Encyclopédie méthodique/Physique/AMPLIFICATION

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AMPLIFICATION. C’eſt la propriété qu’ont les lunettes & les téleſcopes, de groſſir les objets, d’où réſulte la diminution apparente de leur diſtance. Rien n’eſt plus aiſé que de connoître l’augmentation du diamètre d’un objet vu dans une lunette à deux verres convexes, comme dans les lunettes aſtronomiques : c’eſt-à-dire, l’amplification linéaire, car elle eſt égale au nombre de fois que la longueur du foyer de l’oculaire eſt contenue dans celle du foyer de l’objectif. Si, par exemple, le foyer de l’oculaire d’une lunette eſt 1 pouce, & le foyer de l’objectif 15 pieds : tout étant réduit en lignes, on aura 18 lignes & 2 160 lignes ; ce dernier nombre étant diviſé par le premier, le quotient 120 déſignera que la force d’amplification de la lunette ſera de 120, & conſéquemment, que l’objet vu au travers de cette lunette, ſera amplifié ou groſſi 120 fois. Si, dans l’exemple propoſé, il n’y avoit pas eu un demi-pouce ou ſix lignes, on n’auroit réduit qu’en pouces ſeulement, les longueurs des foyers. Les lunettes aſtronomiques ordinaires ne groſſiſſent que 100 ou 150 fois au plus.

La règle eſt la même pour trouver le groſſiſſement d’un objet vu à travers le téleſcope Newtonien ; on diviſe le foyer du grand miroir par le foyer de l’oculaire, & on en prend également le quotient qui marque l’amplification.

Quant au téleſcope Grégorien, l’amplification ou groſſiſſement eſt égal au quotient du quarré du foyer du grand miroir, diviſé par le produit des foyers du petit miroir & des oculaires. Si la courbure du grand miroir a 6 pieds de rayon, ſon ſera à 3 pieds, c’eſt-à-dire, au quart du diamètre de ſphéricité, conſéquemment à 36 pouces ; & si le foyer des oculaires eſt 3 pouces, & celui du petit miroir 4 pouces, dont le produit eſt 12 pouces, on diviſera alors le quarré de 36 — 1 296 par le produit 12 : &. le quotient 108 indiquera que ce télescope grégorien groſſit ou amplifie 108 fois l’image de l’objet.

Le téleſcope, que Short avoit conſtruit, groſſiſſoit 1 000 fois, quoiqu’il n’eût cependant que 12 pieds ; long-temps, on l’a regardé comme un des plus forts ; mais actuellement, ce réſultat eſt de beaucoup moindre que celui d’Herſchel, qui groſſit ou amplifie 6 000 fois, comme on le voit dans les Tranſactions Philoſophiques de 1782.

Nous donnerons ici un moyen ſimple & facile, pour déterminer, par voie d’expérience, la force amplificative d’un téleſcope ; c’eſt celui dont Hauxbée s’eſt ſervi. Ayant placé un cercle de papier, d’un pouce de diamètre, à la diſtance de 2 674 pouces de l’oculaire, dans la direction du téleſcope, on tire 2 lignes parallèles ſur un papier, à un pied d’intervalle l’une de l’autre. On place ces deux lignes à côté du téleſcope, on les regarde à la fois des deux yeux, un œil dans le téleſcope, & l’autre en dehors ; on fait rapprocher peu à peu les deux lignes de l’œil, juſqu’à ce qu’elles paroiſſent toucher les deux bords du cercle, d’un pouce, c’eſt-à-dire, que les 12 pouces vus à l’œil nu, paroiſſent de la même grandeur, qu’un pouce vu dans le téleſcope ; & dans cet état, l’on meſure la diſtance des deux parallèles à l’œil ; ſi elle ſe trouve de 142 pouces ſeulement, l’angle viſuel du téleſcope eſt réellement augmenté dans le rapport, compoſé de 12 à 1, & de 2 674 à 142, c’eſt-à-dire, 226 fois : c’eſt ainſi qu’Hauxbée reconnut que ſon téleſcope de 3 pieds de foyer, augmentoit 226 fois le diamètre des objets.

Amplification des corps lumineux. Tous les corps lumineux paroiſſent plus grands qu’ils ne ſont par un effet de l’espèce de rayonnement qu’on remarque en eux. Une étoile ſemble bien plus grande à la vue qu’à travers une lunette : celle-ci la dépouillant de tout agrandiſſement accidentel, quoiqu’elle dût produire un effet oppoſé, car toute lunette groſſit ou amplifie. Dans la réalité, une étoile vue au-travers d’une lunette, eſt réellement groſſie & rapprochée ; mais comme le dépouillement du rayonnement que la lunette occaſionne, fait perdre davantage à l’étoile, de ſa grandeur apparente & accidentelle, qu’elle n’acquiert d’augmentation dans ſa grandeur réelle, il s’enſuit que l’étoile vue par le moyen d’une lunette, paroît plus petite qu’à la vue ſimple, quoique ſes dimenſions réelles ſoient effectivement augmentées.

Les corps lumineux, comparés à des corps obſcurs, paroiſſent ſur-tout bien amplifiés. Si on conſidère la lune deux ou trois jours avant ou après ſa conjonction, on obſervera manifestement que la portion lumineuse débordera celle qui eſt obſcure ; cette amplification eſt une illuſion optique ; car le corps de la lune eſt ſenſiblement ſphérique, & cette illuſion ſe trouve toujours, dans tous les cas où la lumière d’un corps eſt très-vive, ſoit en elle-même, ſoit comparativement.

On remarque auſſi dans le ſoleil, une eſpèce d’amplification de quelques ſecondes, qui, l’environnant d’une couronne d’aberration, augmente en apparence ſon véritable diſque. M. De la Lande penſe que cette quantité doit être de 6 ou 7 ſecondes ſur le diamètre du ſoleil, vu dans une lunette de 18 pieds, à en juger par les paſſages de vénus ſur le ſoleil où cet effet doit disparaître.