Esprit des lois (1777)/L20/C5

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CHAPITRE V.

Des peuples qui ont fait le commerce d’économie.


Marseille, retraite nécessaire au milieu d’une mer orageuse ; Marseille, ce lieu où tous les vents, les bancs de la mer, la disposition des côtes ordonnent de toucher, fut fréquentée par les gens de mer. La stérilité[1] de son territoire détermina ses citoyens au commerce d’économie. Il fallut qu’ils fussent laborieux, pour suppléer à la nature qui se refusoit ; qu’ils fussent justes, pour vivre parmi les nations barbares qui devoient faire leur prospérité ; qu’ils fussent modérés, pour que leur gouvernement fût toujours tranquille ; enfin qu’ils eussent des mœurs frugales, pour qu’ils pussent toujours vivre d’un commerce qu’ils conserveroient plus surement lorsqu’il seroit moins avantageux.

On a vu par-tout la violence & la vexation donner naissance au commerce d’économie, lorsque les hommes sont contraints de se réfugier dans les marais, dans les îles, les bas fonds de la mer & ses écueils mêmes. C’est ainsi que Tyr, Venise & les villes de Hollande furent fondées, les fugitifs y trouverent leur surete. Il fallut subsister ; ils tirerent leur subsistance de tout l’univers.


  1. Justin, liv. XLIII. ch. III.