Harivansa ou histoire de la famille de Hari/Lecture 35

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TRENTE-CINQUIÈME LECTURE.

FAMILLE ET NAISSANCE DE CRICHNA.

Vêsampâyana dit :

Vasoudéva eut quatorze épouses : Rohinî de la famille de Pourou, l’illustre Madirâ, Vêsâkhî, Bhadrâ, Sounâmnî, Sahadévâ, Sântidévâ, Srîdévâ, Dévarakchitâ, Vricadévî, Oupadévî, Dévakî, Soutanou et Badavâ : ces deux dernières étaient esclaves.

Rohinî était, comme nous l’avons dit, de la famille de Pourou, et fille de Bâhlîca[1] ; c’était la première épouse de Vasoudéva et la plus chérie. Elle eut dix enfants : Râma son aîné, Sârana, Satha, Dourdama, Damana, Soubhra, Pindâraca, Sousînara, la belle Tchitrâ et Coumârî. Ô fils de Courou, Tchitrâ porta plus tard le nom de Soubhadrâ.

De Vasoudéva et de Dévakî on vit naître le glorieux Crichna, surnommé Sôri (ou petit-fils de Soûra).

Râma eut de Révatî un fils chéri, nommé Nisatha.

Soubhadrâ, unie à Ardjouna, surnommé Rathîpârtha, mit au jour Abhimanyou.

(D’Acroûra et de la fille du roi de Câsi, naquit Satyakétou[2].)

Sept des nobles épouses de Vasoudéva[3] eurent des enfants qui comptèrent parmi les héros : c’est ainsi que Sântidévâ fut mère de Bhodja et de Vidjaya ; Sounâmnî, de Vricadéva et de Gada ; et Vricadévî, d’Agâvaha[4].

Une fille du roi de Trigartta[5] épousa Sisirâyana, et donna le jour à un fils nommé Gârgya, qui, outré d’une parole injurieuse qu’on lui avait adressée[6], obtint, au bout de douze années de pénitence, qu’il serait le père d’un héros pareil au dieu Scanda et rival de Crichna lui-même. Gârgya choisit pour femme une jeune bergère. Or, cette bergère était une Apsarâ qui avait pris ce déguisement : par la volonté du dieu qui porte pour arme le trident[7], elle conçut de Gârgya un fils qui se nomma Câlayavana, et qui devint un roi très-puissant. Des chevaux qui avaient la tête et la moitié du corps d’un taureau, le traînaient dans les combats. Il avait été élevé dans le gynécée d’un prince Yavana qui n’avait point d’enfants : de là son nom de Câla-yavana[8]. Quand il eut succédé au roi (son père adoptif), il rassembla les Kchatriyas. Le divin Nârada avertit les Vrichnis et les Andhacas des préparatifs qu’on faisait pour les subjuguer par la force des armes. En effet, Câlayavana marcha contre Mathourâ et envoya un héraut à ses ennemis. Ceux-ci, se présentant devant le sage Crichna, délibérèrent ensemble sur les craintes que leur inspirait l’Yavana. Trouvant qu’ils n’étaient pas en état de lui résister, et cédant à la terreur que leur inspirait l’oracle de Siva, ils résolurent de se retirer et d’abandonner la belle ville de Mathourâ, pour aller se fixer à Dwâravatî, dans le pays de Cousasthalî[9].

L’homme instruit qui, purifiant son corps et domptant tous ses sens, dans les jours de fête[10], fait la lecture de cette naissance de Crichna, sera libre de toute dette et jouira d’une fortune prospère.

  1. Je trouve ce mot écrit Bâhlica ou Bâhlîca. Râma, fils de Rohinî, est le même que Balarama, ou Baladéva.
  2. Ce passage n’est pas ici à sa place. Il semblerait devoir appartenir à la lecture précédente.
  3. Ce sont les sept épouses, filles de Dévaca, dont il sera question dans la xxxviie lecture.
  4. Ce passage me présente le verbe जन​ dans le sens actif et neutre. C’est un fait dont je ne parlerai plus.
  5. Le Trigartta est placé au nord-ouest de l’Inde. M. Wilson pense que ce peut être le pays appelé aussi Djâlandhara, qui formait une partie du Lahore, ou bien le Bâhlîca, qui était le pays de Balkh.
  6. Les compagnons de Crichna lui avaient reproché en termes déshonnêtes son défaut de postérité. Nous verrons dans la suite cette histoire traitée avec plus de détail.
  7. Telle est l’arme ordinaire du dieu Siva, surnommé pour cette raison Trisoûlin.
  8. Mot composé de Câla, qui est le dieu du temps ou de la mort, et d’Yavana, nom général donné par les Indiens aux peuples de l’Occident.
  9. C’est le pays de Cutch, au fond du golfe de Cambaye. Dwâravatî devait être dans une petite île de la partie septentrionale de la côte de Malabar.
  10. J’ai traduit ainsi d’une manière générale le mot पर्व्त्रन्, qui désigne certains jours du mois lunaire dans lesquels on fait des sacrifices.