Histoire d’une grande dame au XVIIIe siècle, La comtesse Hélène Potocka/17

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Calmann Lévy (2p. 428-459).


XVII

1814


Entrée des alliés à Paris. — Le roi Louis XVIII à Saint-Ouen. — Entrée de Louis XVIII à Paris. — La duchesse d’Angoulême. — Représentation de gala aux Français. — Départ d’Hélène pour Brody.



Rien de saillant ne se passa dans la vie d’Hélène de 1811 à 1814. Le comte François, après avoir brillamment servi comme aide de camp du maréchal Davout, éprouva, comme un grand nombre de Polonais, une profonde déception lors de la création du grand-duché de Varsovie. Il quitta en 1810 le service de France pour entrer en 1811 à celui de l’empereur Alexandre, qui le nomma officier d’ordonnance ; plus tard, sa santé délicate ne lui permettant pas un service actif, l’empereur l’attacha à sa personne en qualité de chambellan. Sidonie partageait son temps entre sa mère et son mari, et ce dernier obtenait des congés assez fréquents pour lui permettre de venir souvent à Paris.

Le comte Vincent continuait ses voyages réguliers en Pologne, malgré les événements politiques qui prenaient de jour en jour plus de gravité.

On faisait de part et d’autre des armements gigantesques.

Ce n’était plus des levées de 80 000 hommes qu’autorisait le Sénat français, mais bien de 120 000 et 200 000. Enfin la malheureuse campagne de 1812 commença et fut suivie des guerres désastreuses de 1813 et 1814 et de la marche des alliés sur Paris. À ce moment le comte était à Brody, François à Vienne et Hélène seule à Paris avec sa fille.

La comtesse, devenue royaliste fanatique, s’était brouillée avec son amie la marquise de Coigny à cause des opinions bonapartistes de cette dernière. Nous allons voir que ses lettres ne ressemblent plus à celles qu’elle écrivait au moment de la paix de Tilsitt.


LA COMTESSE HÉLÈNE AU COMTE VINCENT


« 4 avril 1814, quatrième jour de notre délivrance.


» Après quatre mois d’angoisse et d’inquiétudes, croyant à chaque instant voir arriver la mort, le 30 mars au soir, je mis dans une corbeille portative ce que j’avais de plus précieux et j’attendis l’événement. Pendant toute la nuit, et la veille, les habitants des villages voisins, avec des charrettes remplies de leurs effets, entrèrent dans Paris et encombrèrent les rues et les boulevards : on ne pouvait plus circuler en voiture. » Je m’établis à neuf heures du matin dans mon grenier avec des lunettes d’approche, et j’y tins mes assises jusqu’à la chute du jour. Beaucoup d’hommes de mes amis venaient me donner des nouvelles d’heure en heure. L’attaque commença à six heures du matin par Belleville : à dix heures les alliés en étaient maîtres ; Hullin[1] voulait que le maréchal Moncey ordonnât à la garde nationale de sortir, il le refusa et dit que ceux que le zèle porterait à aller combattre en étaient les maîtres, mais qu’il n’en donnerait pas l’ordre. Très peu sortirent et Regnault de Saint-Jean d’Angely, qui s’était porté en avant avec sa cohorte, prit la fuite avec elle au premier coup de canon[2]. À la barrière, le maréchal Moncey lui ôta ses épaulettes et il ne tarda pas à s’aller cacher.

» J’étais toujours avec mes amis et tous les gens de la maison dans le grenier. Comme j’avais beaucoup de foin, dès la veille j’en avais fait faire une meule au milieu du jardin, crainte des bombes, et j’avais fait porter à la place du foin des tonneaux d’eau pour jeter sur les toits. Le bruit du canon approchait : quand on attaqua Montrouge, je voyais la fumée de chaque coup. Cependant j’eus la curiosité de sortir et d’aller sur le boulevard où l’affluence était prodigieuse. Bientôt nous vîmes des officiers blessés qu’on rapportait, quelques-uns mourants ; ils passaient à côté de nous, puis soldats, chariots de munitions, vivandières se précipitèrent en fuyant. Il tomba quelques boulets, un dans le jardin de l’hôtel de Gontaut, un rue Saint-Lazare, mais très peu (car nous apprîmes depuis que l’empereur Alexandre et le roi de Prusse, qui y étaient en personne, envoyaient à tout moment aux diverses attaques, des défenses sévères de tirer sur la ville). Cependant un biscaïen qui tomba et tua une femme à quelques pas de moi sur le boulevard, fit que les hommes qui étaient avec nous m’engagèrent à rentrer. Je remontai dans mon grenier : Montrouge était pris, et l’on attaquait Montmartre. Je vis tout le combat : les Français étaient en haut et les ennemis de l’autre côté de la montagne, le feu était continuel, la fumée empêchait de bien distinguer l’action, on ne voyait que le feu. Bientôt le bruit du canon cessa et nous entendîmes une fusillade très vive, les ennemis étaient en haut de la butte et l’on se battit bientôt à la baïonnette. Alors nous vimes les Français descendre de notre côté et le feu cessa. Il en roula quelques-uns et on voyait des chevaux et des hommes, sans bien les distinguer, étendus sans mouvement sur le flanc de la montagne. Le jour tombait, je descendis dans le salon : ne pouvant plus rien voir nous nous mîmes à table et bientôt le bruit du canon recommença avec vigueur. Cela nous fit lever, on courut aux nouvelles et l’on vint dire que les Français tâchaient de déloger l’ennemi : nos transes recommancérent. On vint nous dire avec effroi qu’on se battait dans le faubourg de Clichy, et que l’ennemi était maître de la barrière. Alors on me conseilla de m’en aller dans l’intérieur. Je ne savais pas alors que l’empereur Alexandre, ce sauveur de la France et de l’Europe, avait envoyé défense à M. le général de Witt, qui avait pris cette barrière, de la passer sous peine de la vie, sans quoi cette partie de la ville eut été livrée à la fureur des soldats. J’allais m’enfuir quand Gotchowski vint me dire que l’on ne se battait plus, et qu’on avait envoyé une députation à Alexandre. On commença à respirer : Alexandre demanda qui signerait la capitulation. On lui offrit d’envoyer chercher le roi Joseph, qui n’était pas loin. L’empereur répondit qu’il ne savait pas ce que c’était que le roi Joseph.

Alors on lui offrit Hullin, refusé : le ministre de la guerre Clarke, refusé. On ne traiterait avec aucun ministre de Bonaparte, mais avec les maires et le commandant de la garde nalionale, maréchal Moncey. La joie se répandit quand on vit revenir le parlementaire avec une branche verte à la main, escorté de deux officiers de la garde nationale. Alexandre ordonnait de se dépêcher, parce que le lendemain, à sept heures du matin, Paris serait bombardé. On demanda vingt-quatre heures, refusé ; on dressa donc la capitulation et malgré les oppositions de Hullin, qui de rage quitta Paris, le maréchal Moncey et les douze maires signèrent. M. de Colin accompagna le parlementaire qui la portait à Alexandre : on lui ôta son épée quand il s’approcha de l’empereur, de sorte qu’il dit : « Sire, pardonnez si un gentilhomme français se présente devant vous désarmé. » Àlexandre répondit : « On vous a ôté votre épée, monsieur, voulez-vous la mienne ? »

» Bientôt on annonça que la capitulation était signée, que l’empereur Alexandre, le roi de Prusse, accompagnés des princes de leur sang, du prince Schwarzenberg et d’un corps d’armée entreraient dans Paris, le lendemain à dix heures. Les troupes de ligne eurent ordre de sortir et permission d’aller rejoindre qui bon leur semblerait, ce qu’elles firent à l’instant[3].

» À peine tout cela était-il fait que M. de Girardin[4] arriva, annonçant que Napoléon arrivait et qu’il fallait rompre la capitulation. Ses cris et ses injures n’émurent personne, le maréchal Moncey demeura ferme et M. de Girardin partit enragé, pour aller rejoindre son digne maître.

» La tranquillité régna aussitôt dans Paris. Chacun fut se coucher attendant avec impatience le moment de contempler le héros qui nous accorde la vie.

» Il a péri environ douze mille hommes de chaque côté dans cette courte mais meurtrière bataille : l’attaque s’est faite sur quatre points différents.

» Le 31 mars, dès dix heures du matin, on battit la générale pour assembler la garde nationale, et on jeta de tous côtés des proclamations de Louis XVIII et une déclaration des alliés, laissant les Français libre de choisir le gouvernement que bon leur semblerait. Une heure après, chacun dans la rue les tenait et on les lisait à haute voix.

» Bientôt on vit paraître à cheval, avec un drapeau blanc et la cocarde blanche au chapeau, ceux que je vais nommer, car il faut que leurs noms aillent à la postérité : le marquis de Lévis et son fils, M. de la Ferté, Maurice de Balaincourt, Fernand de Chabot, Thibault de Montmorency, Finguerlin, et Germain, fils d’un orfèvre[5]. Ils criaient : « Vive le roi ! » et jetaient de l’argent et des cocardes au peuple. Bientôt le nombre des gens à cheval s’augmenta jusqu’à deux cents et une foule immense demandait à grands cris des cocardes.

Seymour, en uniforme anglais, à cheval, deux sacs d’argent devant lui, ses poches remplies d’argent et son chapeau également plein d’argent tout en écus parcourut la ville, les jetant à pleines mains et criant : « Vive Louis XVIII ! » Quand il passait, la foule criait : « Vive le roi ! » Enfin l’armée en bon ordre parut : il y avait cent mille hommes qui n’achevèrent de passer qu’à la nuit, mais quand il y en eut passé vingt mille, on vit l’empereur Alexandre, le roi de Prusse, les princes de leur famille, le grand-duc Constantin, le prince de Schwarzenberg, les généraux, etc. J’étais chez madame de Coislin[6] dès neuf heures et demie avec mesdames de Chalais, de Caylus, de Boufflers, d’Avaray, de Brancas et autres ; chacune avait apporté des centaines de cocardes et nous en jetions par le balcon à tous ceux qui en demandaient. Quand nous n’en eûmes plus, nous coupâmes nos mouchoirs, mais nous nous aperçûmes que beaucoup de polissons nous en demandaient pour aller les revendre. Le tour de la place se remplit bientôt de petits marchands qui en avaient des paniers remplis, elles furent toutes enlevées.

Au passage des souverains et des troupes, la foule remplissait la place ; les fenêtres des maisons retentirent des cris : « Vive Alexandre ! vive le roi, vive Louis XVIII ! vivent nos libérateurs ! » les souverains répondirent en saluant : « Vive Louis XVIII ! » Je revins chez moi à six heures pour dîner, si enrouée de crier que je n’avais plus de voix.

» L’empereur Alexandre ne voulut point loger aux Tuileries, il logea chez M. de Talleyrand, qui est à la tête du gouvernement. Il est un des premiers qui ont pris la cocarde blanche et l’on assure que, depuis trois mois, son arrangement est fait avec les princes. Le soir tout était tranquille à Paris. Le matin du 1er avril, on publia la déclaration des alliés de ne plus traiter avec Bonaparte ni avec personne de sa famille et de conserver l’ancienne France dans toute son intégrité.

» Le soir, Alexandre et Frédéric-Guillaume furent à l’Opéra, ils ne voulurent point aller dans la loge royale, on la garde pour le roi ; on leur donna une loge en face. On n’a jamais vu un plus beau spectacle, ils furent reçus aux acclamations de la salle, qui, de la vie, n’a été si remplie. Bientôt les cris de : « Vive Louis XVIII ! » se firent entendre et les mouchoirs que l’on agitait en l’air, de toutes les loges, faisait le spectacle le plus imposant.

On avait compté donner le Triomphe de Trajan, la modestie d’Alexandre lui fit refuser cet opéra ; on donna la Vestale, mais comme il n’était pas possible d’arranger si promptement les décorations nécessaires, on laissa celles de Trajan.

À tout moment on interrompait le spectacle, même au milieu des airs, pour demander la chanson Vive Henri IV ! avec de tels cris, que si l’on n’avait pas crié soi-même, on n’aurait pas pu résister au bruit ; on a forcé Laïs à venir la chanter cinq fois pendant l’opéra. Ensuite on demanda de couvrir l’aigle qui était au-dessus de la loge de Napoléon : quelqu’un dans la loge supérieure le couvrit d’un mouchoir blanc ; à la fin du spectacle l’aigle fut arrachée, brisée et foulée aux pieds avec des cris et des vociférations épouvantables !

» Le 2 avril, le Sénat se réunit sous la présidence de M. de Talleyrand et la déchéance fut prononcée, le peuple et l’armée relevés de leur serment et Napoléon mis hors la loi !…

» Le 3 avril, le gouvernement provisoire fut or= ganisé et les ministres nommés ; les églises retentirent du Salvum fac regem et malgré la sainteté du lieu on eut peine à arrêter les cris de : « Vive le Roi ! » qui se firent entendre

» Les poissardes sont allées voir Alexandre, elle se sont élues une reine qui a revendiqué le droit ancien d’embrasser le souverain : comme on avait choisi la reine, jeune et jolie, Alexandre s’est prêté avec bonté à cet ancien usage.

» Le soir Leurs Majestés sont allées au Théâtre-Français. On jouait la Jeunesse d’Henri IV. Henri et tous les acteurs avaient d’énormes cocardes blanches : les cris ont été les mêmes qu’à l’Opéra…

» Dans l’entr’acte, une toile de fond s’est baissée et Lafont est venu attacher l’écusson à trois fleurs de lis, il s’est mis à genoux, l’a adoré, et tout le monde a courbé la tête en signe de soumission. Un homme qui a mis son chapeau sur sa tête a été saisi et aurait été assommé, si la garde russe, qui fait le service de moitié avec la garde nationale ne l’avait tiré des mains du parterre irrité. On apprend aujourd’hui la défection du maréchal Marmont et de quatre généraux avec dix-sept mille hommes, qui tous ont pris la cocarde blanche. On crie une proclamation de Moreau où il dévoilé les crimes de Bonaparte, c’est à faire dresser les cheveux sur la tête. Je prends le parti de t’envoyer les journaux. »

Les récits d’Hélène, malgré l’exagération qu’on peut leur reprocher, n’en reflètent pas moins les sentiments d’une classe nombreuse de la société et donnent bien l’impression de la mobilité inouïe qui nous caractérise. Le 30 mars 1814 on se tue aux barrières de Paris, les rues sont encombrées de brancards et de chariots transportant les blessés, douze mille morts du côté des Français sont ramenés dans la ville. Le lendemain l’Opéra regorge de monde et on offre au vainqueur le Triomphe de Trajan, qu’il refuse par modestie. Ce même peuple, qui acclamera le 20 mars 1815 la rentrée de Napoléon dans sa capitale, se rue aujourd’hui sur les cocardes blanches.

Hélène, aussi mobile que les Français, ne tarit pas en éloges sur les Russes, dont elle haïssait jadis la domination en Pologne et qu’elle appelait nos insolents oppresseurs. Elle raconte qu’on avait fait courir le bruit à Paris, dans le peuple, que l’armée russe était une horde de barbares, sales, déguenillés et hideux. « Quand on les vit, on entendait de tous côtés : — Qu’ils sont beaux ! qu’ils sont polis ! et les acclamations retentissaient. »

« Il était venu, dès le matin, beaucoup de cosaques pour différentes commissions, ils regardaient l’entrée des souverains sur les boulevards. C’était curieux de les voir, tenant leur cheval par la bride, pendant que deux ou trois femmes étaient montées dessus pour mieux voir. On s’était tellement familiarisé avec eux, la confiance était tellement établie que des mères leurs confiaient leurs enfants pour les élever au-dessus des têtes, afin qu’ils jouissent de ce surprenant et inconcevable spectacle d’une armée ennemie et victorieuse faisant son entrée au milieu des bénédictions et de la joie publique… »

Les deux Potocki et le général de Witt vinrent déjeuner chez la comtesse, et comme on avait fait courir le bruit que les Russes mangeaient les petits enfants, elle s’excusa de la mauvaise chère qu’elle leur ferait faire, disant : « Je n’ai pu me procurer un petit enfant rôti. » Elle raconte que M. de Talleyrand, interrogé sur ce qu’il pensait lors du passage du Rhin sur l’entrée des alliés en France a répondu : — C’est le commencement de la fin. « Dès cemoment, dit-elle, il travailla à s’arranger avec les Bourbons : On fait des quolibets sur les comtes de la fabrique de Bonaparte ; il y en a de quatre sortes : 1o les sénateurs, les comtes bleus, 2o les chambellans, les comtes à dormir debout, 3o les officiers d’ordonnance, les comtes courants, et 4o les généraux les comtes rendus :… »

Quelques jours après cette lettre, la comtesse, étant allée se promener à Saint-Ouen, vit arriver auprès d’elle un homme de tournure élégante et décoré de plusieurs ordres ; il l’aborda avec la plus grande politesse, et lui dit : « Madame, je suis Pasquier, préfet de la police. Je viens vous demander une grâce : Monsieur voudrait savoir si vous ne seriez point dérangée de recevoir le roi, dans votre château, pour une nuit, la veille de son entrée à Paris. » Hélène répliqua que le roi était le maître du château et de tout ce qu’elle possédait, mais qu’elle priait M. le préfet de l’examiner avec elle. La comtesse, au moment de l’approche des alliés, avait fait démeubler Saint-Ouen. Le préfet trouva les salles superbes mais vides et reconnut l’impossibilité de les faire meubler rapidement par la comtesse : il décida qu’on enverrait, dès le lendemain, une nombreuse escouade d’ouvriers avec des tentures et des meubles du mobilier de la couronne. En vingt-quatre heures tout fut prêt.

Le lundi 2 mai, au matin, la comtesse arrivait à Saint-Ouen avec Sidonie et le comte Jaroslaw Potocki, neveu du comte Vincent, pour recevoir le roi :

« Quand nous arrivâmes, nous trouvâmes que M. le prince de Condé et M. le duc de Bourbon y étaient déjà. M. d’Osmond nous présenta à M. le prince de Condé et M. le marquis de Mortemart à M. le duc de Bourbon. Le prince a soixante dix-huit ans, mais il est plein de forces, et se tint presque toute la soirée debout : il nous dit mille choses obligeantes. M. le duc de Bourbon avait l’air profondément triste ; on voit bien que le sol de la France, arrosé du sang de son fils, sera pour lui une vallée de misère.

» Bientôt tout ce qu’il y a de nobles à Paris, hommes et femmes, remplirent les salons : c’était une foule dont on ne peut se faire d’idée. Vers les cinq heures, le roi et madame la duchesse d’Angoulême arrivèrent : les cours, le chemin étaient remplis de peuple et les cris de : « Vive le roi ! » nous l’annoncèrent. Il salua gracieusement et entra dans son appartement. Madame la duchesse d’Angoulême traversa et passa dans le sien. Au bout d’une demi-heure, on annonça aux femmes qu’elles pouvaient entrer. On s’avança à la file, l’une après l’autre ; le roi était assis au milieu de la chambre, entouré des maréchaux ; le duc de Duras, que tù connais, était derrière son fauteuil et lui nommait les femmes à mesure qu’elles passaient. Le roi remercia la comtesse et lui dit avec beaucoup d’affabilité qu’il s’excusait d’être un hôte aussi incommode, puis il ajouta : « Ce » n’est pas la première fois que les Potocki nous » donnent l’hospitalité ! »

» Le roi assis est un très beau prince, sa tête est noble et pleine d’expression, son sourire gracieux et sa physionomie agréable ; mais debout, en marchant, il se dandine excessivement, ce qui est une disposition naturelle à sa maison, que, chez lui, la goutte augmente encore.

» Madame la duchesse d’Angoulême est charmante, elle a un air de mélancolie qui touche le cœur, ses traits sont un mélange de ceux de son père avec ceux de la maison d’Autriche, ses cheveux sont d’une couleur admirable : en saluant, en s’inclinant, dans ses gestes, elle a de l’air de la reine et la rappelle beaucoup. »

Après la réception, la comtesse revint à Paris très fatiguée. Pendant la nuit qui suivit l’arrivée de Louis XVIII à Saint-Quen, c’est-à-dire la veille de son entrée dans Paris, une aventure assez piquante se passa au château. Le roi confia le soin de sa garde au duc de Berry, lui ordonnant de commander dans Saint-Ouen et il se retira dans ses appartements, fort tranquille, le laissant, à ce qu’il croyait, fort heureux de cette marque de confiance. Il se trompait : le duc avait arrangé pour cette nuit même un rendez-vous avec sa maîtresse, qui était alors mademoiselle Virginie Le Tellier, « danseuse de l’Opéra, jolie comme un ange et bête comme un chou ».

Très contrarié de l’incident, le prince se promenait de long en large dans son appartement : il s’arrêta tout à coup et dit au maréchal Oudinot, qui était auprès de lui : « Monsieur le maréchal, cela m’ennuie fort de rester ici. » Le maréchal s’inclina sans répondre. Le duc prit ses deux mains, et parlant rapidement, comme quelqu’un qui ne veut pas être interrompu, il ajouta : « Mon cher maréchal, je vous confie le commandement que le roi m’a donné, je ne puis le remettre entre de meilleures mains ; pas un mot, je pars pour Paris. »

Lorsque le prince fut parti, le maréchal, de mauvaise humeur, dit au commandant de la garde nationale, qui était aussi dans la chambre : « — Savez-vous, commandant, que c’est fort ennuyeux ce que vient de faire le duc de Berry ; je voulais précisément revoir ma femme cette nuit ; demain nous avons l’entrée dans Paris, impossible de la voir. Ma foi, il faut que vous preniez le commandement à ma place, je reviendrai au petit jour.

» — Mais, monsieur le maréchal, s’écria le commandant effrayé, comment voulez-vous que vos lapins de la vieille garde reçoivent des ordres d’un officier de la garde nationale !

» — Bah ! tu plaisantes, tu es un solide garçon, un bon patriote et un bon royaliste, cela suffit. Voilà qui est décidé ! » Et le maréchal part à franc étrier.

L’officier parcourut les postes, ordonna les rondes, donna les ordres nécessaires, et quand toute la besogne de sûreté fut terminée, il sentit alors une fatigue et un besoin de sommeil impérieux.

« Après tout, se dit-il, je serais bien simple de me tourmenter quand les autres se donnent du bon temps. Ma foi, je vais dormir. » Et, appelant un colonel de la ligne sur lequel il pouvait compter : « Mon cher, je vais me coucher et je vous laisse la garde de Saint-Ouen. » Un quart d’heure après il dormait du sommeil du juste : voilà comment le roi fut gardé à Saint-Ouen.

Malgré la fatigue de la veille, la comtesse se leva à six heures du matin le lendemain, afin de déjeuner de bonne heure et d’arriver, pendant que les voitures circulaient encore, chez Lerebours, l’opticien du Pont-Neuf, qui lui avait envoyé trois places. « Cela nous réussit très bien, et je fus placée en avant, à un des coins du balcon, visà-vis la statue d’Henri IV. Elle a été promptement exécutée en plâtre, sur un piédestal, exactement comme l’ancienne ; elle est fort belle et on va la faire en bronze. Des deux côtés de la statue, à quelque distance, on avait élevé deux temples en bois ouverts ornés de festons, guirlandes et candélabres. On ne conçoit pas comment cela a pu se faire si promptement ; ces deux temples renfermaient deux orchestres au-dessous de la statue ; sur des gradins étaient cent jeunes filles de la ville, vêtues de blanc, couronnées de lis et portant des corbeilles de fleurs, pour les jeter sur le passage du roi. Deux haies de garde nationale bordaient le pont ; la maison de Lerebours et celles qui donnent sur le pont étaient ornées de tentures et de guirlandes de haut en bas. En général toutes les rues où le roi devait passer ont été ainsi tapissées de tentures des Gobelins et de festons.

» Le roi était parti de Saint-Ouen à dix heures, il alla à Notre-Dame et ne passa sur le Pont-Neuf en revenant, qu’à cinq heures et demie. De la vie on n’a vu une foule semblable, les ponts, les quais, les toits des maisons étaient remplis de monde. Tous les gens qui ont vu le sacre et les entrées de Bonaparte disent que ce n’est pas comparable.

» Le cortège était magnifique, les bataillons à pied et les escadrons à cheval de la garde nationale ouvraient la marche, ensuite la gendarmerie, puis l’ancienne garde de Bonaparte qu’on a ralliée au roi, teis que les grenadiers, chasseurs, dragons et lanciers français, tous présentaient les armes devant la statue de Henri IV.

» Les voitures du sacre de Bonaparte ont servi ; on leur a vite ajouté l’écusson des armes de France. Il y en avait vingt-quatre, toutes attelées de huit chevaux. Celle du roi était une magnifique calèche attelée de huit chevaux blancs. Il était assis dans le fond, ayant à sa gauche, madame la duchesse d’Angoulème, sur le devant était M. le prince de Condé et M. le duc de Bourbon son fils, quant à Monsieur et à M. le duc de Berry ils étaient à cheval à la portière, ainsi que les maréchaux. Le duc d’Angoulème était encore dans le Midi. Pendant la marche, les orchestres exécutèrent l’air Vive Henri IV ! et au passage de la voiture du roi, on joua Où peut-on être mieux qu’au sein de sa famille. Les jeunes filles descendirent de leurs gradins et versèrent leurs corbeilles de fleurs devant les pas des chevaux du roi, aux acclamations de la multitude. Le roi et les princes ôtèrent leurs chapeaux en passant devant la statue.

» Le roi était vêtu de l’ancien uniforme des maréchaux de France, madame la duchesse d’Angoulème, qui la veille avait un costume à l’anglaise qui nous paraissait un peu singulier, était déjà vêtue à la française, d’une robe blanche lamée d’argent et d’une toque ornée de superbes plumes blanches ; elle était très bien mise. On lui a donné tous les diamants de la couronne qu’on a repris. Il était sept heures avant que je pusse revenir chez moi ; heureusement j’avais rempli mon ridicule de petits pains de la Mecque, sans quoi j’aurais souffertde la faim. »


» Saint-Ouen, 22 mai,


» Samedi les Mostowski et le prince Adam Czartorisky vinrent dîner avec moi ; le roi allait pour la première fois ce jour-là à la Comédie-Française. Comme j’avais précisément ma loge, je leur proposai d’y venir, ils acceptèrent. Le roi ne fut point placé dans sa loge, on ne l’y aurait point assez vu, on lui avait dressé une loge en avant de l’amphithéâtre, magnifiquement décorée en velours bleu chargé de broderie de fleurs de lis ; au-dessus était l’écusson de ses armes, avec le sceptre et la main de justice en sautoir.

» On le reçut comme à l’Opéra, avec des applaudissements excessifs, ainsi que madame la duchesse d’Angoulème. On donnait Héraclius. Dès le commencement est ce vers :

 » Tyran, descends du trône et fais place à ton maître ! 85


Mille cris s’élevèrent de : Vive le roi !… » Je trouve que l’on a eu tort de choisir cette pièce : elle contient des allusions trop directes aux malheurs qui ont frappé Madame, on a craint un moment de la voir s’évanouir, ses yeux étaient inondés de larmes ; elle a baissé la tête pour les cacher. Après la pièce mademoiselle Mars s’est avancée et a chanté des couplets avec une grâce et une sensibilité qui valaient mieux que la plus belle voix. Un d’eux disait à Madame que, si l’espérance des Français avait été trompée pendant qu’elle habitait un sol étranger, le lis devait fleurir en touchant le sol natal. Alors le roi se tourna vers Madame et applaudit ; tu imagines bien qu’on le seconda de manière à ébranler la salle.

» On avait regardé Madame avec un scntiment mêlé de douleur pendant la tragédie, on osait à peine applaudir ce qui la concernait ; alors on voulut lui témoigner l’intérêt, l’atlendrissement, la joie qu’on éprouvait : les acclamations redoublèrent, elle se leva et salua le roi et l’assemblée avec une noblesse parfaite. Cette princesse, fille de Louis XVI, petite-fille de Marie-Thérèse, sœur de Louis XVII, nièce de roumain et de Joseph II, destinée à régner, pourra dire aux Français si elle a un fils : Moi fille, femme, sœur et mère de vos maîtres.

» Tous les émigrés qui avaient servi les princes sont revenus. Avant-hier, j’ai été à un concert chez madame Vigée-Lebrun ; tout le monde s’amuse de voir M. de Vaudreuil en faire les honneurs comme il y a vingt-cinq ans. Ils paraissaient fort bien ensemble malgré la lacune ; ils se sont retrouvés comme le beau Cléon et la belle Javotte et auraient bien pu ne pas se reconnaître.

» Madame la duchesse de Bourbon est aussi arrivée : elle loge à l’hôtel de Monaco, rue de Varennes. M. le duc de Bourbon ne l’avait pas vue depuis vingt-cing ans : sa conduite en tout genre était une raison suffisante, mais l’excès du malheur qui leur est commun ne leur laisse que ce cruel souvenir. M. le duc de Bourbon est allé tout de suite chez elle, et ils se sont jetés-dans les bras l’un de l’autre en pleurant.

« Tous les Polignac sont ici, excepté Jules qui est commissaire du roi au Languedoc. Melchior est très grandi, c’est vraiment un très joli jeune homme ; mais qui est beau comme un ange, c’est le fils de madame de Guiche, Agénor, actuellement duc de Guiche : il est venu avec son père le duc de Grammont…


« 8 juin.


» Jeroslaw Potocki, Stanislas Potocki et Branicki vont nous quitter ; Tout s’en va et nous allons être livrés à nous-mêmes. Il faut espérer qu’instruits par l’expérience nous n’aurons plus besoin qu’on vienne nous mettre à la raison : la leçon a été un peu dure, et elle devait l’être bien davantage, si les Français avaient eu affaire à des gens semblables à eux, qui eussent usé de représailles, traité Paris comme ils ont traité Moscou et dévasté la France comme ils avaient dévasté l’Allemagne, l’Espagne, l’Italie et la Russie.

» Je n’ai point encore de tes nouvelles, c’est inconcevable ; je mets tout cela sur le compte de l’éloignement pour ne pas me désespérer. »


« 26 juillet,


» On ne se fait pas d’idée comme Paris est changé. Toutes les physionomies ont pris une teinte plus gaie ; cela se fait remarquer même dans le peuple. On ne s’occupe que de bals, de promenades et de fêtes, et, si je n’avais pas de chagrin de ton silence, je prendrais bien volontiers part à la joie publique. M. le duc de Berry est extrêmement à la mode dans la société, il chasse à tous moments dans le bois de Boulogne : tous les jeunes gens ont la liberté de le suivre et toutes les dames de bonne compagnie qui se trouvent à la promenade, autant qu’il en faut pour remplir une vingtaine de calèches toujours prêtes, sont invitées à y monter. On s’adresse aux premières qu’on trouve, pourvu qu’elles soient connues. M. le duc de Berry, pendant la chasse, vient plusieurs fois aux calèches parler aux dames chapeau bas : cela rappelle Louis XIV.

» La chasse finie, on prie celles qui l’ont suivie de venir à Bagatelle, que le roi a donné à M. le duc de Berry.

» Dès que l’on arrive, des aides de camp viennent le chapeau bas donner la main aux dames, si on les prie de mettre le chapeau, ils répondent que le prince n’étant pas couvert ils ne le peuvent pas. Il est toujours sur le perron, et ne le quitte que lorsque les dames de la dernière calèche sont descendues. On va alors dans le salon où un superbe déjeuner est préparé. »


Toutes ces fêtes ne parvenaient que par instants à distraire Hélène de ses préoccupations. Le comte, absent depuis le mois de mars, au grand désespoir de sa femme, prolongeait un séjour dont le terme ne dépendait peut-être pas de sa volonté. La guerre avait rendu les voyages et toutes les communications difficiles et les lettres s’égaraient fréquemment. Privée depuis deux ou trois mois de celles de son mari, la comtesse se désespérait, et son inquiétude redoublait en voyant les dernières ressources pécuniaires disparaître rapidement.

Le comte, en arrivant en Pologne, devait envoyer une somme importante pour solder un arriéré assez considérable, et sa femme, au lieu de cela, continuait à dépenser sans recevoir un sol. Elle n’osait diminuer son train de maison dans la crainte d’effrayer ses créanciers.

Enfin les lettres du comte arrivèrent toutes à la fois ; l’irrégularité des postes était seule cause de leur retard : elles annonçaient plusieurs envois d’argent considérables. Malheureusement le banquier Fontana, auquel ils étaient adressés, ne se trouvait pas à Pétersbourg.


LA CONTESSE HÉLÈNE AU COMTE VINCENT


« 6 septembre 1814.


» Je crains en vérité, écrit-elle, qu’il ne soit arrivé quelque malheur à Fontana, ce qui en serait un bien grand pour nous. Je ne conçois pas que ma santé résiste à tant de chagrins, que je suis obligée de renfermer et que je ne puis confier à personne. Je vois par tes différentes lettres que d’importantes affaires occasionnent ton séjour en Ukraine, rien de plus raisonnable et de plus juste ; mais je vois aussi qu’après les contrats il n’est pas sûr que tu puisses me rejoindre, cela me détermine absolument à partir. Je n’attends donc que les fonds pour pouvoir payer ce que je dois personnellement.

» J’ai reçu une lettre d’Hoffmann, il me mande qui tu es à Niemirow. Je me flatte que ce lieu si rempli de doux et d’amers souvenirs te fera penser à moi. Le grand érable existe-t-il encore ? porte-t-il encore les caractères que j’ai tracés sur son écorce ? Il a été témoin des moments les plus heureux et les plus malheureux de ma vie. Tout ce qui peut m’arriver maintenant en bien ou en mal ne saurait en approcher ; d’ailleurs quand on avance vers le terme, tout devient plus indifférent, on entrevoit une sûre et inévitable consolation. Que ne puis-je aller faire ma dernière prière dans cette pauvre église de Kowalowka ! Que ne puis-je reposer éternellement auprès de ceux qui y dorment. Si les âmes, après la mort, errent et peuvent se transporter d’un lieu dans un autre, ce sera là que je me réunirai à ceux à qui je tenais par des liens que l’inconstance humaine n’a pu rompre et que la mort seule pourra trancher !

» Adieu, Vincent, le courage et le papier me manquent pour te parler d’autre chose. »

Enfin l’introuvable Fontana annonce son arrivée et celle de cent vingt-cinq mille livres envoyées par le comte depuis longtemps déjà, cela ne changea en rien les projets de la comtesse, qui écrit à son mari :

« Je vais faire les payements que tu m’as ordonnés, mettre tout en ordre et partir d’ici à quelques jours ; j’y suis bien décidée. Si je n’en avais eu la possibilité qu’au mois de décembre, je serais partie tout de même et les glaces du plus rigoureux hiver ne m’auraient pas arrêtée. Je prends mes précautions pour pouvoir entrer en Russie, et j’irai te chercher jusqu’à Kiew s’il le faut. Te voir est le premier besoin de mon cœur ; pour cela dès ma jeunesse, j’ai tout sacrifié, franchi tous les obstacles. Souffrir pour me réunir à toi ne sera pas chose nouvelle : la perte de ma santé, de ma vie, ne m’effraye pas, vivre loin de toi est ma seule épouvante ! C’est pour cela que je partirais même au milieu du froid le plus excessif, ne fut-ce que pour te voir une minute, à moins que je ne reste en chemin, et c’est ce dont je me soucie le moins. Je souris de dédain quand tu me parles froidement de ma santé ; il ne s’agit pas de vivre, il s’agit de ne pas souffrir. Tu ne connais pas encore une passion de la trempe de la mienne : quand je ne serai plus tu pourras en faire la curieuse histoire, pour servir à celle du cœur humain. Tu as vu ses commencements, ses progrès, son état de perfection, les épreuves et les maux sans nombre qui l’ont assaillie ; il faut encore que tu l’observes à sa fin, car très probablement ce n’est plus moi qui la décrirai !

» Il est singulier que ma destinée me rappelle en Ukraine (car tu peux bien croire que je ne resterai pas à sa frontière), il me semble que quelque chose m’y pousse et m’y attire, je dois apparemment y recevoir le complément de ma destinée, il est juste que ce soit là plutôt qu’ailleurs ! »


Il est difficile d’exprimer avec plus d’ardeur et de passion un sentiment plus sincère : le comte en fut touché. Mais, il s’effrayait à juste titre de voir Hélène entreprendre un tel voyage à l’entrée de l’hiver, sans avoir à lui offrir une installation quelconque en Ukraine ou à Brody. Ses défenses réitérées ne servirent à rien, et la comtesse partit le 1er octobre.

  1. Hullin (le comte Pierre-Augustin), né à Genève le 6 septembre 1758. Il vint à Paris comme brocanteur de montres, il entra un des premiers à la prise de la Bastille, fut persécuté et arrêté pendant la Terreur. Il sortit de prison le 9 Thermidor, fit brillamment les campagnes d’Italie et devint général de division après la bataille de Marengo en 1804. Il présida le conseil de guerre qui condamna le duc d’Enghien. Il était commandant de Paris en avril 1814.
  2. Ce fait fut l’objet d’une enquête du conseil de discipline. Le général Dessoles rendit publique la déclaration du conseil qui justifiait le comte Regnault de Saint-Jean d’Angely de cette imputation et fait entendre que des ordres et « d’importants intérêts politiques motivèrent seuls son retour dans la capitale. Nous profiterons de cette rectification pour dire, une fois pour toutes, que nous n’assumons pas la responsabilité du plus ou moins d’exactitude des récits de la comtesse. Ses opinions toujours extrêmes doivent influencer ses appréciations et leur ôter beaucoup d’impartialité. C’est au lecteur à en juger, le cadre de notre travail ne nous permet pas de rectifier chaque assertion hasardée.
  3. Le maréchal Moncey les rassembla dans les Champs-Élysées et partit à leur tête. Il n’y avait pas plus de 12 à 15 000 hommes de troupes de ligne dans Paris quand l’attaque commença, et à peine 50 000 de garde nationale, tandis que l’ennemi avait 200 000 hommes devant Paris.
  4. Le comte Alexandre-Louis-Robert de Girardin, lieutenant général de Napoléon, né en 1776, père d’Émile de Girardin.
  5. Le comte Germain, dont on parle, était le petit-fils et non pas le fils du célèbre Thomas Germain, orfèvre du roi Louis XV et échevin de la ville de Paris. Thomas Germain eut un fils directeur de la Banque de France, et père du comte Germain dont il est ici question. Le comte Germain avait été nommé chambellan et comte par Napoléon, il fut en effet, au 31 mars 1814, un des officiers qui montrèrent le plus de sympathie à la cause des Bourbons.
  6. Madame de Goislin habitait un des hôtels de la place Louis XV, à côté du Garde-Meuble.