Dictionnaire de théologie catholique/VIATEUR DE COCCAGLIO

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Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant, Eugène Mangenot, Émile AmannLetouzey et Ané (Tome 15.2 : TRINITÉ - ZWINGLIANISMEp. 653-656).

VIATEUR DE COCCAGLIO, frère mineur capucin, lecteur, écrivain et polémiste janséniste (1706-1793). — I. Vie. II. Œuvres. III. Doctrine.

I. Vie. —

Vincent Bianchi naquit à Coccaglio, près de Brescia, en Italie, de Jacques Bianchi et de Madeleine Perzonelli, le 20 avril 1706. En 1724, il prit l’habit franciscain chez les capucins de la province de Brescia, à Vestone. D’abord prédicateur, puis nommé lecteur à Brescia, il forma, en cette dernière qualité, à partir de 1737, toute la jeunesse de sa province religieuse. Écrivain d’une fécondité extraordinaire, il édita ses premières œuvres polémiques, en 1753 et en 1755. À cette époque, il attaqua Fébronius et réfuta dans un sens catholique l’évêque in partibus de Myriophite (voir ici, t. viii, col. 1061). Mais l’année suivante, il montra le bout de l’oreille lorsqu’il publia Ricerca sistematica sul testoe sulla mente di S. Prospero d’Aquitania, ouvrage imprégné d’augustinisme à tendance jansénisante. Les molinistes s’efforcèrent de faire condamner l’auteur et dans trois sonnets publiés contre lui l’accusèrent d’hérésie ; mais le P. Viateur, jouissant de la protection des cardinaux Passionei et Tamburini, ne fut pas inquiété. En 1760, le théologien capucin publia, en réponse à ces attaques, un recueil d’épigrammes de saint Prosper d’Aquitaine : Lo spirilo di S. Prospero qu’il s’efforça de présenter comme le reflet des doctrines augustiniennes. L’année suivante, en 1761, le P. Viateur donna dans la cathédrale de Spolète une série de conférences exégétiques 2837

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qui eurent un grand succès. À cette époque, tout lui réussit ; en 1763, il a la joie de voir mettre à l’Index les trois sonnets jadis dirigés contre lui ; en 1767, il est nommé gardien du couvent de Cologne, bourg situé à 20 kil. à l’ouest de Brescia ; en 1768, il publie le fruit de son enseignement théologique aux scolastiques de sa province, les Tentamina theotogica ; en 1771, après avoir été définiteur, il est élu provincial de Brescia et, par concomitance, les deux titres étant alors réunis, devient préfet apostolique de la mission de Bhétie (Suisse) ; en 1772, il reçoit de Clément XIV un bref laudatif, daté du 8 septembre, le remerciant de l’envoi de ses Tentamina et louant sa doctrine, preuve que les escarmouches théologiques décrites plus haut n’avaient pas compromis sa position à Borne. En 1774, il quitte le provincialat, mais est nommé custode général et il va reprendre son enseignement à Brescia. À cette époque, les polémiques pro-et antijansénistes battent leur plein. Kn 1776, le P. Camille Monici de l’Oratoire de Brescia, ami et peut-être dirigé du P. Viateur, publia sous le surnom de Pierre Vescovi un factum violemment anti-moliniste, La dotlrina di S. Agostinoe di S. Tomaso vittoriosa di quelle Ludovico Molinae de suoi seguaci, Brescia, 1776.

Cet ouvrage déchaîna la tempête en Italie. Le P. Viateur prit parti pour son ami et, en 1777, abandonna le lectorat pour se consacrer à la lutte. Le jésuite Mozzi de’Capitani, devenu chanoine de Bergame à la suite de la suppression de la Compagnie, ayant répliqué à Monici dans un ouvrage intitulé : // jalso discepolo di S. Agoslinoe di S. Tomaso convinto d’errore. Venise, 1779, le bouillant capucin, en réponse à Mozzi, attaqua, en 1780, l’autorité de la bulle Unigenitus par des témoignages qu’il prétendait emprunter à Benoît XIII, Benoît XIV et Clément XIII et dont il farcit son pamphlet : Zoppicamenti sulla lettera di un libro intitolato « Il falso discepolo. .. », etc.

Mozzi, peu flatté de s’être vu imputer des « bévues (Zoppicamenli) par son acerbe adversaire, démontra au P. Viateur (Brève saggio délia veracità del P. I’. Viatore da Coccaleo, cap… Bergame, 1780) cpi’il était un faussaire. L’année suivante, le jouteur capucin réplique à Mozzi par un nouveau pamphlet : Ingenua véracité dans lequel il dévoile « les faussetés et imposl nies i de son contradicteur. C’est alors que le célèbre irsuite François-Antoine Zaccaria fit paraître, en 17X2. sous le pseudonyme de Pistofllo rnmann une l)i/rsa di tre sommi ponteftei di Santa Chiesa Henedelto XIII, Benedello XIVe Clémente XIII… diretla ni P. F. Viatore de Coccaglio… Bavenne (Venise). La réplique fut immédiate et s’intitula : La bolla Unigenitus non annunziala mai dalla S. Sede regola di jede… L’auteur s’efforçait de démontrer que jamais l’Église n’avait considéré la bulle Unigenitus comme de foi. Sa thèse ayant suscité de nombreuses réactions, le vieux lutteur entama une polémique avec lis Novelle letterarie de Venise qui l’avaient accusé de contradiction et d’incohérence et rédigea une Difesa dell’opusculo inlitulato : La bolla Unigenitus, restée manuscrite. Toutes ces escarmouches doctrinales n’empêchaient pas le vieillard de mettre m i "in des œuvres ascétiques, mystiques, hagiographiques, d’entretenir une correspondance suivie de direction avec de nombreux amis. Il parut encore plefal

de verdeur à 85 ans au chapitre provincial, tenu à Brescia et y prit la parole le 10 août 1792. l’eu de temps après, le p. Viateur fut atteint d’hydroplsle

et il mourut, le 18 janvier 1793, selon le nécrologe

le la province de Brescia, le II mars, selon certains

auteurs, âgé de 86 ans ((iX ans de vie religieuse), laissant à ses frères en religion le souvenir d’un

homme d’une grande austérité et d’une vertu rigide en même temps que d’un savant de première valeur attaché, malheureusement, avec opiniâtreté à ses idées personnelles.

IL Écrits. — 1° Imprimés. — 1. Théologie dogmatique el morale. — a) Dogme. — Tentamina theologico-scholastica f. Viatoris a Cocaleo, cap., en 6 vol., t. i, ii, iii, Bergame, 1768 ; t. iv, v, Bergame, 1769, t. vi, 1770.

b) Morale. — Tent. theol. moral, rev. adm. p. Vial. a Coc, ex-provincialis, en 6 vol., t. i, Lucques, 1778 ; t. ii, t. iii, ibid., 1779 ; t. iv, v, vi, ibid., 1780. Cette théologie morale a été éditée par les soins du P. Alfred d’Acquafredda, lecteur, collaborateur du P. Viateur. Un abrégé en a paru intitulé : Tentaminum theologicorum in moralibus {. Viatoris a Coc. synopsis, 2 vol., Venise, 1791.

2. Théologie ascétique.

Riflessioni sopra l’origine, la natura ed il fine délia devozione al sacro Cuor di Gesù…, Naples, 1790.

3. Écrits polémiques.

a) En 1752, un certain abbé Lamy ayant écrit dans les Nouvelles littéraires de Florence (n. 27 et 28) un article favorable à l’augustinisme rigide s’attira de la part du P. Fortunat de Brescia, mineur réformé, des Osservazioni critiche sopra un arlicolo délie Novelle Letterarie di Firenze al N° 27e 28 anno 1712, Boveredo, 1752. Le P. Viator répliqua aussitôt par un Esame sulle osservazioni critiche del P. Forlunato da Brescia, min. rif., sopra certo articolo délie Novelle Letterarie di Firenze, Lucques, 1753 (183 p.). Le P. Bonaventure vint alors à la rescousse et sous le pseudonyme de Bambaldo Norimene défendit l’augustininisme de son frère dans le t. ni de ses Leltere di raggagluio (p. 69 sq.), Trente, 1756. La polémique gagna un certain nombre de revues italiennes et toucha aux deux délectations, cf. ici, t. i, col. 2488-2489. Le P. Viator publia, enfin, cinq ans après qu’elle eut été commencée, une Sloriae difesa délie due-censure del novellisla fiorenlino contro il P. Forlunato da Brescia, min. rif., Lucques, 1757, dans laquelle il exposa le système augustinien des deux délectations.

b) Ricerca sistematica sul testoe sulla mente di S. Prosper. i d’Aquitania net suo poema contro li ingrati, Brescia, 1756, 581 p. ; 2e et 3e édit., Brescia, 1762. D’après l’auteur (1™ édit.), Prosper, dans son poème dirigé contre les semi-pélagiens (li ingrati), a exprimé la pure doctrine d’Augustin relativement à la grâce et à la prédestination. Dans la 2e édit., 1762, considérablement augmentée de réponses faites à ceux qui attaquèrent la l ro, le P. Viateur publie (lettera VIII) des Osservazioni apologeticlie sulla lettera del P. Vincenzo Milioli. La lettre de ce P. Milioli, O. P., visait une riposte faite par le P. Viateur au P. Augustin Orsi au sujet de la nécessité de la grâce dans l’état d’innocence.

c) l.o spirito plosofico, teologiCO ed aseelicco di S. Prospéra d’Aquitania nei suoi epigrammi. Brescia, 1759 ; 2’édit. ( ?), ibid., 1760. Ce recueil de 106 épigrammes de S. Prosper, « ordonnées comme il convient à un liait é théologique », prétend livrer la vraie pensée du saint sur les problèmes alors discutés, en particulier sur ceux de la grâce et de la prédestination.

d) Carteggio de’padri Viatoree Bonauentura da Coccaglio fratrlli cappuccini délia provincia di lirescia sopra un impio srritlo intitolato « Solenne concioabblura latin nrlla chiesa delta Terra Dominante di Poschlavo nella Rezia li tû Agosto 1789°, Brescia, 1761 ; 2e édit., Ibid., 1762 (301 p.). Cet ouvrage a été écrli par les deux frères I inii ; n eut lire (né en 1713.

capucin en 1732, + 1778) el Viateur pour répondre aux

calomnies d’un apostat ou prétendu Ici du nom fie Paul Lorenzini. 2 839

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e) Ilalus ad Febronium jur(is) cons(ulluni) chir(um) « De Statu Ecclesiæ » pro supplemento ad tentamina theologise Bergami édita armo 1767, Lucques, 1768 (329 p.) ; 2e édit. : Ital. Bergami édita armo 1768, Lucques, 1768 (348 p.) ; 3e édit. : Ital… de statu Ecclesiæ, Lucques, 1768 (348 p.) ; 4e édit. : Ital… edit. ait., Lucques, 1770 (387 p.) ; 5e édit., id., Lucques et Venise, 1770 (387 p.) ; 6e édit. : l. / cui italice adduntur vindiciæ in larvatum Danielem Berlonum, Venise, 1775. L’ouvrage parut également hors d’Italie. En voici l’analyse sommaire :

a. Ilalus… de statu Ecclesiæ seu de hac materia epistolæ eximiæ r. p. Viatoris a Coc…, Francfort-surle-Mein, 1770 ; 2e édit., 1773 ; Leipzig, 1770. b. Ilalus ad cl(arum) Justinum Febronium ictum pro supplemento ad Tent. theol. tomus alter cui italice adduntur in larvatum Danielem Berlonum, Trente, 1774.

f) La polémique suscitée par V Ilalus entraîna Viateur de Coccaglio à publier des ouvrages annexes en langue vulgaire : Versionee proseguimento dell' Italus al en. Signor Giuslin Febbronio dello slalo délia Chiesa, t. i et t. ii, Trente, 1771 ; Proseguimento dell' Ilalus… riposta al secondo lomo stampato in Franfort ed in Lipsia anno 1770, t. iii, 1772 ; Quarto corso di leltere dell' Italus… in riposta al libro di Daniele Berton…, Bologne, 1776. Ce dernier ouvrage répond à la Causa buona di Giustin Febbronio difesa contro il P. Vialore de Coccaglio, cap., Francfort-surle-Mein et Leipzig, 1772. La polémique avec les jésuites Mozzi et Zaccaria donna lieu à la naissance des ouvrages déjà cités dans la biographie.

g) Zoppicamenti sulla lettura di un libro intitolato il falso discepolo de' SS. Agostinoe Tommaso in riposta alla cicalata del Signor dom Luigi canonico Mozzi aulore del sudelto, Bergame, 1780 ; Brescia, 1780 (275 p.) ; — Ingenua veracitù del zoppicante difesa dalle false impulazioni del nob. Signor don Luigi canonico Mozzi ex-gesuita, in riposta alla seconda cicalata intitolata saggio délia rara veracità del p. f. Viatore da Coccaglio, cap., Bergame, 1781 (122 p.) ; — La bolla Unigenitus non annunziala mai dalla S. Sede regola di fede, riposta di f. Viat. da Coc, cap., a Pistofilo romano. In risconlro alla sua difesa dei Ire sommi pontefici, Brescia, 1782, (138 p.) ; — Relazioni storico-criliche sopra di in possessorio in contesa, Lugano, s. d.

4. Écrits sur le droit canonique.

Tracce di tradizione sopra la regola de' frali minori. Cette exposition de la règle des frères mineurs que Viateur n’aurait fait que mettre en ordre et publier, mais qui serait en réalité du P. Fidèle d’Acquaffreda (V. Bonari, Il conv. ed i capp. Bresc, p. 426-7, 466-7, Milan, 1891), est suivie de deux annexes : De prælatorum regular. eleclionibus et De studiis, Venise, 1780, 568 p.

5. Lettres.

Trop nombreuses pour être toutes recensées, nous ne citerons que les principales :

a) Ascétiques. — Riposta ad un amico sul dubbio se la santa messa sia bastante a sanctifleare la festa, Bologne, 1781, 109 p. Non, répond l’auteur : à la messe il faut ajouter les bonnes œuvres, l’assistance au sermon, etc. Aux réflexions suscitées par cet ouvrage, Viateur répliqua par une : Rip. n ad un amico in cui si riconferma non bastare la sanla messa per sanctificare la festa… Venise, 1782, parue sans nom d’auteur, 135 p. Réponse à deux ecclésiastiques de Turin et de Milan et critique acerbe du probabilisme.

b) Polémiques. — Leltere del P. lettore Vialore da Cocc. ex depn. cap. scritta al P. lett. Bonav. dans G. Rusca, Lettera apologetica… Lugano, 1765, p. 6870. — Lettera prima di Filardo Alideo a Rambaldo Norimene ; ii, terza dans Proseguimento délie leltere di ragguaglio di R. Norimene, t. iii, p. 76-113 ; 122 157 ; 171-198. Rambaldo Norimene était le pseudonyme du P. Bonaventure, frère du F. Viatore et janséniste comme lui. l’ne lettre sur la nouv. édit. de Ricerca systematica attribuée à Viatore est en réalité de Bonaventure (cf. llarino da Milano, Bibl. des F. M. cap. di Lomb., p. 81, n° 455).

Dans les lettres ci-dessus et en d’autres encore, Viateur fait ou son apologie personnelle, ou celle de son frère ou des deux à la fois.

Écrits manuscrits.

Conservés à la Vaticane, mss. lat., 9282, n. cxv ; 9287, p. 555-556 ; à la

Quiriniana de Brescia F. *i, 4 a-2 ; aux Arch. prov. des cap. à Milan, ces écrits sont légion et d’un intérêt inégal. Ils comprennent les mss. des ouvrages imprimés, des lettres dont plusieurs à des cardinaux, à des dignitaires ecclésiastiques, à des amis, à des nouvellistes, des divertissements littéraires, des traités de rhétorique, d’algèbre, de géométrie, des traductions du français, des sermons, des apologies personnelles, des polémiques en faveur des capucins et des autres religieux victimes du joséphisme, des mélanges historiques relatifs à l’histoire de la province capucine de Brescia, des articles pour des revues, des poèmes inspirés de la Bible, etc., etc. Nous ne parlerons que de ce qui a trait aux § I et III de notre article.

1. Sujets scolastiques.

a) Cursus philosophicus, seu cursus integr. Logic. Ontol. Cosmol. Gêner. Psycholog. ration. Empiric, Theol. Natur. et Physicæ melhodo Wolflano. — b) Cursus theologicus spéculations dogmaticus. — c) De connexione inter speculalivam rationalem et laxam moralem. — d) Tractalus theoricus de actibus humanis. Plusieurs ouvrages mss. traitent des œuvres ascétiques et mystiques du P. Gaétan de Bergame, capucin, et en font une critique parfois serrée et sévère.

2. Polémiques.

Parmi les lettres, relevons-en seulement toute une série que l’on pourrait intituler : Lettres destinées à donner l’intelligence des Tentamina et à répondre aux critiques soulevées par ces essais de théologie dogmatique et morale. — Favorosi Caolaceti, recueil de controverses théologiques qui eurent lieu en 1771-1772. — De la même veine : Registri dogmatici critico-storici inlorno ai sistemi di grazia, in difesa délia scuola auguslina. — De collationibus ilalicis inter commentarium J. Ffebr.J, 83 p. Ce ms. tend à prouver que Fébronius s’est vraiment soumis à Pie VI en 1778 et a désavoué le De statu Ecclesiæ.

3. Biographiques.

Carattere personale del P. Bonaventura da Coccaglio…, biographie et apologie du frère de l’auteur, mort en chaire, à Coccaglio le 17 mars 1778. Il ressort de ce ms. que les deux frères ont fréquemment collaboré (par exemple dans la rédaction du Carteggio, qui est davantage de Bonaventure que de Viateur) ; que plusieurs ouvrages : Instituta moralia theologi Lugdunensis (P. Paul de Lyon, cap.) l re édit., t. i, t. ii, Brescia, 1765 ; 2e édit., t. i, ii, Milan 1771-72 ; la réédition de La storia de auxiliis del ch. p. Giacinto Serry, O. P., Brescia, 1771, parue sous le pseudonyme de Rimbaldo Norimene ; la Vita délia V. S. Maria Madd. Martinengo (éditée après la mort des deux frères sans nom d’auteur à Brescia, en 1794) sont non du P. Viateur, comme on l'écrit couramment, mais du P. Bonaventure. (Cf. V. Bonari, op. cit., 361-364 ; Hilarin de Milan, op. cit., 79, n. 444, 445, 80, n. 453, 84, n. 468, 85, n. 472).

4. Droit civil et canonique : Traditio avita, considérations canoniques sur la règle de Saint-François.

Après la Révolution française, le P. Viateur rédigea : La concordanza tra i delettie le pêne in distanza di secoli.

(Pour tous renseignements sur ces mss., cf. Vald. Bonari, op. cit., p. 429-436.)

5. Œuvres manuscrites douteuses. — Difjicolla proposte a N. N. sopre le sue riflessioni crilico-dommatiche (Crema, arch. Cap.)- Ce ms. de 156 p. est composé de deux lettres défendant l’augustinisme rigide. Le ms. porte cette inscript. : P. Viatore C. M. L’incipit de la l re lettre est celui-ci : Italia 177<). Bien que ces deux mentions poussent à faire croire que Viateur est vraiment l’auteur de ce jactum jansénisant, V. Bonari pense qu’il faut l’attribuer plutôt à Bonaventure, pourtant mort en 1778. (Cf. V. Bonari, op. cit., p. 357, 436.)

III. Doctrine.

Elle ressort déjà en partie de la biographie et de l’exposé des œuvres. Précisons que Viateur dans le monument théologico-moral qu’il a élevé pendant son lectorat (Tentamina) se montre très éclectique. Il n’est pas bonaventuriste comme ses prédécesseurs capucins italiens, ni thomiste, ni scotiste, pas même augustinien exagéré. Rien à dire, en effet, sous le rapport de l’orthodoxie, du t. v De i gratia, Bergame, 1770 (cf. p. 20, 22. 23, 42, 45) où l’auteur condamne nettement jansénisme et quesnellisme ; p. 45-48, où il déclare que Jansénius prête gratuitement ses erreurs à saint Augustin et où il se ! rallie dans la question de la grâce au système augustinien modéré et prend parti (p. 202-203) contre le molinisme.

Comme moraliste, il prend son bien où il le trouve cl s’avère nettement probabilioriste. Assez tôt cependant, il évoluera et deviendra augustinien rigide comme le prouvent ses études sur le Carmen de ingratis et sur les 106 epigrammata ex Sententiis S. de saint Prosper d’Aquitaine et aussi son ouvrage sur les deux délectations (voir Stor.e difesa delta due cens.), où il expose la pure doctrine de saint Augustin (ici, t. i, col. 2488-2489). Bien que ces ouvrages revêtent un ton désagréable et contentieux, ils restent orthodoxes. L’orthodoxie de Viateur se manifestera avec éclat lorsque, sous le pseudonyme d’Ilalus, il réfutera J.-C. Nie. de Hontheim, caché sous celui tic Fébronius (voir ici, t. viii, col. 1061), et en vingt admirables Epistolæ (part. I, p. 328 dans liai., Lucques, 1768), réduira à néant les thèses gallicanes du De statu Ecclesix (Bouillon, Francfort, 1763). Aussi, bien qu’il y ait là une exagération manifeste, comprend-on qu’après le bref de Clément IY (1772) louant les travaux théologiques de notre capucin. celui-ci ait été salué par ses admirateurs du titre d’il primo teologo d’Italia. Mais à partir de 1780, le jansénisme latent qui sommeillait dans le P. Viateur et qui s’était à peine laissé deviner pour la première fois dans ses Tentamina lorsqu’il regrettait les excessus Commis contre les jansénistes par des Politiques qui

se servaient des bulles comme d’armes contre leurs adversaires (lent., édit. cit.. i. v. col. 22 h in fine), se

manifesta soudain. Son ant imolinisme de toujours le drcss ; i contre les jésuites et le porta au cours de la polémique que nous avons signalée dans la biographie, à attaquer avec frénésie ce même pouvoir pontifical qu’il avait défendu contre lébrnnius. Clément I devlnl sa bête noire et il mil lout en œuvre pour ruiner

l’autorité de la bulle Unigenitus et déconsidérer les pontifes qui l’avaient promulguée ou invoquée « outre les jansénistes. Dans ses différents écrits janséui sauts, il reprend sans cesse, sous une forme ou sous .mire, ces trois mauvais arguments :

I" Clément l en publiant la bulle I nigeniliis n’a pas eu l’intention d’en faire une règle de foi cl. a l’appui de cette assertion. Viateur montre « pic les articles de la bulle ne remplissent pas les conditions n la Règle </<’/<// catholique « le François Véron c ; 1694). C’est là une singulière référence.

2° Le concile tenu a Borne en avril 1725 ; i S.iinl

.le. m « i « - Latran et qui, bien que n’ayant rien d’œcumé

nique, imposa dans son deuxième décret « la constitution. .. Unigenitus… comme règle de foi » aurait donc erré sur ce point si l’on ne savait de science certaine que cette incidente règle de foi fut ajoutée après coup aux actes conciliaires.

3° Dans ces conditions, la bulle Unigenitus ne saurait obliger en conscience les catholiques à l’obéissance.

Ramenée à ses caractéristiques essentielles, cette apologétique janséniste paraît un peu brutale, mais in praxi, elle fut menée avec assez de souplesse, avec assez de protestations de soumission au saint père, pour faire entendre aux lecteurs que, en réalité, le jansénisme n’avait été pris au sérieux que par le seul Clément XI, que cette prétendue hérésie n’était qu’un fantôme, une chimère, une invention des molinistes. Si l’Église a applaudi à la condamnation du jansénisme, ce fut par simple politesse et pure déférence à l’égard de Clément XI et cette approbation ne saurait tirer à conséquence, ni engager les successeurs de ce pontife, ni les évêques, ni les fidèles, puisque, au fond, ce que l’on appelle le jansénisme, ce n’est que de l’augustinisme démarqué, et que tout bon catholique a le droit d’être augustinien. Ces équivoques ont peut-être réussi à tromper les confrères du P. Viateur qui, jusqu’à la fin du xix c siècle, se sont portés garants de sa parfaite orthodoxie (cf. V. Bonari, op. cit., p. 421-423), mais l’impartialité oblige à adopter le jugement de l’abbé Vincent d’Avino sur le P. Viateur : giansenista oslinalo… imbevuto di spiriti giansenistici… si fece lancia spezzata del giansenismo nell’alla Italia (Cf. V. d’Avino, Enciclop. dell ecclesiast., t. iv, p. 947, Turin, 1879). À ce sévère jugement fait écho le bibliographe capucin italien qui s’est occupé le plus récemment du P. Viateur : pencolo verso il giansenismo (cf. Ilarino da Milano, op. cit. n. xxxv).

Mémoires pour servir à l’hist. eccl. pendant le XVII I’s., t. iv, p. 3.32, Paris, 1816 ; F.-X. de Feller, Biogr. univ., t. xii, p. 559-560, Paris, 18(9 ; Bull. Cap., édit. P.-l). de Munster, t. ix, 47-18, Inspruck, 1881 ; Valdemiro Bonari de Bergame, Biograftae bibliografia del P. Viat. Bianchi da Coccaglio, dans Mise, franc., 1888, t. iii, p. 139-1 10 ; le même, / convenu cil i capp. Bresciani, p. 27, 361, : 161, 365, 367, 368, 418-438, 466, 167, 168, 607, 62 : î, 630 ; C. Sommervogel, Hibl. Comp. « /< Jésus, t. ii, col. 543 ; l. v, col. L371 ; I. viii, col. 1118-1 119, Bruxelles-Paris, 1891, 1894, 1898 ; il. Hurter, Nomencl., 3° éd., I. va, col. 258-259, 318319 ; 1 lilarin « le Milan, Biblioteca (Ici jniti ininori cupiiciini ili Lombardia (1836-1000), n. xxxiii, xxxv, p. 78, 79, 81, 291-29’. », Florence, 1937.

P. GODEFROY.