d'Émerson, à savoir que l’unitarianisme se précipite dans le pur théisme. De fait, la plupart des unitariens rejettent actuellement le miracle et la prophétie ou les expliquent d’une manière symbolique, métaphorique ou poétique. Quand un Théodore Parker commença, vers 1840, ; i parler de concert avec Emerson, des éléments mythiques contenus dans la Bible, de l’immanence de Dieu dans le monde et dans l’histoire, du progrès indéfini de la religion dans l’univers, ses déclarations remplirent d’effroi les vieux unitariens. Mais peu à peu la masse unitariens entra dans les idées nouvelles. El quand la direction du mouvement unitarien, après avoir été. pour de pures raisons de prestige littéraire, l’apanage des prédicateurs américains, C.hanning et

Parker, revint en Angleterre, avec James Martineau. l’esprit rationaliste de l’unitarianisme se manifesta avec éclat. Cet esprit se traduisit en particulier par la fondation, en 1873, des Hibbert-Lectures ou Société de conférences sur des sujets religieux. Hibbert était un planteur de la Jamaïque, mort en 1849, qui avait laissé un legs important pour la défense des « doctrines antitrinitaires », sous la condition expresse que les conférences ne seraient faites que par des « hétérodoxes », c’est-à-dire des non-conformistes. Parmi les conférenciers de renom qui furent invités à y donner des leçons, on peut signaler des rationalistes de marque tels que Max Millier, Abraham Kuenen, Otto Pfleiderer, etc.

Il faut remarquer toutefois que cet appela la raison naturelle et à la conscience morale ne prend pas toujours ni même habituellement la forme de raisonnements serrés. Les écrivains unitariens raisonnent au contraire fort peu. Ils refusent la discussion. Un Channing, un Parker, un Emerson surtout ne sont pas des dialecticiens, mais des poètes, des moralistes, des orateurs chaleureux et vagues, en un mot des sentimentaux. Nous avons entendu Emerson faire appel à l’expérience intime de ses auditeurs pour dénoncer la gêne que l’on éprouve, selon lui, à adorer Dieu dans la Cène, tout en maintenant une commémoration du Christ, selon cette parole : Faites ceci en mémoire de moi ! Cette « gêne » n’est pas le moins du monde un raisonnement, ni un argument proprement dit. C’est une simple impression individuelle. Et c’est sur une telle impression que l’on prétend supprimer l’un des rites essentiels du christianisme historique ! La religion ainsi conçue devient une sorte de panthéisme mystique et poétique dans lequel peut se complaire un génie éloquent et nébuleux comme celui d'Émerson ou de Martineau, mais qui ne peut guère apporter de secours efficace à l’humanité commune. En un mot, le rationalisme unitarien est un abandon de la raison en face des preuves de la vérité du christianisme et un glissement vers un naturalisme paré de phrases émouvantes et voilé d’intentions généreuses.

3° Large développement des préoccupations sociales et philanthropiques. — Nous venons de parler d’intentions généreuses. Il n’est pas question en effet de diminuer la hauteur morale d’un Channing. d’un Parker, d’un Emerson, d’un Martineau. Channing et Parker ont lutté de toutes leurs énergies contre le matérialisme et le mercantilisme trop répandus, dès leur époque, dans les milieux américains. Ils voyaient autour d’eux une société uniquement préoccupée d’affaires et de gains abondants. Ils ont protesté avec raison contre les pratiques religieuses purement rituelles et formalistes. Ils entendaient réagir contre le culte du dieu-dollar, contre l'égoïsme engendré parle libéralisme économique. Ils proclamaient avec raison que tout affaiblissement <u christianisme était une atteinte à la civilisation. « Pas de civilisation sans christianisme », disait Channing, sans se rendre compte epre l’attitude doctrinale OU plus exactement antidoctrinale de l’unitarianisme n’allait a rien de moins qu'à dissoudre le christianisme, qui a créé notre civilisation, dans un sentimentalisme flottant et vaporeux. Channing et ses émules doivent être félicités toutefois de leurs initiatives sociales et philanthropiques. Channing prenait volontiers Fait et cause pour les ouvriers dans leurs débats contre un patronat trop souvent cupide et sans entrailles. l’n jour qu’il avait reçu une adresse de l’Institut ouvrier de Slaithvvaite. dans le Yorkshhe, il s'écria, la figure animée et les yeux brillants : « C’est de l’honneur, « ceci, c’est de l’honneur ! » Son neveu, qui nous rapporte ce Irait, ajoute que sur sa table il v avait une lettre écrite par ordre d’un des plus grands monarques de l’Europe, pour le remercier de l’envoi de son livre sur l’Utilité d’un ministère pour les pauvres. « Mais la reconnaissance profondément sentie et simplement exprimée par la main d’un rude mineur le touchait plus que les éloges des grands. »

Les unitariens furent aussi au premier rang des ubolilionnistes, c’est-à-dire des Américains qui faisaient campagne contre l’esclavagisme. Channing écrivit même, en 1835, un Traité de l’esclavage, où il opposait aux considérations d’intérêt et de sagesse matérielle ou d’opportunité les principes éternels de la justice et de la vérité. Théodore Parker entra encore plus ardemment dans la lutte. Il ne craignit pas de prendre parti du haut de la chaire contre les hommes d*État coupables à ses yeux de favoriser les calculs intéressés des planteurs du Sud. Quant à Emerson, ses œuvres sont toutes pénétrées de préoccupations sociales, comme le savent tous ceux qui en ont abordé la lecture. Même note dans Martineau.

Grand souci de la formation des caractères comme fondement de la vie religieuse.

Si les écrivains unitariens, dont nous parlons volontiers ici (parce que par eux l’unitarianisme a exercé une influence qui a largement débordé les limites de la secte), ont été surtout des moralistes antidogmatiques, ils ont insisté particulièrement sur la formation des caractères. Il semble même que ce soit là pour eux l’essentiel de la morale et de la religion. Le caractère consiste, affirment-ils, à être soi, à n’imiter personne, à ne croire à aucune autorité, à ne suivre aucune tradition. Cela ne va pas, il est vrai, sans quelques contradictions : par exemple Emerson oublie qu’il a réduit toute la grandeur du Christ à un exemple qui nous est proposé, quand il nous dit : « Affirmez votre personnalité ; n’imitez jamais… Ce que chacun peut faire de mieux, nul excepté son créateur ne peut le lui apprendre… » S’il ne faut jamais imiter, à quoi sert que le Christ nous ait laissé, à défaut de la rédemption par son sang, une certaine rédemption par son exemple ? Mais ne demandons pas une logique trop parfaite à un poète. Il y a, chez les grands écrivains unitariens, d’excellentes choses, des exhortations admirables, des intuitions dont tout le monde peut faire son profit. Ils ont osé comparer Jésus à Socrate. Ce sera plutôt une sagesse socratique que l’on trouvera dans leurs ouvrages. Ils ont dépouillé l’intransigeance doctrinale inflexible de Calvin, mais ils ont gardé, de son puritanisme fondé sur la certitude de l’élection divine, voir Puritanisme, de fortes habitudes de fermeté dans la conduite privée et publique, le sentiment d’appartenir à une élite de l’humanité, et, de son biblicisme outrancier, l’inconscient désir de prolonger la Bible et d’être les prophètes de leur temps. C’est ce qui leur a valu d’exercer une influence beaucoup plus étendue que leur petit nombre ne permettrait de le prévoir.

I. Sources.

Œuvres de Biddle connues sous le nom de Old Unitarian Tracts, publiés par Firmin, de 1693 à 1700 ; œuvres de Lindsey indiquées dans le corps de l’article ; œuvres théologiques de Priestley, indiquées ibid. ; œuvres de Channing, de Parker, d’Émerson, de Martineau. Pas de confession officielle.

II. Littérature.

Laboulaye, Essai sur Channing, publié en tête de la traduction française des Œuvres sociales de Channing, Paris, 1854 ; Mme Hollond, Channing, sa vie, ses œuvres, préface de M. de Rémusat, Paris, 1859 ; Lavollée, Channing, Paris, 1876 ; Chadwick, W. Ellery Channing, minister oj religion, Boston, 1903 ; Henry Channing, Vie de Théodore Parker, ’Paris, 1860 ; A. Réville, Théodore Parker, sa vie et ses œuvres, Paris, 1865 ; Weiss, Th. Parker, sa vie et sa correspondance, Londres, 1862 ; Frotingham, Th. Parker, Londres, 1876 ; Sanborn, Genius andCharacter oj R. W. Emerson, Boston, 1885 ; Rich. Garnett, Life oj R. W. Emerson, London, 1888 ; M. Dugard, R. W. Emerson, sa vie et son œuvre, Paris, 1907 ; Introduction aux Pages

choisies d’Fmerson, Paris, 1908 ; Jackson, James Martineau, a biography and study, Boston, 1900 ; Drummond-L’pton, The Lije and Letters oj James Martineau, and a survey oj his philosphical Works, 2 vol., New-York, 1902 ; histoire d’ensemble dans Henry Allen, À hislory oj the Unitarians in the United States, au t. x de la collection American Church historical Séries, New-York, 1894.

L. Cristiani.