Esprit des lois (1777)/L16/C8

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CHAPITRE VIII.

De la séparation des femmes d’avec les hommes.


C’est une conséquence de la polygamie, que, dans les nations voluptueuses & riches, on ait un très-grand nombre de femmes. Leur séparation d’avec les hommes, & leur clôture, suivent naturellement de ce grand nombre. L’ordre domestique le demande ainsi ; un débiteur insolvable cherche à se mettre à couvert des poursuites de ses créanciers. Il y a de tels climats où le physique a une telle force, que la morale n’y peut presque rien. Laissez un homme avec une femme ; les tentations seront des chutes, l’attaque sure, la résistance nulle. Dans ces pays, au lieu de préceptes, il faut des verroux.

Un livre classique[1] de la Chine regarde comme un prodige de vertu, de se trouver seul dans un appartement reculé avec une femme, sans lui faire violence.


  1. « Trouver à l’écart un trésor dont on soit le maître ; ou une belle femme seule dans un appartement reculé ; entendre la voix de son ennemi qui va périr, si on ne le secourt, admirable pierre de touche ». Traduction d’un ouvrage Chinois sur la morale, dans le Pere du Halde, tom. III. pag. 151.