Fabre dEnvieu - Noms locaux tudesques/Chapitre 2

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E. Thorin ; Édouard Privat (p. 99-128).

CHAPITRE II

DÉNOMINATIONS LOCALES FOURNIES PAR LES NOMS DES EAUX
(Gewässer).


Un grand nombre de localités tirent leur nom des eaux, et ce fait n’offre rien d’étonnant, car les hommes en fixant leur demeure devaient naturellement avoir égard à cet objet de première nécessité. Les premiers habitants de la Germanie établirent les campements primitifs sur les bords des rivières, des lacs et de la mer, auprès d’une source, et beaucoup d’habitations ont dû leur nom à cette constitution physique de la localité ou à cette circonstance particulière, de telle sorte que l’on serait naturellement porté, d’après le nom, à prendre des villages et des villes pour des rivières et des lacs.

Wasser, eau ; eaux (angl. water) : Wasserburg (château de l’eau ; petite ville de Bavière que l’Inn enveloppe de ses replis), Wasserbillig, Wasserfall (chute d’eau : Fall, chute), Wasserleben ; — Waterloo, Waterhorst ; — Altwasser, Neufahrwasser (Fahr = Gefahr, danger, péril ; — Fähre, bac) ; Oudewater (holl. oude = alt, vieux), etc.

Les cours d’eau étaient jadis souvent désignés par le mot ach (goth. ahva, v. h. all. aha, lat. aqua) : Aach (riv., ville), Aachen (Aix-la-Chapelle) ; Ach (riv.), Acha (riv.), Achberg, Achenbach, Achenrain (Rain, lisière ; pacage), Achern, Achim ; — Biberach, Breisach (grand fleuve : celt. breis, grand), Erlach (riv. des aunes)[1], Schwarzach (riv. noire) ; Staubach (chute d’eau ; — dans laquelle l’eau paraît comme changée en poussière : Staub), Schwabach (ville sur la Schwabach : schweben, jad. se remuer, s’agiter ; auj. planer ; flotter ; cfr. schweifen, errer, vaguer), Schwalbach (de ach ou de Bach ; et de Schwalbe, — m. h. all. swal, angl. swallow, hirondelle ; ou de Schwall, gonflement, turgescence ; schwellen, se gonfler), localité surnommée Langen Schwalbach et bien connue pour ses eaux minérales. On y voit des sources appelées Weinbrunnen (sources vineuses), Stahlbrunnen (fontaine ferrugineuse ; Stahl, acier), etc. ;

Aha, Ahadorf, Ahaheim, Ahaloh ; — Aa (jad. Aha).

Quelquefois aha prend la forme au : Altenau, Donau, etc.

Dans beaucoup de noms le suffixe ach disparaît : Lahn (jad. Loganaha), Schwelm (= Schalmaha : Schwalm = Schwalbe, hirondelle), etc.

Bach, ruisseau, petit cours d’eau (fliessendes Wasser)[2] : — Bach, Bache (riv.), Bache-Fliess (Fliess, petit cours d’eau, petit ruisseau), Bachen, Bachheim ; -gau, -haupten (Haupt ; tête), -hausen, -heim, -scheid, -stein, -thal.

Bach entre dans les composés : — avec des noms de minéraux : Griesbach (Gries, gros sable ; gravier), Goldbach (vg. du H.-R., couronné par les ruines du Freundstein ; — tire son nom d’une rivière dont le fond est semé de paillettes de micapulvérulent [en all. Katzengold ou Katzensilber, suivant qu’il est jaune ou blanc] : Gold, or), Kieselbach (Kiesel, caillou), Steinbach (ruisseau pierreux ; — patrie d’Erwin, architecte de la cathédrale de Strasbourg) ; — des noms d’animaux : Auerbach (de l’ure), Eberbach, Ebersbach (Eber, sanglier), Elbach (el serait pour Aal, anguille), Erbach (serait pour Eberbach, et désignerait une rivière wo sich Eber finden) ; Falkensteinerbach (ruisseau du Falkenstein ou du roc du faucon ; — petite rivière de l’Alsace), Fischbach (Fisch, poisson), Hirschbach (Hirsch, cerf), Katzenbach (benannt von der Nachbarschaft der wilden Katze), Rossbach (Ross, coursier", , Röthenbach (ruisseau du roto, poisson pointillé de rouge [roth], que l’on appelle encore röthli, en Suisse), Ulbach (Eule, v. h. all. ûla, hibou ; — peut-être de ohl, ol, lieu marécageux ; — peut-être aussi uhl cache-t-il une forme celtique ul (eau), ôla, uolo [cfr. l’Ollius, auj. Oglio, dans la haute Italie] ; ou peut-être une forme de Aal, anguille) ; — des noms de plantes : Bombach (Baum, arbre), Erlenbach (ruisseau des aunes), Eschbach, Eschenbach (des frênes ou des ombres : Esche, frêne ; — ombre, poisson), Feldbach (ruisseau des champs), Forbach (Fohre, pin ; — truite), Haslenbach (Hasel, noisetier), Tannenbach (Tanne, sapin) ; — des noms de couleurs : Schwarzenbach (schwarz, noir), Wissenbach (blanc ; der weisse Bach) ; — Dunkelbach (dunkel, sombre, obscur), Finsterbach (finster, ténébreux), Trübenbach (trüb, trouble ; sombre) ; — de la profondeur : Diefenbach, Tiefenbach (tief, profond ; Bach in der Tiefe) ; — des noms de personnes : Egelsbach (d’Egil, d’Egilolf, etc.), Gundelsbach (de Gundolf), Heimbach (d’Heimo), Leutenbach (de Liuto), Ottenbach (d’Otta), etc.

Mentionnons encore les noms suivants qui se rattachent à Bach : Ambach (Ort am Bach), Anspach ( peut signifier : près du ruisseau ; mais l’ancien nom était Onolzbach, Onoldinum, à l’embouchure de l’Olze ou Holzbach), Breitenbach (breit, large), Durbach ou Dornbach (non pas qu’il coule à travers des buissons épineux, durch Dorngestrüpp ; — mais du celt. dur, eau), Erbach (jadis Erdtbach [Erde, terre] ; vg. traversé par un ruisseau de ce nom, lequel s’enfonce dans la terre, passe une montagne et reparaît de l’autre côté, près du moulin de Stockheim), Feuerbach (ville et ruisseau qui n’est pas du tout un torrent de feu [Feuer], le nom de cette rivière était jadis Biberbach [Biber, castor] ; de biber on a fait fiber (nom latin du castor) ; fiur et feuer), Freudenbach (Freude, joie ; — mais plutôt une corruption du celt. ffrydan, cours d’eau), Marbach (ruisseau de l’elfe : Mahr = der Alp ; — ou de Mähre, jument ; — cheval ; rosse), Miesbach (bavarois Mies = Moos, mousse), Mühlbach (du moulin), Narrenbach (Narr, fou), Oelbach (= Steinbach : celtique [anc. irland. ail, irl. oil], pierre), Offenbach (découvert, dégarni d’arbres : offen, ouvert ; découvert), Reichenbach (reich, jad. étendu ; abondant), Schönbach (schön, beau)[3], Steinbach (jad. Stagnebachus, pour stagnans rivus), Sulzbach (= Salzbach, ruisseau salin).

Bach devient, en plattd., beck, becke, bicke : — Hellebecq (clair ruisseau : hell, clair ; — sonore), Schierenbeck (de schier, pur, propre ; ou de l’adj. v. h. all. scioro, rapide, impétueux) ; Rebke (hinnulorum amnis : Reh, chevreuil) ; — becque, en Flandre : Bousbecque (ruisseau du hallier : Busch), Steenbecque (ruisseau pierreux), etc. ; — bec, en Normandie : Le Bec (célèbre abbaye qui dut son nom au ruisseau qui arrose la vallée où elle est située), Clarbecq (ruisseau clair), Haulbec (ruisseau creux : hohl, creux) ; Le Bequet (affl. de la Seine). — Beke prend la forme buis (en Belgique) dans les noms à forme romane.

Becke se transforme en ecke, icke, ke, après les lettres m, r, l : Bremecke (Westphalie), Bremcke (près de Coppenbrügge, jadis Bredanbeke = Breitenbach), Delecke (ruisseau de la vallée : en bas all. dal = Thal) et Dalke (id.), etc.

Le même mot prend aussi les formes peke, pke, pe : Lemke (pour Lembeke : ? de Lehm, terre grasse, argileuse, glaise), Leimpe (auj. Leinbach ; le préfixe est sans doute le celtique linn, eau), Obefispe (auj. Oberfischbach), Rospe (auj. Rosbach, dans le Nassau), etc. — Quelquefois b se change en m et on a les formes meke, mike (d’après des lois spéciales de l’idiome westphalien).

Strom, courant ; torrent (angl. stream) : — Strom (riv.), Stromberg, Strömsfeld, Stromsholm (Holm, colline, petite île), Strömstadt, etc ; — le Gulf-Stream (= Golf-Strom = le courant du golfe (du Mexique), où, sous le soleil de l’équateur, les masses d’eau s’échauffent comme dans une vaste chaudière ; — ou plutôt « courant-courant, » courant rapide : du norrain gôlf [goth. galauf], cours, cours de rivière ; allée, couloir ; laufen, courir), Mahlstrom (le courant qui moud, à cause du tourbillonnement des vagues, nach der strömenden, mahlenden Bewegung des Gewässers : mahlen, triturer, écraser), fameux gouffre que les Norwégiens nomment aussi Storm-King (roi des orages : Sturm, orage, gros temps, tourmente), parce qu’il sert de véhicule aux vents tempétueux ; — il était connu des anciens sous le nom de Umbilicus terræ ; — Coldstream (angl. cold = kalt, froid ; — vg. d’Écosse).

Fluss, écoulement, flux ; chose qui coule ; rivière ; Fliess (petit cours d’eau), et les formes fleth, flet, holl. vliet (ruisseau), fleth (canal, à Hambourg), se rattachent à la racine qui a donné fluere, all. fliessen, couler, fluer ; Fluth, flux) : Flissingen ; — Elsfleth.

Noms dont la première partie est un nom propre de rivières. — Les noms propres de rivières entrent souvent dans la composition des noms de localités. Ainsi on trouve, près du Neckar : Neckarau, trois Neckarhausen, Neckargemünd, Neckarsteinach, Neckargerach, Neckarelz, Neckarsulm (à l’embouchure du ruisseau Sulm), Neckarzimmern, etc.

Les villes suivantes empruntent une partie de leur nom aux cours d’eau près desquels elles sont situées : Aarau (capitale du canton d’Aarau ou d’Argovie, — située sur l’Aar), Aarberg (presqu’île que l’Aar entoure de trois côtés), Düsseldorf (sur la Düssel), Goslar (sur la Gose), Henneborn (source de la Henne), Illkirch (vg. du B.-R., situé sur l’Ill), Ilmenau (sur l’Ilm), Limburg (deux localités, l’une sur la Lenne, l’autre sur la Lahn ; ces deux rivières ont la même racine : lina, qui n’indique ni le lin [Lein], ni une ligne [Leine], mais qui représente le celtique lin, linn, lyn, eau profonde ; cfr. Dublin) ; — Lippstadt (Stadt an der Lippe), Rheinstein (rocher du Rhin), Rheinfelden, Rhinau (petite ville du B.-R., située sur le Rhin), Rhynaw ou Rheinaw (lat. Augia Rheni, v. située au bord du Rhin), Rhyneck (ou Rheinegg, ville bâtie à l’endroit où le Rhin se jette dans le lac de Constance), Ruhrort (= Ort an der Ruhr, au confl. de la Ruhr avec le Rhin), Sarralbe (doit son nom à sa situation au confl. de la Sarre et de l’Albe), Sarrebourg (sur la Sarre, départ. de la Meurthe), Saarburg (sur la Saar ; v. de l’arrondissement de Trèves), Sarrebrück (= pont sur la Sarre), Sarreguemines all. Saar-Gemünd ; — à l’embouchure de la Bilse et de la Sarre), Saarwerden (vg. du B.-R., sur la Sarre), Siegburg, Siegen (Sig-inna, sur la Sieg), Spire ou Speyer (jadis civitas Nemetum et Noviomagus, devrait son nom moderne au ruisseau nommé Speyerbach ; ou au lat. spira [cohorte, troupe], parce qu’il y avait un camp romain) ; Wipperfurt (= Furt über die Wipper).

Quelques localités ont pris tout simplement le nom du cours d’eau près duquel elles sont situées, sans faire entrer ce nom en composition avec Bach, Strom, Fluss. C’est le cas de Wien, capitale de l’Autriche. Le nom de cette rivière est du pur celtique (cornique vian, armor. bihan, petit). La Wien est une petite rivière qui se jette dans le Danube, entre la ville et le faubourg des Weissgerber (mégissiers).

Sources (Quellenorte). — Le mot Brunn est fréquemment employé, pour Quelle, dans la composition des noms de lieux. Dans les contrées montagneuses, ce mot indique les endroits où il y a des sources (Quellen-Oerter)[4].

Brunn et Brunnen ; source, fontaine ; eau de source ou de fontaine ; eau minérale ; Born, poét. source, fontaine, puits. Ces substantifs se rattachent à l’anc. prinnan (ardere) ; comme Sôt (anc. mot pour Brunn) et Sod (prov. puits), proviennent de la racine qui a donné sieden (bouillonner, bouillir), Sod (bouillonnement ; prov. sauce ; diverses localités nommées Soden) :

Brunn, Brünn[5], Brunnbach, Brunnenhof-Strasse, Brunnthal ; — Bronnbach, Bronnveiler ; — Born, Borna, Bornbach, Bornbeck (riv.), Bornberg, -feld, -heim, -hem, Bornhevet (Haupt, tête ; m. h. all. houbet, bas sax. höved, dan hoved), Bornhusen, Bornim, Bornstædt, Bornum ; — Franzensbrunnen (de François), Hellebrunn ou Hellbrunn (clarofontanum palatium, ancien château : hell, clair), Lauterbrunnen, Lauterbronn (source claire : lauter, clair, transparent ; — ou de la Lauter), Mariabrunn (de Marie), Neubrunn (neu, nouveau), Reinhartsbrunn (de Reinhart, P., p. 110), Salzbrunn (du sel), Sauerbrunn (sauer, acide, sûr ; — ou forme de sar, saar, cours d’eau), Schönbrunn (belle source : schön), Tiefenbrunn (tief, profond), Warmbrunn (vg. de la Silésie qui possède des eaux thermales : warm, chaud)[6], Weissenbrunn (weiss, blanc)[7].

Gerabronn (source de la Gera), Heilbronn, Heilborn (fontaine de santé, de guérison : Heil, santé ; bonheur ; salut), doivent leur nom à des sources médicinales ; — Heiligenbrunn (heilig [propr. salutaire, qui donne ou maintient la santé], pur, saint), Niederbronn (nieder, inférieur) ; — Königsborn (du roi), Morsbronn (Moor, marais ; morsch, holl. mors, pourri, carié, friable, cassant ; lat. marcere, être flétri, fané), lieu illustré par la seconde charge des « Cuirassiers de Reichshoffen ; » — Paderborn (d. i. Born, Brunnen der Pader)[8], Quickborn (quick, vif, alerte), Strümpfelbronn (source située dans un cul-de-sac : Strumpf, bas, chausson ; — on trouve aussi un Strümpfelbach), Weissenborn, etc. (voy. l’Appendice pour le celt. born).

Spring, source (jaillissante ; Ursprung eines Gewässers ; saut (d’une rivière) ; springen, se rompre avec bruit ; s’ouvrir subitement, jaillir, sauter, s’élancer ; spriessen, poindre, naître, éclore ; sprühen, jaillir, projeter, répandre ; Sprudel, jaillissement, bouillonnement d’une source ; flux abondant ; eaux vives. Des localités situées près des sources d’un cours d’eau prennent quelquefois leur nom de cette circonstance : Springe (aux sources de la Haller est une ville nommée jadis Hallerspringe, parce que la Haller y prend sa source) ; — Lammspringe (aux source de la Lamme), Lippspringe (aux sources de la Lippe), Ruhmspringe (de la Ruhm) ; — des localités nommées Urspringe, Urspring, Urspringen (rappellent le mot Ursprung, [origine ; source ; sources]; — ou bien une rivière nommée Ur), etc.

Wedel, qui signifie « queue » et « éventoir » (pour wehdel, wegen pour bewegen, mouvoir, remuer, agiter ; ou de wehen, être agité, souffler, faire du vent) a aussi le sens de Quelle.

Une source offre, en effet, l’idée du mouvement (Bewegung). On dérive toutefois wedel (source) de quedilla qui, dans d’anciennes gloses, a le sens de pustula et de gispring (bouillonnement), de sorte que wedel signifie « source qui sort en bouilJonnant » (die aussprudelnde Quelle) : Wedel (dans le Holstein), Wedel (an der Elbe), Wedeldorf ; — Burgwedel, Langwedel, Neuwedel, Salzwedel (lat. Soltaquella), Steinwedel, Storchwedel (Storch, cigogne), — etc. On rapporte à wedel et à quedilla le nom de Quedlingburg (ing, Burg).

Spa (jadis Fons Tungrorum), ville qui doit son nom au mot espa, lequel, dans le vieil idiome du pays, signifiait « fontaine » (cfr. gaél. spac, effort soudain, production subite ; angl. spew, vomir). La principale source est nommée Pouhon, du wallon pouher (entraîner, tirer). Cfr. les eaux de Pougues (France), en patois vosgien, puhé (puiser) et puha (mare).

Kilde, source, fontaine (en danois) : Roeskilde (non pas Fons rosarum ; mais fontaine du roi Hroar, fondateur de cette ville ; ou du dan. roe = Ruh, repos, relâche, paix)[9].

Les sources des fleuves étaient quelquefois regardées comme les têtes (Haupt, tête, chef, sommet ; point élevé) ou les sommités d’où ces rivières découlent : Bronnhaupten (Wurtemberg), Burnhaupten (Alsace), Bachhaupten (Hte-Souabe), Lohrhaupten (la source de la Lohr).

Bains (Baden, Badeorte). — Le nom de Brunnen désigne quelquefois des localités qui ont des eaux minérales, D’autres sources de ce genre sont indiquées par le mot Bad. Ce mot, qui a d’abord signifie « source, » a le sens de « bain » et particulièrement de thermes ou d’établissement dans lequel on prend les eaux thermales.

Bad, bain ; établissement où l’on prend des bains (gallois badh ou baz) : Baden (dat. plur. de Bad, = in den Bädern), ou Baden-Baden (pour la distinguer des autres), capitale du duché de ce nom (est l’ancienne Civitas Aurelia aquensis), qui doit son nom à ses eaux thermales ; — Baden (Aquæ Pannonicæ), en Autriche ; — Baden (Aquæ Helvetiæ), en Suisse (une des sources est auprès d’un rocher nommé der heisse Stein ou la Pierre-chaude : heiss, très chaud, brûlant), Badenhausen, Badenheim, Badenweiler, etc. ; Carlsbad ou Karlsbad (bain de Charles IV), petite ville de la Bohème renommée pour ses bains, qui furent découverts par un chien de chasse de l’empereur Charles IV[10], Kaltbad (bain froid, benannt nach seinen kalten Heilquellen), en Suisse ; — Marienbad (de Marie ; comprenant Salzbrunnen ou Kreutzbrunnen [de l’eau salée et de la croix], Stahlbrunnen [source ferrugineuse : Stahl, acier), Carolinenquelle [source de Caroline], Schlangenbad [bain des serpents], où est un Staubbrunnen [fontaine aux douches : Staub, poussière]) ; — Wiesbaden (bains des prés : Wiese, prairie)[11], Wildbad (Thermæ Ferinæ), située dans une vallée à la fois romantique et sauvage (in wildromantischer Umgebung). Ses eaux thermales (warme Quellen) furent nommées wild (sauvage ; — bêtes sauvages) parce qu’un sanglier, poursuivi par des chasseurs jusqu’auprès de ces sources, en aurait révélé l’existence. Ou bien elles auraient été appelées d’abord Thermæ Sylvestres (Waldbad), parce que la contrée était couverte de bois ; — Belecke (jadis Badelecche ; le premier composant indique ein Badehaus que l’on y voit encore avec une source d’eau minérale ; le second composant se rattache à Lecke (Leckhaus auf Salinen) ou au verbe lecken = stillare, rigare. On trouve aussi une localité nommée Badelachen (principauté d’Eisenach).

Il y a aussi des eaux thermales à Pyrmont (dont le nom paraît signifier « bouche à feu » : Feuer, feu, grec πῦρ, Mund, bouche, ouverture ; ce mot indiquerait peut-être un ancien cratère)[12] ; à Sultzmatt (au pied du Heidenberg), à Seltz (dans le comté de Nassau), dont les eaux contiennent une grande quantité de sel.

Teplitz doit son nom à ses eaux chaudes. Ce nom signifie, en slave, tepla ulice, via calida, rue chaude ; de teply, chaud ; cfr. sanscrit tap (brûler ; lat. tepidus, tepere ; celt. tep, chaleur). Le nom du ruisseau Tepel, qui passe devant Carlsbad, se rattache à la même racine[13].

Embouchure des rivières. (Mündungsorte). Mund, bouche ; ouverture (angl. mouth ; cfr. lat. mandere, mâcher) ; Gemünd (bouche, orifice). Ces mots indiquent une situation à l’embouchure d’une rivière : Münden (dans le Hanovre, au confluent de la Fulda et de la Werra ; Minden (ville près de la Porta Westphalica, qui aurait été ainsi nommée, parce que, en cet endroit, le fleuve débouche [ausmündet] dans la plaine)[14] ; — Hallermund (château qui était bâti non loin de l’endroit où la Haller se perd dans la Leine), Holzmünden, Stolpemünde, Schwinemünde, Travenmünde (à l’embouchure de la Trave), Weichselmünde (= embouchure de la Vistule) ; — Dortmund offre une corruption de Drotmani[15] ; — Gmünd dans le Würtemberg à la jonction de deux cours d’eau), Gmünden, etc. ; — Neckargemünd (où l’Elsens debouche dans le Neckar), etc.

Les formes flamandes monde, muyde, muthe : Dendermonde, Termonde (jad. Teneræmonda = embouchure de la Dendre, rivière qui s’y perd effectivement dans l’Escaut), Deulemonde (embouchure de la Deule)[16], Ruremonde ou Roermonde (de la Roer), etc.

Il paraît que Emden (à l’embouchure de l’Ems) est une abréviation de Emsmünden.

Koblentz (en lat. Confluentia).

Chutes d’eau (Wasserfälle). — Lauf, cours, courant ; Laufen, course ; cours : Lauff (sur la Pegnitz), Lauffen (près de Schafhausen), Lauffen (sur la Salza, sur le Neckar, etc.), Laufenburg (Klein-Laufenburg et Gross-Laufenburg où sont les cataractes ou Wasserfälle du Rhin) ; Wasserfall (chute d’eau), vg. de la Westphalie.

En suéd. fors et, en norwégien, fos, indiquent une chute d’eau : Helsingfors (ville des Helsing)[17] ; — Riukan-Fossen (chutes du brouillard : riukan, brouillard), cataracte fameuse.

Ufer, rivage, rive (mot formé de über [suéd. œfver, hyver, angl. over, upper, grec ὑπέρ, lat. super], sur, au-dessus) ; parce que le rivage est au-dessus de l’eau : — Hanovre, Hannover (jadis Hanover, pour Hohenufer = Hohes Ufer = Alta Ripa, Haute-Rive). Over s’emploie quelquefois pour « rivage » : Ainşi Brownover (en Angleterre ; de l’anglo-sax. ofer, bord, rivage, marge). Overyssel (rivage de l’Yssel ou au-dessus, de l’autre côté de la riv. Yssel).

Strand bord, rivage de la mer (plat et découvert), plage (par extens., fonds sablonneux), sable (cfr. Rand, bord) : Fladstrand (danois flad = platt, plat et large), Holmstrand (Holm, petite île ; chantier), Marstrand (rivage de la mer), Nordstrand (du nord). — Le Strand, rue de Londres, ainsi nommée parce qu’elle est située sur le Strand (angl. rivage) ou Bank de la Tamise.

Localités situées près des gués (Oerter an Furten). — Furth et Furt, gué, passage ; endroit guéable ; endroit (d’une rivière, etc.) par lequel on peut passer (en voiture ou en bateau) : fahren, se mouvoir, ou être mû ; se rendre quelque part, partir, voyager ; aller en voiture ou en bateau[18] ; führen, transporter au moyen d’une voiture, mener, conduire ; Fähre, grand bateau plat destiné à conduire des passagers ou des marchandises, d’un bord d’une rivière à l’autre ; bac (angl. ferry, bac ; cfr. v. fr. fière, La Fère) ; fort, en avant (cfr. grec πόρος, trajectus, vadum). Un Furt est donc ein gefuhrter Weg, der zum Fahren eingerichtet ist, un endroit que l’on peut passer à gué (durchwaten), ou traverser avec des chariots. Dans les noms géographiques, ce mot indique une position à l’endroit guéable d’une rivière et une localité construite auprès d’un gué :

Furt, Furth, Furtwangen ; Fürth, Führten ; — Frankfurt, en français Francfort (jad. Frankenfurt, gué des Francs) ; et non pas gué exempt de péage[19].

Erfurt (pour Gerfurt = Gué de la Gerra ; ce nom aurait été formé par la perte du g, comme Erhard pour Gerard, et l’angl. enough pour genug), localité que Münster nomme Erdfurt (Erde, terre et qui était appelée jadis Erphesfort ; Erpisfort, le gué d’Erpo : erp, erph, v. norois iarpr, sombre, brun ; cfr. celt. erf, vif, animé ; — on a dit aussi que Erfurt était une corruption de Eberbach ; dans tous les cas ce nom ne vient pas de Ehrefurt [Ehre, honneur], ni de Heer, armée ; on pourrait peut-être songer à Eor le dieu de la guerre et à Eresburg, P., p. 30), Illfurt (gué de l’Ill, commune du H.-R., près de l’Ill), Klagenfurth (n’est pas le gué des gémissements [Klagen], mais le gué de la Klagen ou Glan, affl. de la Drave : gaél. gléan, vallée), Ochsenfurt (gué des bœufs : Ochs, bœuf, ou plutôt du celt. ouse, rivière), Querfurt (quer, transversal, de travers, — ou quern, moulin), Schweinfurt (ne signifie pas le Gué des Cochons, Schwein : on regarde ce nom comme une corruption de Suevenfurt [Trajectus Suevorum] : toutefois il peut se faire que les Allemands aient transformé sus en sueio, sueve, et imaginé ensuite que les Suèves occupaient en cet endroit un gué sur le Main).

Steinfurt (gué pierreux), Tieffurt (tief, profond ; ou dans la profondeur, dans l’enfoncement : Tiefe), Wipperfurt (gué de la Wipper), — dans quelques contrées, on emploie ford et förth. Herford (sur la Werra), etc. ; — Binsförth (sur la Fulda ; — Binse, jonc) ; — dans le Hanovre, on trouve des localités dont les noms offrent les formes -förde, -forden, -ferhden : Lemförde, Bochenförde, Bremerforde ; — Averfehrden, Langförden, Schmalförden (= schmal, étroit) ; on trouve aussi verden et vern pour verden ; quelquefois verden vient de ward : — Dans le départ. du Nord : Steenwoorde.

On trouve d’ailleurs, en Allemagne : Fahrenbach ; Fahrenheim, Fahrenholz, -horst, -walde ; Fahrland.

En suédois et en danois, fiord est le corrélatif de Furth (de firth, lat. fretum) et signifie un passage de mer pour les bateaux, un bras de mer, un estuaire, une baie, un golfe.

Leiten, conduire, mener ; le v. h. all. leiti, l’anglo-sax. ledu et les formes laid, lede, let signifiaient conduit [d’eau], canal, chemin ; on marquait un point de direction (Wegleitung Ort) à l’égard du chemin qu’on devrait suivre : Leitenberg ; — Lede, Ledenburg ; — Leidesdorf, Leidon, Leiden (en Hollande) ; — Deurle (par contraction de Deurlede « passage de l’eau » [celt. dur, eau], a reçu ce nom parce qu’on y traverse effectivement la Lys). Yper serait pour Yperleet.

Grands amas d’eaux : — Meer, mer (celt. mor ; slave more) : Armorique (ad-mare : celt. ar, sur ; mor, mer ; et ik, contrée, étendue de pays) ; Mor-bihan (petite mer), Les Morini (maritimes) ; La Pomeranie (en all. Pommern) dont les habitants se nomment Pomorjonen (Pomoriani = habitants près de la mer ; de po, prép. slave qui signifie ad, apud, prope). Chez les peuples tudesques, meer a eu le sens de « lac » et de « marais » : Meerbeck, Meersburg (sur le Bodensee), Meerhausen.

See (die), mer ; See (der), lac : See, Seeau, Seebach[20], -berg, -burg, -bruck, -dorf, -feld, -haus, -hausen, -heim, -hof, -kirch, -kirchen ; — Ammersee (lac dans lequel se jette l’Ammer), Bodensee (v. p. 66), Faulesee (faul, pourri, corrompu, sale), Königsee (du roi), Langensee (lang, long), Mondsee dit aussi Mansee (lac de la lune : Mond, v. h. all. mano, bavarois mân), Milchsee ou Milchspulersee (lac du canton de Glaris qui doit son nom à la blancheur bleuâtre de ses eaux, heisst nach der bläulichweissen Farbe seines Wassers), Mummelsee (lac des ogres, des fantômes, des esprits follets, des sirènes, des fées : Mummel = Larve und Kobold) ; jadis Wundersee (lacus mirabilis : Wunder, merveille, prodige ; miracle), Odensee (lac d’Odin, en Danemarck ; — jad. Odinsve [sanctuaire d’Odin : weihen, vouer, dévouer, consacrer ; v. h. all. wîh, saint ; anglo-sax. wih, temple] ; ou peut-être pour Odinsey = île d’Odin : island. ey, île), Plattensee (de Belaton ; d’un mot slave qui signifie « boue »), Tiefensee (profond), Todtensee (lac des morts : todt, mort, défunt, décédé : Tod, mort, trépas[21], Vierwaldstädtersee (lac des quatre-frontières-villes) ou des Quatre-Cantons-Forestiers.

Vierwaldstätter-see (lac de Quatre-Cantons-Forestiers), Wassersee, Weissensee, etc. — Le Zuiderzee (mare austrinum, mer du sud : holl. zuid = sud) ; — Zeeland (= Seeland, terre de mer, terre maritime).

Wac, vag, waag, weg, wege, signifient quelquefois mer (c’est-à-dire le flot : Woge, grande vague, flot ; bewegtes Wasser) : Norweg (= Nordsee), Austurweg (= Ostsee) ; Eschwegen, Hückeswagen (jad. Hokenuage).

Salt a aussi le sens de mer (salsum) : Eistarsalt (= Ostsee).

Marécages (Sümpfe). — À la racine qui a donné le mot Meer (mer), appartiennent les mots :

Moor (marais, d’où l’on extrait de la tourbe), Morast (marais, marécage) et Marsch (pays marécageux, bas et humide) ; Moorburg, Moordorf, Moorflett, Morstein, Morsbach, Mörsberg ou Meersberg, Morsbronn, Meurs, Meursen (sur le lac de Genève ; -sen pour Hausen), Möhringen, Mohrungen, Morgarten, Murbach, Murau ; — Morschleben ; — Nordmoor, Ostermoor ; — Marsch, Marschland (contrée basse, humide, boueuse, fangeuse ; — fertile ; par opposition au pays élevé, sablonneux et stérile qu’on nomme Geestland, comme : Gesmold, Geistingen, etc., v. p. 78) ; — Dietmarsen (= Deutsche Marschen ; ou peut-être habitation de Dietmar, comme Ottmarsen [habitation d’Ottmar] et Volkmarsen pour Volkmarhausen), etc.

Mos = Moor, marais : Mosach, Mosau, Mosbach, Mosburg, Mosenberg.

Bruch, terrain marécageux, terra paludosa, marais avec des arbrisseaux (anglo-sax. broc ; holl. broek, terrain bas, ordinairement cultivé en prairie)  : Bruch, Bruchdorf, Bruchenbrücken, -hagen, -hausen, -hof, -mühlen, Bruchsal (habitation du marais ; près de Carlsruhe ; Bruxelles (v. plus loin) ; — Breitenbruch (breit, large), Düsternbruch (düster, sombre, obscur, ténébreux), etc.

Lache, mare, bourbier ; — trouée, clairière (lat. lacus, lac) : Laach (ancien monastère), Lach, Lachen (ad lacum), Lachstædt ; — Durlach (celt. dur, eau), Fischlaken (Fisch, poisson) ; — Lackstadt ; — Interlachen (du lat. inter lacus), nom qui répond à la situation.

Brühl, lieu marécageux avec des arbrisseaux, lieu buissonneux, hallier marécageux (forme ancienne brogilus, ital. broglio, franç. breuil) : Brohl ou Brühl (près de l’embouchure du Brohlbach, affl. du Rhin), Brühlsbacher Warte, Brühlsdorf ; — Brüllbach, noms de places et de rues dans diverses villes : à Venise, le Broglio ; Brühl (près de Cologne), Hirschbrühl (un faubourg d’Erfurt ; Hirsch, cerf). Dans le moyen-âge, brogilum ou broilium signifiait un Wildpark (parc aux bêtes fauves).

La forme briel (marais couvert de broussailles) se retrouve dans le nom de la Brille, que l’on a rattaché à Brille, lunettes, paire de lunettes ; par extension ouverture ronde[22] : — Brille (la Lunette), ancien nom de la citadelle de Münster ; La Brille (ou Brielle), ville de Hollande[23].

Pfütze, flaque, bourbier (jad. source ; cfr. anglo-sax. pyt, angl. pit, fosse, creux ; lat. puteus, puits) : Pfützenthal, Pfützingen ; — Pützchen (près de Bonn).

Pfuhl, mare, bourbier (angl. pool, lat. palus) : Pfulendorf ; Liverpool (jad. Lerpoole, Lyrpole : du gallois llér-pwll, place du marais)[24].

Ol, Ohl, terrain marécageux (en island. et en norwég. ôle, marais) : Ohl, Ohlau, Ohlenhausen, Ohlgut, Ohlhausen, Ohlhof, Ohlweiler ; — Olau, Olbrüch ; — Oldorf ; — Bredenol (breit, large), Langenohl. — Quelquefois ol, ohl serait pour aul, auel qui, en vieil all. signifiait ravin, fondrière, vallée étroite et profonde, gorge, défilé (voy. le celt. ul) : Algau ou Aelgau (en Souabe ; — contrée montagneuse et coupée par de nombreuses gorges) ; Oelberg (a une signification semblable).

Siepen, expression usitée, en Westphalie, pour désigner un terrain marécageux (du verbe siepen, laisser passer, filtrer, comme à travers un crible ; Sieb, crible, tamis)[25] : Siepen, Vossiepen (marécage du loup), Schneppenseifen (Schnepfe, bas sax. sneppe, bécasse).

Hor (anglo-sax., horu, horg, horh), marais, boue : Horbach, Horburg, Horwang, Horhusen ; Horenburg ; — Horchem, Horchheim ; Horgen.

Sôt, seut, en plattd. signifie « puits, » lieu marécageux, étang (se rattache à sieden [bouillonner]).

Sohle, Sohl, Sol, marécage ; Suhllache, souille, bauge (cfr. v. h. all. salo, salaw, noir ; franç. souiller ; sühlen = südeln, barbouiller ; patauger) : Sohlen, Sohlenhoffen ; — Solingen ; — Wulfsahl (luporum volutabrum : Wolf, loup).

Sieck (dans quelques dialectes, terrain bas et humide ; bas sax. sîk, eine sumpfige Niederung ; m. h. all. seige = Senkung, dépression, enfoncement du sol, : Sieck, Siechenhof ; — Sichem, Sichen ; — Sicke, Sickenberg, -heim, -hofen, Sickingen (voy. ing).

Weiher, étang ; vivier (lat. vivarium) : Weyer, Weiherbach, Weyerhof, Weyersberg, Weiherhammer ; — dans le Haut-Rhin : Riquewihr, Gueberswihr, Wihr en plaine ; dans le B.-R. Weyersheim

Teich, étang (anglo-sax. dic, angl. dike, fosse, canal) : Teich, Teichenau, Teichhütte ; — Dichingen, etc. — Garbenteich, près de Giessen, ne signifie pas étang aux gerbes, ein Teich an den Garben (Garbe, gerbe ; mille-fouille, plante) : la forme ancienne donne Geriwart-eich, c’est-à-dire « chêne de Gerwart » (voy. P., p. 212).

Les contrées marécageuses sont aussi désignées par les mots : Rohr, Ried ou Rieth, etc.

Fenn (das), Fenne (die), veen, en hollandais, endroit marécageux et tourbeux (wallon fagne, marais ; goth. fani, boue, fange) : die Hohe Veen (dans la Prusse rhénane[26] ; — Veendam (digue du terrain tourbeux), Veendaal (vallée), Veenhusen ; Venloo (offre peut-être deux fois la même idée [loo, marais] et pourrait signifier Torfmoor ; mais loo signifie aussi hauteur boisée) ; — Diepenveen (tief, profond), Hoogeveen (hoch, haut, élevé) ; Groteveen (dans l’Ostfrise ; holl. groot = gross, grand, vaste) ; — Louvain, voy. p. 134 ; — Dickelvenne (la désinence indique une a tourbière » ou « terre marécageuse » et la première partie du nom a le sens de « bois touffu ; dick, épais, et pour loo, v. p. 71) : Tvenne (auj. Het Venne = La Fange (fagne) ; la langue flamande abrège l’article het en’t.

Ports et Golfes.Hafen, port (de mer, de rivière ; angl. haven, dan. havn, suéd. hamn ou ham) ; — vase, pot (peut-être avec le sens de « ce qui a » ou « contient ; » haben, lat. habere, island. hafa, tenir, avoir) ; Haff, golfe : Friedrichshaven (sur les bords du lac de Constance), Heiligenhafen (où il y avait un lac sacré nommé jadis Tulendorf : du celt. tul, caverne), Königshafen (port du roi) ; — Carlshaven ou Karlshaven (port de Charles), Christianshaven (le port de Christian IV), Cuxhaven ou Kuxhaven (? der Kux, portion de mine ; jadis Kuckus signifiait terrier, cavité souterraine ; mine), Delfshaven (du fossé ou du canal), Kiöbenhavn (jad. Kobandshavn et Kiobmandshavn = Kaufmannshafen ; — signifierait le havre, le port du marchand) ou Copenhagen (enclos des marchands)[27], capitale du Danemarck, nommée, en latin moderne, Hafnia (à cause de la situation avantageuse de son port). Le préfixe Kioben, Koband rappelle peut-être le Koband de Ptolémée. La forme Copenhagen ou Copenhague renferme le mot hagan (enclos) ; cfr. Hag, clôture ; haie.

Thorshavn (port de Thor) est la capitale des îles Faröe.

Carlshamn (port de Charles), Cimbrischhamn, Söderhamn (port du sud).

Haff, golfe : — Kurische-Haff (Sinus Curonicus), ainsi appelé des pêcheurs nommés Cures ou Courons, qui habitent sur les bords de ce golfe. Il est séparé de la Baltique par une langue de terre appelée Curische Nehrung[28], en esthonien Mendæniemi (promontoire des pins), et par Pline Mentonomon. Le Frische Haff (en lat. Sinus ou Lacus Venedicus, communique avec la Baltique par un détroit qu’on appelle le Gatt, passage ; Gasse). On a dit que ce nom signifie « Hâvre des Frisons. » Mais Friese (frison), diffère de Frisch. On a donc pensé que ce golfe devait son nom à la nature de ses eaux. Frisch-Haff serait un bassin d’eau douce ou un nouveau golfe (frisch, frais, rafraîchissant ; d’origine récente ; récent, neuf).

Canaux et fossés.Giessen, verser, épancher, répandre. Ce mot indique un pays où sont des cours d’eau, des canaux : — Giessen, ville située dans la Lahnthal, entre la Lahn et la Wisseck, et dont on a pu dire avec vérité : Eine Menge kleiner Flüsschen « giessen » ihr Wasser in das Giessene Becken).

V. h. all. telban (fouiller), anglo-sax. delfen, angl. to delve, creuser, fouir ; sonder ; delve, fosse, caverne, trou ; delf, delfe, carrière, mine ; — et « faïence » à cause de la ville de Delf) ; holl. delven, creuser, fouir ; cfr. lat. talpa (= fouilleuse), franç. taupe) : — Delft (fosse, lieu creux) que les latinistes nomment Delphi : ville de Hollande ainsi nommée parce qu’elle s’éleva au bord d’un ancien canal ; cette ville est très renommée pour sa faïence), Delfzyl (Ziel, borne ; terme) ; — Delve, Delvenau.

Barm, sein, mamelle ; sinuosité, gorge, golfe ; métaph. cœur ; barmherzig, miséricordieux, charitable, litt. qui prend quelqu’un sur son sein, qui l’embrasse : Barmen, Barmeke, Barmstedt.

Voy. wic (p. 83).

Détroits.Sund, détroit : Le Sund (détroit qui est entre la Suède et le Danemarck), Christiansund, Langesund, Œrsesund (en suéd. et dan. œre, fonds d’eau bas et sablonneux vers les côtes), Stralsund (détroit de la flèche : de Strahl [jadis flèche], auj. rayon, trait [lumineux], dard [du soleil] ; cfr. le slave strelec ou strelitz, archer, tireur] ; mais, quoique la ville de Stralsund ait trois flèches dans ses armes, il paraît que son nom signifie « en deçà du détroit » et qu’elle a été fondée par un prince rugien pour protéger ses possessions en deçà de la mer). La ville de Stralsund est bâtie, en partie, sur l’île Strela ; — le détroit de la Sonde.

Les îles. — (Inseln ; cfr. lat. insula.) Jadis les Allemands n’avaient aucun autre mot pour signifier « île » que le mot awe, owa, ouwa, au ; lequel prit aussi la forme ey, ei (norois, ey, suéd. ö ou oe, plur. oer), que l’on retrouve dans Eiland (île). Mais le mot Au, qui se rattache à aha, ahwa (cours d’eau), signifie tout à la fois « plaine aqueuse, prairie arrosée » et « île. » Au désigne, en un mot, une contrée située près de l’eau ou entourée d’eau, bedeutet eine Fläche am oder in Wasser).

Aue, eau coulante, cours d’eau (aha), contrée arrosée ; prairie ; pâturage ; Au, en compos. a servi pour la formation de noms de rivières et d’habitations situées au bord de l’eau : Au, Aubach, Auburg ; Aue, Auen, Auenheim, -Stein ; — Altenau (au vieux pré), Arnau (pré de l’aigle), Blumenau (florum pratum), Birkenau (Birke, bouleau), Buchau (mit Buchen), Erlau (Erle, aune), Glogau (en polonais glog signifie « aubépine »), Goldenau (pays d’or ; — partie très riche du duché de Nassau), Hagenau (prairies de l’enclos, de la forêt : Hag, clôture ; haie ; enclos ; jad. forêt), Hasenau (augia leporis), Hirsau (Hirse, millet), Hirschau (Hirsch, cerf), Kornau (Korn, grain, grains ; blé), Krumau (krumm, courbe), Krummenau (sur la Thur qui fait un grand circuit en cet endroit), Landau (pré du pays), Lindau (aurait dû son nom à un certain nombre de tillets qui s’y trouvent ; voy. plus loin), Lindenau (eine Au mit Linden), Nassau (Burg Nassau ; die nasse Au ; — nass, humide), Passau (Patavia, originairement Batava : ? du celt. bat, gallois et irland. bad, bateau ; ou de pat, courir)[29], Reichenau (île étendue)[30], Rheinau (du Rhin), Schandau (pré de l’opprobre) : Schande, outrage, honte ; ignominie (ou de schande, prov. schund-grube, cloaque ; ville bâtie dans une vallée entre des montagnes et des rochers ; — ce qui faisait dire qu’elle était la fin de tout l’honneur et de toute la probité de la Misnie), Schönau (belle prairie), Tannau (mit Tannen), Ufenau ou Ufnau (jad. Ubinavia = die obere Insel ; — île du lac de Zurich), Wetterau (Wetteravia, doit son nom à la Wetter), Ziegelau (? Ziegel [tuile lat. tegula] ; — ou dimin. de Ziege, chèvre), Zwickau (appelée en lat. Cygnea ou Cygnavia ; mais il ne s’agit pas de cycnus (cygne), mais de cuneus [coin à fendre ; outil à greffer, grand clou] : Zweck, clou ; broche, cheville ; broche [qui occupe le centre d’une cible], par extens. but ; — Zwick, pincement ; Zwickel, coin, pointe), ville de l’Osterland, défendue par un fort nommé Osterstein.

Ey (île) : Anglesey (île des Angles), Norderney (île du nord), etc. — Les îles Orkneys, que Pomponius Mela mentionne sous le nom d’Orcades (gaél. ork, baleine ; n est le reste du gaél. innis ou inch, île[31] ; ou du kymrique orch, limite, frontière, bord ; Ptolémée mentionne un cap Orcas au nom duquel on a rattaché celui des Orcades ; les Norwégiens ont ajouté ey, île). Ce groupe d’îles comprend les îles Sanda (île sablonneuse : Sand), Stromsa (du courant, Strom), Westra (île de l’ouest), etc.

Oe ou ö, en danois et en suédois, île (plur. oer) : Oeland ou Aaland (= terre-île ; — île de la Baltique), Christiansö (île de Christian), Faroer (îles des moutons [sauvages, qui y furent trouvés par le roi Frodo] ; anc. scand. faer, dan. faar, mouton), Hvaloe (île de la baleine ; près des côtes de la Norvège près de laquelle Hammerfest est bâtie : angl. whale, baleine, all. Wallfisch)[32], Karlsö (île de Charles), Nalsoe (= Nadelinsel ; — une des petites îles Faroer où l’on voit un tunnel naturel, à travers lequel peuvent passer les vaisseaux ; ce tunnel ressemble au trou d’une aiguille [Nadel] gigantesque), Sandö (île du sable), Storö (grande île ; stor, grand), Stora-oester-Swartoe (grande île noire de l’est ; schwarz, suéd. swart, noir) ; Suderoe (île du sud, relativement à Faroer), Utö (île extérieure : bas sax. ut, angl. out, aus, hors de) ; — Helsingör (voy. pp. 112, 122).

En bas latin au est traduit par augia qui représente la forme celtique aug, og, qui avait le sens général d’abri et qui désigna aussi un îlot fortifié[33]. Le pays d’Auge, en Normandie, tire son nom des marais et des pâturages qui l’environnent ; Eu (jad. Auga, Oca), ville de Normandie, située au milieu de prairies. L’île d’Oye (au pays d’Aulnis) s’appelait Ogia.

Holm, éminence, colline ; petite île et particulièrement petite île située dans une rivière ou dans un lac ; presqu’île ; terrain près de l’eau ; chantier. Ce nom a été rattaché au suéd. hol, angl. hill, colline, qui dérivent de hoch, jad. hoh, haut ; on peut le regarder comme une forme de Helm [casque, couverture en voûte, abri ; couvert, protection] ; de sorte que Holm aurait signifié un lieu abrité, entouré par les eaux[34] : Bornholm (nom que l’on suppose contracté de Burgundar-holm, îles des Burgondes), Drottningholm (île de la reine ; drottning, reine ; île près de Stockholm ; — suéd. drott, roi ; v. P., p. 69), Flatholm (utpote plana : platt, suéd. flat, dan. flad, plat) ; Stockholm (qui fut d’abord bâtie dans une île [holm], auprès d’un détroit ; en suéd. staket, stak, détroit ; d’où Stäkholm et puis Stockholm = île du détroit). Cette ville occupe aujourd’hui sept îlots, et comme elle est bâtie sur pilotis et que les îlots sont joints par des ponts en bois, on a dit que c’est apparemment de ces pièces de bois qu’elle tire son nom (Stock, bâton ; tige ; souche, tronc ; Stacke, palissade ; en bas all. stack, digue).

Werth (v. h. all. werid, werida, m. h. all. werd) signifie un lieu endigué (ein abgedeichtes Land am oder in Wasser) ; une hauteur qui domine sur l’eau (Erhöhung über dem Wasser) ; une île de rivière (eine Flussinsel, insula amnica). Ce mot dérive de wehren (arrêter, empêcher ; détourner ; défendre ; comme le mot Wehr, défense, retranchement ; rempart, parapet ; digue, bâtardeau, môle), et il signifiait un lieu gardé, défendu contre les eaux ; un fort. Les îles naturelles servaient, encore mieux que les crannoges, de lieu de refuge. Elles offraient aux populations primitives un asile qui leur paraissait assez sûr pour y prendre gîte. Elles servaient de lieu fortifié ou plus facile à défendre contre les attaques des voisins plus puissants ou des bêtes fauves pendant les longues nuits de l’hiver. On a rattaché Werth à Warte (specula, statio, échauguette, donjon). Mais on peut croire que ces deux mots proviennent de la racine qui a donné warten (attendre ; guetter ; garder) et wahren (voir ; prendre garde à).

Dans l’Allemagne méridionale, on emploie le mot Wörth, dans le même sens. Dans la Prusse, on se sert du mot Werder (île située dans un cours d’eau ; digue ; chaussée) : Mentionnons d’abord notre Wörth alsacien, village auprès duquel, le 6 août 1870, une partie de notre armée succomba sous le flot envahisseur des armées allemandes, et dont le nom devint le nom prussien de la bataille, parce que l’état-major y dina après sa facile victoire : Wörth (sur le Rhin, en Bavière), Wertheim (hameau de l’île ou de la digue) ; — Donauwörth (Danubii insula), Kaiserswerth (de l’empereur), Marienwerder, Werder ; — les formes werd, wurd, ward (boulevard), weert (ont le même sens), holl. waard (terre desséchée et entourée de digues : Werden, Werdohl, Werdau, Werdenberg, Werdenfels ; — Bischofswerda, Schönwerda ; — Würden (contrée montagneuse, près du Weser ; ce mot a ici le sens de lieu fortifié) (voy. Verodunum).

Quelques noms formés avec cette racine peuvent aisément se confondre avec vort, voort, holl. voord (= Furt, gué) et aussi avec le celtique Vero-dunum (Verdun).

Les Flamands donnent à Lille (jad. L’Isle, Insula), ville située entre la Lys et la Deule, le nom de Ryssel, corruption de Lys-insel ou de Rys-insel. Les mots lys et rys (Ruysbroek, Ruys-lede) sont des noms celtiques de l’eau (rys, ruisseau, se rattache à reisen, s’en aller, partir, voyager ; jad. se mouvoir).


  1. Dans ce nom, ach peut désigner un lieu, une propriété où croissent des aunes, comme dans Heslach (Hasel), Weidach, etc.
  2. Ce mot est peut-être une forme de ach (B-ach, be-ach ; — be est un préfixe qui sert à donner plus de force à l’expression ; — ein Kollektivbegriff). D’un autre côté, on pourrait supposer que ce mot a d’abord signifié le creux du lit d’un cours d’eau (das Flussbecken : de Becken, bassin). Indiquons enfin le grec πηγή (source), et le grec moderne πάγω (je vais) ; et le sanscrit bhag, baka (tourner çà et là).
  3. Schönbach (près de Kircheim) ne signifie pas ein schöner Bach, mais ein kurzer Bach (un ruisseau d’un parcours restreint ; du v. h. all. scam, court, petit).
  4. Quelle (source, fontaine ; quellen, jaillir) se rattache à Welle (vague, onde). Cfr. wallen, rouler des flots ; bouillonner ; — marcher ; — aller en pèlerinage ; angl. well (puits, source).
  5. On a dit que Brünn, ville de la Moravie, devait son nom aux excellentes sources qui l’environnent. Mais cette ville, qui est au confluent de la Schwarzawa et de la Zwittawa, est nommée en slave Brno qui signifie « gué. » On donne aussi à brno le sens de « cuirasse » et on dit que la ville de Brünn a été fondée par le duc Bryno.
  6. Une localité nommée Warmbronn n’a pas de sources chaudes : et, pour expliquer ce mot, on a recours au nom propre d’homme Warin, Warino, P., p. 37).
  7. Wisonbronna aurait, dit-on, signifié « la source du bison, » en anc. all. wisunt. Mais le préfixe peut se rapporter à Wiese (prairie) et on aurait ainsi un Wiesenbach, une source, une eau des prés.
  8. Cette ville est située auprès des sources de la Pader. On la nommait jadis Phadarprunnin. La petite rivière Pader sort de trois sources qui se trouvent au centre même de la ville, sous l’autel de la cathédrale. Ses eaux sont tièdes en hiver et froides en été. Le nom de cette rivière se rattache à la racine qui a donné Padus, Bad.
  9. Le nom de cette ville a été transformé par les Allemands en Rothschild (abri rouge : Schild, écu, bouclier ; jad. abri, protection).
  10. Cette localité se nommait auparavant Warmbad (bain chaud). La principale source est nommée le Sprudel (jaillissement, bouillonnement) ; jad. Brudel = Brodem (vapeur chaude) ; brudeln (bouillonner). On y prenait jadis des bains nommés Hautfresser (rongeur de la peau : Haut, peau ; Fresser, mangeur ; glouton ; fressen, manger, ronger), parce qu’on enlevait la peau aux malades avec l’eau du Sprudel. Les ulcères étaient cicatrisés avec d’autres bains.
  11. Cette localité était jadis nommée Aquæ Mattiacæ. Les Mattiaci étaient un peuple du Taunus dont le nom parait avoir été traduit par Wiesbaden. En effet, Matte = Wiese (prairie) et bad a eu le sens de ach (eau).
  12. Selon quelques érudits Pyrmont serait pour Viermund (vier, jad. fior, quatre) et indiquerait quatre ouvertures. D’après certains documents Pyrmont ou Permunt serait pour Petri mons. Il y a eu un Pyrimont dans le département de l’Ain.
  13. On rencontre le nom de Teplitz trois fois en Hongrie (avec des bains d’eaux chaudes), une fois en Illyrie, et une fois en Styrie avec des bains chauds.

    Il ne faut pas confondre ce nom avec Töplitz en Prusse (Alt und Neu Töplitz), dont le nom dérive du wende topol, peuplier.

  14. Au sujet de ce nom, voy. p. 12.
  15. Drotmani, Throtmani, Throtmeni, villa Trutmanni (P., p. 153) signifierait monile gutturis seu colli (angl. throat, gosier, gorge ; v. all. mani, collier ; lat. monile ; voy. P., p. 302).
  16. Dans le nom d’un village appelé Deulesmont, le suffixe mont ne désigne pas une montagne. Ce nom est une corruption de Deulesmond (embouchure de la Heule : hohl, creux).

    Il en est de même du nom de Pyrmont qui n’a pas trait aux montagnes (per montes ; — ville entourée de montagnes), mais plutôt à des sources d’eaux minérales. Ce nom nous paraît, en effet, avoir le sens de « bouche de feu » (Feuer, v. h. all. fiur, anglo-sax. fir, angl. fire, grec πῦρ, feu). Il y avait sans doute en ce lieu un volcan, et son nom indiquerait un cratère. Une des sources chaudes de Pyrmont se nomme Brodelbrunn à cause de l’eau qui sort à grand bruit (brodeln, être en ébullition ; — braten, rôtir, cuire). On a rattaché le nom de Pyrmont à Viermünden (vier, quatre).

  17. Helsingfors, Helsingborg, Helsingör, noms de trois villes qui ont appartenu aux Helsing, Helsingfors, en Finlande, est une colonie de la province d’Helsing-land, en Suède. Helsingborg, en Suède, est opposée à Helsingör (vulgairement Elsinore ou Elsineur) du Danemarck.
  18. De là l’expression Fahre wohl (angl. farewell), litt. voiture-toi bien, porte-toi bien.
  19. L’origine de cette ville jette une certaine poésie sur le Maingau. C’est là qu’une biche apparut aux soldats de Charlemagne, mis en déroute par Witikind, et leur montra, en passant la première, le gué providentiel du Mayn.
  20. Village du canton de Zurich, situé près du Seebach, ruisseau qui coule du Katzensee ou lac des chats.
  21. En 1879, les journaux allemands ont raconté le fait suivant, qui se serait passé à Rappelsdorf, village aux environs d’Erfurt, au milieu de la grande tempête du 20 février :

    À 5h. 45 du soir, le niveau du lac des Morts (Todten) s’est élevé avec un bouillonnement violent, et ses eaux ont inondé la région voisine sur une étendue de 500 mètres. Après quelques instants, les choses sont revenues dans leur état normal. Un habitant de Rappelsdorf raconte qu’il a vu une colonne d’eau bouillonnante sortir du milieu du lac et éclater en se répandant dans toutes les directions.

    Ce qui est certain, c’est que pendant cette crue soudaine et inexpliquée de l’eau, on a entendu des bruits souterrains. On voit tout autour des crevasses profondes d’où s’exhale une sorte de vapeur. Tout le terrain inondé est couvert de petites coquilles et de poissons morts.

  22. Le mot Brille est formé de beryllus. Béryl est le nom d’une pierre précieuse et d’un espèce de cristal dont on se servait pour faire des lunettes.
  23. La reprise de la Brille donna lieu à ce distique hollandais :

    Op den ersten April
    Verloor Alva zyn Bril.

    (c’est au premier d’avril qu’Albe perdit sa lunette). Cette prise paraissait peu de chose pour le duc d’Albe ; elle eut par la suite de très graves résultats.

  24. Les polders (flam. poel = Pfuhl) sont des terrains cultivés, enlevés à l’Océan qui les couvrait et enfermés par des digues et par des canaux de dessèchement.

    Des parties de terrain, jadis recouvertes par la mer et nommées moeres (marécages) sont devenues des prairies au moyen de saignées qui ont été nommées Watergands (cours d’eau : gehend marchant, allant : gehen, aller, was im Gange ist, was Cours hat), pour watergang (marche ; écoulement de l’eau : water = Wasser).

    Dans le département du Nord, il y a une portion du territoire qu’on nomme le Pays des Watteringhes (ing, App. P), à cause des nombreux watergands qui le sillonnent.

  25. Le mot siepen désigne très bien un terrain qui se laisse pénétrer par l’eau, qui s’imbibe d’eau. Peut-être la racine de ce mot a-t-elle donné aux Grecs le mot σίφων, siphon.
  26. Hohe Veen ou les Hautes Fanges offrent un nom qui proviendrait des lacs que l’on trouve dans la contrée. Mais nous croirions plus volontiers que veen ou fenn cache ici les mots celtiques penn, ben, montagne.
  27. De kaufen, acheter, échanger ; dan. kiobe, suéd. kopa, island. kaupa ; cfr. lat. caupo, cabaretier, marchand ; grec κάπηλος, cabaretier ; trafiquant.
  28. La Kurische Nehrung est le terrain ou le pays bas (Niederung) de la Courlande. On a voulu rattacher ce nom à nähren (nourrir) et on a cru y trouver une allusion au « travail des alluvions nourricières. » Mais cette contrée est tout simplement un bas-fond sablonneux formé par la Baltique et par le Memel. Ce mot se rattache peut-être au celtique [gaél.] near, eau ; et ing ou ung (voy. App. P).

    La Frische Nehrung est une presqu’île située près du Frische Haff.

  29. Cette ville est bâtie sur le Danube qui reçoit, à l’ouest, l’Inn, et, à l’est, l’Ilz. H. A. Daniel reconnaît que c’est une ville celtique, mais il en explique le nom, comme on le fait ordinairement, par la présence en cet endroit d’un corps de troupes bataves : Schon die Celten hatten hier in uralten Zeiten eine Hauptstadt, in Römerzeiten erwuchs Batava Castra, ein befestigtes Lager batavischer Truppen (Deutschland, t. II, p. 226).

    Sans doute, la Notice de l’empire (Notitia imperii), dressée probablement environ l’an 427 sous le règne d’Honorius, place là une cohorte de Bataves (nova cohors Batavorum Batavis). Mais que signifie ce nom de cohors Batavorum ? Ce nom ne vient-il pas de celui de la ville ? Et celui de la ville n’aurait-il pas trait aux drei Flüsse, Donau, Inn und Ilz ?

  30. Jadis Rychenaw, ancienne abbaye. On a supposé que ce nom signifiait « île riche » (en bas lat. Augia dives = die reiche Au) et qu’il avait trait aux richesses du monastère. Ce n’est pas toutefois à la richesse que la célèbre abbaye devait son nom, mais à son étendue. Dans le voisinage de Constance, le lac est partagé en deux bras, par une langue de terre longue et étroite ; chacun de ces bras du lac possède une île : dans celui qui est à l’est, il y en a une petite qu’on appelle Meinaw (bas lat. Augia Minor) ; et, dans l’autre bras, vers l’ouest, il y en a une plus grande nommée Reichenau (= l’île étendue : reich, étendue ; riche). Quelques autres noms composés de reich n’expriment que l’idée de l’étendue.

    Pour la signification de Augia, voyez plus loin (p. 126).

    Cette île fut nommée jadis Sintlesaw, mot qui ne signifie pas « ile sans péché » (Sünde, péché ; les pour los, exempt, dégagé), mais « île étendue. » En effet, en celtique [gaélique] sin, étendre, se prolonger ; participe şinte, étendu, stretched, lengthened, extended, reached ; irland. lios (les, lass), forteresse de terre de forme circulaire. Jadis, en allemand, sin, sint signifiait grand (cfr. v. h. all. sint-fluoth, le grand flot, le déluge : sin devenait un préfixe intensif, qui fortifiait l’idée indiquée ou qui exprimait la durée ; anglo-sax. sin, semper, perpetuo ; cfr. Singrün, quelquefois Sinngrün = Immergrün, toujours vert ; pervenche ; joubarbe), mot que l’on a rattaché à Sünde (péché) et dont on a fait Sündflut (le flot du péché, le déluge).

  31. La langue anglaise a adopté ce mot. On lit dans Milton :

    The haunt of seals and orcs, and sea-mew’s clang.

    Cfr. lat. orca, sorte de grand poisson.

  32. Non loin est une île nommée Kirkegaardœ (île du cimetière ; littér. île de l’enclos [Garten] de l’église, Kirche), où l’on enterrait autrefois les malfaiteurs et les suicidés. Vers le nord, on trouve les îles Biorna (île de l’ours : Bär), Rennœ (île du renne, Renn, Rennthier), Maasœ (île du goëland), etc.
  33. Les crannoges (irland. crannog, habitation ; bateau : crann, arbre, mât ; barre, pilotis) sont des îlots pilotés, des îlots lacustres, souvent immergés en hiver, mais que l’on a exhaussés au moyen de pilotages, d’empierrements, pour les rendre habitables en toute saison ; cfr. irland. ogh, pointe, coin ; lieu saint, sacrė ; irl. et gaél. uagh, manx oghe, ooig, cornique ogo, gallois ogov, ogof, antre, abri souterrain. Tous ces mots indiquaient plus particulièrement des « habitations dans une île artificielle d’un lac, » et ensuite un lieu abrité : Greenoge (irland. lieu exposé au soleil : grian, soleil), Fearnoge = Farnagh (lieu des aunes : fearna, aune ; — cfr. Ferney).
  34. Toutefois, l’idée fondamentale, exprimée par ce mot, paraît être celle de « terrain qui s’élève sur l’eau. » Holm est ainsi apparenté à un mot slave qui se présente sous les formes golm, chlum, chlom, et qui signifie élévation de terre, exhaussement, éminence. Le nom de la ville de Culm nous présente une forme de la même racine. Près de cette ville, on trouve Cölln (jadis Colno), qui nous en offre une autre forme. C’est croyons-nous avec raison qu’on a expliqué par la même racine le nom de Cölln, partie de Berlin, île formée par deux bras de la Sprée. On a traduit et expliqué Cölln par Cologne (Colonia), parce qu’Albert l’Ours peupla ce pays au moyen de colons chrétiens qu’il fit venir des bords du Rhin et des Pays-Bas.