Grand dictionnaire universel du XIXe siècle/La Fayette (Mlle DE), roman de Mme de Genlis

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Administration du grand dictionnaire universel (10, part. 1p. 53).

La Fayette (Mlle DE), roman de Mme de Genlis (1813, in-8o). L’auteur n’a guère fait que raconter, d’après les mémoires, la vie de son héroïne et mettre en dialogues ce qui était en récit. On ne trouve dans ce livre ni faits nouveaux, ni inductions originales, pas même ce que la lecture attentive des documents peut fournir sur cette intrigue de cour et de confessionnal, ce qu’ils ont révélé, par exemple, à M. Cousin. Personnages et caractères sont envisagés de haut, d’ensemble, à un point de vue de sentimentalité vertueuse et dévote qui n’est pas le véritable. Mlle de La Fayette est une La Vallière avant la faute, un modèle de vertu, de pudeur et de discrétion, bon à proposer aux jeunes pensionnaires ; Louis XIII joue tant bien que mal son rôle d’amant et de roi fainéant ; Richelieu est le fourbe et Boisenval le traître de mélodrame. Il y a quelques peintures assez vraies de la cour de Louis XIII, des portraits plutôt prétentieux que réussis et perdus dans les teintes grises d’un style fade et sans chaleur. Il y a pourtant quelque délicatesse dans la peinture des sentiments contenus et dissimulés des deux héros. Non-seulement Louis XIII et Mlle de La Fayette n’ont pas entre eux de scène d’amour, mais ils ne prononcent pas même ce mot criminel, et s’adorent tout en se déguisant à eux-mêmes leurs propres pensées. On ressent, en lisant ces pages, qui ont terriblement vieilli, tout l’ennui que la fille d’honneur d’Anne d’Autriche devait éprouver aux conversations languissantes du monarque, et, en ce point, le roman est aussi vrai que l’histoire.