À valider

Dictionnaire raisonné de l’architecture française du XIe au XVIe siècle/Crypte

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Crucifix <
Index alphabétique - C
> Cuisine
Index par tome

CRYPTE, s. f. Crute, croute, grotte. L’étymologie de ce mot (ϰρὐπτειν, cacher) indique assez sa signification. Les premières cryptes ou grottes sacrées ont été taillées dans le roc ou maçonnées sous le sol, pour cacher aux yeux des profanes les tombeaux des martyrs ; plus tard, au-dessus de ces hypogées vénérés par les premiers chrétiens, on éleva des chapelles et de vastes églises ; puis on établit des cryptes sous les édifices destinés au culte pour y renfermer les corps saints recueillis par la piété des fidèles. Beaucoup de nos anciennes églises possèdent des cryptes qui remontent à une époque très-reculée : les unes ne sont que des salles carrées voûtées en berceau ou en arêtes, suivant la méthode antique, ornées parfois seulement de fragments de colonnes et de chapiteaux grossièrement imités de l’architecture romaine ; d’autres sont de véritables églises souterraines avec collatéraux, absides et absidioles. On pénètre habituellement dans les cryptes par des escaliers qui débouchent des deux côtés du sanctuaire, ou même dans l’axe du chœur.

Les églises de France et des bords du Rhin présentent une grande variété dans la disposition et la forme de leurs cryptes ; plusieurs sont construites avec un certain luxe, ornées de peintures, de colonnes de marbre et de chapiteaux historiés, et sont assez vastes pour contenir un grand nombre de fidèles ; elles possèdent le plus souvent deux escaliers, afin de permettre aux nombreux pèlerins qui venaient implorer l’assistance des saints dont les restes étaient déposés sous leurs voûtes de descendre processionnellement par l’un des degrés et de remonter par l’autre. On évitait ainsi le désordre et la confusion.

Les cryptes, sauf de rares exceptions, reçoivent du jour par d’étroites fenêtres ouvertes sur le dehors de l’église ou sur les bas-côtés du sanctuaire. Cette dernière disposition paraît avoir été adoptée lorsque les cryptes étaient creusées sous les chœurs des églises romanes entourés d’un collatéral. Ainsi les ouvertures qui donnaient de l’air et de la lumière dans la crypte débouchaient dans l’enceinte du lieu consacré. Alors les chœurs étaient élevés au-dessus du pavé du pourtour, ce qui ajoutait à la solennité des cérémonies religieuses, et ce qui permettait même à l’assistance de voir, du bas-côté, ce qui se passait dans la crypte. La plupart des églises rhénanes conservent encore cette disposition, que nous voyons adoptée dans une petite église dont quelques parties paraissent remonter au VIe siècle ; nous voulons parler de l’église de Saint-Martin-au-Val de Chartres. « On pénétrait primitivement dans la crypte, » dit M. Paul Durand, dans la description fidèle qu’il a donnée de cet édifice[1], « par deux petites portes placées à droite et à gauche de sa partie occidentale. Ces portes existent encore… Il est probable qu’autrefois le spectateur, placé dans la grande nef, pouvait apercevoir l’intérieur de la crypte par une ouverture médiane, ou deux ouvertures latérales pratiquées dans sa face occidentale, comme on le voit encore dans plusieurs églises du centre et de l’ouest de la France… » Il y a entre le sol du sanctuaire relevé et celui du bas-côté une différence de niveau suffisante pour qu’on ait pu pratiquer des fenêtres dans le soubassement des arcades du chœur, de manière à éclairer la crypte et à permettre de voir l’intérieur de cette crypte, dont les voûtes reposent sur deux rangées de quatre colonnettes chacune. Bien que l’église ait été mutilée et reconstruite en partie à plusieurs reprises, cependant les bases des colonnettes de la crypte et quelques chapiteaux primitifs sont d’un travail qui appartient à une époque très-reculée, voisine encore des arts du Bas-Empire, et présentant tous les caractères de la sculpture de la crypte célèbre de La Ferté-sous-Jouarre[2].

Les cryptes romanes n’ont guère qu’une hauteur de trois à quatre mètres du sol à la voûte ; il fallait alors que ces voûtes fussent portées sur un quinconce de colonnes, si la crypte occupait en superficie un espace assez étendu. Toutefois, les cryptes étant creusées sous une abside ou sous un sanctuaire entouré de colonnes, le mur qui les fermait à l’orient était ordinairement semi-circulaire. Prenons, comme exemple, une des plus anciennes cryptes conservées, celle de Saint-Avit d’Orléans[3]. Saint-Avit mourut de 527 à 529 ; son corps, transporté à Orléans, fut enseveli non loin des murailles. « Childebert Ier, passant par Orléans pour aller combattre les Visigoths, voulut visiter les reliques du saint ; il fit vœu de bâtir une église au lieu où elles étaient déposées, s’il remportait la victoire : il revint triomphant et remplit son engagement[4]. » L’église fut, depuis lors, saccagée plusieurs fois par les Normands, pendant le siège de 1429 et en 1562 ; en 1710, elle fut rasée. On avait perdu jusqu’à sa trace, lorsqu’en 1853 des fouilles faites pour agrandir les bâtiments du séminaire mirent au jour la crypte de Saint-Avit, qui nous paraît appartenir à la construction de Childebert.

centrér

Nous donnons (1) le plan de ce monument. On observera que l’entrée A se trouve au bas du rond-point, dont les voûtes sont portées sur quatre pilettes à section octogonale ; en B est une arrière-salle (martyrium), séparée de l’abside par une claire-voie maçonnée. Le petit autel devait être placé en C, et le corps du saint en D. Nous retrouvons des dispositions analogues adoptées dans la plupart des cryptes primitives : c’est qu’en effet les reliques se trouvaient ainsi déposées sous le maître autel du sanctuaire, placé en avant de l’abside occupée par les clercs.


La fig. 2 donne la coupe transversale de la crypte sur la ligne EG, regardant la claire-voie ; et la fig. 3, la coupe longitudinale sur la ligne HI.


Cette dernière coupe fait voir, en A, le tombeau du corps saint ; en B, l’autel principal supérieur placé dans le sanctuaire au-dessus du corps du martyr ; en C, les sièges des clercs (chorus), et en D, l’autel de la crypte. La construction de la crypte Saint-Avit est faite en moellons grossièrement taillés, séparés par des joints de mortier très-épais. La grotte destinée à recevoir le corps saint n’est parfois qu’un réduit, comme à Saint-Germain d’Auxerre, comme dans la crypte de la cathédrale de Chartres et dans celle de l’église de Vézelay ; quelquefois, au contraire, le martyrium est une véritable nef entourée d’un bas-côté. Cette dernière disposition est bien marquée dans la crypte de la cathédrale d’Auxerre, que nous supposons construite du IXe au Xe siècle.


Voici (4) le plan de cette crypte, aujourd’hui enclavée dans des constructions du XIIIe siècle. Le martyrium A est une longue salle dont les voûtes reposent sur un quinconce de piles ; le corps saint devait être déposé en B ; la petite arcade jumelle du fond rappelle encore la claire-voie que nous trouvons dans la crypte de Saint-Avit d’Orléans. Un déambulatoire C pourtourne le martyrium ; un seul escalier subsiste aujourd’hui en D, mais il y a tout lieu de croire qu’il s’en trouvait un autre en E. l’autel était placé au fond de l’absidiole G. Ainsi les fidèles descendaient par l’un des escaliers, pouvaient voir le tombeau du saint par les ouvertures ménagées dans le mur du martyrium, faisaient leurs oraisons devant l’autel et remontaient par l’autre escalier. La crypte de la cathédrale de Chartres avait un martyrium très-étroit, mais un déambulatoire avec chapelles d’une grande étendue[5]. La crypte de l’église abbatiale de Saint-Denis présentait ces mêmes dispositions dès avant la reconstruction entreprise par Suger ; l’illustre abbé les conserva en rebâtissant le rond-point, et ajouta de vastes chapelles au déambulatoire pourtournant le martyrium, auquel il laissa sa forme primitive[6], ne voulant pas, probablement, toucher à ce lieu consacré. Cependant ce fut Suger qui enleva les reliques de saint-Denis et de ses deux compagnons de la crypte où elles étaient déposées, pour les placer sous l’autel des martyrs, au fond du sanctuaire (voy. Autel)[7].

Une des cryptes les plus vastes qui aient été élevées est certainement celle de l’abbaye de Saint-Bénigne de Dijon. Cette crypte existait dès le VIe siècle sous le sanctuaire de l’église bâtie par Grégoire, évêque de Langres. En 1001, Guillaume, abbé de Saint-Bénigne, entreprit de reconstruire l’église et les cryptes. D. Planchet[8] veut que Guillaume n’ait fait que réparer l’ouvrage de l’évêque Grégoire, et qu’il ait seulement bâti en entier la rotonde qui se voyait derrière l’abside. Quant à l’église, nous ne pouvons savoir s’il la reconstruisit ou s’il la répara, parce qu’elle fut totalement rebâtie à la fin du XIIIe siècle ; mais des découvertes récentes[9] ont mis à nu les restes du martyrium renfermant le tombeau du saint et les caveaux de la rotonde y attenant : or ces constructions sont identiques et possèdent tous les caractères de l’architecture barbare du commencement du XIe siècle. Il faut donc voir là un monument de cette époque ; cependant il est certain que l’abbé Guillaume conserva des massifs appartenant à des constructions antérieures ; on reconnaît des soudures, on retrouve des fragments d’un monument plus ancien réemployés comme moellon.

Le plan souterrain de cet édifice, unique en France (5), fait assez voir que les cryptes primitives s’étendaient au delà des parties A, sous les transsepts de l’ancienne église. C’était dans ces deux galeries A que devaient aboutir probablement les escaliers de la crypte de l’évêque Grégoire. Peut-être, du temps de Guillaume, ces anciens escaliers avaient-ils été déjà supprimés ou jugés insuffisants, puisqu’on en avait pratiqué deux autres dans les deux tours rondes B qui flanquent la rotonde. Le tombeau du martyr était en C, couvert par un édicule et posé en contre-bas au sol de la crypte[10]. En D se trouvait la chapelle de saint-Jean-Baptiste, construite au VIe siècle, si l’on en croit D. Planchet[11]. Toute la crypte, la rotonde et la chapelle sont voûtées en moellons, excepté la partie milieu G, qui restait à jour. Cette disposition connue, on comprend comment les processions de pèlerins devaient circuler autour du tombeau du saint, autour de la rotonde, remonter soit par les escaliers des deux tours rondes, soit par l’un des deux escaliers primitivement ouverts en A. Cette crypte circulaire, dans le centre non voûté, laissait voir deux étages de galeries terminées par une coupole qui devait produire un fort bel effet. Avant la reconstruction du chœur, au XIIIe siècle, dont les fondations se voient en E, I, I, il est à croire que l’étendue de l’étage souterrain était plus grande encore et se prolongeait sous le chœur roman et les transsepts. On peut donc considérer la crypte de Saint-Bénigne de Dijon comme la plus vaste des cryptes connues. Ce monument si remarquable fut vendu pour le prix des matériaux, à la fin du dernier siècle, par la commune de Dijon (voy. Saint-Sépulcre ). Les entrepreneurs jugèrent que les pierres de la crypte ne valaient pas les peines qu’il faudrait prendre pour les enlever, et cette crypte nous est restée à peu près entière. Aujourd’hui les Dijonnais, devant ces vénérables débris qui sortent des décombres, accusent leurs pères de vandalisme.

Cette disposition des cryptes dont les déambulatoires se trouvaient au delà du lieu réservé au corps saint n’était pas la seule. Dans beaucoup de cryptes de petite dimension, le corps saint occupait une sorte de niche ou d’absidiole construite ou creusée à l’extrémité orientale ; alors les fidèles, en descendant les escaliers, se trouvaient en face du corps saint comme devant un autel placé au fond d’une chapelle. La crypte de Saint-Seurin de Bordeaux, qui date du XIe siècle, est construite d’après ce principe.


Voici (6) son plan et (7) une vue perspective de l’intérieur ;
le tombeau du saint est placé au milieu d’une sorte de grotte précédée d’une salle à trois nefs ; la nef centrale est voûtée en berceau, ainsi que les nefs latérales. Il existe à Vicq, dans l’arrondissement de Gannat, une petite crypte fort curieuse en ce que la place du reliquaire est parfaitement indiquée derrière un autel massif. Un seul escalier descend à cette crypte, dont voici le plan (8).
Le reliquaire est en A, en partie encastré dans la muraille. La vue (9) du fond de la crypte nous évite toute description.

Quelquefois, mais plus rarement, les cryptes présentent en plan les dispositions de l’église supérieure. Telle est la belle crypte de Saint-Eutrope de Saintes, l’une des plus vastes qui existent en France. Cette crypte, en outre, présente cette particularité remarquable qu’elle est largement éclairée et que ses chapiteaux sont richement sculptés. Nous regardons cette construction comme appartenant en partie aux dernières années du XIe siècle ou au commencement du XIIe. C’est un large vaisseau (large pour une crypte) de 5m,40, terminé par un rond-point avec collatéral pourtournant et trois chapelles rayonnantes. En voici le plan (10). En A est le tombeau du saint, formé d’une dalle posée sur deux marches[12].


La construction des voûtes de la crypte de Saint-Eutrope de Saintes mérite d’être observée avec soin ; les voûtes de la nef centrale appartiennent au XIIe siècle ; elles se composent d’arcs doubleaux donnant en section un demi-cylindre, entre lesquels sont bandées des voûtes d’arête en moellon, sans arêtiers ; à l’abside, ce sont des arcs à section rectangulaire qui viennent se réunir en une énorme clef.
Notre vue perspective (11) donne l’aspect de l’intérieur de cette crypte. Les murs des collatéraux ont été repris à la fin du XIIe siècle et au XIIIe, ainsi que les voûtes des deux chapelles latérales. La chapelle absidale a été reconstruite, mais la disposition primitive est facile à saisir. De même que l’église supérieure, la crypte est précédée d’un vaste narthex dont les murs seuls appartiennent à la construction de la fin du XIe siècle.

Il nous paraît superflu de multiplier les exemples de ces constructions souterraines, qui présentent presque partout les mêmes caractères. Nous avons cherché à faire passer sous les yeux de nos lecteurs les variétés les plus remarquables des cryptes françaises ; souvent ce ne sont que des caveaux très-simples, sans collatéraux et dépourvus de tout ornement, ou des constructions dont la configuration irrégulière était donnée par des excavations anciennes que l’on tenait à conserver par un sentiment de respect religieux.

Vers la fin du XIIe siècle, la plupart des corps saints, renfermés jusqu’alors dans les cryptes, furent placés dans des châsses de métal et déposés dessous ou derrière les autels des églises hautes ; aussi ne voit-on point de cryptes dans les églises entièrement bâties depuis cette époque. La cathédrale de Bourges fait seule exception ; mais la déclivité du sol sur lequel on éleva cet édifice, bien plutôt qu’une idée religieuse, fit adopter le parti de construire, sous les bas-côtés de l’abside, une église souterraine, qui, par le fait, n’est qu’un rez-de-chaussée. À Chartres, les architectes du XIIIe siècle conservèrent la vieille crypte du XIe, parce que cette crypte était en singulière vénération parmi les fidèles, et que la solidité de la construction permettait d’asseoir la nouvelle bâtisse sur ces vieilles maçonneries. Le programme d’après lequel on élevait les cathédrales françaises à la fin du XIIe siècle ne comportait pas de cryptes, puisque ces vastes édifices avaient alors un caractère à la fois civil et religieux (voy. Cathédrale. D’ailleurs, on observera que la plupart des anciennes cryptes des églises paroissiales ou conventuelles étaient plantées de façon à ce que de la nef on aperçût les entrées du caveau ; les chœurs devaient alors être relevés au-dessus du pavé des transsepts de plusieurs marches, comme, par exemple, dans l’église abbatiale de Saint-Denis. Cette disposition, qui convenait à une église monastique dont une partie seulement était réservée au public, ne pouvait être admise dans nos grandes cathédrales françaises, où l’on tenait surtout à offrir à la foule et au clergé une superficie de niveau d’un bout à l’autre de l’édifice[13], sauf à l’entrée du chœur, qui était, avec ses bas-côtés, relevé de deux ou trois marches.

Sur les bords du Rhin, au contraire, et dans les provinces de l’est, les cathédrales possédaient, dès le XIe siècle, et conservèrent plus tard leurs cryptes enfoncées à mi-sol, de manière à relever de plusieurs pieds le pavé des sanctuaires. Ces cathédrales ayant deux absides pendant la période romane, l’une à l’est, l’autre à l’ouest, ces deux absides avaient souvent chacune leur crypte prenant jour sur les collatéraux nord et sud et par des fenêtres percées dans le rond-point dépourvu de bas-côtés. À la cathédrale de Besançon, avant les mutilations qui, pendant cent cinquante ans, ont successivement modifié le plan de ce bel édifice, il y avait deux sanctuaires relevés et deux cryptes ; même disposition à Verdun. À Strasbourg, l’une des deux cryptes est conservée sous le chœur, très-relevé, au-dessus de la nef. À Bamberg, on voit encore les deux sanctuaires est et ouest, avec leurs clôtures et les deux cryptes. L’une des plus belles et des plus anciennes cryptes des bords du Rhin est certainement la crypte de la cathédrale de Spire, qui se trouve, suivant l’usage habituel, à mi-sol, prenant jour sur le dehors. En Angleterre, la crypte de la cathédrale de Canterbury est de beaucoup la plus vaste et la plus intéressante, ayant successivement été agrandie à mesure qu’on augmentait l’édifice.

Toutes les anciennes cryptes romanes présentent des traces de peintures ; celles si curieuses de l’Auvergne étaient entièrement couvertes de sujets légendaires exécutés souvent avec soin. Sous le chœur de Saint-Benoît-sur-Loire, il existe une crypte laissant voir encore des fragments de peinture qui appartiennent au Xe ou XIe siècle. Dans un grand nombre de cryptes, il existe des puits ; souvent ces eaux étaient considérées comme miraculeuses.

Nous ne devons pas terminer cet article sans mentionner un fait singulier. Hugues de Poitiers, dans son Histoire du monastère de Vézelay[14], dit : « Le feu prit par accident à la voûte qui s’élève au-dessus du sépulcre de la bienheureuse Marie-Madeleine, amie de Dieu ; et ce feu fut tellement violent, que les supports mêmes, que les Français appellent des poutres, et qui étaient placés dans la partie supérieure, furent tout à fait consumés. Cependant l’image en bois de la bienheureuse Marie, mère de Dieu, laquelle posait sur le pavé même de la voûte, demeura entièrement à l’abri du feu, et en fut seulement noircie… » Hugues de Poitiers entend-il parler d’une voûte en bois fermant la crypte au-dessus du sépulcre de Marie-Madeleine, ou de la charpente supérieure de l’église ? Ce qui ferait croire que l’incendie détruisit la voûte ou plutôt le plancher couvrant une crypte, c’est la suite du texte : les moines ayant trouvé des reliques dans l’image de bois de la Vierge, les populations environnantes accoururent pour voir cette image ainsi miraculeusement préservée. Gilon, le prieur du monastère, expliqua devant cette multitude de peuple comment on devait rendre des actions de grâces de la découverte précieuse qui avait été faite. « À ce récit, ajoute Hugues, tous pleurèrent de joie ; et lorsque ensuite on voulut rétablir sous la voûte le sépulcre de la bien-aimée de Dieu, il se fit un si grand concours de ce peuple… etc. » Ainsi donc on peut croire que c’était la voûte ou le plancher servant de voûte à la crypte qui avait été incendié. Cependant il reste à Vézelay une portion de crypte antérieure à Gilon (1165), et ce reste est voûté en moellon ; l’autre partie de la crypte, sous le sanctuaire, date des dernières années du XIIe siècle, c’est-à-dire fut reconstruite après l’incendie. On pourrait donc admettre que, sous le sanctuaire, au XIIe siècle, il existait une sorte de plancher surélevé sous lequel était déposé le corps de Marie-Madeleine et sur lequel s’élevait l’image en bois de la Vierge.

  1. Rapport sur l’église et la crypte de Saint-Martin-au-Val, à Chartres, par M. Paul Durand. Chartres, 1858.
  2. Voy. la publication des Archives des monuments historiques, sous les auspices de S. E. M. le ministre d’État. Gide, édit.
  3. Cette crypte se trouve aujourd’hui comprise dans les bâtiments du grand séminaire d’Orléans.
  4. Voy. le Rapport sur la crypte découverte dans le jardin du grand séminaire d’Orléans, par M. Buzonnière. — Bullet. du comité de la langue, de l’histoire et des arts de la France, no 5, p. 399. 1853.
  5. Voy. la Monographie de la cathéd. de Chartres, par M. Lassus, publiée par le ministère de l’instruction publique et des cultes (inachevée) ; et la Description de la cathéd. de Chartres, par M. l’abbé Bulteau.
  6. Le martyrium de Saint-Denis date du IXe ou Xe siècle.
  7. Voy. le mot chasse, Dict. du Mobilier français
  8. Hist. de Bourgogne, t. Ier.
  9. Des fouilles exécutées en novembre 1858, sous la direction de M. Suisse, architecte, ont fait reparaître les restes de la crypte de Saint-Bénigne et l’étage inférieur de la rotonde. Ces précieux débris vont être consolidés et seront conservés.
  10. Les restes de ce tombeau sont encore visibles aujourd’hui.
  11. Les soubassements de cette chapelle n’étant pas découverts, nous ne pouvons assigner une époque précise à sa construction.
  12. M. Letronne pense que cette dalle tumulaire date du IVe ou Ve siècle. Un autel a été posé malheureusement devant cette tombe, et détruit l’effet grandiose de la crypte. Sur l’un des rampants de la dalle tumulaire, on lit, en capitales romaines, ce seul nom gravé : EVTROPIVS.
  13. À la cathédrale de Paris, par exemple, avant la clôture établie au XIVe siècle, le sanctuaire était de niveau avec les bas-côtés du chœur ; l’autel seul était relevé de quelques marches.
  14. Liv. IV.