Fables d’Ésope (trad. Chambry, 1927)/L’Homme qui a trouvé un lion d’or

La bibliothèque libre.

Pour les autres éditions de ce texte, voir L’Homme qui a trouvé un lion d’or.

Traduction par Émile Chambry.
FablesSociété d’édition « Les Belles Lettres » (p. 30r-31r).
62


L’HOMME QUI A TROUVÉ UN LION D’OR


Un avare, qui était peureux, ayant trouvé un lion d’or, disait : « Je ne sais que devenir en cette aventure. L’effroi m’ôte l’esprit, et je ne sais que faire : je suis partagé entre mon amour des richesses et ma couardise naturelle. Car quel est le hasard ou le dieu qui a fait un lion d’or ? Ce qui m’arrive là jette la discorde dans mon âme : elle aime l’or, mais elle craint l’œuvre qu’on a tirée de l’or ; le désir me pousse à la saisir, mon caractère à m’abstenir. Ô fortune qui offre et qui ne permet pas de prendre ! Ô trésor qui ne donne pas de plaisir ! Ô faveur d’un dieu qui devient une défaveur ! Quoi donc ! Comment en userai-je ? À quel expédient recourir ? Je m’en vais et j’amènerai ici mes serviteurs pour prendre le lion avec cette troupe d’alliés, et moi, de loin, je les regarderai faire. »

Cette fable s’applique à un riche qui n’ose ni toucher à ses trésors, ni les mettre en usage.