Fabre dEnvieu - Noms locaux tudesques/Chapitre 1

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E. Thorin ; Édouard Privat (p. 22-98).


CHAPITRE PREMIER

NOMS DUS AUX ACCIDENTS TOPOGRAPHIQUES DE LA NATURE.


ARTICLE PREMIER

Les noms qui expriment le relief, la configuration du sol, les accidents topographiques qui sont le fait de la nature terrestre, attirent de prime abord notre attention.

Les formes naturelles du sol ont, en effet, joué un rôle important dans la formation des noms topographiques. L’aspect du lieu, sa configuration physique devait naturellement suggérer aux premiers immigrants des mots qui servaient à le caractériser. Nous avons ainsi une catégorie de noms de lieux qui dérivent du site (natürliche Lage) ou de la physionomie du terrain (Beschaffenheit des Bodens). Nous allons d’abord examiner les noms qui ont trait aux montagnes, aux vallées (Erhöhungen und Vertiefungen des Bodens ; Berg und Thal) et aux plaines (Ebenen).

La hauteur (die Höhe) est désignée par les mots : (Berg, Bühel, Horn, Eck, Stein, etc.) ; la profondeur (die Tiefe) s’exprime par Thal, Grund, Boden, etc., et la plaine (die Ebene) par Feld, Flacht, Land, Wang, etc.


§ i.

NOMS DE LIEUX PROVENANT DE MOTS QUI DÉSIGNENT L’ÉLÉVATION,
LES SAILLIES (Erhöhungen) TERRESTRES (auf hohen Lagen).

Les noms de lieux qui expriment l’idée de « hauteur » sont formés des mots Höhe, Berg, etc.

Höhe (die, hauteur, élévation) et l’adj. hoch (élevé, haut, éminent ; v. h. all. hoh, suéd. hög, ha, haf, har ; bas-sax. et holl. hoog, angl. high ; bas lat. hoga, v. franç. hoge, hogue, et les formes houg, houch, höge [die Anhöhe] ; v. angl. ho, how et dans des noms de lieux hoo, hoe[1] ; celt., kymr. ucho, en haut, au haut, dessus, sur ; uchel, corn. uhel, haut, élevé[2] :

Hohwald (haute-forêt, Bas-Rhin), Hohroth (haut défrichement : Reut, H.-Rhin), Hoburg, Hoberg, Hobusch (hallier, bosquet élevé) ; Hochstadt (haute ville : Stadt, ville ; Statt et Stätte, lieu, place, séjour).

Au datif : Hohenburg (au château élevé), Hohenfels (au haut rocher), Hohenheim (à l’habitation élevée), Hohenlohe (au haut hallier : dialect. Loh, bois, hallier ; marais ; Lohe, flamme ; F., p. 178), Hohenstadt (à la haute ville), Hohenstaufen (au rocher élevé : de stauf, jad. rocher, hauteur escarpée ; Stauf, Stufe, degré, gradin, montée ; entaille [dans le roc] ; éclat, fragment de roche ; minerai ; cfr. angl. to stoop, se baisser, pencher ; Stauf signifiait « qui va en pente, raide, à pic, et avait le sens de Fels, jähe Höhe ; cfr. steif, raide ; peu flexible) ; » Hohenthal (à la vallée élevée), Hohenwart (Warte, échauguette, donjon, tour pour observer ; Wart, guet), Hohenzollern (à la haute motte : der Zol, Zollern, petite masse cylindriforme ; motte, cfr. Scholle, motte ; ital. zolla, motte de terre ; gazon ; la Motte, la Mothe sont des localités situées sur des hauteurs ; en v. h. all. et dans les dialectes de l’Oberland, zol signifie « tronc d’arbre, billot, souche, bloc, gourdin, garrot ; » — der Zoll [douane, péage], bas sax. angl. bret. gallois toll ; franç. taille : lat. tollo, je lève ; j’élève ; je prends, je saisis ; sanscr. tul, lever, soulever ; prélever) ; — Hohenstein et Hohnstein (au haut rocher), Hohnholz (au bois élevé), Hohnhorst (Horst, buisson ; touffe d’arbres), Humberg (jad. Hohinberg), Homburg (au haut château), Homfeld (= Hohenfelde), Hobohm (der hohe Baum), Hohnbaum (à l’arbre élevé), Hohenlinden (aux tilleuls élevés), n’indiquent peut-être pas l’élévation du sol, mais tout simplement la hauteur des arbres.

Höchst (est le superlatif de hoch [höchst, le plus haut] ou peut-être pour Höchstatt, lieu élévé), près de Francfort ; — Hannover (= Hohenufer, à la haute rive) en franç. Hanovre (nom qui indique que le rivage est élevé) ;

Wilhelmshöhe, jad. Weissenstein, château bâti au pied du Karlsberg qui domine le Riesenschloss (château du géant), etc.

Hügel (der, monticule, colline, coteau, butte, petite montagne, hauteur, éminence ; mamelon, motte ; — suéd. hygel, hol, hals ; bas sax. hull, angl. hill ; de hoch, dont hukil fut un diminut.) : Hügelheim (habitat. de la colline), Hückelheim, Höckelheim ; — En Anglet. : Churchill (colline de l’église : church = Kirche), Forest-Hill (coll. de la forêt), Sandy-Hill (col. sablonneuse), Snow-Hill (colline de neige : snow = Schnee, neige) ; — Spring-Hill (col. de la source : spring, source, fontaine ; origine, principe ; printemps (primum tempus) ; élan, essor ; saut ; secousse ; cfr.  springen, sauter ; jaillir ; Sprung, saut, bond, élan, Springbrunnen, fontaine jaillissante, fontaine), etc. Mais Dunhill offre une corruption de l’irlandais Dun-aille (forteresse du rocher escarpé, du coteau).

Berg (der, mont, montagne) ; ce mot ne désigna pas d’abord, par lui-même, une élévation du sol, une hauteur. Il paraît se rattacher à bergen (= schützen, protéger, défendre, et spécialement cacher, recéler, mettre en sûreté, sauver, cfr. mons et munire), et il indiquerait que les montagnes servirent de refuge aux hommes et que c’est dans les lieux élevés qu’ils cherchaient un abri, un refuge, au moment du danger. Ainsi, Berg, abréviation pour Berghöhe (hauteur, refuge ; cfr., auberge, Herberge, voy. P., p. 26), désignerait la montagne considérée, non au point de vue de l’élévation (nicht als etwas Hohes), mais comme un objet qui protège (sondern als etwas Bergendes)[3]. Puis, le mot Berg a eu le sens restreint de « montagne. » Quelquefois Berg a le sens de Burg (= Bergveste) ; jadis les deux formes se prenaient souvent l’une pour l’autre. À ces notions de « hauteur » et de « refuge » se rattachent les noms formés du mot Berg, qui désignent un grand nombre de montagnes, de villes, etc. Ce mot entre dans plus de 400 noms géographiques[4] :

Berg (duché de), le château de Berg (sur les bords du lac de Starnberg [? der Stahr ou Staar, étourneau, lat. sturnus], un des six châteaux du roi de Bavière), Bergen (ad Montes, auj. Mons), en Belgique, en Pomeranie (cette ville élait jadis nommée Gora, qui, en slave, signifie montagne), Bergen, en Norwège (ville que Pline nomme Bergio : — de bergen [cacher] ou de Berg : elle est entourée de sept montagnes du côté de la terre), etc. ; Berg (Moselle, Bas-Rhin, etc.), Bergues (dép. du Nord), etc.

En composition : Bergfeld (champ de la montagne), Bergfried, Bergfrieden (de fried, jad. clôture, enclos ; Be-fried-igung, clôture, enclos, enceinte de haies ; contentement, satisfaction ; befriedigen, entourer d’une haie, enclore ; garantir, contenter, satisfaire ; cfr. beffroi, P., p. 208 ; Friede, paix, tranquillité, repos ; cfr. P., p. 32), Berghausen (Haus, maison), Bergheim (H.-Rhin ; Heim), Bergum ou Berghem (Holl.Heim), Berghes (Haus), Berghof, Bergholz, Bergkirchen, Bergstadt, Bergzabern (Tabernæ Montanæ) ; — Bergenweiler, Bergen-op-Zoom (sur la Zoom, affl. de l’Escaut : holl. op (= oben), sur, au-dessus ; tout près, vers ; environ ; zoom = Saum, bord, lisière) ; Bürglein (dimin. de Berg. — La Bergstrasse (strata montana, route de la montagne : Strasse).

Abensberg (mont de l’Abens, nom celt. d’un affluent du Danube), Adelberg, M. de noblesse : Adel ; ou de la plante nommée Adelgras ; cfr. Adel pour Ahdel, jus du fumier, P., p. 24 ; – jad. Madelberg : ? Mädel = Mädchen, jeune fille ; dimin. de Magd, fille), Ahrenberg (petite ville située sur l’Ahr), Altenberg (? au vieux château : Berg pris dans le sens de Burg ; alt, vieux ; ou à cause des comtes d’Altena), Amberg (am = an dem, au, sur le ; auprès de), près d’une montagne ; Annaberg (M. de Sainte-Anne), Aremberg, Arenberg (Mont-aux-Aigles, Mons aquilarum, Mont-Aigle : localités où l’on voyait des aigles se perdre dans les nuages ou sur les rochers : Aar, poét. aigle, vautour ; génit. anc. et poét., Aaren ; bas all. arn, datif pluriel ; P., p. 21), Arensberg (id.), Arlberg (pour Adlersberg, montagne de l’aigle : Adler, aigle ; der edle Aar ; P., p. 244 ; ou pour arle, pinus montanus, ou pour Erle, aune ; le Vorarlberg est la contrée située en deçà [vor, devant, avant] de l’Arlberg), Asberg ou Aschberg : Esche, v. h. all. asc, frène ; ou forme de asc, eau, en celtique (Auerberg, Auersberg), (M. sauvage ou du taureau sauvage ; v. h. all. ur, sauvage, prompt, impétueux ; der Ur = Urochs = Auerochs, taureau sauvage) ;

Bäderberg (non pas de Bad, bain ; mais de baito, hutte de berger des Alpes, Alphütte, Sennhütte), Bamberg (Babinberg, Babenberg, Bavenberg, Babeberga, Papeberga, Mons Babonis ; — montagne de Babe, fille de l’empereur Othon, ou d’un Bavon inconnu)[5] ; Blankenberg (blank, blanc, clair, poli, reluisant ; P., p. 289), Blankenberge (ville de Belgique qui doit son nom à l’écume blanche des flots de la mer qui la baignent ; berg ne signifie pas, dans ce nom, une montagne, mais un havre, un port, un refuge pour les vaisseaux ; v. p. 25), Bleyberg (M. du plomb : Blei), Blocksberg (Mont des blocs, à cause des énormes blocs de granit, grossen Granitblöcken : Block, bloc ; tronc, billot) ou Brocken (das Gebrockene, ce qui est brisé, rompu ; ein Felsbrocken, un fragment, un éclat de rocher : Brocken fragment, éclat, petit morceau : brechen : le grand Blocksberg ou Mons Bructerus ; et le petit Blocksberg ou Heinrichshöhe) ; Brassberg (de brass, en v. h. all. et en anglais, cuivre, ou de der Brass et Prass, tas de choses mêlées ; jad. bruit, vacarme ; prassen [jad. faire du bruit], mener une vie bruyante, désordonnée), Bromberg (M. aux ronces : v. h. all. pramo, m. h. all. brame, épine ; piquant. aiguillon : Brombeere, baie de ronce : Beere ; cfr. Bram, alène ; framée, P., p. 59), Carlsberg (de Charles, P., p. 130), Copperberg (M. du cuivre : suéd. koppar, angl. copper = Kupfer, cuivre ; lat. cuprum, æs cyprium), Danneberg (Tanne, sapin ; m. h. all. tan et tann, forêt), Dispargum (= Tiesberg ou Fanum martis : Tius, dyu ; voy. P., p. 64, 62), Donnersberg (ou Mont [du] Tonnerre : Donner, tonnerre, foudre), Dreisesselberg (des trois sièges : drei, trois ; Sessel, siège, chaise, lat. sedile ; sitzen, être assis), Dürrenberg ou Doernberg (? M. desséché, sec, aride, stérile : dürr ; ou de Dorn, épine ; ou du celtique durn, bec, extrémité : Durnomagus), Enzberg (de l’Enz, nom celt. d’un affl. du Danube), Erzberg (Erz, mine ; minerai ; airain, bronze), Eisenberg (Eisen, fer), Engelberg (M. des anges : Engel, ange), Eschenberg (Berg, der mit Eschen bewachsen ist : Esche, frène), Essenberg (jadis Asciburgum sur la rive du Rhin : celt. ass = eau), Falkenberg (Falke, faucon), Feldberg (Feld), Fichtelberg (pour Fichtenberg, Mons piniferus : fichten, de pin ; Fichte, pin), Frankenberg (M. des Francs), Freiberg (Montagne libre ; ? ou consacrée à Freya) et Freiburg (château libre ; indiquent des pays dotés de franchises pour attirer des habitants : frei, libre, dégagé de liens, exempt), Freundsberg (M. de l’ami : Freund), Freudenberg (M. de la joie : Freude), Friedberg (Mont de la paix ou de l’enclos : Friede ; fried, p. 26), Friedeberg (id.), Fürstenberg (M. du prince : Fürst) ; Gablenberg (jad. Gabelberg : du mot Gabel, fourche ; peut désigner la forme d’une montagne ou un de ces passages que, dans les langues romanes, on nomme fourche, furca), Galgenberg (en Alsace), où la potence [Galgen] fut substituée aux supplices du glaive ou du bûcher ; Geiersberg (M. du vautour : Geier), Geisberg (Mons caprarius : Geiss, chèvre ; ce mont domine Heidelberg), Gnadenthalberg (M. du Val-de-Grâce : Gnade, grâce ; condescendance ; clémence ; Thal, vallée), Godesberg (= Montagne de Dieu ; cfr. Ville-Dieu ou Ville de Dieu : Gott, Dieu ; angl. god ; P., p. 96)[6], Goldberg (Chrysopolis, M. de l’or : Gold ; — ville de Silésie qui doit son nom à une mine d’or qui s’y trouvait), Grafenberg (M. du comte : Graf), Greifberg, Greiffenberg (Greif, condor ; gryphe, griffon ; — greifen, prendre, saisir ; étendre les doigts ou les griffes pour saisir), Grimberg (Mont de Grim [le diable], du spectre ; de Grimoald, etc. : Grimm, fureur, rage, colère ; P., p. 99), ou Grimiberg (du bas lat. cremia, cremium, hauteur, colline), Grünberg (= Mont-Vert : grün, vert, verdoyant ; – ville environnée de vignobles, qui est aussi appelée Prasia Elysiorum [πράσιος, qui est d’un vert clair] et Thalloris [θάλλω, je pousse, je verdoie ; ὄρος, montagne ; colline], Guckenberg (= M. du regard, mont du haut duquel on regarde : de gucken, popul. regarder, guigner ; être visible), Guggisberg (en gaulois, gwgg, regard menaçant ; — vg. suisse, sur une hauteur dont la vue peut avoir occasionné le nom ; en suisse guggen, voir ; guggeln, voir par une petite ouverture ; ou montagne du guogo [ou guegi, scarabée] ; — M. du coucou ; m. h. all. gouch, gucgouch = der Gauch = Guckuck et kukuk, coucou, oiseau qui doit ce nom à son cri : gaken, gacken, gackern, crier, crételer ; bavarder ; suisse, gugge, cor [à sonner, cor de chasse] Blasehorn ; guggen et gucken, crier ; mugir ; ou d’après la forme du sommet qui est semblable à un capuchon ; lat. cucullus), Halberg (où la colonne d’Irmen, Irmenseule [P., p. 281 et ss.) avait son temple :  ? häl, glissant ; bavar, hel, v. h. all. hâli ; ou de Hall [der] = Schall, son, retentissement ; — Hall [das], sel), Hallenberg (Halle, espace couvert ; halle, salle ; chantier, bazar). Havelberg (M. de l’Havel, affl. de l’Elbe), Heidelberg (v. qui devrait son nom aux Heidelbeeren (littér. baies des bruyères ; Heidelbeere, myrtille, airelle, raisin des bois ; myrtil, genre de plantes de la famille des bruyères, qui croît encore sur le Geisberg et derrière le château)[7] ;

Heiligeberg (Montagne sainte : heilig, saint, consacré), Heiligenberg (M. des saints : der Heilige, le saint ; das Heilige, le sanctuaire, le lieu saint), Herzberg (jad. Hirzberg : Hirsch, cerf), Herzberg (qui confine à la forêt nommée Harz), Herzberg (en Saxe ; où il y a des forges de fer ; peut-être de Erz, mine, minerai ; airain, bronze), Hirschberg (Cervimontium ; v. de la Silésie), Hochberg (der hohe Berg ; — das Schloss, von dem das Dorf genannt ist, liegt auf einem Felsen über dem Neckar), Hohenberg, Hohnberg (p. 23), Hülfenberg (Mons Salvatoris, fameux pèlerinage : Hülfe, secours, aide ; assistance ; helfen, aider, secourir ; Helfer, aide, assistant), Hüttenberg (Hütte, hutte, cabane, maisonnette — forge, mine), Jaxtberg (de la Jaxt, affl. du Neckar), Jarlsberg (jad. iarl, vieillard, homme respectable ; angl. earl, comte [anglais] ; cfr. Ehre, honneur ; ehrlig, honorable ; P., p. 75, 76) ; Iberg (de i, y, formes suisses de Eibe, if), Joannisberg (M. de s. Jean), Judenberg (Jude, juif ; usurier) :

Kahlenberg (M. chauve = Chaumont ; — le nom de cette montagne der kahle Berg), qui commence non loin de Vienne, lui vient de ce que sa cime est dénudée : kahl, chauve, nu ; pelé)[8] ; Käseberg (n’est pas le mont du fromage : Käse), jadis Geissberg (Geiss, chèvre et aujourd’hui, en patois du pays, Gässberg) ; Kaisersberg (Cæsaris Mons, Mons cæsareus, Cæsareum castrum, M. du Kaiser, empereur ; cfr. lat. Cæsar ; — v. du H.-R.), Katzberg (M. du chat : Katze, chat), Keilberg (Keil, coin), Kellenberg (de kele, jad. gorge, défilé ; fondrière, ravin ; Kehle, creux, enfoncement ; gorge), Kirchberg (mont de l’église), Kloppenberg (bas sax. kloppen = klopfen, frapper ; rendre ou produire un son sourd en frappant ; cfr. Klappen, claquement, cliquetis ; klappen, faire un bruit de claquement, tomber avec bruit ; Klappe, claquet ; soupape ; trappe), Kochersberg (appelé, dans le moyen-âge, Mons Concordiæ ; à la Renaissance, Wimpfeling le nomma Mons pharetratus, qui porte un carquois : Köcher, carquois ; — mais plutôt du celt. coiche, sommet ; er, grand ; v. p. 6), anc. château-fort du B.-R. ; Königsberg (M. du Roi, Regiomontium, Mons regalis, mont royal : König, roi), Kreuzberg (M. de la Croix, nach einem dort angestellten Kreuze : Kreuz, croix [lat. crux] ; éminence, saillie ; croupe ; cfr. Krücke, croc, crochet ; potence ; béquille), Kupferberg (M. du cuivre : Kupfer), Kuttenberg (Montagne à froc, qui offre la forme d’un capuchon : Kutte, froc ; cfr. le franç. cotte), Landsberg (Mont. du pays), Lauterberg (Mont clair, serein ; lauter, [jad. et prov. transparent, clair], pur ; vrai, sincère, — connu par le Chronicum Montis sereni seu Lauterbergense), Ledeberg (M. du conduit ou du passage : leiten, [jad. aller], conduire, guider ; v. h. all. leit, chemin ; voyage ; holl. ley, suéd. led, franç. lée ; ou de Lede = Lehde, lande), Lehnenberg (Lehen, Lehn [jad. prêt], fief : = Bauergut, bien de paysan, bien taillable ; ferme : d’un bien de ce genre situé sur une montagne ; cfr. leihen, prêter, louer ; — ou de Lehne, pente, versant [d’une montagne], talus), Lemberg (Leopolis, M. du lion ; polon. Lwow (de lew = Löwe, lion) ; la forme all. ne se rattache pas à Lehm [limon ; terre grasse, terre argileuse] : peut-être rappelle-t-elle le celtique léim, saut), Leuchtenberg et Lichtenberg (Leuchte, lumière ; luminaire ; lanterne, falot ; Licht, lumière, clarté ; voy. F., p. 173 ; licht, lumineux ; das Lichte, clairière [forest] ; celt. leachdann, pente), Löwenberg (M. du lion), Mahlberg (M. de l’assemblée : Mahl, repas ; assemblée populaire ; cour de justice ; mahlen, triturer, écraser, moudre ; P., p. 147, 148, 320, — 322 ; — irl. meall, colline), Marienberg (M. de Marie), Monterberg (d’un fort nommé jadis Munna, pour Mund, jad. défense, tutelle ; Vormund, tuteur ; P., p. 159) ; — le ruisseau qui coule auprès reçut le nom du fort et s’appelle Munt), Mühlberg (Mühle, moulin), Münsterberg (M. du Münster [jad. monastère], cathédrale), Nuremberg ou Nürnberg (Mons Noricus, Castrum Noricum, Norica, Norimberga, doit son nom aux Noriques, qui s’y réfugièrent ; quelques étymologistes ont voulu voir dans ce mot, Nero’s Berg [M. de Drusus ou de Tiberius Néron]), Nordenberg [Nord, nord], Neuenberg [neu, neuf, nouveau ; neuer, plus nouveau ; Neuerung, innovation], Nahrunberg [Nahrung, nourriture ; aliment ; nähren, nourrir, alimenter], Narrenberg [Narr, fou, sot, extravagant], et Nur ein Berg [nur, ne… que, excepté, seulement ; ein, un])[9] ; — Oelberg (non pas de Oel, huile, mais de Ahle, angl. awl ; anglo-sax. ael, âl, alène, pointe), Rammelsberg (M. du Bélier : Rammel = Widder, Schafbock ; ou de Ramm (Bock, bélier ; ou v. h. all. hram, ramm, hraban = Rabe, corbeau ; P., p. 172), chasseur de l’empereur Othon, qui y découvrit une mine), Rechberg, Rechenberg (Rechen, râteau ; das Rächen, la vengeance ; F., p. 177), Reckenberg (Recke, géant ; recken, allonger, étirer), Regensberg (de la Regen, affl. du Danube), Reichenberg (reich [primit. étendu, grand, puissant], abondant, riche ; Reich, puissance, pouvoir ; empire, règne : reichen, s’étendre), Roggenberg (? Roggen, seigle), Rothenberg (à la montagne rouge ; der rothe Berg : roth, rouge), Salzberg (Salz, sel ; montagne où se trouvent des mines de sel gemme, à l’est de Hall), Schallenberg, Schallberg, (non pas de Schal, son, bruit ; mais de scala, degré, échelon ; scalæ, échelle, escalier : scalata = Stufe, Felsenstufe', Leiter ; Schallhorn, id.), Schellenberg (Schellhorn, Schellkopf ; ne viennent pas de Schelle [sonnette], mais de l’anc. mot schëlech = Riesenhirsch [cerf géant], Schellhengst [cheval gigantesque] ; peut-être l’élan), Scherenberg (Schere, ciseaux ; chose fourchue), Schildberg (Mons clypeorum ; ou montagne abritée : Schild [der], bouclier), Schlangenberg (Schlange, serpent : cfr. schlingen, entrelacer ; nouer, entortiller ; avaler, engloutir ; schlank, délié, menu, svelte, flexible ; schleichen, se traîner en marchant, ramper ; aller lentement), Snarrenberg (von der Schnarre oder Schnarrdrossel so genannt : Schnarrdrossel, grive de gui ; Schnarr, crécelle ; schnarren [faire entendre un son rauque], ronfler), Schmiedeberg (Schmiede, forge ; Schmied, forgeur ; forgeron).

Schneeberg (presque toujours couvert de neige : Schnee, neige ; — Autriche), Schomberg (forme de Schönberg = Beaumont : schön, beau [primit. brillant, clair] ; Schein, clarté, lueur ; lumière), Schöneberg (id.), Schwarzenberg (Montagne noire ou M. de la Noire ; — v. située près d’une rivière nommée, das Schwarz-Wasser, l’eau noire : schwarz, noir), Seeberg (M. du lac : der See, le lac), Silberberg (M. de l’argent : Silber), Schmalenberg (schmal, étroit, effilé ; m. h. all. et holl. smal, angl. small, petit, menu, mince), Sonneberg (M. du soleil : Sonne), Sonnenberg (vg. fondé, dit-on, par Sunno [brillant, vrai, P., p. 198], prince allemand), Spangenberg (M. des boucles ; — près de laquelle on trouve de petites pierres rondes marquées d’une espèce de boucle : Spange, pointe ; pointe mobile d’une boucle ; boucle), Sparenberg (= Berg des Sperlings, Berg, wo viele Sperlinge sich aufhalten : Sperling, moineau ; v. h. all. sparo, v. norv. spör, angl. sparrow), Spiegelberg (château voisin d’une chapelle où une image de la Vierge attirait beaucoup de pèlerins : Spiegel, miroir ; du lat. speculum), Spielberg et Spilberg (peut-être de Spiegel ; ou de Spiel, jeu, partie de jeu ; jadis ce mot signifiait « chasse » : Federspiel [jeu de plumes], chasse à l’oiseau, c’est-à-dire au faucon ; Windspiel, chasse avec des lévriers [Windhunden ; Windhund, popul. Wind, lévrier, chien courant] ; en Suisse, Windspiel signifie tourbillon de vent, Wirbelwind [littér. vent de tourbillonnement : Wirbel]), Spitzberg (Montagne aux pics aigus ; — contrée dont les côtes sont comme hérissées de montagnes pointues : Spitze, pointe, sommet pointu ; spitz, pointu, aigu, piquant), Stachelberg (Stachel, aiguillon, épine), Stahrenberg (Stahr = Staar, étourneau), Starkenberg (au Montfort : stark, fort, gros, épais) ; Starnberg (lac dans lequel on trouve l’île des roses, accumulation de pierres analogues aux crannoges [irl. crannóg, maison de bois, sur pilotis : crann, arbre] de l’Irlande), Sternberg (Stern, angl. star, astre, étoile ; grec ἀστήρ, Sternberg et Liebenstein (rocher de l’amour : Liebe, Stein ; — noms de deux rochers majestueux des bords du Rhin, qui sont couronnés par les murs décrépits de deux antiques châteaux et qu’on appelle die Brüder, les Frères : Bruder, frère), Stolberg (M. de la galerie, du support : Stolle, appui, soutien, support ; Stollen, colonne [de lit], pied [d’une table, etc.] ; balustre, balustrade ; conduit [d’une mine], galerie, canal souterrain, percement ; Stollort, bout, extrémité d’une galerie, d’un percement ; stellen, poser, dresser, ériger, mettre debout ; Stuhl, v. h. all. stuol, support, chaise ; jad. colonne, Ort, extrémité, pointe), Stoppelberg (Stoppel, chaume ; steule, esteuble ; cfr. lat. stipula, paille, chaume), Stapelberg (Stapel, étape ; lieu d’entrepôt), Straussberg (Strauss [jad. querelle, combat] ; — faisceau, bouquet ; — autruche) ;

Vogelsberg (M. de l’oiseau : Vogel), Voigtberg, Voigtsberg (castrum Vogatense ; dont le nom dérive des prévôts de l’empire : Vogt, Voigt, prov. Voit, protecteur, avoué [d’un couvent] ; prévột ; bailli ; gouverneur, administrateur ; du lat. vocatus, advocatus ; franç. avoué ; avoyer), Wanneberg (bas sax. wanne = Wendepunct, Grenze ; ou de Wanne, van ; cuve ; ou du nom propre Wân = Wahn [jad. espoir, opinion], opinion erronée, illusion), Weinberg (coteau planté de vignes ; vigne, vignoble : Wein, vin), Weinsberg (M. du vin ; au milieu de vignobles, près d’une hauteur où l’on voit de vieux pans de granit en ruine, une tour féodale croulante, que l’on nomme la Weibertreue [Fidélité des femmes : Weib, femme ; Treue, fidélité ; treu, fidèle, loyal], parce que, en 1140, l’empereur Conrad ayant refusé de faire grâce aux hommes qui s’y trouvaient et ayant permis aux femmes d’emporter tout ce qu’elles avaient de plus précieux, on les vit chacune portant son mari sur ses épaules), Weissenberg (weiss, blanc), Wittenberg (Mont-blanc, Leucorea [λευκός, ὄρος], montagne ; — v. sax. hvit, angl. white = weiss, blanc), Wolkenberg (M. des nuages : Wolke, nuage, — c’est-à-dire élevé ; — cfr. Wolkenburg, Wolkenstein) ;

Würtemberg (forme franç.), Wurttenberg, Wirtenberg (château qui a donné à un royaume de la Confédération allemande l’ancien nom celtique de Verodun-um ; voy. Append. I).

Zobelberg M. des martres, que l’on y trouve et qui ressemblent à des zibelines : Zobel, zibeline), Zottenberg (? M. à floquets : Zotte, flocon, touffe, houppe, frange ; — mais cette montagne se nommait jadis mons Zabotus ou Sabothus, mons Zotensis, Zobtensis, Silensis et Silentius, et elle est située près de la ville de Zobten), Zwingenberg (Zwinger, tour fortifiée, citadelle, donjon ; rempart ; prison fortifiée, geôle ; zwingen, contraindre, forcer ; Zwinge, étau).

Les Gleichberge (die Gleichberge), ainsi nommées parce qu’elles sont semblables (gleich, semblable, pareil) ; la ville de Gleichen dérive son nom de celui des montagnes voisines (nach den benachbarten gleichen Bergen) ou, comme dit un vieux chroniqueur, de sa situation inter montes qui a quibusdam Similes a quibusdam vero Steinberg et Bernberg vocantur.

Les Himmelberge sont des montagnes qui ont leur tête dans les nues, dans le ciel (Himmel, ciel). Les Malbergen (v. h. all. mahal, concio, fædus) étaient des lieux d’assemblées (voy. P., p. 147 ; Mahl, assemblée populaire ; tribunal ; repas ; mahlen, triturer) : Mahlberg, Mahlbergen.

De Berg, on a formé le mot Gebirge (agglomération ou chaine de montagnes, pays couvert de montagnes)[10] : Altgebirg (Vieilles montagnes : alt, vieux ; plutôt alt, en celtique [irlandais], hauteur), Eichsfeldgebirge (montagnes de l’Eichsfeld [? du champ des chênes], ou pour Eichenwald, de la forêt de chênes : Eiche), Erzgebirge (monts métalliques, montagnes des mines : Erz, mine, minéral ; bronze, airain ; cuivre), Gesenker-Gebirge, Gesenke (Montes demersorii, monts abaissés : Gesenk, chose qu’on plonge ou qu’on enfonce : provin, marcotte ; chose qui s’enfonce : mine, carrière ; creux ; défoncement ; puits souterrain, puits de mine ; senken, plonger, abaisser, creuser ; gesenkt, abaissé, baissé, incliné ; Senkung, action de plonger, enfoncement, abaissement du sol ; provignement), Rhoengebirge (montagnes de Rhoene : du celtique [irland.] rin, reen, ring, rinna, pointe de terre, cap), Riesengebirge (monts des géants ou monts élevés : Riese, géant, colosse : reisen [primit. se dresser, s’élever ; partir, se mettre en voyage ; anglo-sax. risan], voyager ; le mot Riese qui a pris le sens de géant se rattacherait tout aussi bien au v. h. all. risan [tomber] et à l’anglo-sax. hreosan [tomber], hrysan, se précipiter, s’abattre ; cfr. lat. ruere, abattre ; renverser, terrasser), ainsi nommés parce que les hautes pointes de cette chaîne s’élèvent au-dessus des autres montagnes de la contrée ou parce qu’elles étaient peuplées de gens qui tombaient et s’abattaient sur les tribus plus pacifiques des plaines environnantes[11] ;

Le Siebengebirge (le groupe des Sept montagnes ou les Sept montagnes : sieben, sept) : L’Oelberg (ou Auelberg ne vient ni de Oel, huile, lat. oleum ; ni de Eule, angl. owl, hibou ; ni de aul, lat. olla, pot, marmite, oule ; mais du celtique : anc. irland. ail, moderne oil, pierre), Loewenburg (Loewe, lion), Lohrberg (? de lôr pour le v. h. all., lôrboum = Lorbeerbaum, laurier ; lat. laurus), le Nonnenstromberg (le Stromberg des religieuses ; Nonne, religieuse ; lat. nonna, prim. mère ; Strom, torrent), le Petersberg (où se trouve une chapelle de S. Pierre, der heilige Petrus), la Wolkenburg (Château des nuées : Wolke, nue, nuage) et le Drachenfels (Rocher du Dragon, tué par Siegfried, le héros des Niebelungen, P., p. 84, 127 : Drache, dragon)[12].

Bühel et Bühl et Büchel (anc. et prov.), colline ; ce mot se rattache sans doute à Buckel, petite saillie arrondie, convexité ; bosse, gibbosité[13]. Dans l’Allemagne méridionale Buckel et Puckel sont employés dans le sens de Hügel et de Berg. Ainsi, Bühl désigne un mamelon, une colline arrondie (ein sanfter, zugerundeter Hügel). Ce mot n’est pas dérivé de Hügel ou de Hübel par transposition (durch Versetzung) ; il paraît se rattacher à Bug comme hukil, Hügel à houc, hoch : cfr. v. franç. pug, ital. poggio, hauteur, éminence ; v. h. all. bougan et puchan, pencher, incliner ; Teutobochus, nom celtique qui signifiait colline du dieu Teut ou du peuple ( cfr. P., p. 64), dont les Tudesques firent Teutoberg ;

Bühl (village de l’arrond. de Colmar qui doit son nom à sa situation au haut d’une colline ; — un autre Bühl dans l’arrond. de Wissemburg), Bühlen (à la colline), Bühlenthal (à la vallée de la colline), Bulach (champ ou eau de la colline) ; Dinkelsbühl (Zeapolis ; la colline du froment locar ou épeautre : Dinkel, épeautre ; cette ville porte dans ses armes trois montagnes sur chacune desquelles est un épi d’épeautre, espèce de froment, nommé aussi Spelz, en latin triticum spelta), comme symbole de la fertilité de son territoire ; Dombühl (colline du Dom, dôme, coupole ; cathédrale, cfr. lat. domus, maison ; ou de don [angl. down], bas, formant un plan incliné ; — Donbret [mines], planches d’un puits ; Donlage, Donlege, la pente d’un conduit de mines ; donlegig, incliné, penchant), Eichenbühl (Eiche, chêne), Grünbühl (grün, vert, verdoyant), Hohinbuilo (hoch, jad. hoh, élevé ; auj. Hummel), Kitzbühl (= Hædicollis : Kitze, Kietze, chatte ; Kitzchen, chevreau, cabri ; lat. hædus, chevreau ; bouc), Milchbühl (forme altérée de Mühlbühl : Mühle, moulin ; — Milch, lait), Schönbühl (pulcher collis), Schweinsbühl (Schwein, cochon, porc ; Voy. P., p. 197)[14].

Bühel a donné les formes : Biel, buol, puol, böhl, bohl, boll, qui, en Suisse, signifient, colline, Hügel, Abhang, bohlen, bohle, bühler. Cfr. le niçois bogilo et le français beuil (comme Brühl, brogilo, broglio) :

Bielstein (roc de la colline ; — peut-être ce nom se rattache-t-il au dieu celtique Beal, Phol, etc.) ; Boleheim, Bollestat, Bollenboden (Boden, fonds ; terrain), Steinbohl (auj. Steinel) ; Boll, Bohlen, Bollenbach, Bohle, Bollingen ; — Mausebolle, etc. ; Bolwig, Bollum, etc.

Quelques noms composés de buck ou böck se rattachent aussi à Bug : Bockum ou Bochum ; Bockau ou Buckau ; Bückeberg, Bückeburg ; Böckendorf, Böckenförde, Bockscheid ; toutefois ces noms peuvent provenir de Buche (hêtre) ou de Bock (bouc), — Bokel (= Bokloh, le bois de la colline), Bockeln, Bockelnberg, Böckelheim ; Bogen et pogen se retrouvent dans Ellinbogen (= Ellenbogen, coude : Elle [jad. avant-bras ; coude] aune (mesure) ; cfr. lat. ulna ; os du bras ; le bras entier ; grec ὠλένη le haut du bras, l’humérus) : Katzenelnbogen (coude des Catti ou guerriers ; voy. P., p. 103 et 104 ; Hatze, hetzen ; Hass, Katze) ; Steinelnbogen ou Ellnbogen (roude pierreux : Stein), en Bohème.

Les montagnes qui ont une forme arrondie (bühlförmige Berge) sont ailleurs nommées Kugelberge (Kugel, globe, boule, sphère). Jadis Kugel et Kogel avaient le sens de « sommet de montagne » et désignaient des montagnes qui avaient une forme arrondie : Kogel, Kogelberg.

Botzen (en bavarois, petit tas, petite masse, petit monceau, grumeau de matière molle, peloton, bourgeon, germe ; rejeton ; — de Butz, bout, extrémité arrondie ; bouton ; cfr. franç. bosse : Botzen (Tyrol).

Haufen (tas, amas, monceau, groupe, troupeau ; suéd. hop ; Hübel = eine kleine Erhebung, petite hauteur, petite élévation : Hub, action de lever ; élévation ; chose qui a été levée ; heben, lever, soulever) : Hübelstatt, Hüblingen (ingen).

Les formes Hüwel, Höwel (coteau, colline) : Hövel ; Heiligenhövel (heilig, saint), Howelwick (wick), Krummhübel (krumm, courbé, courbe ; tortueux, sinueux), Scherpenheuvel (en franç. Montaigu, en lat. Mons acutus ou Aspricollis : schärfen, aiguiser ; affiler, scharf, angl. sharp, suéd. scharp, aigu, acéré ; hérissé d’aspérités ; cfr. le français escarpé et l’italien scarpa, hauteur raide), Sprockhöwel (sprock, cassant, friable, fragile ; sec, aride)[15].

First (der) sommet (d’une montagne, d’un toit) ; die Firste, faîte, comble (propr. ce qui avance, domine ; la partie la plus élevée ; cfr. vor, für ; et l’anglais first, premier) : Hohinfirst, Firstfalli, Fersta.

Brinck (colline verdoyante, ein grüner Grashügel ; champ verdoyant ; pâturage ; celt. brynn [montagne], bryncyn, colline) : Brink, Brinke (près d’Osnabrück), Brenken ; Brenkhausen ; — Ahlbringen, Bobrink (corruption de Bökbring).

Kopf, tête, sommet, cime ; pointe ; cfr. caput, languedoc. cap, tête. Cet affixe désigne le sommet d’une montagne, une montagne à forme arrondie ; cf. Kuppe, sommet, cime ; couronne ; Kuppel, dôme, coupole) : Katzenkopf (tête de chat ; Katze, chat), en Wurtenberg ; Kuhkopf (tête de vache : Kuh), une des plus hautes montagnes des environs de Coblentz ; Meisenkopf (sommet des mésanges : Meise), Ochsenkopf (Ochs, bœuf), en Bavière ; Schneekopf (Schnee, neige), Steinkopf (sommet pierreux : Stein) ; Biedenkopf (pour Beidenkopf = aux deux sommets : beide, les deux ; ou pour bei den Hügeln : bei, auprès de) Zunderkopf (zünden, prendre feu, s’enflammer : zündbar, inflammable ; ou de sonder, sans ; jad. séparé), au nord de Hall ; le haut Wandkopf (Wand, muraille), au-dessus du Martinswand) ; Riesenkoppe (tête du géant : Riese). En suédois kop, en anglais cop, cope se trouve dans de nombreux noms de lieu avec le sens de colline (anglo-sax. cop = head, tête) : Bossekop (? tête de la baleine ; ou plutôt de la boîte, de l’arquebuse ; dan. bosse, boîte ; arquebuse, fusil ; all. Büchse, boîte), colline élevée, au bord d’un des golfes d’Alten ; Guppen (de Kuppe, sommet), montagne du canton de Glaris, dont le sommet est une pointe très élevée.

Haupt (tête ; haut sommet, cap ; jad. houpit ; bas all. höved ; dan. hoved ; bas sax. höved, höfd ; angl. head ; dialect. heet, höt ; caput) : Bergeshövede (sommet de montagne) ; Bornhöved (sommet de la source : Born) ; — Holy-Head (promontoire sacré : angl. holy = heilig, saint, sacré).

Horn, corne ; pointe saillante ; angle, cap, promontoire. On donne ce nom à la pointe (Landspitze), la plus apparente des hautes montagnes qui imagent une corne ; à une pointe (dans la Suisse française, aiguille ou dent) qui s’avance dans la mer, ou à un coin, à un angle formé par deux rivières. Quelquefois les mots terminés par horn ou en ern indiquent tout simplement un endroit où l’on se retire, une retraite (corne creuse) : Horn, ville ancienne dans le comté de la Lippe[16] ; Hornbach, Hornburg (château-corne), montagne qui a la forme d’une corne ; Horneburg, etc. ; Aalhorn (Aal, anguille ; Ahle, alène ; pointe), Balhorn (Ball, globe, sphère ; — celt. bal, tête ; irl. ball et bail, habitation ; baile, ville), Balmhorn, Balmenhorn (celt. balm ; creux de rocher, grotte), Blankenhorn (blank, blanc, éclatant, brillant), Breithorn (breit, large), Buchhorn (Buche, hêtre), Daubenhorn (ne dérive ni de Daube [douve], ni de Taube [angl. dove, pigeon], mais du bas lat. dova, doga, fosse ; ravine ; gouttière), Dungelhorn et Dungelalpen (du v. h. all. tuncolla, ravine, fondrière : tunc, creux, cavité), Faulhorn (App. K), Fischhorn (Fisch, poisson), Finster-Aar-Horn (n’est ni le pic de l’aigle noir, ni le sombre pic de l’Aar, mais le pic où est le glacier d’où sort l’Aar noir : finster, sombre, noir, ténébreux ; Aar, aigle ; aar, cours d’eau), Gespaltenhorn (gespalten, fendu ; spalten, fendre), Frombergerhorn (de fromberg, qui désigne une montagne de rapport [frua, fruit] ; jad. frum, utile, profitable ; fromm, bon, pieux), Jungfrau-Horn (pic de la jeune fille [App. K]), Langenhorn (lang, long, grand, haut), Matterhorn (qui s’élève au-dessus des prairies : Matte, prairie ; lait caillé ; enfoncement ; matt, terne, blafard), Mutthorn (dialect. mutz, tronqué, abgestumpft ; lat. mutilus, mutilé, tronqué), Riffelhorn (le pic coupé, fendu, das zersägte Horn : v. h. all. rifilón, scier) ;

Scheerhorn (indique une corne avec deux pointes [cfr. Zwillingspitzen, pics jumeaux] : Scheeren ou Scheren, ciseaux : Scheere et Schere, ciseaux ; brisants, écueils ; chose fourchue ; fourche ; scheren [jad. dé-chir-er, fendre], tondre, couper ; séparer)[17], Schlauchhorn (dans le patois des Alpes Schlauch = Schlucht, ravin, gorge), Schreckhorn (corne de la terreur, pic de l’épouvante : Schreck, frayeur, épouvante, effroi), Steckhorn, Stockhorn (montagne du canton de Berne, qui ne dérive pas ce nom de sa forme [von thurmähnlicher Gestalt], ni de la ressemblance de sa corne avec une souche [Stockförmigkeit des Hornes] ; mais des deux villages nommés Ober- et Unter-Stocken, localités qui doivent leur nom à des souches [Baumstöcken], qui étaient restées après le défrichement de la forêt), Wetterhorn (non pas pic des tempêtes [Wetter, temps ; température ; mauvais temps ; orage], mais « pic fendu », mont de la brèche : du v. h. all. wetaro, fourchette ; brèche), Wiesbachhorn (du ruisseau des prés [Wiese] ou du ruisseau blanc weiss).

Le mot Horn indique aussi un promontoire, une pointe de terre qui s’avance dans la mer ou dans un lac : Aachhorn (cap de l’eau : ach), Kuhhorn (cap de la vache), Romanshorn (Cornu Romanorum ou Romani Cornu, c.-à-d. cap habité par les Romains ou par un individu nommé Romanus ; ou de l’allemand Ruotmanneshorn : cfr. Ruodman, Rudoman [l’homme renommé : hrod ; ou défricheur, roden, défricher, P., p. 153]), sur le lac de Constance ou Bodensee ; Zurichhorn ; — le cap Horn (en holl. Kaap van Hoorn) est la pointe extrême de la terre de Feu ou le cap qui termine l’Amérique en guise de corne (du holl. horn, corne et cap ; — on a vu dans ce nom un souvenir de la ville de Horn, patrie de Schonten qui découvrit ce cap.

Horn signifie aussi « angle » ou encoignure au confluent de deux rivières, et quelquefois un lieu où l’on peut se retirer (comme au fond d’une corne), le fond d’une baie profonde, un asile sûr ; solitude, lieu désert (anglo-sax. ærn, ern, dan. arne, sax. hern, lieu caché, chambre, habitation, maison) : Wedehorn (= Weidewinkel, l’angle ou le coin du pâturage ou du saule : Weide, pâturage ; — saule), Wolfshorn (luporum angulus seu recessus).

Horn prend quelquefois les formes arn et ern : Asparn (Aspe, Äspe, Espe, tremble, arbre), Balmern (la demeure de la grotte), Lucern (lucis domus), Goltern (auri angulus : Gold). Wulstern (Wulst, renflement, tumeur), Salerne, etc.

Localités de l’Angleterre : Hearn (jad. Hern). Whitehern (maison blanche) ; Chillern, Mintern, Pimpern, etc., Arne, etc. En breton, arne signifie péninsule, division.

Le mot « corne » désignait aussi chez les Celtes, la tête, l’extrémité d’une chose, et il se donne à divers sommets de montagnes et à des caps. Ainsi le nom de Cornouailles est commun à une partie de la petite Bretagne et à un comté d’Angleterre, parce que ces contrées sont à l’extrémité de ces deux pays, et qu’elles s’avancent en forme de corne ou de cap. En France, les Cornouailles (en lat. Cornu Galliæ, corne ou cap de la Gaule) forment une péninsule dont le nom indique une situation à l’extrémité de la Gaule (Basse-Bretagne). En Angleterre, les Cornouailles sont deux grandes péninsules de la Grande-Bretagne que les Celtes avaient nommées Cernyw (Cornes) : celt. cern ; gallois et irland. corn, corne ; en angl. corner, coin, encoignure, angle. Les habitants étaient nommés Carnabii ou Gwyr Cernyw (les hommes du promontoire). Les Latins formèrent du premier de ces noms celui de Cornubia. Puis, les Saxons ayant donné à la partie du pays des Bretons qui conserva son indépendance et qui fut refoulée dans le sud le nom de Weales (Wales), les latinistes formèrent le nom Cornu-Wallia = Cornu-Walliæ (Galliæ). C’est à tort qu’on a vu dans ce nom celui de Cornu-Vallis.

Le suffixe horn a pu se confondre avec les mots celtiques cair, cor, carn qui signifient montagne (cfr. le slave ker, kor). Ainsi les Riesengebirge sont nommées en tchèque Ker-Konosky-Hory et le plus haut sommet se nomme Korkonosch.

Enfin Krone (couronne) est quelquefois employé dans le sens de sommet de montagne et, dans ce cas, ce mot n’est peut-être qu’une modification de corn.

Spitz, pointu, aigu ; piquant [mont à cime pointue] : Spitze, pointe, sommet pointu [pointe de terre] ; franç. pointe ; ital. punta ; roman. piz) ; Spiess, pique, javelot, dard ; broche : Spitzberg (contrée qui n’offre de tous côtés que des montagnes taillées à pic, des cimes dentelées comme une scie) ; — Drei-Herren-Spitz (le pic des trois seigneurs), Eisthaler-Spitz (le pic de la vallée de glace : Eis, Thal), Hochspitz (hoch, haut, élevé), Orteler-Spitz (le pic de l’Orteler, voy. App. K).

Ort (primit. pointe, coin tranchant, Spitze, Ecke ; promontoire, pic, extrémité, fin ; cfr. gaél. ord, montagne ; grec ὄρος, montagne ; lat. ora, bord, extrémité, borne), lieu, endroit, place, localité[18]. Ce mot a aussi signifié « canton, » par exemple, dans Vorort (mot qui désignait, en Suisse, avant 1848, le canton directeur [vor, devant, avant]. La ligne des huit premiers cantons se nommait die acht alten Orte) : Ortenau (le pré de l’extrémité, du bout), Ortberg, Ortburg, Ortholz, Orteneck ; Ortler (App. K)) ; Angerort, Friedrichsort, Ruhrort (localité sur la Ruhr, Ort an der Ruhr), Schwarzort (schwarz, noir), localité où l’on exploite des gisements d’ambre jaune.

Grat, pointe, tranchant ; arête, ligne de jonction de deux plans, saxeum dorsum : Falkengrat (pointe du faucon), Wannengrat (arête de l’espèce de faucon nommé wanderli [v. h. all. wannoweho] ou Wannenveihe, émouchet, littér. milan qui agite les ailes : mit den Flügeln wannend ; — Wanne, van ; dialect. aile ; Weihe, milan) ; on trouve aussi des montagnes nommées : Wannerspitz, Wannihorn).

Ecke, pointe, angle saillant, coin (cfr. lat. acies, pointe ; acutus, aigu ; ἀκή, ἀκίς, pointe. Ce mot indique quelquefois une avance, une saillie, une pointe de montagne, une pointe élevée et rocheuse et quelquefois une proéminence qui se forjette sur le bord d’un lac. Eck désigne encore un endroit resserré, une coin, un angle. Dans l’Allemagne du Sud, ce mot est écrit egg, egge : Eckstedt (Statt, sax. stede, place, séjour), Eckweiler (village de la pointe, du coin), Eggmühl (moulin de la pointe : Mühle), Eggeberg ; — Arneck (pointe aux aigles : arn, bas all., dat. pluriel aux aigles [den Adlern] ; de Aar, poét. aigle), Bergeneck (pointe de montagne), placé sur une colline ; Brunecken (Brunn, source), Friedeck (sommet fortifié : fried, clôture, enclos, lieu de paix, de tranquillité ; cfr. Be-fried-igung, clôture, enceinte de haies, enclos ; action de contenter, d’apaiser ; be-fried-igen, enclore, fermer d’une haie ; contenter, satisfaire ; Friede, paix, état de sécurité, de tranquillité ; d’ordre, de repos), Harteneck (hart, dur, résistant ; pénible), Heideck (Heide, lande couverte de bruyères ; bruyère), Hoheneck (Höhe, hauteur ; éminence ; hoch), Hohengeroldseck (au haut sommet de Gerold [puissant par l’épée], P., p. 36), Landeck (d. i. Ecke des Landes, coin du pays), ville située aux angles que forment trois routes), Lobeck, Lubeck (de lubbe, lübbe qui, en Basse-Saxe, signifie géant (cfr. angl. lubber, drôle, fainéant) ; ou de lub, en wende lipa, tilleul ; en v. norrain lubbi [hirsutus] ; cfr. Laub, feuillage), Neydeck (pointe de Nitho, de Nidbald, etc. ; ou coin du combat [celt. nitio], de l’envie [Neid] ; voy. P., p. 163 ; doit peut-être son nom à des disputes au sujet de limites) ; Rheineck (pointe du Rhin), château situé sur les bords du Rhin (von dem Bergvorsprung so genannt), Rolandseck (pointe de Roland, P., p. 139, 301)[19], Scheideck (pointe qui divise : scheiden, séparer), montagne située entre les vallées du Grindelwald et de Hasli ; — autre montagne située entre Grindelwald et Lauterbrunn ; Rigi-Scheideck, un des points les plus remarquables du Rigi sur une pointe de la montagne qui partage deux contrées, Scheideck et Scheidegg indiquent aussi la ligne de séparation des eaux, Wasserscheide), Schönecken (schön, beau), Spohneck (bas all. spón = Span, fragment, éclat ; en vieil all. spohn signifiait désunion, désaccord ; et ce mot pourrait indiquer un lieu de séparation ou de dispute), Stahleck (Stall [jad. lieu couvert, clos ; habitation], étable ; — Stahl, acier ; pointe d’acier ; cfr. steil, raide, escarpé, abrupte ; à pic ; Stiel, tige, hampe), bourg ruiné sur les bords du Rhin ; Wadeck, Waldeck (Wald, forêt) ; — Bernegg, (pour Bärenecke, pointe de l’ours ; Bär, — ou plutôt du celtique bern, sommet), Cronegg (pointe-corne, p. 47), Giebelegg (Giebel [jad. sommet, tête], pignon, fronton ; Gipfel, cime, crête, pic).

Quelques noms géographiques terminés en eck ou ecke offrent peut-être une forme de Eiche (chêne) : Schöneck (beau chêne), Hoheneck (chêne élevé), etc.

Kamm, crête, sommet allongé et tranchant d’une chaine ou d’un rameau de montagnes ; peigne, corps muni de pointes saillantes ou formé d’une série de dentelures ; Gebirsgkamm (comme sierra en espagnol, App. K). Il ne faut pas confondre ce mot avec le slave kam (dans Kamenz, Kamin, etc.) qui indique un sol pierreux, des rochers.

Rück, dos [usité seulement en composition, pour Rücken, dos]. Ce mot indique une chose saillante et étendue en longueur, une crête de montagnes : Hundsrück (nom que l’on a traduit par dorsum caninum : Hund, chien[20] ; d’autres étymologistes prétendent que le mot hun a été donné à cette montagne parce que les Huns s’y seraient arrêtés ; mais c’est là probablement un nom celtique cun, haut ; en all. Hüne, géant), Roggenflue (pour Rücken).

Stotz, Stutz, en Suisse, signifie hauteur escarpée, montée raide.

Steig, sentier roide ou escarpé, sentier ; steigen, monter, grimper, s’élever ; Steig indique proprement un chemin de montagne (ein in das Thal führender Bergpass) : Luciensteig (de Lucius ; défilé au milieu de montagnes escarpées). La route du Saint-Gothard commence à Amsteg (= Am Steg, auprès du sentier ou de la route, située près d’un pont où se trouvait une passerelle jetée jadis sur la Reuss : on a, depuis, établi, en ce lieu, une route, et on y a construit un pont en pierre.

Lehne, plan incliné, penchant, versant (p. ex. d’une montagne), talus, appui ; aujourd’hui, en bas saxon, eine Lehne signifie une contrée (lehnen, incliner, pencher, s’appuyer, être appuyé ou adossé contre ; lehnen, relever, être sujet à un cens ; préler, emprunter ; Lehen, Lehn, prêt, emprunt ; fief ; leihen, prêter, louer ; emprunter) : Lehndorf, Lehnenberg, Lalaing (dép. du Nord) ; Lehen (fief), Lehenweiler, Burgstallehen ; — Lohnhausen (? Lohn, paye, gages).

Gehre, biais, biaisement ; talus, pièce en talus ; chanteau ; pan d’un habit. En bavarois, Gern pour Gehren : Buchengehren (Buche, hêtre), Grasgehren (Gras, herbe), Hohengehren, Lippoldsgern (de Leupold, Leopold, Leibold). — Gehren et Gern désignent une portion de champ cultivé, qui occupe un espace taillé dans un bois et quelquefois un morceau de terre situé entre deux autres.

Klippe (die, rocher abrupte ; roc ; écueil ; cfr. goth. klaiv, tumulus, agger ; lat. clivus, pente ; rampe, montée ; angl. cliff, rocher escarpé ; penchant, descente d’une montagne; v. norr. klif, colline) : ? Clevemont, Clèves (Clivia) doit son nom à sa situation sur la pente de trois collines ou de trois « descentes »[21] ; Ratcliff (hameau près de Londres ; en creusant on y a trouvé une couche de terre rouge, et on croit que son nom signifie Red Cliff : angl. red = roth, rouge).

Hart (et Har), montagne (peut-être de hart [dur], parce que un pays montagneux était âpre et rude[22] ; cfr. har [montagne], en hébreu, et en grec ὄρ-ος, οὖρ-ος) ; — au dat. pluriel haren, en plattd. heren, eren, ern. Quelquefois, cette dernière forme se rattache à Horn (corne). Hart et Hard signifient souvent « bois » (primit. montagne boisée) et ces mots prennent les formes art, ert qui ont servi aussi à désigner des massifs abruptes d’une forêt, des bois ronceux, des taillis buissonneux :

Hard, Haardt, Neustatt an der Hard ; — Hard, district au-dessous de Zurich, dans lequel il y avait un château nommé Im Hard, qui défendait le passage étroit de la rivière (le mot Hard faisait peut-être allusion à la difficulté du passage : hart, rude) ; Hertle (petit bois) ; — Le Spessart (jad. Spehteshart, forêt du pic : Specht, pic, oiseau ; lat. picus ; de spicken, larder, piquer ; forme de picken, piquer, becqueter, donner des coups de bec : ce nom désignerait un Picker, Baumpicker) ; Hunhart (n’est ni une forêt du géant [Hüne], ni du Hun [Hunne], mais du celt. cun [haut] ; voy. P., p. 123, 124), Kallenhart (? kalt, froid ; dans les environs de Cologne kallen = parler ; peut-être forme de hallen et gellen, résonner, rendre un son ; cfr. lat. calo, grec καλέω), Kirschenhart (de Kirschbaum, cerasus, cerisier ; — gall. cors, marais), Krummhart (krumm, courbe, tortueux, sinueux), Oedenhart (= forêt inculte, Wohnort beim öden Wald : de öde, désert, inculte ; solitaire ; silencieux), Plattenhart (forêt située sur un plateau, dans une plaine, am flachgelegenen Walde : Platte, surface plate, plane ; plateau [d’une montagne] ; platt, plat, aplati) ; — die Haar (en Westph.), Haarhof ; — Rickert, etc.

Halde, die, pente [rapide], colline, coteau, Abhang ; de l’anc. adj. hald, rapide : Halde ist die steile abschüssige Bergseite ; de holt, jad. qui incline, qui penche, enclin ; hold, favorable, propice) : — Anhalt (acclivis : de an = ad (près de, vers, etc.) ; d’après l’analogie de Anhöhe) ou de Holz (bois) ; Anholt (ardua sylva), Anrath (arduum novale : Reut), Anweiler (ardua villa). Toutefois Anhalt se rattache plutôt à halt (pascuum ; haltaro, custos ; goth. haldan, pascere ; anc. all. haltan, tenere, habere, sustentare, custodire. On dit d’un avare qu’il est natif d’Anhalt, parce que er hält an sich)[23] ; Frederichshald dont le nom était jadis Halden ; — Frédéric III lui donna son nom à cause de la défense glorieuse des habitants de cette ville contre les Suédois (1665).

Hlita (v. h. all.), lite (m. h. all.) signifie colline, coteau, Hügel, Bergabhang, pente, déclivité de montagne (cfr. grec κλιτύς et κλίτος, pente, inclinaison ; tertre, colline ; κλίνω, j’incline, je penche ; lat. clivus, pente, montée). De là proviennent les formes Lit, Lith, Lieth (an der Ems), Leete ; Hlidbeki (Lübke), Amelieht (an der Lit), Hebel (pour Hebilide ; de heben, élever, tendre plus haut).

D’autre part leiti signifie, en v. h. all., conduit (leiten, conduire) et peut désigner une lisière (Leitband) ou un aqueduc[24]. Remarquons encore que led signifie une terre stérile, inculte (Lehde, lande ; ledig, qui n’a pas de propriétaire, sans maître ; épave ; libre, affranchi ; de l’anc. verbe lidan, se mouvoir : Glied, membre, primit. jointure mobile ; cfr. leiten, gleiten). De là les noms de villages : Lede (sous-entendu Land, terre), Ledeberg, Ledeghern, Ledesele, Lederinge (Ring, cercle ; enceinte [circulaire]), Lindelede (Linde, tilleul), Moorslede (Moor, marais), etc.

Les mots Stein, Fels désignent plus particulièrement un lieu fortifié, un Burg.

Stein, pierre, roche. Dans les noms géographiques ce nom est souvent synonyme de Felsberg (montagne rocheuse) et de Bergspitze : il désignait un sommet pierreux ou fortifié, des blocs de rochers. Un rocher était comme le piédestal naturel d’une construction féodale. Stein est ainsi employé pour désigner une montagne (Berg) et un Steinbau (Burg) : Stein, Steinen ; — Beinstein (on ne peut pas songer à Bein [os ; jambe] ; bein est ici une forme du celtique (erse) ben = pen, montagne), Breitenstein (breit, large), Canstein (et plusieurs Cannstadt : bas bret. kann, blanc, brillant), Dachstein (en 1017, Dabechenstein : ne vient pas de Dach, toit ; decken, couvrir ; mais du celtique dae [maison], apparenté à l’irland. teach [dans quelques noms de lieux ti et tee] et au latin tectum ; et de beangan [irl. bheag, armor. bihan], petit : Petite maison ; — ou de beagh [bouleau] : lieu où se trouvent des bouleaux), lieu fortifié où il y eut plus tard un château construit en pierres de taille qui avaient une épaisseur de six à huit pieds ; — Ehrenbreitstein (forteresse nommée d’abord Hermannstein [rocher d’Hermann], à cause de Hermann Hillin [pour Hildiwin, P., p. 224, 32], archevêque de Trèves, qui la rebâtit [1153] ; mais lorsque cette forteresse fut terminée [1160], ce prélat, ayant égard à l’étendue transversale ou à la largeur [Breite] de ce monument, lui donna le nom d’Hermannsbreitstein, mot dont on a fait Ehrenbreitstein la large forteresse de l’honneur : Ehre, breit)[25] ; Eichel-Stein (rocher du gland : Eichel, gland ; Eichelstein [littér. pierre de gland], balanite), montagne située non loin de Mayence et qui se présenterait sous la forme d’un gland)[26], Freundstein (montagne de l’ami), Grevenstein (du Comte : Graf, bas sax. grefe, comte), Herberstein (de Heribert = Haribert, P., p. 32, 168), Herbstein (= Heriperhteshusium = maison d’Héribert : Haus), Königstein (du roi), Lichtenstein (Saxum candidum ; — v. pag. 33), Nierstein (pour Nierenstein, pierre néphritique, jad. Niere, rein), Reichenstein (non pas de reich [jad. étendu], riche ; ni de Reich, empire ; mais du m. h. all. diu rihe, ravin, gorge, défilé), Wartstein (? Wart, guet), Windstein (château du vent), etc.

Stone s’emploie en anglais pour Stein : Stonehaven (haven = Hafen, havre, port), Stonyhurst (stony, pierreux ; hurst, bois, taillis ; bosquet), etc.

Steen, en flamand : Steenwerck (Werk, travail, ouvrage ; où werck est pour Berg).

Fels et Felsen, roche, roc ; masse pierreuse ; récif, brisant ; en wallon, falije, carrière de pierres [cfr. franç. Roche, Rochette, Rochelle, Rochefort]. Ce radical a donné les noms de lieux : Fels, Falaise (Calvados ; — v. qui doit son nom aux falaises sur lesquelles elle est bâtie ; les collines situées sur le bord de la mer sont appelées « falaises ; » — Ardennes), Houffalise (Belgique : holl. hof, jardin ; hoeve, métairie, ferme ; ou de hoh pour hoch, haut), Felza (Haut-Rhin), Felsbach (Haut-Rhin), Felsberg, Felsburg ; — Altenfels (alt, vieux), Braunfels (roche brune ou roche de Bruno : braun, brun), Drachenfels (rocher du dragon : Drache)[27], Ehrenfels (Ehre, honneur ; ou du v. h. all. êr, Erz, minerai ; celtique hajarn, houarh, iarann, fer), Lichtenfels (Licht, lumière ; licht, clair, lumineux ; das Lichte, chose claire, le clair ; clairière [dans une forêt], lichter Platz im Walde), Stolzenfels (stolz, haut, élancé ; fier), château royal qui mérite son épithète par sa situation élevée ; le Treuenfels (roche de la fidélité : Treue, fidélité), situé dans le voisinage des Sept-Monts ; Weissenfels (rocher blanc ; Leucopetra : weiss), ville sur la Saale, avec un château sur une roche blanche ; Wildenfels (wild, sauvage, inculte ; désert), etc.

En norois, fial = Berg ; en scand. fell, fiell, rocher : Dofrefiell (roche triste), etc.

Fluh, Flüh, Flühe, mot suisse qui signifie un roc escarpé, un massif de rochers ( cfr. Flöz, couche de terrain de sédiment : Sandflöz ou Sandfluh, lit de sable, assise arénacée, c’est-à-dire pierre de sable, pierre sablonneuse ; Bettfluh (pierre de couche, = Steinbetten ou Steinlager, lits de pierre : Bett, lit, couche ; Lager, couche ; banc, gîte) : Mährenfluh (et Mährenhorn ; non pas de Mähre, jument ; ni de Mär, Märe, bruit ; nouvelle ; mais du bas lat. magaria, mayria, Meierei, métairie) ; Männlifluh (qui a la forme d’un Steinmännli ou d’un Steinsignal), Portfluh (dans un endroit resserré de la vallée où il y avait un vieux mur transversal [Quermauer : quer, transversal, à travers] avec une porte [porta] pour garder le pays).

Le nom de Chemnitz se rattache au mot slave kamen (pierre) et est une forme de kamenitza (lapidosa). Il ne faut pas confondre ce mot slave avec le mot breton kemen, kemenez (montagne), qui a donné le subst. kemenet (par altération Guéménée), seigneurie, fief. Les manoirs étaient construits sur des hauteurs, et, par suite, les idées de « montagne » et de « manoir féodal » s’associèrent.

Joch (lat. jugum), joug ; chaîne de montagnes qui unit deux autres chaînes ou des montagnes élevées[28] : Jochsberg.

Skiär désigne, en norwégien, les rochers des îles scandinaves ; en suédois skär, dan. skier, rocher[29] ; skæren, en suéd., écueils ; découpures ou échancrures de la falaise : de skaera, couper ; scheren, couper, Schere, ciseaux ; écueils, brisants, proprement chose qui coupe). Les Scheeren sont des rochers dont les pointes incommodent les vaisseaux.

Riff et Reff, récif : Revel (ville qui doit son nom à deux petites îles situées près du port et qu’on nommait jadis Reffe (bancs de sable) ; — Altenrif (Suisse ; — en latin Alta ripa, et, en français Hauterive ; — l’étymologie de ce nom paraît être latine).

Les passages (die Pässe), les enfoncements (Einsenkungen) des montagnes sont nommés : Gabeln (fourches : Gablenberg) ; Furken (lat. furca, Furculæ caudinæ) ; Sättel (Sattel, selle, bât ; saillie ; crête ; dos d’âne), Lücke (ouverture : Lückli, Luglen, petit défilé, gorge ; v. h. all. luog), Thor (portail ; Thürli : Thür, porte), qui a le sens de passage entre deux montagnes[30] ; Pass (passage étroit, défilé ; — lorsqu’un chemin passe à travers) ; cfr. franç. col, fenêtre, pas ; ital. forcolo, forcella ; sella, passo, bocca. Thor désigne aussi des rochers escarpés entre lesquels se trouve un défilé : Hochthor. Lorsqu’il y a un rocher, une colline, en un mot une barrière au milieu de ces portes[31], on leur donne le nom de Riegel (barre ; verrou).

On a dit que les localités nommées Füssen devaient leur nom à leur situation au bas ou pied (Fuss) d’une montagne. Mais ce nom leur vient plutôt de leur situation à l’entrée d’une gorge ou d’un étroit défilé (lat. fauces, gorge ; défilé ; pas ; entrée) : Füssen (dans les Alpes Juliennes, jadis Oppidum Faucense, où fut fondé un monastère nommé Faucense Monasterium), Füssen (sur le Lech), Fussac (en Autriche). Le Piémont (ital. Piemonte, piè di monte) doit son nom à sa situation au pied des Alpes.


§ ii.

NOMS TIRÉS DE LA SITUATION DANS UN BAS-FOND
(auf Lage in der Tiefe)
.

Les idées de profondeur, enfoncement ne sont pas souvent exprimées, dans l’onomatologie topographique, par le mot Tiefe, profondeur (tief, profond, creur, bas ; holl. diep, angl. deep)[32]. On trouve cependant ce mot dans les noms suivants : Dieppe (Seine-Inférieure), Deeps, ville de la Pomeranie ; Tiefenthal (à la vallée profonde), Tiefengrund (id. ; Grund), Tiffauge (voy. auge, oge, p. 35), Dieppedale (de diep ; dale = Thal), située dans une vallée au-dessous de Rouen.

En revanche, on emploie fréquemment les mots Thal, Boden, Grund, Höhle, etc., qui expriment l’idée de profondeur (Tiefe) et désignent les vallées (Thäler), et les enfoncements, les excavations du sol (Vertiefungen des Bodens).

Thal (angl. dale ; goth. dal ; anglo-sax. dael ; sax. dahl ; irl. dal, dail ; gall. dol), vallée ( cfr. theilen, séparer, diviser, partager ; sanscr. dala, fissure, entaille, passage). Ce mot désigne les diverses divisions ou entailles des pays montagneux. On donne le nom de thalweg (chemin de la vallée : Weg) au lit d’un fleuve, au fond sur lequel il coule entre les deux rives. En bas all. Dölle, Tölle, Tolle et mayençais dell signifient lieu bas, bas-fond. Le mot suisse dole et le v. h. all. dola ont le sens de cloaca, fosse, égoût.

Dans les noms des localités Thal (opposé à Berg, höh, Burg, Stein, etc.) indique qu’elles sont situées dans des vallées : Thal, Thalbach, -brunn, -dorf, Thalgau (district de la vallée), Thalhausen, -heim, -hofen, Thalkirchdorf (village de l’église de la vallée) ; Thalitter ( = Itter im Thale ; village situé an der Itter) ; — La Dala (vallée de la Suisse), Dalheim (habitations de la vallée), Dalhausen, Dalstein ; — Die Dell ou Dellt (petite vallée) ; Delle (en Alsace, située dans une vallée agréable)[33].

Affenthal (non pas vallée du singe, Affe ; mais de afa, eau), Binnenthal, synonyme de Binnenland, pays intérieur, pays entouré par la terre ferme, par des digues : binnen, dans, dans l’espace de…, d’ici en… ; Bisenthal (? der Bison, jad. Wisent, taureau sauvage), Blumenthal (Blume, fleur), Darnétal (Seine-Inférieure ; anglo-sax. derne, dyrne, caché), Eichthal (vallée du chêne : Eiche), Freudenthal (de la joie : Freude ; vallis jocosa seu jucunda), Friedenthal (de la paix : Friede), Grafenthal (vallée du comte : Graf, chef militaire ; comte), Höllensteinerthal (vallée pierreuse de l’enfer : Hölle, enfer ; Stein), défilé de montagnes qui forme le vestibule du massif de montagnes auquel on a donné, en l’honneur de Dolomieu, le nom de Dolomites ; — Jammerthal (non pas de Jammer, gémissements, lamentations ; douleurs ; cfr. lat. gemere ; wimmern, gémir ; se lamenter ; mais du wende jama, creux, fosse ; caverne, trou), Joachimsthal (vallée de Joachim; — avec des mines d’argent : de ce nom on a fait celui de Thaler, adopté encore aujourd’hui, pour l’unité monétaire, et, par corruption, celui de dollar), Kaltenthal (ville dans une vallée qui se dirige vers le nord ; ou de la fraîcheur des eaux : kalt, froid), Klingenthal (vallée des lames : Klinge, lame, fer ; acier ; épée ; klingen, rendre ou faire entendre un son ; résonner) ; v. de l’Alsace où une grande manufacture royale d’armes blanches fut fondée en 1730), Königsdahlen (König, roi), Kornthal (val des grains : Korn, grain ; grains ; blé, blés ; — in getreidereicher Gegend), Kreuzthal (Kreuz, croix), Langenthal (lang, long), Lenkerthal (de la courbure de la rivière ou de la vallée : v. h. all. hlinkan, m. h. all. lenken = biegen, courber, plier ; lenken, donner une inclinaison latérale ; gelenk, souple, flexible), Lilienthal (Lilie, lis), Lichtental (Licht, lumière ; licht, clair, lumineux ; das Lichte, la chose claire ; clairière [dans une forêt]), Maisenthal (Meise, mésange), Marienthal (de Marie, de Notre-Dame), Meisenthal (des mésanges), Melchlthal (vallée de la farine : Mehl, farine : mahlen, moudre ; ou du miel : Milch, angl. milk, dan. holl. melk, lait : melken, traire), Munzthal (vallée de la menthe ; — du Muntz = fils d’un Mund, tuteur, protecteur ; ou de Münze, monnaie, pièce de monnaie ; — menthe), Naodendal (vallis gratiæ : Gnade, grâce ; clémence, condescendance ; charité ; jad. abaissement, Senkung, Neigung ; v. h. all. gi-nada ; dan. naade ; de nahen, approcher, s’approcher de ; neigen, pencher, incliner, baisser ; — petite ville qui s’est formée près d’un couvent de femmes, en Finlande), Oberthal (= Ort im obern Thal, Oben im Thal : ober, situé plus haut, supérieur ; oben, au haut, dessus, en-dessus), Oberwiesenthal (val de la prairie supérieure : Wiese, prairie), Pusterthal (vallée du Puster = Blasebalg, soufflet ; pusten, souffler ; — à cause d’une idole qui avait les joues gonflées et paraissait souffler)[34], Rheinthal (val. du Rhin), Rinderthal (Rind, bœuf ; plur. Rinder, bêtes à cornes, race bovine), Rosenthal (rosarum vallis : Rose), Salzthal (val. du sel), Scakenthal (anglo-sax. scacan, quatere, concutere, angl. to shake, secouer, ébranler ; ou du v. h. all. scah ; voleur ; m. h. all. schach, proie, butin ; v. franç. eschec, pillage, sac, saccagement ; ce mot se rattache à scacan, secouer, ébranler ; franç. choquer ; le pillage succédait au trouble et à la mise à sac ; cfr. Schächer, larron ; Schacherer, trafiquant rapace, grapilleur ; Schacher, trafic usuraire, sordide ; — ou de Schacht, fosse ; puits [de mine] ; mesure quarrée ou cubique ; — étendue de bois ; carré d’arbres, bavarois der Schachen, Schacht, partie d’un bois ; — on trouve aussi le même radical dans Scakinhova), Schnepfenthal (Schnepfe, bécasse), Schönthal (jolie vallée : schön), das Sibnenenthal (transformé en) Simmenthal (dans les chartes, Septem vallis et Siebenthal ; — dont la source est aux Sieben Brunnen ou aux sept sources : sieben, sept ; mais le Simmerthal, traversé par la Simme, était nommé, en bas latin, sepiana vallis, la vallée des fermes entourées de haies, la vallée des Einzäunungen ; de sepiana, on a fait, dans le langage populaire, Sibenthal, etc. ; il suit de là que la Simme a reçu sa dénomination de la vallée et non la vallée de la rivière), Silberthal (Silber, argent), Stendal ou Steindal (Stein, pierre, ville de la Marche de Brandebourg), Waterdahl (bas sax., angl. water = Wasser, eau), Wichtendahl (vallée des lutins : Wicht, angl. wight, individu, personne, homme, quelqu’un, c’est-à-dire chose qui se meut, qui s’agite, qui croît : das Wichtlein, das Wichtelmännchen, lutin, gobelin, esprit follet, das Bergmännchen ; F., p. 79), Wolfsthal (vallée du loup : Wolf), Winnenthal (goth. vinja, pâturage ; Wonne [joie ; v. h. all. Wunna, angl.-sax. wyn] avait aussi jadis le sens de pacage ; — ou pour Winidothal, Wendenthal, vallée des Wendes).

Dans les noms anglais on trouve la forme dale (vallon, vallée) et l’anglo-sax. dell : Arundell (vallée de l’Arun, ville située sur l’Arun), Colebrookdale (vallée du ruisseau froid; angl. cool, sax. col = kühl, frais ; cfr. angl. cold = kalt, froid ; brook, ruisseau), Crickdale (= Crick ou creek valley : creek, petite baie, anse, crique), etc.

Les noms dans lesquels dal est préfixe dérivent du celtique dol (champ) : Dalkeith (la vallée bornée, emprisonnée [celt. caeth] par les eaux), Dalziel (la vallée blanche [gheal] ; à cause de la couleur blanchâtre du sol), etc.

Grund, fond ; fondement, base ; emplacement, terrain ; terrain bas, ravin, vallée, gouffre : Ce nom signifie une vallée, une contrée située dans un bas-fonds, dans une gorge ou près d’un ravin : Freiegrund (frei, libre, dégagé, exempt), dans le Westerwald ; — Herrengrund (vallée du Seigneur : Herr, seigneur, maître), Hörnissgrunde (les fonds des frelons : Hornisse, frelon ; ainsi nommé à cause de ses tentacules que l’on a comparées à des cornes : Horn)[35], Riesengrund (des géants : Riese) Tiefengrund (tief, profond), Teufelsgrund (v. du Diable : Teufel, diable, démon), vallée du Riesenberg.

Boden, fond, fondement ; sol, fonds ; terroir ; plancher, parquet ; enfonçure ; le fond ; le bas ; dépression, profondeur, cavité, fossé[36]. Boden a eu le sens de marécage (eine wasserhaltende Vertiefung) et a signifié ensuite plaine couverte d’herbe (eine grasbewachsene Fläche). Puis, Boden a signifié un terrain situé dans une vallée[37], un fonds, un bien-fonds (= Grundstück, Gut). D’après Schmeller ce mot a le sens de planities horizontalis alpina. Il est quelquefois synonyme de Ebene ou de Hochebene. Boden a enfin signifié un enfoncement de la mer, un golfe (Kyrialabotn = Finnischer Busen). Ce radical se retrouve dans les noms de contrées qui paraissent avoir été jadis couverts de lacs : la Bottnie (et non pas Bothnie), pays qui aurait été un ancien fond marin : de bottn, nom que l’on donne à des parties ou districts de la Suède et de la Finlande :

Bodenbach (affl. de la Kocher ; affl. du Neckar), Bodenmäder (Matte = Wiese, prairie, pacage), Bodenburg (le château du bas-fond), Bodendick (= Sumpfdeich, digue [Deich] auprès d’un marais : Sumpf), Bodenhausen, etc. ;

Adelboden (vallée de l’Adelgras ; espèce de plante alpestre : plantago alpina), Urnerboden ; Im Boden (= im Grunde : im = in dem, dans le…), en Suisse.

Les Allemands ont transformé un ancien nom celtique en Bodensee, mot qui offre le sens de « lac du fond, » (lac profond). Mais ce lac doit son nom à une localité appelée Bodoma, Potama, Bodmen, auj. Bodman. Les premières formes procurèrent au lac le nom de lacus Bodamicus ou Potamicus (qu’on pourrait rattacher au grec ποταμός, rivière) et qui offrent le v. gallois bodi, auj. boddi (enfoncer ou s’enfoncer dans l’eau) par lequel nous arriverions à un mot celtique synonyme de l’allemand Boden[38]. En somme, le Bodensee devrait son nom à sa profondeur (durch seine grundlose Tiefe ; — im Gedanken an die gleichsam bodenlose Tiefe des Wassers). Le château Bodman ou Podman aurait dû son nom à sa situation dans le fond (von einem schon vorher bestandenen Hofe auf dem Boden). Mais on n’explique pas ainsi le suffixe man. Or, il ne faut pas oublier que le celtique se parlait, encore au xe siècle, sur les bords du lac de Constance. Le nom de Bodman pourrait signifier en celtique [irland.] maison [both] du lac [main, marais] : En gallois bod signifie « existence, station, demeure. »

Hohl, creux, bas ; Höhle, cavité, caverne, grotte (cfr. grec κοῖλος) ; le verbe hehlen, cacher, dissimuler (lat. celare), Hehl, dissimulation, déguisement ; Hülle, enveloppe ; hüllen, couvrir, envelopper, voiler ; Hölle, enfer, Unterwelt, le monde souterrain, l’empire des morts : Hohlfeld (champ creux, bas ; champ de la caverne), Holach (ruisseau creux) ; Holbach (Moselle ; id.), Holbeck (id.), Houlebec (basse-rivière), Holberg (montagne du creux, de la caverne), Holland (= Tief-land, terre basse, pays bas)[39], etc. Les noms de la Houille (petite rivière qui se jette dans la Meuse à Givet) et de la Hulle, un de ses affluents, offrent peut-être la même idée que le nom de la Creuse.

Brunshole (specus fontis : Brunn). Au mot Höhle (cavité) se rattache le subst. Hölle (enfer, séjour des damnés). Dans certains noms hole, Höhle, cachent l’adjectif hell (clair, retentissant, lumineux) :

Houlgate (trou de l’enfer ; — Gat, ouverture, trou ; passage ; voy. Gasse), dans le Calvados[40].

Helle-Straete (rue de l’enfer ; en holl. hel, enfer ; hell, clair, sonore), Hellegate (porte de l’enfer), Helmont (bouche de l’enfer : Mund, bouche), Helvoet (pied de l’enfer : voet = Fuss, pied).

On trouve dans quelques noms de lieux hül pour Hülle (enveloppe, sac, poche ; manteau, robe ; cfr. Hülse, enveloppe, gousse, coque : hüllen, envelopper, couvrir, voiler) et qui avait sans doute la signification de couvert, abri, toit. Dans le Palatinat : Breitenhül (breit, large), Irlhül (bavarois hül = Hülle ; Irl = Erle, aune ; dans le même dialecte, irl signifie aussi pacage, Viehweide, et hül = marais), Kefenhül (du vieux chefa, en suisse kefa = die Erbse (= ervum = pisum sativum = pois cultivé, pois ordinaire).

Grube, creux, fosse ; mine ; Graben, fossé, tranchée, canal ; Grub, creux, fosse ; caveau, tombeau, sépulture ; — Gräben, vallées profondes.

Schmalzgrub et Schmalzgraben (désignent des creux, des vallées, des prairies fertiles : Schmalz, graisse fondue ; beurre ; schmelzen, fondre, faire fondre), fermes du canton de Zurich ; — Pfalgraben ou Pfahlgraben (fossé palissadé, ein verpallisadierter Wall : Pfahl, lat. palus, pieu ; ce mot a pris les formes pfal, pal, poll et pol).

Fleth (die), canal, en bas sax. (fleten = fliessen, couler, fluer ; lat. fluere). Dans le pays de Hambourg, ce mot est synonyme de Gräben : Bevenfleth, Buzfleth, Elsfleth, Ivenfleth, Morfleth, etc.

Kessel, chaudron, marmite, bassin ; gouffre ; vallée encaissée : Kesselbach, Kesselberg, Kesselkopf.

Schlucht (ravin), le col de la Schlucht, en Alsace.

Loch, trou, ouverture, cavité ; fosse ; Leck, fente, ouverture ; Lücke, ouverture (cfr. grec λάκκος, lat. lacus, lacuna ; franç. lac ; Lache, trouée, clairière, haie ; mare, bourbier, lagune) ; löcheln, creuser, percer.

Quelques montagnes offrent aux curieux des cavernes et des grottes remarquables. Ainsi, dans le Würtemberg, on trouve le Nebelloch (trou du brouillard : Nebel, brouillard ; cfr. lat. nebula, grec νεφέλη, nuage ; — caverne sous un rocher d’où s’échappent souvent d’épais brouillards) et l’Erdloch (Erde, terre). À Winckel, près du Joannisberg, on rencontre un village appelé Heidenloch (le trou-des-païens : der Heide, le païen ; — die Heide, bruyère ; lande couverte de bruyère ; jadis champ, plaine) :

Bingerloch (trou de Bingen) que l’on croyait communiquer avec un gouffre ou tournant nommé Gewirr (confusion, désordre ; entortillement, entrecroisement : wirren, confondre, méler ; brouiller)[41] ; Drachenloch (trou du dragon ; — creux de rocher, où, d’après la légende, Strouthan [le coq du combat ou du bois : Hahn, coq ; v. hanan, crier, chanter ; Strauss, jad. combat ; streiten, combattre ; — Strauss, autruche, lat. struthio ; — m. h. all. struot, strût = Gebüsch, Wald] de Winckelried [F., p. 152] tua un dragon, Drache ; — dans le voisinage, on trouve Drachenried et Drachencapelle), Haigerloch (trou de la pie : der Häher, Häger, Hieger, Heyer, pie ; geai : en v. h. all. heigiro, l’alcyon, heigero, heiger, ital. aghirone, provenç. aigron ; franç. hairon, héron), Schafloch (trou des moutons ; Schaf, mouton, brebis ; — caverne de glace, près du Rothhorn, dans les Alpes, où, en été, les bergers réunissent les troupeaux, pendant le mauvais temps) ; l’Urnerloch (le trou du pays d’Urner ou Urseren ; passage ou galerie sombre, creusée dans le roc, qui traverse le Teufelsberg [mont du diable] et conduit dans la vallée d’Urseren et au village d’Andermatt), das Wetterloch (le trou des tempêtes : das Wetter, temps, mauvais temps, tempête), Wiesloch (Wiese, prairie), etc.

Le mot Loch (creux), a pris en anglais la forme low (adj. bas, inférieur, au point de vue de la situation, comme un terrain bas, la marée basse), en flamand la forme loo qui est répandue à profusion sur le sol de la Néerlande. Un grand nombre de lieux, en Belgique et en Hollande, portent des noms qui proviennent de cette origine topographique.

Waterloo (le creux-humide ; water = Wasser eau ; — le bassin où fut écrasée en 1815 l’armée française, paraît avoir été un étang ou un endroit marécageux) ; Beverloo (de bever = rivière ; P., p. 277), Venloo (creux tourbeux : ven, tourbe), Tongerloo (de Tongres).

Dans la Westphalie, cette terminaison prend les formes loe, loh (en v. h. all. loh signifiait aussi pays marécageux) : Ammeloe, Burloe, Einigerloh, Gütersloh ; — Ramesloh ou Ramsahl (qu’on interprête vulgairement par Arminii Saal, la salle [jad. habitation, demeure] d’Arminius ; — non loin d’Harmensdorf ; on prétend qu’Arminius est enterré non loin de là près du village nommé Steinbeck), etc. ; Lohboden, terrain marécageux.

Loch et loh sont apparentés avec l’all. moderne Lache, marais, bourbier : Lachen (à cause de ses marais), en Bavière ; Lacken (Suisse et Bavière), Laeken (petit lac), en Belgique ; Lekem (demeure humide ; lecken, suinter, dégoutter, couler ; Heim ; village de la Flandre occidentale).

Quelquefois, au lieu de loh, on trouve lohn, qui offre une forme plurielle ou un datif : Iserlohn (v. h. all. is = Eis, glace ; voy. le celt. isar), Stadtlohn, Südlohn.

Dans quelques parties de la Prusse, cette finale est exprimée par le mot losen, qui doit être rapporté au wende luz (marais), car, sur les bords de la Sprée et de la Neisse habitaient jadis les Slaves Lusaces (Lusitzen) : Kumlosen (près de Wittenberg), Gross und Klein Schwarzlosen (près de Stendal), Moorlosen (Moor, marais), Hundlosen (près de Brême), localités situées dans des bas-fonds marécageux.

Le mot Loch est quelquefois employé, dans les noms propres, pour le v. h. all. lôh, bois (lucus). Voyez plus loin. Dans le choix de l’un ou de l’autre de ces mots, on doit se décider d’après les circonstances, c’est-à-dire d’après la nature et la situation des lieux, et d’après les renseignements de l’histoire.


§ iii.

NOMS TIRÉS DES MOTS QUI DÉSIGNENT LA TERRE COMME SURFACE

PLANE OU QUI INDIQUENT LA SITUATION D’UN LIEU

DANS UNE PLAINE (auf einer Ebene)
.

La notion de plaine est exprimée par le mot :

Ebene, plaine, plate campagne ; eben, plat, aplani, plain ; égal, uni (cfr. lat. æquor [plaine, pays plat] et æquus [plat, uni ; égalisé, aplani ; fig. égal, pareil ; juste, équitable ; holl. heffen, even, égal, uni) : Ebenau (Au, prairie), Ebenheim (habitation en plaine, ou d’un individu nommé Ebo ou Ebbo, P., p. 72 : Heim), Ebensee (est-ce un lac de la plaine, un lac uni [eben] ? Ce n’est pas sans doute un lac qui a un reflux [Ebbe] ; n’est-ce pas plutôt le celtique eve [eau] ou avon dont les Tudesques ont fait le mot eben auquel ils ont ajouté le subst. See, lac)[42] ; Ebnet (jad. Ebenoet, possession plate, en plaine ; comme Einoet [de ein, un ; et oet = Öd ou Oed, subst. inusité qui signifiait propriété,P., p. 46] = Einöde (solitaria possessio), solitude, désert [od a été confondu avec Öde [vide, creux], désert ; cf. Kleinod [petit bien], objet précieux, bijou), Hoheneben (= Hochebene, plaine élevée ; plateau).

Le mot bill entre aussi dans l’onomatologie tudesque avec le sens de « plaine. » Ce mot inusité aujourd’hui signifiait égal, uniforme, plain, plat, qui a la surface égale et unie. On retrouve ce radical dans le substantif Bild (qui aurait voulu dire d’abord chose égale, semblable, puis représentation d’un objet, image, statue) et dans l’adjectif billig (équitable, juste, raisonnable). Ainsi bill et billig offriraient une signification analogue à celle que nous donne le mot latin æquus (cfr. in-iquus, inégal, raboteux ; non équitable, inique, injuste) et ont eu le sens d’égal, uni, réglé, ajusté. De la même racine proviennent le mot anglais bill (= loi, droit ; cf. lat. rectus, droit, qui est en droite ligne ; juste) et les mots Unbill, Unbild (iniquité, injustice) et Weichbild (littér. image sainte : geweihtes Bild ; — ou un droit de la ville [= Stadtrecht] de weich = vick [vicus], droit municipal ; juridiction d’une ville ; bailliage ; banlieue).

Ce mot se retrouve fréquemment dans les noms de lieux, avec le sens de plaine. Ainsi, Bilderlach (= ebenes Feld) ; Bildechingen (Echingen de la plaine), Bielefeld, Billigheim (v. du Palatinat située au milieu d’une vaste plaine ; — ville du duché de Bade). Plusieurs villages des bords du Rhin se nomment Billig. Dans la région de la Moselle, on trouve trois villages du même nom spécifiés par des mots déjà connus : Welschbillig (Welsch et Wälsch, gaulois ; français ; étranger), Waldbillig, dans une plaine boisée (Wald), Wasserbillig (= plaine de l’eau), ville située au confluent de la Sure et de la Moselle.

En Autriche, trois Grätz sont différenciés de cette manière : Grätz, Windischgrätz (des Vindes) et Billichgrätz (de la plaine).

Le plus haut sommet du Vogelberg dans le pays de Darmstadt, se nomme Bilstein, ce qui n’offre pas un contre sens, car ce rocher est aplati et forme un plateau. Il y a beaucoup de localités nommées Bilstein, qui ont aussi été bâties sur des hauteurs dont le sommet était aplani.

Biel, auprès du Bielersée, en Suisse, est dans une plaine. On trouve aussi Billeben, Billendorf, Billenhagen, Billenhausen, Billenkamp, Billigshausen (à la maison de Billig, P., p. 517), Billigsbalden (p. 53), et plusieurs Billerbeck (ruisseau de la plaine). Mais le nom de Billwärder, près de Hambourg, ne se rattache pas à la même étymologie. Bille est ici nom du ruisseau[43].

Flacht, Flaach ont le même sens que die Fläсhe (surface plate ou plane : grande étendue unie, plaine ; angl. flat, plat, uni ; flach, plat, uni ; blach, en compos. plat ; Blech, métal battu et réduit en plaques ; πλάξ, plaque ; plaine, champ). Ce mot a désigné, d’abord une étendue sablonneuse (Sandfläche) qui était encore un peu couverte par l’eau (cfr. franç. flaque) : Flaach, Oberflacht, Westerflach, Flachstöckheim.

Flur (plaine, campagne ; champs ; territoire ; vestibule) : Honfleur.

La notion de plaine est aussi exprimée par des mots qui indiquaient d’abord un lieu cultivé : Land, Feld, etc.). Les colons primitifs s’établissaient dans des plaines, dans des vallées où se trouvait un sol facile à déchirer avec la bêche ou avec la charrue, ou près de pâturages qui ne demandaient aucun travail. Les noms de ces champs et de ces prairies ont pris ensuite le sens de « plaine. »

Land, terre (portion solide du globe, opposée à Wasser [eau]) ; terrain uni, plaine, pays (plat ; opposé à Höhe, das platte Land, im Gegensatze des Gebirges) ; partie déterminée de la terre (ein Stück Feld) ; terre cultivée, champ (opposé à un unbebauten Boden), ensemble de terre, campagne, champ ; villages, province (opposé à Stadt) :

Landen (comme Felden, au dat. plur., ou pour Landheim), Landenberg, Landau, Landeck, Landhus (Haus), Landsberg, Landshut, Landser (l’ornement du pays : Zier, Zierde, ornement ; — bg. du H.-R., non loin d’un fossé qui se nomme Kuttelrausgraben [fossé-du-ruisseau -des-tripes : Graben, fossé ; raus = ruisseau en celt. ; Kutteln, tripes) ; — en Belgique : Landeghem (demeure champêtre), Landscauter (jad. Landescultura = culture champêtre), etc. ;

Aland (pays de l’eau : aha), îles à l’entrée du golfe de Bottnie ; Bonlanden (bon pour Baum, arbre ; ou pour Bohne, haricot ; fève) ; Courlande (pays des Courons, Curonia ; non pas « terre choisie » [küren, ol. choisir, élire], mais de kur qui, dans la langue lettonienne signifie maritime ; cfr. v. prussien cauras, plaine), Dachslanden (Dachs, blaireau), Ermeland (voy. Wermeland) ; Esthland (Estonia, Ostland ; — Aestü ; Ost, est, orient), Finlande (le pays des Finn que Tacite nomme Fenni et Ptolémée Phinni ; island. et anglo-sax. fen ; holl. veen, flam. venne, marécage, pays marécageux ; tourbière ; la côte orientale et le centre de la Finlande sont entrecoupés de lacs, de marais et de rivières ; les naturels se nomment eux-mêmes Suomelaïne ou « habitants des marais » (de suo = Sumpf, marais ; et ma « contrée ; » voy. l’App. sur les Celtes)[44] ; Friedland (Friede, paix, tranquillité ; cfr. P., p. 208, not. 2 ; — dans le Mecklembourg, en Lusace, en Moravie, en Bohême, en Prusse, etc.), Frieslande (pays des Frisii ou Frisons[45] ; on a vu dans ce nom le bas all. fresen, trembler [cfr. le franç. frisson ; frieren, frissonner, trembler de froid] et il ferait allusion à la nature du sol qui est marécageux, peu solide, instable), Gottland (Gotland, Gothland = bonne terre, gut ; terre de Dieu, Gott ; pays des Goths ; — ou du celt. coet, bois, pays boisé ; voy. sur les Goths l’Appendice relatif aux Celtes), Groenland (all. Grünland, grünes Land, terre verte : grün, dan. grôn, angl. green, vert ; — ainsi nommée à cause de la « verdure » des pâturages et des arbres qu’on y trouva lorsqu’on la découvrit (quod gramen ibi reperiatur) ou de la mousse qu’on voyait sur le rivage)[46] ;

Halland (= Salzland = Meerland : salt [= Salz, sel], désigne la mer ; en Scandinavie, la mer Baltique est nommée Ostarsal [= Ostsee, mer de l’Est], Helgoland ou Heligoland (que l’on a regardé comme synonyme de Heiligesland, terre sainte ; pour expliquer ce nom Adam de Brême ayant recours au mot heilig [saint], dit : Pagani terram illam vocant sanctam et beatam ; d’autres expliquent le nom d’Hâlogaland, par « pays d’Halogi ou de la flamme élevée, sacrée » : Halogi = Hochlohe [haute flamme], peut-être l’aurore boréale, Nordlicht ; Halogi était, dans la mythologie scandinave, l’épouse de Glödh [= Glut ou Gluth, braise, chaleur ; de glühen, luire, briller, flamboyer] ; dans la même mythologie, Logi [isl. log = Lohe, feu] est la personnification du feu [die Naturkraft des Feuers]. On a dit aussi que le nom d’Helgoland provenait de Hallaglun [terre aux bancs inondés], ancien nom de l’île, qui a trait à la partie inondée qui a disparu ; il paraît que des phénomènes volcaniques ont contribué à la destruction de l’ancienne île d’Hallaglun), Helluland (= Steinland ou Felsenland ; en anc. norr., hella, goth. hallus, pierre), Hirschlanden (v. h. all. hiruz, auj. Hirsch, cerf ; hiruz signifiait aussi millet, die Frucht Hirse), Hollande (= pays bas, creux, cava terra : hohl, creux, excavé, déprimé ; cfr. κοῖλος, creux, cave ; ou pour Olland, pays marécageux ?), jad. Holtlandia (pays de bois, pays boisé : holt, = Holz, bois)[47], Irlande (pays d’Erin ou pays de l’île de l’Ouest : en gaél. eir, ouest, et in, île ; ce pays était naguère nommé par les Anglais, Ierland), Islande (= Eisland = terre de la glace : Eis, glace)[48], Jutland (pour Jötunland, pays des Jotes ou des géants, P., p. 49 ; voy. Append. N), Livland (Livonie : esthonien liva, sable), Lappland (contrée des Lapps ou de gens attachés à la pratique de la sorcellerie ; dans leur langue, lapp signifie sorcier), Néerlande (= Niederland pays bas : nieder, holl. neder et neer, bas, inférieur), Oberland, le Berner Oberland (le haut pays bernois), Oppenland (oben, en haut, dessus), Rutland (= Rottland, ausgerodetes Feld : Reut), Seeland (= Sœland, pays de mer : See ; cfr. Sœkonungar, rois de la mer), Shetland (nom qui était aussi écrit Hetland, Hialtland, Yealtland, Zethland ; le nom primitif a dû être Hiet-land ; on disait jad. S’Hit-land ; — de höjland ou höietland = pays élevé), Smaland ( = Schmalland, mot traduit par Kleinland [petit pays] : angl. small, petit, menu, mince ; l’all. schmal signifie, étroit, mince, maigre, pauvre, chétif), Sunderland (sonder, ol, séparé ; angl. to sunder, partager, diviser ; séparer), Uechtland (= ödes Land, pays désert ; voy. plus loin), dans les environs de Fribourg, en Suisse ; Upland (pays élevé : über, sur ; oben, en haut ; ober, supérieur ; angl. up, en haut, sur), Vieland (pays marécageux ; de ? vie, marais ; — Vieh, bête, bétail), Vich, ville située entre la Weser, la Rohre et le Geest (Geestland, partie élevée et sablonneuse : wüst, anglo-sax. veste, inculte ; Wüste, désert ; steppe ; savane ; cfr. lat. vastus ; franç. gâter) ; dans les vieilles chartes ce pays est appelé Paludes ; le terroir est généralement bas et humide (Marschland) ;

Voigtland (en Misnie, où il y a un Voigtsburg : de Vogt, défenseur, avocat, avoué ; lat. vocatus pour advocatus), Wermeland, Ermeland, Warmie (pour Wærimmanaland, c.-à-d. pays protégé, défendu : goth. vara, protéger ; cfr. wehren, défendre ; résister ; Wehr, défense, retranchement, P., p. 40), province de Pologne, auj. de Prusse, archidiocèse catholique, que les évêques ont eu souvent à défendre contre les attaques des barbares et des civilisés[49] ; Zealand (qu’on a dérivé du dan. , mer ; mais ce nom est une altération de Sjœlland, de Sjœl : Seele, angl. soul, âme, esprit) ; Zélande (= Seeland, pays qui doit son nom à sa situation sur les bords de la mer : See, mer), Zinsländer (= Agri decumates : Zins, cens, impôt, tribut ; lat. census).

En Angleterre (England, Land der Angeln, pays des Angles), on trouve aussi des noms de lieux formés du substantif Land : Cleveland (= cliff Lane, pays rempli de cliffs et de rochers escarpés (cfr. lat. clivus ; voy. p. 51), Cumberland (anglo -sax. Cumbraland ; terre des Kymri, Cumbri, Kymbri, qui se maintinrent longtemps dans ce pays, lorsque le reste était conquis ; ou « pays de vallées » : angl. comb, vallée : languedoc. coumbo) ; Copeland (terre des mines de cuivre : copper = Kupfer, cuivre ; ou pour Copfland, à cause des sommets pointus [cop, sommet, cime ; cfr. Kopf] que l’on y trouve), Foreland (promontoire : fore, antérieur, de devant ; vor, avant), Marshland (palustris regio : angl. marsh, marais ; Marsch, pays marécageux ; cfr. fr. marais), Newfoundland (= land newly found : new = neu, nouveau ; found, part. passé de to find, trouver, découvrir ; finden, trouver)[50], Northumberland (Land North of the Humber, pays [situé au] nord de l’Humber), Portland (terre du port ; — du port ou lieu de débarquement qui est défendu par une forteresse), île de la Grande-Bretagne ; Westmoreland (The West moor land, the moor land to the West, contrée marécageuse de l’Ouest : moor, Moor, marais ; west = West, ouest). En Écosse, on trouve les Highlands (hautes terres : angl. high, haut) et les Lowlands (low, bas, petit).

Le mot lande est employé en France. Dans les environs de Paris, on trouve Vauhallan (vallis Herrlandi ou vallée de la terre du Seigneur : Herr ; ou du guerrier, ari ; Heer, armée, P., p. 29), vg. fondé par Childebert. On a dit que le mot Languedoc provenait de Landgothie, et il est vrai qu’on aurait pu désigner cette contrée par l’expression de Land [der] Gothen ou Land ď Gothen (contrée des Goths). Mais le nom de Languedoc indique la langue d’oc, le pays où le mot oc était employé pour « oui. » Dans quelques localités de cette contrée, oc est encore aujourd’hui usité dans ce sens. Cfr. auch, aussi, vraiment.


§ iv.

NOMS RELATIFS À DIVERS AUTRES ACCIDENTS DU SOL

Les mots qui expriment les idées d’angle, de coin, de courbure entrent aussi dans la formation de noms géographiques qui ont trait à la configuration du sol.

Winkel (angle ; coin ; encoignure ; lat. angulus) : Winckel (vg. du H.-R., près de la source de l’Ill), Winckelshausen (vg. du H.-R.), Kra ou Kräwinkel (Krähe, corneille), Mahlwinkel, etc.[51]. — Winkel a aussi le sens de ravine, fondrière : Börenwinkel (de bör, corrupt. de Bär, ours ; ou de bord pour Bord, bordure ; lisière) ; Harsewinkel (Harz, montagne boisée ; — résine ; — harsch, rude, rugueux, dur), Meiswinkel (Meise, mésange), Voswinkel (holl. vos = Fuchs, renard) ; — En Angleterre : Winchelsea (jad. Winceles-ea ; de l’anglo-sax. Wincel angle, coin ; et de ea = eau ; ou plutôt de ea = île : cette ville était naguère baignée par les eaux de la Manche au sud et, à l’est et au nord, par la Rother ; ensevelie dans la mer ; une autre ville de ce nom a été rebâtie plus loin).

Hoek (angle, coin, corne, en holl.) a remplacé, dans quelques noms anciens, le mot Winkel : Houcke (v. de Belgique).

Kiel (bas all. pour Keil, coin ; chose qui ressemble à un coin) : Kiel, ville du Holstein (= Holzland), ainsi appelée parce que le golfe sur lequel elle est située a la forme d’un coin keilförmig[52]. (Kiel = Kegel, cône ; quille). Toutefois cette ville est située près de l’endroit où le canal de Kiel débouche dans la Baltique et peut-être son nom vient-il de Kiel (corps allongé et creux, tuyau, plume) et aurait-il trait au canal ; cfr. Kehle, creux, enfoncement, gosier, rigole ; sillon ; en scandin. Kuhle, fosse)[53].

Kante, angle, corne ; arête, bord (celt. cant, bord ; languedocien cantou, coin). Ce mot se retrouve dans le nom du comté de Kent, Cantium, et dans celui des Cantabres ou Cantibériens.

Angel [jad. angle], hameçon ; gond ; pivot : Angles (habitants d’un angle, entre deux fleuves, etc., Einwohner eines Winkels) ; Feldengel (coin du champ), Waldengel (coin du bois), Kirchengel (Kirche), Westerengel (West, ouest), dont les noms indiquent la situation.

Nase (nez) employé comme suffixe avec le sens de Spitze (p. 47), et qui en scandinave désigne un promontoire (näs, cap) : Lindesnäs ; — à Hamburg on dit Blankenese pour Blankhorn ; — en anglais ness (Fowlness, cap des oiseaux, promontory frequented by fowl : — fowl, oiseau ; cfr. Vogel ; — ou à cause du mauvais temps, pour Foul — weather — cape ; — angl. foul, sale, vilain ; = faul ; et weather = Wetter, mauvais temps, tempête) ; — franç. nez (le cap Grinez).

Bogen, courbe (ligne), courbure ; arc (celt. bou ; angl. bow[54] ; Ellenbogen et Ellbogen [littér. arc de l’avant-bras], coude ; Elle [primit. avant-bras], aune, mesure)[55] :

Ellbogen (coude), ville située près d’une courbure de l’Eger ; Katzenellenbogen (pourrait signifier : le Coude-du-Chat[56] ; mais ce nom est formé par corruption du nom de Cattimelibocia [Novum Cattorum Melibocorum Oppidum], donné à cette contrée à cause de Catti Meliboci ou des Cattes qui étaient fixés au pied du Melibocus) ; — Langenbogen (lang, long).

Krumm, courbe ; courbé ; tordu, tortu ; tortueux, sinueux (celt. crwmm, courbe ; crwnn, rond [lat. corona, couronne] ; crynder, rotondité) : Krumbach (rivière tortueuse), Krumhübel (montagne courbe : Hübel = Hügel, hauteur, élévation), Krummendorf (Dorf, village), Krummensee (See, lac), Krummenteich (Teich, étang), Krumme Wasser (rivière).

Korb, corbeille, panier (lat. corbis, v. h. all. chorp, languedocien gorp ; dan. kurv ; ces mots se rattachent au mot corb, courbe ; lat. curvus ; les corbeilles devaient leur nom à l’osier recourbé ; en irlandais, corb signifie chariot, voiture, et l’on sait très bien que les chariots des anciens affectaient la forme ronde : cfr. les mots languedociens curbel (crible) et curbelet (espèce de gaufre), qui se distinguent par cette même forme : Corbie (l’abbaye de Corbie [en all. Corbey], sur la Weser, devait son nom à l’abbaye de Corbie, en Picardie ; — Korb (en Wurtemberg et en Franconie), Korbeck (au bord de la Dyle ; — au bord de la Loo ; ach devenu eck, cours d’eau), en Belgique.

Weichen, s’affaisser, fléchir, reculer, céder ; plier ; weich, flexible, ductile, souple (cfr. lat. vinc-io, vi-men) ; Wickel, peloton, rouleau, wickeln, rouler, enrouler ; entourer ; weihen, consacrer, vouer, dévouer, dédier [propr. lier à…] ; angl. wicker, d’osier, fait d’osier.

De ce radical, on a formé un substantif vic, vich, vig, vik, wig qui a eu la double signification de clôture formée de branches flexibles ; et de baie, crique, terrain courbé qui servait de lieu de refuge, de retraite, d’abri.

1o Vicus [en latin], bourg, village, hameau, grec οἶκος, habitation ; anglo-sax. weihs et wîc ; v. h. all. wîch, wih ; angl. wic ; armor. gwîc[57], lieu, endroit, place ; habitation, ville ; forteresse, château ; monastère. Ces mots indiquaient primitivement des cabanes construites en treillis ou la courbe formée de branches entrelacées qui servaient d’enceinte[58].

2o Wic, wich, wig, indiquent la courbure d’une rivière ou de la côte de la mer, une baie, Bucht (biegen, plier, courber), Busen (dan. vig, baie ; gué ; viig et suéd. vik, crique, petite baie ; endroit où la côte fléchit, cède), une sinuosité, un petit golfe : la mer, échancrant de ses flots les falaises, creuse mille ports naturels où les barques peuvent s’abriter en sécurité.

Le sens de vicus se trouve dans Berwick (Anglet.). Mais le sens de « baie » est exprimé dans les noms de Netherwich (angl. nether = nieder, inférieur), Northwich (north = Nord), Middlewich (angl. middle, milieu ; Mittel, qui est au milieu, moyen), Nantwich (celt. nant, vallée)[59] ;

Brunswick (all. Braunschweig = Brunonis vicus)[60], Sleswick (le bourg de la Sle, all. Schleswig)[61], Dantzig (pour Danswig = le port des Danois)[62], Leipzig (le vicus des tilleuls) ; Viborg (le bourg du vic ou du golfe) a le sens de Wigton.

En Angleterre : Berwick (le bourg de l’embouchure : ber pour le celtique aber, embouchure d’une rivière, confluent), Greenwich (baie verte, ville verte, à cause de la verdure, des prairies : green = grün, vert), Harwich (port, baie, habitation des guerriers, de l’armée : Heer, armée ; hari, guerrier ; v. P., p. 29 et suiv.), Norwich (au nord), Sandwich (baie, localité sablonneuse : Sand, sable), Warwick (jad. Waering-wic : de l’anglo-sax. vaering, boulevard, forteresse ; ou hameau des guerriers : wer, homme ; cfr. angl. werewolf = loup-garou = homme-loup ; — d’après Cambden du gallois guarth, sauvegarde, garnison ; et wic), Woolwich (jadis, dans le Domesday, Hulviz = la crique ou l’habitation de la colline ; à cause du Schooter’s Hill qui domine la contrée : hul = hill, colline) ; — Wicklow (en Irlande : du dan. vig, suéd. vik, crique, baie ; ou de l’anglosax. wic, habitation, forteresse ; angl. low, colline ; ou de l’irland. lough, bras de mer) ; — Wickham (habitation sur la Wick, rivière dont le nom est probablement une forme du gallois bychan, petit).

Quelquefois wic est une transformation de wih (sacré, lieu sacré ; temple ; weihen, vouer, consacrer, dédier ; cfr. lat. vincio, je lie, j’attache). Les formes wegge, weg, wigge, peuvent, dans quelques noms, se rattacher à vik (v. saxon, marais, lieu marécageux) ; v. frison veg, vei (= Woge, flot, vague) ; eau ; ou à Weg (via, chemin).

Ende, bout, extrémité : Ostende (extrémité orientale), Land’s end (= finis terræ).


ARTICLE II


NOMS TOPOGRAPHIQUES EMPRUNTÉS À LA CONSTITUTION
GÉOLOGIQUE, AUX PROPRIÉTÉS MINÉRALOGIQUES
ET À L’ÉTAT DU SOL.

La nature du sol a contribué à enrichir la nomenclature géographique. On rencontre en effet un terrain pierreux (steinig) ou sablonneux (sandig), etc., sec (trocken) ou humide (nass) ; fertile (fruchtbar) ou stérile (unfruchtbar), etc. Ce sont là des propriétés qui caractérisent un terrain aux yeux d’un colon. C’est pourquoi on trouve, en Allemagne, diverses localités désignées par les mots Stein, Sand ; nass, feucht, dürr ; gut (bon, c.-à-d. fertile), quad (= schlecht, mauvais, c’est-à-dire stérile), etc.

Stein, pierre, roche (angl. stone ; flam. steen ; grec στῖον, στία, petite pierre, caillou). Dans les noms de lieux, ce mot a souvent la signification de forteresse et de montagne pierreuse ou d’édifice en pierre ; nous en avons déjà parlé pag. 54. Mais dans beaucoup de localités, ce nom désigne la nature du sol : Stein (Bade, Bavière, etc.), Steinau ; Steinen (Westphalie) ; et les composés : Steinach (rivière pierreuse : von ihrem felsigen und steinigen Bett) ; Steinbach (id. riv. au lit pierreux ; vg. du H.-R. ; — Moselle, Vosges), Steinberg (montagne rocheuse), Steinbourg (vg. du B.-R.), Steinbrunn-le-Bas et Steinbrunn-le-Haut (deux villages du H.-R.), Steinfeld (champ rocailleux), Steinfurth (gué pierreux : Furt, gué, passage), Steingrub (H.-R. ; — Grube, excavation ; creux ; fosse), Steinhart (bois pierreux), Steinheim, Steinmatt (Matte, provinc. enfoncement, creux ; — prairie ; — vg. du H.-R.).

Steenbecque (ruisseau pierreux ; — Nord), Steenkerque (église des rochers ; — Hainaut belge), Steenvoorde (gué pierreux), Steenweg (Weg, voie, route ; — Brabant), Stinzel (Meurthe ; — nom formé de Steinsale = sale ou maison de pierre ; — ou pour Steinzelle : Zelle, lat. cella, cellule), Steinselt (H.-R. ; Zelt, tente ; voûte, dôme).

Stein est aussi employé comme suffixe dans un grand nombre de noms géographiques : Altenstein (alt, vieux). Baerenstein ou Bernstein (Bär, ours ; voy. App. E), Bartenstein, en Prusse[63], Beilstein (Beil, hache, cognée ; — voy. p. 72, 73) ; Binzenstein (Binse, m. h. all. pinz, jonc : cfr. binden, lier ; lat. juncus et jungere), Blasenstein (? rocher en forme de vessie : Blase, vessie ; — rocher venteux : blasen, souffler [se dit du vent] ; sonner), Blauenstein (à la pierre bleue : blau, bleu), Dürrenstein (dürr, sec, aride ; stérile), Falkenstein (Falke, faucon), Forchenstein (Forke, fourche), Frankenstein (Rocher des Francs), Fürstenstein (Fürst, prince), Geroldstein (rocher de Gerold ; v. P., p. 36), petite ville sur la rivière de Kyll (p. 81), Greiffenstein (Greif, griffon ; condor), Hauenstein (hauen, hacher ; fendre ; diviser ; trancher), nom de deux défilés du Jura suisse et de diverses localités, Heiligenstein (heilig, saint ; Heil, santé ; salut ; prospérité), Helfenstein (helfen, secourir ; servir, être utile), Hohenstein (p. 23)[64], Hornstein (rocher en forme de corne : Horn), Königstein (Lapis regius, Regis Saxum : König, roi), Kuffstein (Kufe, forme de Kuppe [sommet arrondi, cime] et de Kopf, tête ; sommet [arrondi], cime ; — ville du Tyrol, au pied d’un grand rocher sur lequel est un château qui forme une des meilleures forteresses de la montagne), Lauenstein (jadis Lewenstein), nom de diverses localités (? lau, tiède, tempéré), Lehenstein (v. p. 50), Lichtenstein (v. p. 33), Liebestein (lieb, agréable, aimable ; cfr. lat. lubet, libet ; Liebe, affection, amour), Lobenstein (Lob, louange ; — die Laube, lieu couvert ; galerie ; cabinet de verdure ; der Laub, feuillage ; angl. leaf, suéd. löf ; dan. lov, bas sax. loof, feuille), Lœwenstein (Löwe, lion ; — v. p. 167), Nieder (bas) et Ober (haut, supérieur), Hammerstein (Hammer, marteau ; forge ; — ou plutôt du v. h. all. hamar, pierre, rocher ; — les premiers marteaux étaient des pierres), — châteaux ruinés des bords du Rhin ; — Nierenstein (Nierenstein, pierre néphritique ou néphrite, jade ; Nierenerz, le fer oxidé terreux : Niere, rein), Oberstein (ober, situé plus haut, supérieur), Pleckenstein (Block, bloc ; quartier (de roche, etc.), Rabenstein (roche aux corbeaux : Rabe, corbeau), Ravenstein (id. angl. raven, bas sax. rave, corbeau), Reichenstein (reich, étendu, grand ; puissant ; riche), Rheingrafenstein (rocher du rhingrave ou du comte du Rhin : Graf, préposé ; intendant ; comte), Rosenstein (Rose, rose ; celt. ross, cap, pointe), Scharfenstein (scharf, aigu), Schornstein (tuyau de cheminée ; cheminée ; prim. âtre ; voy. F., p. 125 et 126), Taubenstein (Taube, pigeon), Trauenstein (Treue, fidélité ; loyauté ; trauen, ajouter foi ; se fier à, croire qn. ou qc.) Wallerstein (Waller, pèlerin ; wallen, marcher, aller en pèlerinage), Weissenstein (weiss, blanc), Wildenstein (wild, sauvage, inculte ; stérile ; — H.-R.), Windstein (Wind, vent ; — B.-R.), Wittgenstein (F., p. 156), Wolkenstein (Wolke, nuage), ville dont le château est bâti sur le sommet d’un rocher si élevé qu’il semble qu’on y peut toucher les nuages.

En pays anglais : Stone-hafen (port aux pierres : Hafen, angl. haven, port, havre), Blackstone (angl. black, noir ; voy. P., p. 289), Yellowstone (yellow, jaune).

Au même radical se rattache le nom de Stonehenge (= Steingehänge, chose en pierre qui pend : Gehänge, chose qui pend ; hangen, être suspendu), amas de pierres que la légende suppose avoir été apporté par des géants d’Afrique en Angleterre, et que l’on nomme en gaélique choirgaur (= chorea gigantum).

D’autres noms géographiques tirés des pierres sont formés avec sahs (v. h. all. équivalent du lat. saxum, roc ; caillou). On trouve cette signification dans les noms suivants : Sahsbach (rivière pierreuse), Sahswirfen (auj. Schaswerfen ; werfen, jeter), Sassenhaus (maison en pierre), Sachsenried (au terrain défriché pierreux : Ried, roseau ; terrain marécageux ; terrain défriché), Sachsendorf ; — Eichelsachsen (a peut-être le sens de Eichelstein, balanite, littér. [gland de mer] pétrifié : Eichel, gland ; voy. p. 55).

Sur les bords du Rhin, le mot ley signifie schiste, roche schisteuse ; ardoise : Bäderley (Bad, bain), près d’Ems, Steinley ; — d’après Brandes, Lurley signifie lauter Schiefer (schiste relentissant : laut, sonore, bruyant ; en anglais lore, leçon, doctrine ; jad. chant). Cette localité doit son nom à un écho célèbre qui donna lieu à la légende de l’Ondine ou de la . Magicienne de Lurlei (die Sage von der Zauberin Loreley). On en fit un lieu enchanté. Du bateau à vapeur, les loustics (lustig, gai, joyeux) allemands s’amusent à demander à l’écho le nom du bourgmestre d’Oberwesel, et l’écho répond : Esel (âne).

Sand, sable, amas de sable ; sablonneux ; rivage :

Sandau (prairie, plaine sablonneuse), Sandebeck (Bach, rivière), Sandford (angl. ford = Furt, gué, passage), Santwick et Sandwich (v. p. 83) ; — le nom de Sandwich a été donné à une île et à une ville par Cook, en l’honneur de lord Sandwich; — Int-sand, village qu’on croit être l’ancien Sablones des Ménapiens ; — Whitsand (angl. white = weiss, blanc), et l’île d’Ouessant (mot qui paraît signifier sable de l’ouest, mais qui n’est qu’une altération de l’ancien nom Uxantis), — Wissan[65].

Zande (au sable), Zandvoorde (route sablonneuse : holl. voord Furt), villes de Belgique, s’Graavesande (vg. qui fut la résidence des comtes [graaven] de Hollande : le sable ou la grève du comte : holl. graaf = Graf, comte), — Christiansand (— de Christian IV, roi de Danemarck).

Gries, gros sable ; gravier ; semoule, gruau ; ce mot désigne un rivage sablonneux (Flaches, sandiges Ufer) ; — quelquefois Gries indique un chemin au bord de l’eau (cfr. franç. grève, ou un lieu de tournoi (Kampfplatz, die Arena)[66] : Griess (ancienne prévôté de chanoines réguliers où se sont réfugiés les Bénédictins de Muri), Griesbach (en Alsace), Grieshof (Hof, ferme), Grieskirchen (Kirche, église), Griesstein, Griesschlag (Schlag, taillis ; coupe ; lieu défriché par l’abatage des arbres : schlagen, frapper ; abattre), Griesthal (vallée sablonneuse), Grieswang (vang, champ) ; — peut-être aussi Grieth, Griethausen ; — Burggriesbach (rivière sablonneuse du château) ; Sulzgries (d’un ruisseau de ce nom ou d’une source d’eau minérale, près de Canstatt ; le coteau au pied duquel se trouve la source se nomme Sulzerrain : Sulze, saline ; Rain, lisière ; gazon ; pacage).

Quelques-uns de ces noms peuvent peut-être se rattacher à gries (adj.), qui fait frémir ; cfr. Graus (obsol. et poét.); effroi, épouvante ; grausam, jad. effrayant ; auj. qui effraie ; cruel, barbare ; grauen, avoir peur.

Un pays sablonneux est aussi désigné par les mots ör (en suéd. grève, lieu plein de gravier : Elsinore pour Helsing-ör, ville du Danemarck en face de Helsing-borg, en Suède) et Strand (bord de la mer ; rivage ; sable) : le Strand, grande rue de Londres, située sur le terrain qui borde la Tamise.

Scholle (glèbe, motte de terre ; sole ; poisson, lat. solea) : Schollen, Schollendorf, etc.

Muld, la terre grasse qui couvre les autres couches du terrain ; Mull et Müll (goth. mulda, angl. mould, suéd. mull), terre meuble ou légère, poussière ; gravois : balayures ; cfr. mahlen, triturer, moudre)[67] : Gesmold (près de l’Elbe), Versmold (entre Bielefeld et Münster) ; Wittmold (v. h. all. wittu, bois ; — P., p. 226), dans le Holstein. En Normandie, Meulant (pour Meul-land = terre grasse, etc.) ; — Detmold[68] ; cfr. Detfurth, Detwang, etc.

Mold, en Angleterre, n’est qu’une contraction de Mont-hault (= mont-haut, mons altus) ; c’est par ce nom que les Normands remplacèrent celui de Y Wyddrug (le mont remarquable), conservé encore aujourd’hui par les habitants du pays de Galles.

Mulm, poussière (de bois pourri) ; vermoulure, terreau (terre légère mêlée de bois pourri) ; cfr. mahlen, malmen ; — en suéd. malm, sable.

Malmö (île de sable).

Lehm, argile ; terre grasse, terre argileuse ; limon (anglo-sax. lâm, en haut all. lahm, lam, bas sax. leem ; angl. loam ; argile ; lat. limus ; — cfr. Leim, colle ; glu ; et avec un s initial, Schleim, mucus, glaire) : Leimaha (ruisseau limoneux ; — près de Schlettstadt), Laimbach ou Leimbach (id. ; — plusieurs localités), Leimgarten (Garten, clôture ; enclos ; jardin), Leimen (jad. Leimheim), Leimburg, Limburg, Le Lehm, Lehmen, Lehmingen, Lehmke, Lehmwasser, etc.

En celtique (irland.), leamh signifie ormeau.

Märgel (der), terre grasse (du celtique marg, gras ; boue tenace ; v. h. all. mergil, angl. marle ; franç. marle et marne ; bas lat. marila, marla ; la boue des ports s’appelle merl ; ce mot désigne aussi une espèce de gravier marin, et il est en usage, dans quelques parties de la France, pour marne) : Marlière, Marly ; Marlborough (le château situé dans un pays marneux ; — on a dit que ce mot est une corruption de Merlin’s Borough et que Merlin avait une grotte en cet endroit), Marlow (de leag, champ ; ou de hlaw, colline) ; — Aumale, jad. Alba-marla (marne blanche ou montagne marneuse ; du celt. alp, alb, hauteur), Albemarle-Street (rue d’Albermarle, à Londres).

Quelquefois marl se rattache à mar-l (pour le celt. mawr, grand, ou pour Moor, marais ; mare ; et loh, v. p. 70) : Marl, Marle (= Marloh, Morloh), Marlenheim (jad. Marilegium, Marley), bg. du B.-R..

Kalk, chaux (lat. calx) : Kalkberg, Kalkhorst, Kalkreut.

Salz, sel (grec ἅλς, ἁλός ; lat. sal, salis ; celt. hal ; on trouve en Allemagne deux formes de cette racine : hal et sal). Ce nom désigne des localités situées près de rivières salées (Salzflüsse), près de sources qui contiennent du sel (Salzbrunnen), près de salines ou de sauneries (Salzwerke) et aussi près des entrepôts où l’on vendait du sel. Des montagnes doivent leur nom à ce produit (Salzberg, Obersalzberg, Untersalzberg) et des rivières sont nommées Salza, Salzach et Saale :

Salzbach, Salzburg (le fort ou le château de la Salza ou du sel)[69], Salzkammergut (Kammergut, bien domanial : Kammer, chambre ; cassette ; trésor ; Gut, bien, propriété), Salzbrunn, Salzforst, Salzfurt, Salzgau, Salzkotten (das Koth et die Kohte, cabane, hutte ; et en particulier Salzhütte), Langensalza (lang, long)[70].

La même signification se retrouve dans les noms suivants : Sulz, Sulza, Sulzbach, Sulzberg, Sulzdorf, Soultzbach (petite v. du H.-R., connue par ses eaux minérales), Soultz-les-Bains (bg. du B.-R.), Soultzmatt (Matte, enfoncement, prairie), non loin de sources minérales ; Soultz-sous-Forêts (bg. du B.-R., sur la Saltzbach, et auprès d’une source d’eau salée qui est exploitée, etc., — on dit aussi solt pour Salz : Soltau, Soltholm.

Sohle signifie aussi Salzwasser, eau salée (naturelle ou provenant d’une source) : Sohlenhoffen, — Solingen (?), Solothurn (Soleure) ?

Salz est quelquefois pour le lat. salix (saule).

La forme hal donne les noms suivants[71] : Hall (an der Saale, sur la Saale ; Hala Saxonum, en Saxe) renommée pour ses sources d’eau de sel[72], Halle (dans le Ravensberg), Hall (sur le Kocher, en Souabe, Schwäbisch Hall, Hala Suevorum), Hallein (= das Kleine Hall, an der Salza, avec une saline ou Salzlager), Hall et Hallstadt (en Autriche), Hall (dans le Tyrol), Hallenberg (Westphalie), Allendorf (pour Hallendorf) ; — Friedrichshall, Leopoldshall (avec des mines où, en 1881, un tremblement de terre détacha des masses considérables de sel), Reichenhall (reich, étendu ; riche), en Bavière[73].

La ville de Soden doit aussi son nom au sel : Sod, eau salée ; c’est-à-dire cuite, qui a bouilli ; sieden, bouillonner, bouillir).

Eisen, fer (jad. isarn)[74] :

Eisenach (rivière du fer), Eisenberg (montagne du fer), Eisenfeld (Feld, champ), Eisenbrechtshoffen (à la ferme d’Isambert : P., p. 77), Eisenhart (forêt du fer), Eisenhausen (Haus, maison), Eisenheim (id.), Eisenrode (Reut, défrichement), Eisenstat (Statt, lieu, place), Eisenthür (porte de fer) ; — Iserlohn (p. 70).

Erz, minerai ; airain ; bronze (v. h. all. ar, er ; goth. ais ; lat. æs ; franç. airain) ; ehern, d’airain, de bronze ; dur ; impitoyable :

Erzleben (de leben, habitation ; cfr. leben [exister, rester], dans le sens de bleiben, subsister, demeurer), Erzgebirge (montagnes métalliques), Erzhausen ; — Bleienerze (Bleierz, mine de plomb).

Blei, plomb : Bleistein (= pierre plombière).

Kupfer, cuivre (suéd. Koppar ; lat. cuprum, ces cyprium), Kupferberg (diverses montagnes où l’on trouve du cuivre), Kupferhammer, Kupferzell (Zelle, cellule), vg. sur la Kupfer. Kopersberg (montagne de Suède qui a des mines de cuivre).

Silber, argent : Silberberg, Silberhausen.

Gold, or : Goldau ; Goldberg.

Geld, métal monnayé, monnaie : Geldern (corne de l’argent ; lieu caché où il y a du métal monnayé : Horn).

L’état du sol, au point de vue de la sécheresse ou de l’humidité, de la stérilité ou de la fertilité, suggère la pensée de désigner certains lieux par des noms relatifs à ces particularités.

Le sec est désigné par les mots :

[Trocken, sec, aride] : Trockau (prairie, localité sèche) ; — Trockne Werra (la Werra desséchée) ;

Dürr, dorr, sec ; aride ; stérile ; dorren, sécher, se dessécher ;

Dürrenbach, Dürrenberg, Durrenhayn (Hain, bosquet), Dürrenhard (hart, forêt), Dürrenhoff (ferme aride), Dürrenrot (Reut), Dürwalde (Wald, forêt), Dürrvangen (vang, champ).

L’idée de sécheresse est comprise aussi dans les mots : Sand (sable) (p. 90), et Wüsten (déserts, landes), (p. 78)[75].

L’humidité du sol est désignée par les mots :

Nass, humide, mouillé (cfr. languedoc. nasso, prairie qui repose sur l’eau, qui s’enfonce sous les pieds) : Nassau (prairie, pays humide ; ville située sur une colline entourée d’une campagne marécageuse). Nassenbeuern, Nassenfels, Nassenheide (bruyère humide).

À l’idée d’humidité se rattachent des idées spéciales exprimées par les mots Wiese, Au, etc.

Feucht, humide : Feucht, Feuchting (ing, App. P), Feuchtwang (champ).

Suhl (localité où l’on fabrique de nouveaux revolvers pour la cavalerie allemande) paraît devoir son nom au radical sühlen (patauger ; se vautrer dans la fange ; cfr. franç. souiller, sale) et de die Sule (lieu où l’on patauge, lieu boueux) : Suhla, Suhle (rivière), Suhlingen.

Dans quelques noms, leke indique aussi une habitation ou une localité humide (lecken, suinter, dégoutter ; s’écouler) : Lekem (Heim).

D’autres dénominations indiquent la fertilité, la richesse, l’abondance :

Geile, fertilité exubérante ; fumier, engrais ; geil, exubérant, gras ; lascif : Geilenfelde, Geilenkirchen, Geilingen ; Geilsdorf.

Baar (au comptant) et bar (comptant ; pur, sans mélange) offrent l’idée de production (cfr. gebären, produire ; enfanter ; de l’anc. bären, porter) : Baar, Baaren.

  1. La Hogue (Manche), La Hoguette (Calvados), et les Hogues (Isère) — Hoogstraten (rue, place élevée : Strasse, [via] Strata), près d’Anvers, Hoogeveen (hoog, haut, élevé ; veen, tourbière) ; — en Anglet. Sand-hoe (élévation sablonneuse : Sand), Shaft-hoe (hauteur du creux profond ; shaft, puits, etc.), Icanhoe (Arx Icenorum), etc.
  2. Grai-ocel-i, Gar-ocel-i ; Uxellodunum (forteresse élevée). En Écosse, Ochiltre et Uchiltree, localités dont le nom signifie, habitation élevée (tre, demeure hameau). On trouve aussi dans le comté de Perth les Ochil Hills (montagnes élevées).
  3. Les hommes qui viennent occuper une contrée cherchent d’abord à se garantir contre les attaques des animaux et des envahisseurs. Les montagnes étaient de leur nature plus difficilement accessibles que les vallées et les plaines : on pouvait à peu de frais y construire des retranchements, des lieux de refuge ; une montagne devenait ainsi un poste sûr que les hommes et les fauves ne pouvaient atteindre sans danger. Voilà pourquoi les idées de « montagne » et de « forteresse » ou de « château » ont été souvent unies dans l’esprit des peuples anciens : la montagne était la « Receleuse, » la « Protectrice » (hinter Bergen ist man geborgen vor Feind und Wind) ; — quant au vent, il est sans doute permis de faire des réserves, dans certains cas du moins ; dans d’autres, la montagne peut servir de paravent, et former comme un abri sur son versant.

    D’un autre côté, on pourrait peut-être supposer, avec quelque raison, que l’idée qui s’offrit la première, à la vue d’une chaîne de montagnes, fut celle de la brisure du terrain. Les mots celtiques breg (= Bruch, fracture, cassure, rupture, fente), et brig (montagne) seraient la forme primitive du mot Berg qui se rattacherait, d’ailleurs, à l’all. brechen ( briser, casser, rompre ; Brechung, rupture, brisement). Cfr. franç. brèche ; all. BrescheMauerbruch, Wallbruch rupture du mur, du rempart ; lat. frango, je brise, je casse, je fracasse ; fregi, fractum ; fr. broyer, brayer ; Brack, débris. Mentionnons enfin les anciennes formes de Berg : v. h. all. përac, m. h. all. bërc.

  4. Les hameaux, les bourgs, construits sur une colline, sur une montagne ou à proximité de ces lieux fortifiés, prirent leur nom du mot qui désignait ces élévations du terrain (voy. p. 19, 3e).
  5. Le nom de Babe provient du radical qui a donné l’angl. babe, baby, bambin, petit enfant ; celt. baban, Bube (der), garçon et les noms propres, Bobbo, etc., P., p. 61). Mais d’un autre côté, baver a eu le sens de « couler » (P., p. 276), et il pourrait se faire que baben et baven (Bavoberg) aient indiqué la situation de cette ville sur les deux rives de la Regnitz, qui, en cet endroit, se divise en plusieurs bras. Remarquons enfin que, en irlandais, babhun signifie enclos pour bétail ; ville.
  6. Montagne dont le cône altier couronné de ruines, se dresse isolé dans la plaine près de Bonn. On a dit que ce nom offre une corruption du mot Wodan. Sans doute les mots Gott et Wodan peuvent se rattacher à une même racine. Mais ce rapprochement ne suffit pas pour identifier la mythologie scandinave avec la mythologie germanique (voy. P., p. 312 et suiv.).
  7. C’est d’après la signification de ce mot que Melissus prête ce langage à l’ancienne capitale du Palatinat du Rhin qui fait aujourd’hui partie du grand-duché de Bade :

    Heidelberga vocor myrtilli vescula dona
    Monte sub arboso mi tribuere notam.

    D’autres étymologistes rattachent ce mot à Edelberg (edel, noble, excellent, admirable), ou à Heiden Berg (Mont des bruyères, M. des païens : Heidel pour Heiden comme Fichtelberg pour Fichtenberg : Heide [die], bruyère, landes ; Heide [der], païen, gentil, infidèle) et à Heiterberg (montagne sereine : heiter, serein, clair ; tranquille) ; cfr. Heiterfeld et Heiterhagen. En suisse, l’Heitialp est riche en Heidelbeeren (dialect. : heiti). Toutefois Heidelberg pourrait très bien se rapporter, comme le pense Mone, au gaélique aiteal (= Wachholder).

  8. Cfr. Chaumont, Calmunt, Kaelmont, Colmont, Chalmont, Chamont (de Calvus mons). Quelques localités qui portent ce nom s’appelaient en latin calidus mons (calor, chaleur). Dans certains cas, il faudrait peut-être voir, dans le nom de Chaumont, le mot chaux (qui désigne une forêt, une montagne boisée, dans le Jura), mot qui dérive du celtique [bas breton] caill. (bois ; — comme de val on a fait vaux), qui a donné Chaillac, Chailly, Chaulhac, Chaulieu, noms de localités.
  9. La ville de ce nom était l’ancienne métropole des Norici. Il y avait un Castrum Noricum, en Franconie, et l’empereur Frédéric mentionne ainsi cette localité : In castro nostro Norimbercensi (1187).
  10. La particule prépositive ge correspond au français co-, con-, et au latin cum. Elle exprime une idée d’ensemble (cum, avec), de réunion : Gethier (= l’ensemble des animaux ; Thier, animal, bête, brute), Ge-sang (= l’ensemble des chants ; chant : Sang, chant). Cette particule a servi aussi à renforcer l’idée du participe passé : ge-brochen (rompu, cassé, brisé : = faisant partie des choses brisées ; brechen, rompre, briser).
  11. On a supposé que ces montagnes étaient le séjour d’un esprit nommé Rübenzahl (Queue de raves : Rübe, rave, navet ; Zahl, contract. de Zagel, queue ; angl. tail), c’est-à-dire esprit à grande queue qui se nourrit de raves (??)

    Quelquefois les Riesengebirge, comme les Riesenhügel (Hügel) et les Hünebetten (Bett, lit, couche ; Hüne, géant, colosse ; cfr. celt. cuno, hauteur, haut ; voy. P., p. 123, et p. 124, sur la confusion des Hünen avec les Hunnen ou Huns) désignent un endroit où un géant ou bien une montagne de rochers qui offraient quelque ressemblance avec un géant.

  12. Berg paraît avoir eu les formes de Bracht (comme bert = brecht : Albert et Albrecht ; voy. P., p. 166). Braht, Brait, Brecht, Berch, Bert, Brait, Bret, Breit (qui pourraient aussi se rattacher à peraht, ou Pracht, éclat, et signifierait une hauteur qui est splendide, éclatante, belle à voir ; cfr. la forme celtique, p. 25.

    Dans les vieux documents, on trouve : Plettenbraht, Plettenbracht et Plettenberg, Lintenbrecht et Lindenberg, etc. ; Bracht (montagne du Wittgenstein), Meinekenbracht (Westphalie), Brachthausen ; Brachbach ou Brabach (jad. Braychtbach), dans le Siegerland (im Siegerlande) ; Brachwitz, Brake, Brakel (pour Brakelo = bois de montagne : Loh, bois, hallier).

    Brabant (bant = Land), qui est montagneux surtout le Südbrabant (Ardennes), en comparaison des Pays-Bas (Niederlande).

    En Suède : Brahelund (= bois de montagne) ; en Finlande : Brahestadt (ville de montagne).

    On trouve aussi des formes pert et bert : Valbert, Lüdespert (Westphalie), et des Bertestein ou Bernstein (en Bavière, Autriche et Brandeburg). Quelquefois Breit a le même sens : Breiteneck, Breitenbach, etc. ; Marcktbreit (Bavière). Peut-être aussi y a-t-il confusion avec Brache (jachère), ou avec breit (large).

  13. Der Buckel, convexité, bosse ; die Buckel, petite bosse ; boucle ; bücken (sich), s’incliner, se baisser ; der Bückling, courbette, révérence (ne pas confondre avec Bückling, hareng-saur ; de böckeln, puer, sentir le bouc) ; Bauch, ventre, abdomen ; voussure, proéminence ; sein ; fond ; — der Bug, courbure, pli ; endroit où une partie du corps se plie ; jarret ; poitrail, épaule [de mouton, etc.) ; ventre d’une chose ; l’avant ou la proue d’un vaisseau ; der Bügel [der kleine Bug] ; pièce de bois ou de métal courbée en arc ; étrier ; anse ; der Bogen (jad. bogo, pogo, poko ; angl. bow, irland. bog), arc ; courbure ; biegen, courber, plier ; fléchir ; beugen, plier, incurver ; incliner ; Beuge, courbure, inflexion ; pli, creux ; Bucht, petit golfe, baie (sinuosité formée par le rivage de la mer) ; — die Bocke, Pocke, pustule [weil es etwas, Rundes, Gebogenes ist.] ; Backe (joue) signifie etwas gebogenes. Le mot anglais back (dos) se rattache aussi à l’idée d’éminence. En suéd. et en dan. bakke (montagne, éminence) se rattache aussi à biegen, beugen : Paradis Bakke (montagne du Paradis), non loin de Christiania.
  14. Le nom de Bulow, écrit sans h et avec la terminaison wende ow ne se rattache pas à ce radical. C’est un nom wende composé, comme Bilowes, Bilowitz, Bylowitz, du polonais bialy (blanc) et wies (village).
  15. Dans les noms anglais hope signifie une vallée en pente entre deux montagnes ; vallée et montagne : Stanhope (anglo-sax. stan, angl. stone = Stein, pierre).
  16. Non loin de là est le fameux Exterenstein (ou Egersterstein = Rupes Picarum : suisse agerste, ägerste, jadis et encore auj. dans quelques localités, Aglaster = Aelster, et Elster, pie), rocher qui s’étend en avant dans la plaine et dont le nom a donné lieu à beaucoup de conjectures.
  17. Les Scheeren (Finlande) sont un vaste archipel rocheux formé de milliers d’îlots couverts de verdure. Le navire glisse à travers les écueils et à chaque instant il semble prêt à se briser sur la falaise (Fels, roc, brisant, récif).
  18. Le latin ora (margo, angulus) semble se rapprocher de l’angl. ore (petit pays, canton, contrée). En danois öre (cap sablonneux) : Windsor (cap du tournant ou du vent : angl. wind (= Wind, vent ; — to wind, tourner, virer ; winden, tordre, rouler en spirale).
  19. Ruines des bords du Rhin. Les légendes allemandes supposent que Roland ne mourut pas à Roncevaux et qu’il termina ses jours dans un ermitage au sommet du rocher qui depuis porta son nom. Il s’agit là sans doute d’un autre Roland. Du sommet de ce rocher, l’œil se repose agréablement sur l’île de Nonnenwerth (Nonne, religieuse) ou Rolandswerder.
  20. On a pu croire que ce nom était analogue aux noms de Ziegenrück (Ziege, chèvre), Pokkesrukke (Bock, bouc), Geizrukke (Geiss, chèvre). Près de Trente se trouve une montagne appelée jadis Dorsum Tridentinum (dos de Trente) et sur laquelle on voyait une forteresse nommée Verruca (verrue ; butte, tertre). On a donné le nom de Dos d’âne à la pointe la plus haute du Scheideck, dans le canton de Berne, parce qu’elle présente la forme de cet animal.
  21. D’autres pensent que cette ville doit son nom aux trois feuilles de trèfle (Kleeblätter : Klee, trèfle) qu’elle porte dans ses armes. Mais la première étymologie est plus sérieuse. Clèves est partagé en ville haute et ville basse (Ober- et Unterstadt). La ville haute (Oberstadt, hoch oben auf dem Rheinkliff) est bâtie sur trois collines. Cette situation donne beaucoup de pente à ses rues. Sur la hauteur dite Schlossberg (Montagne du château, du fort : Schloss) est le château nommé Schwanenburg (château du Cygne : Schwan), qui doit son nom à la tour sur la flèche de laquelle on a fiché une girouette qui représente un cygne. Les noms de Schwanenburg et de Schwanenthurm (Thurm, tour) rappelleraient, dit-on, les Chevaliers du Cygne (Schwanenritter) et le voyage de Lohengrin (P., p. 99) et de son épouse sur un vaisseau conduit par un cygne.

    La partie basse (die Unterstadt) de Clèves n’est plus située près du Rhin qui s’est retiré, mais sur un canal navigable lequel se rend dans ce fleuve.

    On a dit que Klippe a dû signifier primitivement « rocher fendu » et on l’a rattaché à klieben (fendre) et à klippen (fendre, fractionner, couper). Cfr. celt. clip, fragment de rocher ; en languedocien, clap (pierre), claparedo (pierraie) : Kloppenheim, Kloppenburg.

  22. Ce nom n’a pas trait à la résine (Harz ; propr. suc durci : hart, dur, résistant) que produisaient les arbres des forêts, ni au grand nombre de cerfs (angl. hart = Hirsch, cerf). Hart et Hard sont plutôt des formes du celtique ard, haut, hauteur. Voy. l’Appendice — Forêts de la Celtique.
  23. Hold, houd (sax. hold), jadis tenure, terre tenue en fief, métairie, ferme ; — terminaison fréquente dans l’ancien royaume de Bourgogne. — Kœnigshould (= tenure du roi), en Silésie.
  24. En v. h. all. leit (suéd. led, anglo-sax. lâd, holl. ley, franç. lée) = Weg (chemin ; leiten, conduire ; Leiter, échelle).
  25. Cette forteresse, très renommée, tant par sa situation qui est au haut d’un rocher, que par un grand nombre d’ouvrages qu’on y a fait, a été aussi appelée jadis Ehrenberti Saxum et ce nom a pu aussi très facilement se changer en Ehrenbreitstein. On trouve Ehrenberger Klause (lieu clos, fermé ; plus part. cellule [de moine], ermitage ; bas lat. clausa, clusa ; lat. claudere, clore, fermer ; claustrum), dans le Tyrol.

    D’un autre côté, en v. h. all. arin, erin signifiait aræ, templa ; et en anglo-sax. ārn et ern ont le sens de « maison. » Voy. Horn.

  26. Eichelstein devrait son nom à la forme (von der Gestalt) qu’elle affecte. Cette forteresse a été aussi appelée Eigelstein, et l’on a traduit ce nom par Adlerstein (montagne de l’aigle : aquila = Adler), en accompagnant cette étymologie d’une légende. Les Romains y avaient bâti le Castrum Drusi et peut-être ils confondirent à dessein les mots celtiques [gallois] uchel (élevé ; cfr. Uxellodunum) ou achel (cachette, lieu de refuge) avec le nom latin de l’aigle. Ces deux mots gallois offrent entre eux le rapport que nous avons signalé entre Berg et Burg.
  27. Montagne escarpée au pied de laquelle il y a une caverne appelée Dombruch (la brèche du dôme : Dom, Bruch), qui, d’après la légende, était jadis habitée par un dragon (Drache) ou monstre auquel on rendait les honneurs divins.
  28. En roman et en v. franç. jougo, jouc, Joux signifient sommet de montagne. Ce mot provient du celtique (breton) yau, hauteur. Les Romains ont confondu ce nom avec celui de Yu ou Jov-is (Jupiter) ; ils en ont fait de nombreux Mons Jovis, et l’on a cru que cette dénomination provenait de quelque temple de Jupiter. Dans les Alpes françaises et dans le Jura, on trouve plusieurs Mont-Joux. Le nom de Canigou est formé du celt. can (blanc) et du breton joug (la partie supérieure du dos).

    Rind n’a pas dans les noms de lieu le sens de bœuf [Rind] et, il ne se rattache pas à Rinde [écorce]. Ce mot désigne un rivage élevé, un avancement du sol et une colline en forme de poitrine (ein brustförmiger Hügel : — Brust, poitrine ; mamelle, sein), un mamelon formé de sable de rivière, un banc de sable en mer (cfr. die Rundung, forme ronde ou arrondie) ; sens analogue à celui de Bergrücken et de dorsum. Le mot Dossen s’emploie aussi pour signifier montagne et il dérive du lat. dorsum. En Suisse, schrof signifie une cime rocheuse [Felskopf] ; cfr. schroff, rude, raboteux ; escarpé, abrupte.

    Hals, cou, col. En scandinave, halsa, colline : Hals (vg. de la côte orientale du Jutland ; — village en Bohême).

  29. En gaél. et en erse sgeir, rocher escarpé ; irland. sceir (prononc. sker), rocher de mer. Ce radical se trouve dans les noms de localités : Skerry, Skerries. Dans les noms de lieux du nord de l’Angleterre, il prend les formes scar, scarr, skarr, skire (rocher escarpé, pente dénudée d’une montagne) : anglo-sax. carr (rocher ; cfr. celtique carn, monceau de pierres) : Scarborough (château-rocher, forteresse sur un roc ; rocher fortifié : Burg).
  30. Un petit Thor se nomme Thierl et Thörl. La ville de Thorn (anc. Thoren, polon. Torun) située sur la Vistule, doit son nom, à ce qu’il paraît, aux chevaliers de l’ordre teutonique (sic) qui s’ouvrirent en cet endroit la porte (Thor) ou l’entrée du pays des Prussiens. C’est dans cette ville polonaise que naquit Kopernik. La maison qu’il a habitée porte l’inscription suivante : Nicolaus Copernicus Thorunensis, terræ motor, solis cælique stator.
  31. Le mot Pforte (porte ; ouverture, passage ; cfr. lat. porta) n’a pas toujours un sens géographique : il offre un sens métaphorique ou religieux : Himmelpforten (Porta cæli : Himmel, ciel), village du duché de Brême où il y avait jadis un couvent de Bénédictins ; Schul-Pforte (Porte de l’École : Schule, école ; lat. schola). Voy. Appendice M.
  32. Cfr. taufen (baptiser) qui se rattache au goth. daupjan (enfoncer, plonger ; angl. to dip, plonger, entrer dans ; to dive, plonger, sonder, approfondir) et qui nous offre l’idée de l’ancien usage du baptême par immersion. Le mot tief (profond) a-t-il eu d’abord le sens de « submergé ? » Cet adjectif pourrait avoir signifié une chose « enfoncée, » un « enfoncement. »
  33. La Dalecarlie tire son nom des Dalekarla, Dalekarliens ou « gens des vallées. » Ce pays est en effet remarquable par la quantité de vallées qu’on y rencontre. Cette contrée comprend deux grandes vallées (Vesterdal [ouest] et Osterdal [est], et leurs nombreuses ramifications). Les habitants de ces vallées (Karl, Kerl ; voy. P., p. 129) sont robustes et forts. Ils se nomment eux-mêmes Dahlkull (du suéd. kull, race ; sanscr. kula, famille ; race, tribu).
  34. Cette idole représentait un jeune homme laid et gros qui semblait vomir des flammes. C’est pour cela qu’on nomme Gros Puster (souffleur), un homme gros et gras.
  35. Ce sont des ravins formés par les sommets les plus élevés de la Forêt-Noire (Bade). C’est au milieu de ces effrayants précipices que se trouve le lac Mummelsee que la légende populaire peuple d’ondines et de sylphes appelés Mümmelchen (petits Mummels).
  36. Cfr. suéd. botn (le fond, le bas ; terroir), anglo-sax. botm et bytne, angl. bottom, le fond, le bas, le bout, la fin ; sanscr. budma = Boden = Grund ; grec πυθμήν (le fond), βυθμός = βυθός (fond, profondeur ; abîme), ἄϐυσσος (sans fond), πύνδαξ (le fond), βάθος (profondeur) ; — lat. fundus, pro-fund-us ; puteus.
  37. Bödeler et Bödler désignent un individu qui habite dans une vallée, par opposition à Berger qui habite auf dem Berge.
  38. Cfr. le nom du Bodincus, dans la langue des Celtes, signifiait « sans fond. » Ce nom paraît avoir la même racine que Boden. Bodincus signifiait profond ; où l’on enfonce. Le suffixe incos se retrouve dans des noms gaulois, par exemple, dans Agedincum, ancien nom de la ville de Sens.
  39. Quelquefois holl est pour le vieux norois hôll (= Hügel, colline : Holle [Suède] et Oldenburg), Hollenbach (Würtemberg), Hollenstedt (Hanovre), Hollfeld (Bavière), Holler (Nassau), Hollerland (Brême).
  40. On prétend que les parents montrent à leurs enfants cette colline de sable en leur disant : « Vous voyez là-haut, enfants ! Eh bien, c’est le trou de l’enfer. » Mais en bas breton, houl signifie « flot » (cfr. franç. houle).

    Le mot anglais gate signifie porte (entrée d’une ville) et quelquefois route. Un chemin et une porte offrent l’idée de passage en longueur ou à travers. Dans l’Inde, les ghats ou ghauts sont des passages qui longent des rivières ou des passages à travers des rangées de collines : Ramghaut = le passage de Rama. En Angleterre : Newgate (new = neu, nouveau), Bishopsgate (bishop = Bischof = évêque), Canongate (= la porte des chanoines [canons] ou moines de l’abbaye d’Holyrood), Ramsgate (ram, = Ramm, bélier) ; — Highgate (haut chemin).

  41. Plus loin, on voit un second tournant ou gouffre qui a un aspect, effrayant et que l’on nomme die Bank (léger exhaussement du terrain, petite élévation ; banc ; siège long, banquette, banc ; pont), parce que, en cet endroit, le fleuve est obstrué par un amas de rochers.
  42. Ebenfurt ne signifie peut-être pas « gué (Furt) de la plaine, » mais « passage de l’eau. »
  43. Dans quelques-uns de ces noms, bil se rattache au celtique [gaél.] bial (eau). Ce mot celtique se retrouve dans le nom de Biel que les Allemands donnent à la ville de Bienne (celt. buinne, eau), et qui est située près du lac du même nom. Bilstein ou Beilstein offrent aussi un radical celtique (byl, qui désignerait un amas de rochers ; de bal, bel, pierre). Cfr. gaél. beul, génit. bail, bouche ; ouverture : dans quelques localités, le mot bil peut avoir désigné un antre, une caverne.
  44. Sans doute le mot Finnland peut signifier Sumpfland. D’un autre côté, il est vrai que les Finnois actuels sont d’origine tschude. Mais il n’en est pas moins certain que ce pays a été, comme la Scandinavie, habité primitivement par des Celtes. C’est le pays des Fenii ou Feine (singul. fionn, guerrier, géant ; cfr. le nom des Fénians). L’Irlande est appelée Tuatha Feni : Les Celtes ont dû quitter les bords de la Baltique. Mais le nom qu’ils avaient donné à la contrée a été maintenu.
  45. Mais il est probable que les Frisons portaient leur nom avant leur arrivée dans un terrain mouvant. L’orthographe Frigiones a donné lieu à l’étymologie qui a en vue le froid (lat. frigus) de leur pays d’origine. D’autres savants ont rapproché ce nom de celui des Phrygiens. Il offre, d’ailleurs, le même radical que le nom des Fr-anci (= freie Encke, libres garçons ; cfr. Enkel, petit-fils ; — ou plutôt fils de Freya ou du Soleil). Enfin, la Frieslande serait le pays des forts, des géants (virorum fortium regio ; — fries est fortis ; v. h. all. vriso, géant).
  46. Il est vrai que Nordenskiold (F., p. 44) n’a pas trouvé dans l’intérieur de cette contrée les oasis de verdure que les géographes y supposaient. Mais en 1884, le lieutenant Greely, de la marine des États-Unis, a fait connaître le résultat de ses explorations. Il s’est élevé, par le nord du Groenland, jusque vers le 84° de latitude, à six degrés seulement du pôle, et il a pu vérifier de visu la théorie qui place dans ces latitudes extrêmes une zone relativement tempérée. Il a traversé à pied, au mois d’août 1882 ou 1883, une contrée ondulée où il n’y avait pas un atome de neige et où la terre était couverte d’herbe et même de petits buissons. Des troncs, gisant là où ils étaient tombés, témoignaient de la présence encore récente d’une végétation arborescente. Les renards, les ours blancs et le lièvre polaire, ainsi que plusieurs oiseaux, fréquentent ces parages, mais non le renne. Wayprecht et Payer avaient donc entrepris trop au Sud leurs tentatives inutiles pour pénétrer dans l’intérieur du Groenland et découvrir ces plaines verdoyantes signalées par les traditions des Esquimaux.
  47. Lorsque les digues ne retenaient pas les eaux de la mer, celle-ci entrait dans des criques profondes et inondait chaque jour les terres basses. L’étymologie que certains auteurs ont tirée du mot Holzland ou Houtland (pays de forêts) n’est peut-être pas sans fondement, car une partie de cette contrée était couverte de bois, tandis que l’autre était remplie de lacs et de marais.

    Alting pense que la Hollande doit son nom à sa position sur le golfe de la Helle ou Holle, connu dans le temps sous le nom de Helium. Not. German. infer. in lit. H.

  48. Cette île fut découverte par un pirate qui la nomma Snjoland (= Schneeland, pays de neige), parce qu’elle était couverte de neige. Floke, navigateur qui en prit une connaissance plus détaillée, la nomma Island, parce que, durant ses longs hivers, elle est cernée en partie par les glaces que les courants accumulent sur ses bords.
  49. On désigne sous le nom d’Ermeland une portion de l’ancienne Prusse que la Passarge coupe en deux moitiés à peu près égales, et qui a pour villes principales, Braunsberg (montagne de Bruno), autrefois résidence des évêques, et Frauenburg (forteresse de [Notre] Dame), leur résidence actuelle, ville où Copernic était chanoine. Les évêques d’Ermeland ont toujours à défendre ce pays. Aujourd’hui, Mgr Krementz, « le petit Ermlandais, » joue un rôle aussi difficile en tenant tête au Grand Chancelier.
  50. Ce pays paraît avoir été connu jadis par des Islandais et par des Groenlandais. Plus tard, il fut découvert par Jean Cabot, alors au service de l’Angleterre, et le pays newly found a été réclamé, pour ce motif, comme une dépendance de l’Angleterre.
  51. Dans quelques mots Winkel ne vient pas de Winkel (angle), mais de Vinicella ( = Weinlager, dépôt de vins ; chantier de cuve).
  52. Dans ses Encomia Urbium Holsatiæ, Rantzau s’exprime ainsi :

    Chilonum, Holsatiæ non infima gloria terræ,
    A Cuneo nomen, quo vocitatur, habet.

  53. Dans les noms celtiques, kil, kill (gallois coïlle) signifient « forêt. » Ainsi, en Irlande : Kildare (le bois des chênes), Killinure (le bois des ifs : irl. jur, if), etc.
  54. Ainsi Bou, village du Loiret où Gauthier, évêque d’Orléans, tint un synode en 847, tire son nom de sa situation dans une courbure prononcée de la Loire.

    La plupart des lieux qui ont cette syllabe dans leur nom, sont placés dans des courbures de fleuves, de mers ou de collines.

  55. Il reste à expliquer le mot ellen qui se trouve dans le composé allemand Ellenbogen (coude ; articulation du bras avant l’avant-bras ; angle extérieur formé par cette articulation ; arc du coude). Elle (jadis elina ; lat. ulna, grec ὠλένη, l’humérus, le bras ; aune, mesure) se rattache au mot elin qui, d’après Cambden, signifiait « coude » en langue celtique.

    Ainsi Lens (jadis Vicus Helena, Lenense Castrum, Lenæ Castrum), célèbre par la défaite de Clodion qui y fut battu par Aétius.

    L’Orne, rivière de Normandie, est appelée Olena dans Ptolémée ; elle était ainsi nommée parce qu’elle est courbe et tortueuse.

    Le même radical se retrouve dans le nom d’Elno, rivière près de laquelle fut bâtie l’abbaye de Saint-Amand (en Belgique), qui s’appelait aussi Elnone (eau-courbe : on, eau, en celtique), autrefois, et dans le nom d’Elne, ville de France dans les Pyrénées Orientales. Il suit de là que le mot Ellenbogen est un pléonasme qui signifie coude-coude.

  56. Cette ville est construite au haut d’une montagne nommée die Katz (le chat). Non loin de là, est le château délabré de Thurnberg (Mont de la tour), que les comtes de Katzenellenbogen, par opposition à leur château de Katz, appelaient die Mause (la Souris).
  57. Le celtique a les formes vîx, vîces, vici (kymrique guîc, guîg, irl. fich = vicus, village) : Eburo-vices (cfr. Eboracum), Ordo-vices, Cambo-vicenses (cfr. Cambo-dunum), Branno-vices, Lato-vici, Lemo-vices ; — Viridovix.
  58. Cfr. Flecken (bourg, bourgade) et flechten (tresser) ; grec πλέκω (je tresse, j’entrelace) ; lat. flectere, plectere ; plicare. La clôture d’une maison ou d’un groupe de maisons était faite avec des objets flexibles entrelacés.
  59. Ces localités, ces baies étaient renommées pour la production du sel que l’on obtenait par l’évaporation de l’eau de la mer ; et par suite, les lieux où l’on fait du sel ont été nommées, en anglais, Wychhouse (wyche ou wich, saline, mine de sel).
  60. Brunswic ou Braunschweig (en all.) ne signifie pas « ferme d’une source » (Brunn, source ; Schweig, ferme où l’on élève des bestiaux), ni « bourg de la source » (fontis recessus). Ce nom signifie Brunonis vicus (jad. Brunes-wic) ou Bourg de Bruno. Cette ville dut une partie de son nom à celui de son fondateur Bruno Ier, duc de Saxe, au xe siècle.
  61. La ville de Sleswig (jad. Sliaswyk), capitale d’un duché, doit son nom à la Wiecke (golfe) de la Schley, à l’extrémité occidentale duquel elle est bâtie. La rivière Schlei (vieux norrain sle = canal) donne son nom au golfe étroit et long dans lequel elle débouche. En irlandais, slighe (prononc. sli) et la forme slee signifient route, passage. Sleswig, en celtique, signifierait « habitation, anse du chemin. »
  62. On a rattaché à wic le nom de Danzig qui serait une contraction de Danske-wick (Bourg des Danois). Selon d’autres étymologistes, ce nom serait dû à une forme Godanske, qui aurait eu le sens de Ville-de-Dieu (Gott) ou de Gothiscanzia (= Gothenschanze, forteresse des Goths : Schanze, retranchement, redoute). Mais il est plus probable que Danzig est une corruption du slave Gdansk, provenant d’une racine que nous a conservé le latin Gedanum et dont nous ne saurions indiquer l’étymologie.
  63. Ce nom ne se rattache ni à Bart (barbe), ni à Barte (arme tranchante) ; il dérive de Bartelstein qui fut le nom primitif de cette localité. Cette ville a dû son nom à l’évêque Barthélemy qui convertit les Prussiens à la foi chrétienne. La statue en pierre de ce prélat a été placée au milieu du marché de cette ville. Il y a un autre Bartenstein en Würtemberg.
  64. Le Holstein ne doit pas son nom aux pierres (a ligno et lapidibus). Il dérive de Holsten = Holseten = Holsaten = accolæ sylvæ (Holz) ; ou de hol = hohl, creux, excavé, déprimé ; bas. Dans ce cas ce nom signifierait habitants des vallées ou des plaines (Niedere Sassen).
  65. Un cicerone donnant du nom de Wissan (sable blanc) une étymologie sans doute populaire, disait que ce port était autrefois si grand qu’on y vit appareiller une fois huit cents navires et que de là lui venait le nom de huit cents ou Wissan. Il est vrai que César s’embarqua dans le port Itius ou Iccius, emmenant avec lui une flotte nombreuse. Le nom de Wissan vient, comme disent les vieux chroniqueurs, ab albedine arenæ, ou ex albentis sabuli interpretatione, c’est-à-dire de la blancheur des masses de sable qui ont fini par obstruer et enterrer ce port. Non loin de là sont deux pointes nommées Gris-Nez et Blanc-Nez (v. p. 81).
  66. En celto-breton grôa et krôa, grève ; groan, gravier, gros sable ; cfr. franç. grave, gravier, gravelle, pierre de grès ; et les mots allemands Grus (gravier), Grütze, gruau ; ital. crusca.
  67. Maulwurf (taupe) ne vient pas de Maul (gueule, bouche), mais du v. h. all. multwurf = Erdwerfer (jeteur de terre : Erde, terre ; Wurf, jet ; werfen, jeter ; lancer). En plattdeutsch, on a encore plus altéré ce mot : on en a fait Mullworm (Wurm, ver) et on a mis ainsi cette bête au rang des vers.
  68. Toutefois, dans le nom de Detmold (jad. Thiatmalli, Theotmalli), la syllabe mold a un autre origine. Elle provient de mall (mot celt. ; all. Mahl, jad. assemblée ; lieu d’assemblée ; tribunal) que l’on a confondu avec mold. Le préfixe Det est pour thiot tribu ; peuple (voy. P., p. 64). On dit, en bas all., Detlef pour Volkslieb (aimé du peuple). On peut aussi rattacher ce préfixe au celtique [irland.] tuath, district ; pays. Ainsi Thiatmalli peut signifier lieu « d’assemblée de la tribu » (Volksmahl) ou lieu de « l’assemblée du pays. » — Non loin de Detmold, les Francs battirent les Saxons qui formaient l’avant-garde des nouveaux envahisseurs de l’Occident (783). Là est le Winnfeld (Gewinn, gain ; v. h. all. winne, guerre, victoire ; voy. P., p. 222).

    On croit que cette localité est l’ancien Teutoburg, où Varus essuya sa trop fameuse défaite. La montagne qui avoisine cette ville porte encore le nom de Teutoberg (ce qui ne nous paraît pas constituer une preuve).

    C’est à Detmold, dans la principauté de la Lippe, qu’a eu lieu naguère l’inauguration du monument d’Arminius, au jour anniversaire de la bataille de Rezonville ou de Mars-la-Tour, date qui, évidemment, n’avait pas été choisie sans dessein.

  69. Salzburg (en Autriche) s’appelait jadis Juvavum. Bergmann dérive ce nom du celtique juf, juv ; rhéto-romain giuf = jugum, all. Joch, sommet, éminence, hauteur, chaîne de montagne ; — au même radical se rattachent les noms suivants : Jaufen, Jaufenberg, Jaufenthal, Juval, dans le Tyrol, Jufen, Jufing, etc.). Le second composant de Juv-av-um est évidemment ahva, ava, aha (eau). Ainsi, l’ancien nom de Salzbourg indiquait une localité située sur une « hauteur baignée par l’eau, » Dans les Tables de Peutinger, la Salzach est nommée Jvaro, c’est-à-dire « eau (ar, aar) de montagne. »
  70. Localité où, en 1866, s’immortalisa George v, roi de Hanovre. Il pouvait sauver sa couronne en acceptant le protectorat prussien. Mais il n’hésita pas une minute, et, sans espoir de succès, décidé seulement à affirmer le droit et à honorer la chute de son trône, il alla, avec sa brave petite armée, chercher la mort, qu’il ne trouva cependant pas.
  71. Les Allemands ont sans raison redoublé la lettre l, et ils ont ainsi donné au thème primitif la forme Hall. Il ne faut pas confondre ce mot avec Halle (espace couvert ; salle ; cfr. lat. aula), ni avec Saal (jad. habitation ; auj. salle), et il ne faudrait pas supposer que le nom du sel provient du nom de la maison qui servait d’entrepôt pour cette denrée.
  72. Janson dit à propos de cette localité : etymologia græca vel cimbrica derivatione a salis proventu nominata… et in Armenia Halis fluvius græca voce salsus, ut Straboni placet.

    Les rapports des langues indo-européennes sont connus. Mais l’on s’est demandé si la forme Hall des noms géographiques de l’Allemagne n’attestait pas une origine celtique. Mone voit dans le mot hal, qui désigne des salines, en gallois, une preuve de l’ancienne habitation de l’Allemagne par les Belges (thèse qui n’offre d’ailleurs aucun doute) et de la ressemblance du gallois et du belge (thèse également certaine, car les anciens Belges étaient des Celtes venus de la Germanie à une époque où cette contrée était entièrement celtique).

    Les Allemands conviennent que le nom de Hall est d’origine celtique. Mais M. d’Arbois de Jubainville dit que cette doctrine, admise par MM. Hehn, Mehlis, etc., « n’a pas de base, puisque le changement d’s en h, est, à très peu d’exceptions près, un phénomène néo-celtique, spécial au rameau breton, et postérieur à la chute de l’empire romain, » et il ajoute : « Nous n’avons aucune preuve que ce phénomène phonétique s’accomplit chez les Celtes de la Germanie… Il n’est donc pas prouvé que les Celtes aient créé des salines dans la vallée du Rhin. » (Rev. celtique, t. III, p. 347.)

    Mais il est reconnu que hal n’appartient à aucun dialecte tudesque ; et l’on sait, d’ailleurs, que la plupart des villes qui portent le nom de Hall sont en pays qui est resté celtique jusqu’en plein moyen-âge. D’un autre côté, il n’est pas nécessaire de supposer que les Celtes de la Germanie auraient eu besoin de changer s en h. En grec, le mot ἅλς (sel) n’offre aussi qu’une forte aspiration. Enfin, le rameau armoricain n’est pas le seul qui offre la forme hal, puisqu’on la retrouve aussi dans le rameau gallois. En effet, en gallois hal et hallen signifiait « sel. » Dans cette langue, Tîr hal se traduit par « pays de sel » ou par « marais salant » (salt land or a salt marsh). De hal on a formé halad (imprégné de sel) et plusieurs autres dérivés. Le cornique hal (marais salant) entre dans la composition des noms de lieux, en Cornouailles : Penhale, Penhalow. De plus, le mot bas breton « hal » (sel) a produit les mots halennour, halenner (cornique haloiner), qui se rattachent sans doute à la racine celtique qui a donné les mots hanouar, henouar, hannouart, lesquels, en v. franç., signifiaient, comme leurs équivalents néo-celtiques, « porteur de sel, vendeur de sel. »

  73. On a dit que la Gallicie tirait son nom de Halicz ou Galitch, ville qui était jadis capitale de cette contrée et où l’on trouve des sources salantes.
  74. Isarnodurum, nom de lieu gaulois, nous donne la forme îsarno (de fer). Dans quelques dialectes celtiques, la sifflante s s’est changée en h : gall. haiarn ; armor. houarn ; l’irlandais iarn a perdu la lettre s ; angl. iron (fer) (Voy. App. M).
  75. Le nom de Suckau paraît dériver du mot slave ssuchy (sec), que l’on trouve, avec la lettre z, dans les noms géographiques : Zuchow (ville de la Poméranie), et, avec un s dans Suchow et Suchau (grand-duché de Strelitz).