E. D. – Le marbre animé/1

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Aux dépens de la compagnie (Bruxelles) (p. 13-19).

CHAPITRE I



L’ÉPICIER




Le soir, à dix heures, j’étais sur le champ de bataille, représenté par la chambre à coucher de la princesse, éclairée par douze bougies roses. Sur un lit majestueux et bas, la dame m’attendait dans le plus simple appareil. La vue de ce corps merveilleux, qu’aucun voile ne cache, aurait tenté saint Antoine, et damné tous les saints du paradis. Blonde comme les blés mûrs, la princesse souriait de ses deux grands yeux bleus, ombragés de longs cils soyeux, sous d’épais sourcils noirs ; sur un buste svelte, bien pris, dégagé, une gorge adorable, d’un satin étincelant, berce la fraise mûre de deux seins de neige, que soulève et qu’affaisse tour à tour la respiration égale et régulière ; au fond du ventre poli et blanc comme l’ivoire, une tache d’ébène couvre le promontoire, qui cache au regard le temple de Cypris ; au-dessous, deux cuisses rondes et fermes, deux jambes moulées, terminent le chef-d’œuvre par deux petits pieds d’enfant, faits de roses et de lis. Pendant que je contemplais ces merveilles, sans mot dire, la princesse, les yeux purs et limpides, sans un frisson, sans une émotion, calme, indifférente, me disait : „Dévêtez-vous, et commençons l’épreuve. Vous m’appellerez Nijni, de mon pays natal, qui est Nijni-Novgorod ; vous me tutoierez, si vous voulez, pendant la durée des ébats, sauf à reprendre ensuite, ici et au dehors, les formules d’une banale politesse. Chaque nuit d’épreuve ne comportera qu’un genre d’exercice, que vous pourrez recommencer à votre gré, suivant votre puissance, jusqu’au matin ; mais parlez le moins possible, et agissez au mieux. » Ces quelques mots, dits d’une voix dont la douceur contraste avec l’air froid du visage, ne sont guère faits pour encourager. Cependant, comme rien dans l’attitude de la princesse n’indique une velléité quelconque de résistance, je me dévêts promptement et, sans perdre de temps en réflexions, je me glisse auprès de la plantureuse beauté. Au contact de cette peau si douce et si fraîche à la fois, qui n’a pas un frisson, pas un tressaillement, quand je suis tout agité auprès d’elle, je sens bien qu’il va falloir réchauffer ce glaçon, et le préparer aux émotions, sans brusquer l’attaque. Je prends dans ma bouche le bout vermeil d’un sein d’ivoire ; j’emprisonne dans ma main le joli jumeau, tandis que l’autre main descend caressante vers la tache d’ébène et s’en vient visiter, entre les bords serrés de l’écrin qui l’enferme, le petit bouton d’amour. Mais la belle ne s’émeut, ni ne tressaille. Laissant alors le sein, mes lèvres descendent, promenant un long baiser de la gorge au bas ventre, sans laisser un coin inexploré ; là, le nez sous la motte, les lèvres sur les lèvres, je larde de petits coups de langue drus et pressés, le clitoris dans sa prison ; et quand je crois qui j’ai mis la belle Russe en état de me donner la réplique, je m’étends sur son corps, écartant ses cuisses, de façon à pousser, sans trop de peine, ma longue et grosse verge dans l’huis qui bâille. Après quelques efforts, car la belle est fort étroite, n’ayant jamais reçu sans doute pareille dimension, je suis au cœur de la place, et, soulevant ses fesses de mes mains passées sous son derrière, je maintiens son ventre collé contre le mien, la peau contre la peau, les poils se mêlant, nos corps ne faisant qu’un. Je sens qu’à chaque allée et venue dans le vagin qu’elle fouille, ma verge frotte le bouton ; ma belle compagne va me seconder, sans doute, et partager mon plaisir ; déjà, je l’inonde, j’étouffe des soupirs de bonheur, et je l’étreins à la broyer.

Quand je reviens à moi, rouge, ému, palpitant, la princesse ouvrait ses grands yeux bleus, clairs et froids, et quand je m’arrache de ses bras, elle me dit toujours du même ton assuré et doux : „Vous m’avez procuré une légère, très légère sensation non pas celle que j’attends dans les bras d’un homme, mais telle, cependant, que j’ai un moment espéré que vous alliez vaincre ; je me trompais. Si vous m’avez un peu mieux servie que vos pareils, cela tient sans doute, à ce que vous êtes mieux fourni que vos prédécesseurs”.

Malgré mon insuccès, comptant que je saurais bien prendre ma revanche, je recommence ma tentative, essayant par le retour des plus douces caresses, de réchauffer la statue que j’ai auprès de moi. Je reprends donc les jolis préliminaires, prodiguant les mamours sur les yeux, sur le nez, sur la bouche, sur les dents, prenant la langue pour échanger à la manière des colombes les plus suaves baisers. Je tressaille déjà tremblant d’une douce émotion, je reviens par le même chemin au clitoris, sur lequel j’insiste longuement, jusqu’à ce que je croie le sentir s’émouvoir sous mes lèvres ; je viens alors m’étendre sur la belle, saluant le bouton du bout du gland, avant d’entrer, puis ayant logé ma verge tout entière dans le vagin, je m’y démène avec rage, tandis que je chatouille du bout du doigt le petit trou entre les fesses ; et bientôt je me pâme sur la mignonne, croyant qu’enfin elle partage mes feux. „C’est mieux, me dit-elle quand j’ai fini, mais ce n’est par encore çà !”

Jusqu’au matin, cinq fois encore, je la tins sous mon étreinte, sans plus de succès. Enfin vint l’heure où la princesse me congédia en me disant : „À ce soir, mon ami ; venez à la même heure. Vous ne m’avez pas convaincue de l’excellence des Français ; mais je suis pendant sept jours encore votre bien, votre chose, votre esclave ; vous pourrez donc renouveler votre tentative mais, dorénavant, je ne vous informerai plus du résultat de vos épreuves ; à vous de le deviner, si vous pouvez.”

Je quittai la princesse avec le regret de n’avoir pas réussi dans cette première épreuve, mais avec l’espoir d’arriver à mes fins, en employant dans les assauts qui suivront, toutes les ressources dont je dispose.