Histoire du Parnasse/Théophile Gautier

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Éditions "Spes" (p. 1-26).

CHAPITRE PREMIER

Théophile Gautier

Le véritable ancêtre du Parnasse est sans contredit Théo. Le vieux bousingot, l’ancien soldat d’Hernani, quitte, lui aussi, l’armée romantique. Il ne déserte pas, il garde un culte pour son ancien drapeau, mais il en arbore un autre, qui est le sien[1]. Bien entendu il conservera toute sa vie sa diathèse romantique[2]. Ainsi, le 9 avril 1868, il écrit à Sainte-Beuve pour lui certifier qu’il n’est pas mort ainsi que le bruit en a couru : « Mon oncle…, je n’ai pu aller lundi au Roi Lear. Ma qualité de vieux romantique a fait penser sans doute que mon absence d’une représentation de Shakespeare ne pouvait être motivée que par ma mort[3] ». Deux ans plus tard, on constate encore chez lui une rechute de romantisme : le Ier novembre 1870, à un banquet chez Brébant, les convives rabâchent sur les causes de notre défaite ; Nefftzer s’écrie : — Ce qui a perdu la France, c’est la routine et la rhétorique, — et Théo précise en soupirant : — Oui, c’est le classicisme[4] !

N’importe, il se détache de l’École de 1830, et se distingue de plus en plus de tout le romantisme[5] ; on peut même fixer la date : c’est en 1835, dans la préface de Mlle de Maupin, qu’il reconnaît le divorce entre la poésie romantique et la société nouvelle ; il récidive en 1837, et c’est un parnassien, G. Lafenestre, qui le constate : Théo brise « les chaînes étroites de la formule romantique, pour se précipiter sur la grande route du beau éternel[6] ». Pour préciser cette orientation nouvelle, il faut ajouter que, de très bonne heure, Théo avait étudié la littérature grecque, et que l’hellénisme est, selon l’expression de Baudelaire, « la véritable clef de sa chambre spirituelle[7] ». Son plus intime confident, Bergerat, nous dit, sans trop grande exagération, que « son âme, la plus antique qui fut jamais », aimait l’ancienne Grèce[8]. C’est cet amour qui lui avait fait accepter une proposition de Buloz ; alors Commissaire royal auprès du Théâtre Français, celui-ci lui avait demandé de traduire en vers L’Orestie ; le projet ne fut pas mené à sa fin, mais il y avait eu un commencement d’exécution : on retrouve dans ses œuvres complètes le monologue du début[9]. Son hellénisme procède de Chénier ; Gautier en parle avec une sorte de reconnaissance : « on peut dater d’André Chénier la poésie moderne… Un frais souffle venu de la Grèce traversa les imaginations ; l’on respira avec délices ces fleurs au parfum énivrant qui auraient trompé les abeilles de l’Hymette. Il y avait si longtemps que les Muses tenaient à leurs mains des bouquets artificiels…, où jamais ne tremblait ni une larme humaine, ni une perle de rosée ! Ce retour à l’antiquité, éternellement jeune, fit éclore un nouveau printemps[10] ». Chénier évidemment ne suffirait pas pour l’inféoder à l’hellénisme, mais Gautier ajoute la lecture des textes, dans le texte ; même malade, mourant, et ne lisant presque plus rien, il garde un livre de chevet sur lequel il promène ses yeux de myope, y prenant visiblement intérêt et plaisir, et c’est l’Iliade, en grec, qu’il relit, pour la trentième fois, aussi facilement que nous lisons un journal[11]. Cette intimité avec la Grèce l’éloigne irrésistiblement du romantisme. Aussi, Sainte-Beuve a-t-il raison de constater qu’après avoir fait partie du groupe Hugo, Gautier s’en est détaché, et qu’il est devenu à son tour « un chef de branche[12] ». Il reste personnellement fidèle à V. Hugo ; peut-il oublier que dans le Vert-Vert du 15 décembre 1835, Hugo a publié sur Mlle de Maupin un article aimable, un peu vague du reste, et qui n’est même pas signé[13]. Mais il ne faut pas en demander trop à Hugo, et Gautier paye bien sa dette ; dans son Rapport, en 1864, il a le courage de magnifier les œuvres de l’exilé, les Contemplations, la Légende, les Chansons des rues et des bois ; rédacteur littéraire du Journal Officiel, il ne peut tout de même pas louer les Châtiments[14]. L’amitié de Gautier pousse le courage jusqu’à la témérité : apprenant que son article sur la reprise d’Hernani, le 20 juin 1867, est accroché au Moniteur et qu’on n’ose le publier sans l’autorisation du Ministre, Gautier va chez M. de la Valette, et lui donne le choix entre son feuilleton publié ne varietur, et sa démission[15]. Le Ministre a le bon goût d’accepter le feuilleton, et Gautier passe à la caisse pour toucher ses droits d’auteur : « si petite que fut la somme, dit M. Dreyfous, elle lui était indispensable pour soutenir les dépenses urgentes de la maison. Au moment où il avait offert sa démission, il ne s’était pas demandé comment il gagnerait sa vie le lendemain, si elle était acceptée[16] ». Inutile de multiplier les preuves de son dévoûment chevaleresque à V. Hugo[17]. Il en a été récompensé par l’admiration de Banville :


Éclatant de joie et de lustre
Il appartient, sous le ciel bleu,
À la même lignée illustre
Que Hugo son maître et son dieu[18].


De la même lignée ? Bravo. Son dieu ? Peut-être. Son maître ? Non[19]. Il est toujours l’admirateur de V. Hugo, mais il n’est plus fanatique. Il entrevoit des imperfections dans l’œuvre du Dieu, dans les Chansons particulièrement, mais, dit-il, à M. Dreyfous, « si j’avais le malheur de penser qu’un vers de Hugo ne fût pas bon, je n’oserais pas me l’avouer à moi-même, tout seul, dans la cave, sans chandelle[20] ». Il finit pourtant par le crier sur les toits : en février 1868, dans sa préface aux œuvres de Baudelaire, il pense « au saint Jean poétique qui rêve dans la Pathmos de Guernesey[21] ». Veuillot seul allait plus loin : — Jocrisse à Pathmos ! — Hugo ne pardonna ni à l’un, ni à l’autre : invité à assister aux funérailles de Gautier, il resta à Pathmos, et laissa à son fils le soin de le représenter, ce qui suffisait pour « un disciple bien dévoué », comme disait François Hugo avec une candeur filiale : « Touchante niaiserie ! » remarque Dreyfous[22]. En effet, Gautier n’était plus l’élève de Hugo ; il était devenu, à son tour, sinon le chef du Parnasse, du moins son inspirateur.

Théo a toutes les qualités qui font un entraîneur de poètes : il en a même une de trop, car c’est un merveilleux improvisateur, à faire pâlir Glatigny[23]. Le don de l’improvisation est un perfide conseiller de platitudes, témoin Lamartine. Et pourtant cette dangereuse facilité permet à Gautier d’improviser des vers délicieux qui semblent l’effet d’une longue recherche, tant ils sont près de la perfection[24]. On les lit au milieu des œuvres les plus travaillées du maître sans pouvoir se douter que ce furent les songes d’une soirée d’été. Un Banville, un Hugo même, eussent usé, abusé de ce don prodigieux. Le grand artiste, lui, ne voyait là qu’un point dè départ pour aller vers cette perfection qu’il enseignait par ses préceptes et par son exemple. Quelles sont ses étapes dans sa marche vers la beauté ?

Il part de son amour pour la beauté pure. Il ne la trouve pas dans l’homme : « l’homme est laid, dit-il à Bergerat, partout et toujours, et il me gâte la création[25] ». Théo, qui est pourtant beau comme un oriental, n’est guère content de lui-même : un jour que Maxime Du Camp lui demande quel don il aurait voulu posséder, il répond : la beauté[26] ! Déçu, Gautier cherche, âprement, ce qu’il n’a pu trouver dans l’humanité : « j’ai usé ma vie à poursuivre, pour le dépeindre, le Beau sous toutes ses formes de Protée, et je ne l’ai trouvé que dans la nature et dans les arts[27] ». Pour peindre la nature, Gautier ne se sert que des données de la vision ; il laisse les autres paysagistes faire appel à tous les sens, à toutes les sensations[28]. À ses débuts, ou quand il écrit en simple prose, il est coloriste ; il peint avec des mots, et ainsi il peut tout rendre : « je me suis lancé à la conquête des adjectifs, dit-il à son gendre ; j’en ai déterré de charmants et même d’admirables, dont on ne pourra plus se passer. J’ai fourragé à pleines mains dans le xvie siècle… J’ai mis sur la palette du style tous les tons de l’aurore et toutes les nuances du couchant ; je vous ai rendu le rouge, déshonoré par les politiqueurs ; j’ai fait des poèmes en blanc majeur, et quand j’ai vu que le résultat était bon, que les écrivains de race se jetaient à ma suite, et que les professeurs aboyaient dans leurs chaires, j’ai formulé mon fameux axiome : Celui qu’une pensée, fût-ce la plus complexe, une vision, fût-ce la plus apocalyptique, surprend sans mots pour les réaliser, n’est pas un écrivain[29] ». Ce qu’il cherche, lui, c’est l’image, et l’image prolongée ; il révèle une partie de son secret dans une boutade entre amis : « Moi, je suis fort ; j’amène 357 sur la tête du Turc, et je fais des métaphores qui se suivent : Tout est là[30] ». Cette maîtrise du style, au service de quelle idée va-t-il la mettre ? Est-ce l’apôtre de la doctrine de l’art pour l’art[31] ? Écartons cette formule qui n’est pas claire. Gautier pense que l’art est sa propre fin ; qu’il ne faut pas y voir un générateur du bien, mais un instrument du beau ; que le beau n’a rien à voir avec la morale. Il dit à son confident habituel : « J’aurais décrit Sodome très volontiers, et la tour de Babel avec enthousiasme. Je ne travaille pas pour le prix Montyon, et mon cerveau fait du mieux qu’il peut son métier de chambre noire[32] ».

Ce culte exclusif du beau, de la forme, lui faisait-il sacrifier le fond ? On l’a cru, en vertu de quelques anecdotes mal comprises, où l’on n’a pas su découvrir une ironie pourtant très apparente : un jour, entrant au Moniteur, il y trouve son autre gendre, furieux : Qu’y a-t-il, demande Théo, très calme. — Il y a, répond Mendès, que cet animal de prote m’a fait faire un non-sens ; j’avais mis : « le roi du jour s’avance » ; il a imprimé le roi des ours. — Théo répète les deux formules, les scandant, les comparant comme beauté du son : « le roi du jour… le roi des ours… le roi du jour… Le prote a raison : le roi des ours fait mieux ». Et Théo passe, impassible en apparence, au fond plein de mépris pour Mendès et pour la valeur de sa pensée[33].

Si l’on veut savoir sérieusement quelle valeur exacte Th. Gautier donne aux mots, ne prenons pas ces anecdotes où le narrateur modifie toujours un peu ce qu’il a entendu dire ; écoutons l’écrivain lui-même. Étudions la rhétorique qu’il a esquissée dans un article sur la divine épopée de Soumet : on croirait d’abord qu’il a été écrit par un austère philologue, intransigeant dans son respect de la langue : il condamne les néologismes du malheureux poète avec un superbe dédain : « M. Soumet ne paraît pas savoir qu’une langue s’appauvrit de tout ce qu’on lui ajoute, et que, s’il est permis de créer des mondes, il ne l’est pas de créer des mots ». Il corrige le texte de Soumet avec une sévérité de professeur de quatrième, relevant ses fautes de grammaire, lui rappelant qu’on n’a pas le droit « d’accoupler un verbe positif à un substantif métaphysique : on n’incruste pas une souffrance ». Puis, l’artiste reparaît, et parle au nom de la beauté qu’il connaît bien, au nom de la perfection littéraire : « nous croyons que l’on s’est mépris sur la véritable portée de l’art ; l’art, c’est la beauté, l’invention perpétuelle du détail, le choix des mots, le soin exquis de l’exécution ; le mot poète veut dire littéralement faiseur : tout ce qui n’est pas bien fait n’existe pas[34] ». Le « faiseur » ne mérite vraiment le nom de poète que s’il écrit en vers. Là encore Gautier a réfléchi à son art : il a sa poétique.

Son art du vers est, dans l’ensemble, celui des romantiques, celui de Hugo, celui aussi de Baudelaire, qu’il admire fort[35]. Mais il a sur la rime des idées personnelles : il voudrait qu’à ses débuts chaque apprenti-poète se fît un dictionnaire de rimes ; il ne faut pas en acheter un tout fait[36]. Et pourquoi ? Le mot à la rime est pour Théo le générateur du vers. Un dé ceux qui l’ont vu au travail croit remarquer qu’il va de la rime à l’idée[37]. Pourtant il est d’esprit plus large que Sainte-Beuve, il ne voit pas dans la rime l’unique harmonie du vers. Il attache au contraire, la plus grande importance au rythme : il tâtonne longtemps avant de se décider ; ainsi le sonnet Modes et Chiffons est d’abord essayé en octosyllabes :


Si j’étais Pétrarque ou Ronsard,
Prenant une lyre païenne
Ou la mandore italienne,
Je vous chanterais avec art.


Il se sent à l’étroit dans ce petit vers, et cherche si l’alexandrin ne ferait pas mieux :


Si j’étais ou Pétrarque, ou Shakespeare ou Ronsard,
Maniant la mandore ou la lyre païenne,
De concettis, suivant la mode italienne,
Je voudrais pailleter un sonnet avec art.


Cette forme, maintenant, lui paraît trop large pour l’idée qui est menue ; la cheville apparaît, ou mieux, la bourre, comme disait Malherbe. Alors, il se décide pour le vers de dix pieds qui, dans sa légèreté ironique, convient mieux au sujet :


Si comme Pétrarque ou le vieux Ronsard,
Viole d’amour ou lyre païenne,
De fins concettis à l’italienne
Je savais orner un sonnet plein d’art[38]


Son traité de versification a le grand avantage de ne pas présenter de termes techniques. Pour définir le vers de douze pieds sans césure, il exprime la sensation produite par ce vers, dans une image : « la coulée d’un seul jet du grand alexandrin[39] ». Sa poétique a cette grande supériorité sur les traités classiques qu’elle est écrite par un poète. Il parle du vers avec le respect que mérite une forme qui assure l’immortalité de l’œuvre et de l’auteur : « quand l’on écrit des vers, il faut songer que ce seront peut-être précisément ceux-là seuls qui resteront de nous dans mille ans, car on ne retrouve de toute une civilisation disparue que des fragments de statues et des lambeaux de poèmes, du marbre et des vers[40] ! »

Remarquons cette image : elle est une époque dans la vie littéraire de Gautier. Jeune romantique, il compare la poésie à la peinture ; maintenant, conscient de sa force, de son originalité, sentant que grâce à lui un art nouveau va paraître, il change son terme de comparaison : « le vers est matière étincelante et dure comme le marbre de Carrare, qui n’admet que des lignes pures et correctes, et longuement méditées. L’on a dit que la peinture était sœur de la poésie ; cela serait bien plus vrai de la sculpture ; en effet, le poète et le statuaire cachent dans une forme réduite d’immenses travaux d’idéalisation ; ni l’un ni l’autre ne peuvent se passer du dessin ; la couleur peut pallier les défauts du prosateur ou du peintre, mais, en poésie et en sculpture, il faut le style et la perfection de chaque chose. Toute statue qui, brisée en morceaux, n’est pas toujours admirable, ne vaut rien ; tout poème dont une dizaine de vers pris au hasard ne font pas dire de l’auteur qu’il est un grand poète, peut être considéré comme non avenu[41] ». Désormais, la poésie éveillera toujours dans son imagination l’idée de la statuaire. Dans son admirable article sur la mort de Rachel, il compare les brèves et splendides destinées des acteurs au sort des poètes : nous n’avons qu’un présent médiocre, mais nous avons l’avenir, « nous autres sculpteurs patients de ce dur paros qu’on appelle le vers[42] ». Plus tard encore, dans son Rapport, il revient sur son orgueilleuse et parnassienne comparaison : tout poète doit « sculpter la beauté dans cette forme dure et difficile à travailler du vers, qui est comme le marbre de la pensée[43] ».

Comment s’est-il efforcé de réaliser cet idéal de beauté plastique dans les Émaux et Camées ? Nul n’en a mieux défini l’intention artistique que Théo lui-même : « ce titre, dit-il, exprime le dessein de traiter sous forme restreinte de petits sujets, tantôt sur plaque d’or ou de cuivre, avec les vives couleurs de l’émail, tantôt avec la roue du graveur de pierres fines, sur l’agate, la cornaline ou l’onyx[44] ». Le poète a tous les soucis de l’artiste qui cherche la perfection dans sa lutte contre une matière difficile, presque ingrate. Il aime la difficulté à vaincre. En fait de mètre, il songe un instant au vers de neuf pieds, coupé par une césure après la quatrième syllabe. C’est ainsi qu’il esquisse d’abord sa fantaisie d’hiver :


Le doux printemps, captif sous la neige,
Semble dormir d’un pesant sommeil,
Blanc de frimas, l’hiver nous assiège,
Et nous enchaîne au foyer vermeil[45].


Son instinct sûr l’éloigne vite d’un procédé qui ne plairait qu’au seul Verlaine. Il écarte également l’alexandrin trop vaste pour convenir à ces bijoux de petit format ; il s’en tient uniquement au vers de huit pieds, « qu’il refondit, polit et cisela avec tout le soin dont il était capable. Cette forme, non pas nouvelle, mais renouvelée par les soins du rythme, la richesse de la rime, et la précision que peut obtenir tout ouvrier patient, terminant à loisir une petite chose, fut accueillie favorablement », avoue-t-il, malgré sa modestie[46]. Mais aussi que de beauté il avait su enfermer dans ces petits cadres. On a déjà remarqué qu’il était impossible de substituer un autre mot à celui que l’auteur a trouvé, ni même de le déplacer, de toucher à la rime ou à l’allure du vers, sans tout gâter[47]. Pas une faute même de nuance, pas une faiblesse, pas une cheville même d’orthographe. J’avais cru en découvrir une dans Le Souper des armures :


Il ne voit ni laïcs ni prêtres,


et c’est une orthographe du xvie siècle, vieillie sans doute, mais usitée encore dans la prose en 1821[48].

Comment Théo a-t-il obtenu cette perfection que seuls avant lui avaient atteinte Racine et La Fontaine ? Ses intimes l’observent, rôdant par les étages de sa maison, l’air désœuvré, puis s’asseyant sur le tapis de sa chambre, écrivant ses brouillons sur le premier bout de papier venu ; une journée suffit pour une pièce : « rarement, dit Mme Judith Gautier, le jour s’achevait sans qu’il nous appelât pour nous montrer, soigneusement recopié, le poème terminé. J’ai vu naître ainsi Le Souper des armures[49] ». Le poète pourtant n’est pas encore satisfait ; d’une édition à l’autre il continue à corriger les quelques défaillances qui avaient pu échapper aux lecteurs les mieux avertis, mais que son œil de myope, grossissant les fautes comme une loupe, a bien su découvrir. Une seule fois la correction est malheureuse. Dans Bûchers et Tombeaux il avait mis d’abord :


En oubliant le monstre maigre
Que chacun porte sous sa peau,
Dans une insouciance allègre
Tous s’avançaient vers le tombeau[50].


Dans l’édition définitive, on trouve à la place cet hommage à l’euphorie païenne :


Le monstre, sous la chair splendide,
Cachait son fantôme inconnu,
Et l’œil de la vierge candide
Allait au bel éphèbe nu.


On a le droit de préférer la première version. Partout ailleurs, chaque correction est un gain. On voit, dans Les Néréides, avec quelle patience Théo s’acharne, impitoyable aux tremblements de l’outil. Il se reprend à la besogne quatre fois, avant de se déclarer satisfait de la première stance :


Je possédais une aquarelle
De Théophile Kwiatowski.
N’allez pas me chercher querelle
Pour ce nom qui finit en ki.


Au premier vers Je possédais étonne. Pourquoi dire qu’il ne Fa plus ? L’a-t-il vendue ? Puis le second vers est une surprise désagréable parce qu’elle n’est pas préparée. Le troisième est manqué, le lecteur n’ayant aucune envie de lui chercher querelle. Quant au quatrième vers, c’est une gauche cheville. Tout cela va changer :


J’ai dans ma chambre une aquarelle
D’un peintre polonais, à qui
Rythme et rime cherchent querelle :
Théophile Kwiatowski.


Le premier vers est parfait, et ne changera plus. Mais, au second, « polonais » est de la bourre, car le nom du peintre est bien suffisant pour indiquer son pays. Rythme et rime font une cacophonie. Le quatrième vers est bien à sa place, et y restera. En supprimant la préposition de, Théo supprime du même coup la dureté de la synérèse « kia » ; on entend maintenant Ki-a-tous-ki. Quelques menus coups de lime donnent la troisième version :


J’ai dans ma chambre une aquarelle
Fantasque, et d’un peintre avec qui
La rime exacte se querelle :
— Théophile Kwiatowski.


Fantasque est-il bien le mot propre, quand on connaît le reste de la pièce, cette opposition entre les Néréides de la vieille mythologie et le bateau à vapeur ? Exacte est une platitude, se dit le poète ; une cheville, dirait le lecteur, car ce mot ne veut rien dire, et remplace rythme, qui disait quelque chose. Théo profite de ce qu’il a repris la plume pour corriger une faute d’orthographe au nom du peintre, et enfin voici la strophe irréprochable :


J’ai dans ma chambre une aquarelle
Bizarre, et d’un peintre avec qui
Mètre et rime sont en querelle.
Théophile Kniatowski.


C’est un émerveillement de suivre, grâce au livre du vicomte de Spoelberch, ou à l’édition critique de Jacques Madeleine, ces coups de burin qui affinent peu à peu le profil de la buire en métal précieux. Ainsi encore, dans Cœrulei oculi, cette strophe qui, dans sa première forme, paraît parfaite :


Que j’aime ces claires prunelles
Où la lumière s’attendrit,
Mouillant de pleurs ses étincelles,
Comme une douleur qui sourit.


Pourtant les prunelles qui pleurent ne restent pas claires. Le quatrième vers semble joli d’abord, mais la douleur ne sourit pas. Puis ce retour à l’idée pure après une image est une déception. Les cordes de la lyre semblent détendues ; Gautier les serre, et le son devient net, clair :


Dans les langueurs de leurs prunelles
Une grâce triste sourit ;
Les pleurs mouillent les étincelles,
Et la lumière s’attendrit.


On pourrait prolonger pendant des pages l’étude de ces changements qui transforment l’à peu près bien en beauté parfaite. Je me bornerai à faire une dernière comparaison de textes qui n’a pas besoin de commentaire, et je la dédie à ceux qui disent que Théo n’a pas d’idées. Plaçons simplement côte à côte les deux états des strophes de l’Obélisque de Paris :

Première version       Texte définitif
Sur cette place je m’ennuie,
Monolithe dépareillé,
Sous les hachures de la pluie
Qui lave mon granit mouillé.
Rhamsès un jour, mon bloc superbe
Que rien n’avait pu jeter bas
Roula fauché comme un brin d’herbe
Par un monsieur nommé Lebas.
Sur cette place je m’ennuie,
Obélisque dépareillé ;
Neige, givre, bruine et pluie
Glacent mon flanc déjà rouillé.
Rhamsès, un jour, mon bloc superbe
Où l’éternité s’ébréchait,
Roula fauché comme un brin d’herbe
Et Paris s’en fit un hochet[51].

Ce n’est pas de la simple description, de la reproduction plastique : c’est un art créateur. La réalité pâlit auprès de cette création. Mme Judith Gautier s’en rend compte le jour où elle peut comparer La Symphonie en blanc majeur à l’héroïne de la pièce, Mme de Kalergis, née Nesselrode, devenue la Comtesse Mouchanoff, celle en l’honneur de qui Henri Heine n’avait pu que démarquer les vers de Gautier : « Auprès d’elle la neige de l’Hymalaïa paraît grise comme la cendre ; le lis, que sa main saisit, aussitôt par le contraste ou par jalousie devient couleur de rouille ». Mme Judith Gautier, assise près de la Comtesse, se rappelle une des strophes les plus passionnées de La Symphonie :


Son sein, neige moulée en globe,
Contre les camélias blancs
Et le blanc satin de sa robe
Soutient des combats insolents.


« Je cherche, ajoute la fille du poète, les camélias blancs près de la neige de sa poitrine, très marmoréenne en effet, mais par le secours peut-être du blanc de perles et d’une neige de poudre de riz[52]1 ». Ce sont maintenant les vers de Gautier qui soutiennent un insolent combat contre la beauté réelle du modèle ; aux accents de La Symphonie en blanc majeur, qui ne peut plus lui servir de marche triomphale, la beauté célèbre apparaît comme un ivoire jauni. Encore ne sommes-nous pas très sûrs de « réaliser » toute la grandeur de l’art du poète, car nous contemplons, dans Emaux et Camées, ces pièces serrées les unes contre les autres. À être ainsi pressées, quelques-unes ont perdu le charme de leur première révélation ; Gautier avait commencé par sertir ces pierres précieuses dans le beau métal de sa prose. C’est ainsi que la chanson d’automne, Ce que disent les Hirondelles, avait paru d’abord dans un feuilleton sur une comédie de Mme Ancelot, Marie ou les trois Époques ; Mme Ancelot n’a qu’une colonne et demie pour sa part, et tout le reste est consacré aux préparatifs de départ des hirondelles : « nous nous sommes mis à transcrire leurs gazouillements de la façon la plus exacte possible… S’il y a des fautes dans notre traduction, considérez qu’il n’existe pas encore de dictionnaires pour la langue des oiseaux, et que nous n’avons pu y chercher les mots d’un sens douteux ou d’une acception rare. Toutefois nous pensons ne pas nous être trompé de beaucoup. Notre version est presque toujours littérale : nous l’avons montrée à une hirondelle tombée dans notre chambre par la cheminée, et elle n’en a pas paru mécontente :


Déjà plus d’une feuille sèche
Parsème les gazons jaunis[53]… »


De même, le 7 avril 1851, les lecteurs de La Presse trouvent dans leur journal, au lieu du feuilleton, le Premier Sourire de printemps, ainsi présenté : « il fait aujourd’hui un temps superbe ; le ciel est bleu, le soleil brille, et n’était notre tâche dominicale qu’il faut remplir, nous serions tout à fait de l’avis de M. de Montalembert sur le repos du septième jour…, nous irions saluer le printemps dans le Bois de Boulogne ou sur les coteaux de Meudon. Ne pouvant lui faire cette politesse, nous lui adresserons, en manière d’hymne, une petite pièce de vers que nous avons rimée l’autre semaine, en regardant éclater les premiers bourgeons sous les pluies et les giboulées de mars ;


Tandis qu’à leurs œuvres perverses
Les hommes courent haletants,
Mars qui rit, malgré les averses,
Prépare en secret le printemps[54]… »


La jolie monture ! Dans les Émaux et Camées nous n’avons plus que les pierres, mais elles sont toujours précieuses.

Sous ce scintillement y a-t-il une idée profonde ? Y a-t-il un système philosophique ? Question peut-être oiseuse, car les poètes ne sont pas tenus d’être des philosophes ; mais on a pris l’habitude d’exiger d’eux une conception particulière du monde, sous peine d’être traités de minus habentes, alors qu’on ne demande ni aux romanciers, ni aux dramaturges, ni même aux historiens s’ils se sont créé un système de l’univers. On a durement reproché à Théophile Gautier de n’avoir en philosophie que des négations, des dédains, ou des ignorances[55]. Lui-même a prêté le flanc à ces critiques par certaines boutades qu’il lançait dans des conversations particulières, et que les Goncourt recueillaient gravement[56]. Pourtant, une fois, il semble avoir voulu résumer son expérience de la vie dans une formule qu’il aimait à répéter : « Rien ne sert à rien, et d’abord il n’y a rien ; cependant tout arrive, mais cela est bien indifférent[57] ». Ce n’est pas une pensée philosophique, cela, c’est du fatalisme de raté[58]. Concédons que Théophile Gautier n’est pas un philosophe.

Mais on va plus loin : on lui dénie toute valeur de pensée ; Scherer, Faguet et Brunetière mènent le chœur ennemi[59]. Théo souffre de ce mépris pour sa force intellectuelle, et des compliments de ceux qui ne veulent voir en lui qu’un paysagiste : « Oui, oui, dit-il avec amertume, c’est une tactique, je la connais : avec cet éloge ils font de moi un larbin descriptif[60] ! » Ils, c’est les critiques de profession, les professeurs, dont il se méfie[61]. Il a tort, car Sainte-Beuve prend sa défense, pareillement Gaston Paris, d’autres encore[62] ; et ceux-ci ont raison : comment des critiques peuvent-ils considérer comme un médiocre penseur l’homme qui a écrit, par fragments, une des meilleures histoires de l’art dramatique ; qui a tenu le feuilleton du Moniteur, depuis le n janvier 1858 jusqu’à la fin de l’Empire ; qui a eu en esthétique des idées encore discutées en 1928, donc encore vivantes[63] ? Il prétendait que si l’on voulait publier ses œuvres complètes, on ne s’en tirerait pas à moins de trois cents volumes[64]. N’en prenons que la moitié ; c’est encore un beau chiffre, et cela suppose tout de même une certaine force de pensée. Même sa causerie intime éveille une idée de supériorité : Baudelaire, qui n’était pas un naïf, emporte de leur premier entretien une impression de respect : « en écoutant cette éloquence de conversation, si loin du siècle et de son violent charabia, je ne pouvais m’empêcher de rêver à la lucidité antique, à je ne sais quel écho socratique, familièrement apporté sur l’aile d’un vent oriental. Je me retirai conquis par tant de noblesse, de douceur, subjugué par cette force spirituelle[65] ».

Cette puissance d’esprit ne dessèche pas son cœur. Il a beau s’en défendre, et, devant la galerie, lancer des invectives contre l’art sentimental, il a le don divin de l’émotion. Sa main d’artiste, d’ouvrier en vers, est froide et ne tremble pas, mais elle traduit tous les battements de son grand cœur. Là-dessus, pleine justice est rendue par Barbey d’Aurevilly à l’auteur d’Émaux et Camées : « son titre est vaincu par son livre. Ce titre ne dit pas la moitié du livre qu’il nomme. Il en dit le côté étincelant et sec. Il n’en dit pas le côté noyé, voilé et tendre. Les émaux ne se dissolvent pas. Le livre de M. Gautier devrait s’appeler plutôt Perles fondues, car presque toutes ces perles de poésie, que l’esprit boit avec des voluptés de Cléopâtre, se fondent en larmes aux dernières strophes de chacune d’elles ; et c’est là un charme, un charme meilleur que leur beauté[66] ».

Parmi ces perles, la plus pure c’est son amitié pour la Princesse Mathilde, qu’il a si joliment flattée dans La Fellah, non pas en courtisan, mais en ami, fidèle jusque dans la déchéance de 70. Au moment de la débâcle impériale qui le précipite lui-même dans la misère, c’est à peine s’il songe à se plaindre ; de Suisse, il écrit à son ami Bazin, le 5 septembre : « Pour ce pauvre empereur, quelle fin lamentable d’un rêve éblouissant ! Et ma chère Princesse ! Quelle affreuse douleur ! La voilà détruite à jamais, cette abbaye de Thélème de Saint-Gratien ! Fermé comme un tombeau, ce gracieux Décaméron, où se sont tenues tant de conversations étincelantes ! Où est-elle maintenant, cette belle et bonne créature si aimée[67] ? » Quand il sait enfin où lui écrire, quel courage, quelle beauté dans son amitié : « …j’ai honte de parler de mon petit écroulement particulier devant une infortune comme la vôtre !…Ne plus vous voir, moi qui avais pris cette habitude si douce de vivre près de vous, presque à vos pieds, et à qui vous laissiez baiser vos belles mains impériales[68] ! » Quelle noblesse dans ce dernier mot !

Le cœur du poète battait si fort que, en approchant l’oreille de ses vers, on y perçoit encore de lointains contre-coups. La passion, dans les Émaux et Camées est personnelle, originale, et ne doit rien aux influences littéraires. Quelqu’un a prétendu pourtant que « le grain de sentimentalité et la parcelle d’au-delà qu’on découvre en cherchant un peu dans l’œuvre de Gautier, lui viennent sans doute d’Henri Heine[69] ». C’est une erreur, ou, si l’on préfère, c’est le comble de la littérature comparée. Gautier sans doute connaissait les œuvres d’Henri Heine ; il appréciait son talent, et en avait fait une jolie étude restée inédite[70]. Il avait pour Heine personnellement une sincère affection ; il le défendait contre ses ennemis, même contre Sainte-Beuve, et cela huit ans après la mort de son ami[71]. Mais ses poésies sentimentales ne doivent rien à Henri Heine. Qu’il s’agisse de sensualité comme dans Le Poème de la femme, d’amitié amoureuse comme dans Apollonie, ou d’amour profond pour la dame aux yeux de violette, rêve de sa jeunesse et regret de sa maturité, dans le Dernier Vœu, Gautier ne reprend pas les gaufriers des autres, cet autre serait-il l’auteur des Lieder, pas plus qu’il n’emprunte aux Deux Grenadiers de Heine ou à la ballade de Zedlitz ses Vieux de la Vieille[72]. Peut-être en doit-il l’idée première à un article de Monselet[73]. Mais la divination du cœur de ces vieux grognards, mais la beauté de ces descriptions qui avaient ému Napoléon III, et frappé Bismarck, tout cela vient du cœur même du poète, de son patriotisme, qui vibre chez lui sous sa forme la plus élevée, le patriotisme militaire[74]. On ne peut pas comprendre à fond les Vieux de la Vieille, si l’on ne connaît pas la lettre qu’il écrivait à la Princesse, au début de la guerre de 70, pour lui annoncer son retour de Suisse : « quoique je ne puisse en rien contribuer à la défense, je partagerai le danger avec les autres ; ce n’est pas quand la vieille mère est à l’agonie que ses enfants doivent la quitter, sous prétexte que l’air n’est pas sain[75] ». Le lendemain, il était à Paris.

On voit ce qu’il avait mis de son cœur dans son poème sur les grognards ; il en fut surpris lui-même une fois, jusqu’à perdre le contrôle de ses nerfs, un jour qu’une actrice récitait ces vers devant lui : ému par sa pièce et par ce retour brusque d’un sentiment puissant, Gautier éclate en sanglots, et Sainte-Beuve, qui raconte l’histoire, applaudit : « Bravo ! ô stoïcien de l’art, qui affectez par fois plus d’impassibilité que vous n’en avez, ne vous repentez pas d’avoir obéi un moment à la nature, et d’avoir trahi cette source du cœur qui est en vous ! Cet air de parfaite insensibilité (vous le savez mieux que moi) ne provient souvent que d’une pudeur extrême de la sensibilité la plus tendre, qui rougirait de se laisser soupçonner aux yeux du monde ». Sainte-Beuve a bien deviné ; Gautier écrit à sa fille Estelle : « je t’aime beaucoup sans le dire ; j’ai trop de pudeur pour parler de ces choses-là[76] ».

Même là où l’impassibilité de commande est renforcée par le respect humain, Gautier laisse lire dans son cœur son trouble religieux, car, s’il n’a pas la foi, il a l’inquiétude religieuse[77], celle surtout qui vient de la crainte de la mort ; il ne fait pas bon le railler là-dessus : le sceptique Bergerat regrette d’avoir eu cette audace : « J’en fus pour ma courte honte. En fait de persiflage, il était aussi mon maître. — Monsieur libre-pense ? me jetait-il en s’incrustant le monocle dans la baie sourcilière ; monsieur franc-maçonne[78] ? » Pour lui, jusqu’où allait-il dans son for intérieur ? Jusqu’aux petites médailles ? On l’a dit[79] ; ce doit être une histoire de bons camarades. Prenons son œuvre ; elle reflète jusqu’à ses incertitudes : il y a en lui, donc il y a dans les Émaux, deux religions : celle de la beauté et celle de Dieu. Noël est un tableau néo-catholique, une crèche de vitrine devant laquelle on n’aurait jamais prié, et qui n’a pas la piété naïve des Noëls populaires d’autrefois ou d’aujourd’hui[80]. Puis, dans Bûchers et Tombeaux il préfère à l’austérité chrétienne la joie de vivre des Grecs, ou ce qu’il suppose avoir été une joie de vivre :


Des dieux que l’art toujours révère
Trônaient au ciel marmoréen ;
Mais l’Olympe cède au Calvaire,
Jupiter au Nazaréen.

Une voix dit : Pan est mort I — L’ombre
S’étend. — Comme sur un drap noir,
Sur la tristesse immense et sombre
Le blanc squelette se fait voir


Le christianisme ne dit rien à son imagination : tout au plus, sa raison admet-elle ce que Baudelaire appelait chez Théo « le sentiment d’universelle hiérarchie écrite du haut en bas de la nature à tous les degrés de l’infini[81] ». C’est plutôt froid, et cela explique en partie la mélancolie qui sort, comme une brume, du fond de cette poésie brillante à la surface : elle est faite des douleurs communes à toute vie d’homme, et qui gardent d’autant plus de force qu’on ne les laisse pas voir, ébranlement de l’âme qu’il appelle le glas intérieur :


Comme autrefois pâle et serein,
Je vis, du moins on peut le croire
Car sous ma redingote noire
J’ai boutonné mon noir chagrin.
Sans qu’un mot de mes lèvres sorte,
Ma peine en moi pleure tout bas ;
Et toujours sonne comme un glas
Cette phrase : ta mère est morte[82] !


Sa mélancolie est encore faite des déceptions du penseur et de l’artiste, chantées dans Ténèbres, cette symphonie en noir qui semblait prodigieuse à Baudelaire, parce qu’il y trouvait ses idées, et jusqu’à la splendeur métallique de ses Fleurs du Mal[83]. Il s’y mêlait encore les tristesses familiales de Gautier, la désolation que Mendès avait amenée dans sa vie[84], la mauvaise chance qui brusquement détruisait sa maison et le réduisait à habiter réellement une mansarde, cette mansarde qu’il décrit à la fin de ses Émaux, avec de tristes sourires, et des efforts vers la perfection vraiment surprenants[85]. Elle est belle, cette vie artistique de Gautier, attaquée, renversée par la gêne, et se relevant toujours vers la beauté ; elle est dramatique, cette poésie enchaînée par la prose de la vie, cette force qui résiste à toutes les déceptions, même à celle-ci : les Émaux lui ont rapporté deux cents francs[86] !

La générosité de ce cœur, la perfection de cet art se sont fondues en un seul chef-d’œuvre dont voici d’abord la première ébauche. Après avoir causé gaîment avec une américaine, Mrs Moulton,

Gautier se reproche d’avoir raillé une femme, de lui avoir dit qu’elle n’était qu’une blasée, et il lui offre son repentir sous la forme de ce sonnet :


Vos prunelles ont bu la lumière et la vie,
Telle une mer sans fond boit l’infini des cieux,
Et rien ne peut remplir l’abîme de vos yeux,
Où, comme en un lotus, dort votre âme assouvie.

Pour vous, plus de chimère ardemment poursuivie :
Quel que soit l’idéal, votre rêve vaut mieux,
Et vous avez surtout le blasement des Dieux,
Psyché, qu’Éros lui-même à grand peine eut ravie.

Votre satiété n’attend pas le banquet,
Et, connaissant la coupe où le monde s’énivre,
Dédaigneuse, à vos pieds, vous le regardez vivre,

Et vous apparaissez par un geste coquet
Rappelant Mnémosyne à son socle appuyée,
Comme le souvenir d’une sphère oubliée[87].


Ce n’est encore qu’une maquette, en 1866 ; mais le bon artiste se met aux retouches ; la glaise peu à peu précise ses contours[88]. Le corps a toujours l’attitude de la mère des Muses, mais l’expression du visage est devenue vivante comme celle d’une mortelle ; Gautier peut exposer au Parnasse Contemporain de 1869 la statue en marbre pur :


La satiété dort au fond de vos grands yeux,
En eux plus de désirs, plus d’amour, plus d’envie ;
Ils ont bu la lumière, ils ont tari la vie,
Comme une mer profonde où s’absorbent les cieux.

Sous leur bleu sombre on lit le vaste ennui des dieux,
Pour qui toute chimère est d’avance assouvie,
Et qui, sachant l’effet dont la cause est suivie,
Mélangent au présent l’avenir déjà vieux.

L’infini s’est fondu dans vos larges prunelles,
Et, devant ce miroir qui ne réfléchit rien,
L’Amour découragé s’asseoit, fermant ses ailes.

Vous cependant, avec un calme olympien,
Comme la Mnémosyne, à son socle accoudée,
Vous poursuivez, rêveuse, une impossible idée[89].


Théophile Gautier est bien le statuaire du vers, comme disait Charles Hugo[90]. C’est son imposante figure que nous voyons se dresser au début de la pré-histoire du Parnasse.

Ne voir, en lui que l’ancêtre des Parnassiens serait sans doute le restreindre. Il est assez grand pour projeter son ombre sur toute une époque. Il a donné des leçons d’écriture artiste, ou tout bonnement de français, même aux prosateurs, aux Goncourt, à Daudet, à Zola, à Flaubert lui-même : ce n’est pas uniquement par familiarité d’égal que ce dernier écrit à Théo, le 3 avril 1863 : « comment vas-tu, cher vieux Maître[91] ? » Cette maîtrise s’étend hors de France, depuis qu’il a été traduit en anglais par M. de Sumichrast[92]. Tout de même, son influence la plus forte, la plus facile à préciser, se concentre sur la poésie de la fin de l’Empire. Elle répond à un besoin de sa nature : révéler à ceux qui en sont dignes les procédés de son art, avoir des disciples, être professeur ès-vers. Son insuccès auprès de la Princesse Mathilde, qui est une mauvaise élève, ne le décourage pas[93]. Il rêve de fonder une Ecole quand il sera vieux : < je m’entourerai de jeunes gens, et je les initierai aux secrets de la forme et aux mystères de l’art. Ces mystères existent, et vous vous imaginez trop, vous autres, dit-il à Bergerat et à quelques jeunes, que l’on naît avec la science infuse. Tout s’apprend en ce monde, et l’art comme le reste. En résumé, qu’est-ce que l’art ? Une science aussi, la science du charme et de la beauté. Je convertirai mon salon en atelier de littérature, et je formerai des élèves. Les peintres mettent au bas de leur nom : élève de Gérôme ou de Cabanel ; pourquoi les poètes ne seraient-ils pas, eux aussi, élèves de V. Hugo ou de Théophile Gautier[94] ? » Est-ce une bouffée de vanité ? Il se rend simplement justice ; Laurent Tailhade affirme que tous les parnassiens procèdent de ce puissant initiateur[95]. Faguet admet deux exceptions seulement : Sully Prudhomme et Coppée[96]. Encore, est-ce une erreur, même pour Coppée, surtout pour Sully Prudhomme : nous pouvons l’affirmer, grâce à Gautier lui-même : il s’est vanté de l’influence des Émaux et Camées sur ses cadets : son effort d’art fut, dit-il, en 1863, « accueilli favorablement, et les vers de huit pieds groupés en quatrains devinrent pour quelque temps un sujet d’exercice parmi les jeunes poètes[97] ». En effet, dans son premier recueil de poésies, 1864-1869, Coppée a pris le mètre des Émaux dans huit pièces. Sully Prudhomme, dans ses deux premiers recueils de 1864 et de 1866, a écrit le tiers de ses poèmes en quatrains d’octosyllabes ; dans ses Stances, sur les vingt-deux pièces qui les composent, vingt sont coulées dans ce moule, et en particulier Le Vase brisé. Gautier a donc raison de parler de son influence. C’est le premier modèle des parnassiens. Il inaugure leur esthétique avec ses idées sur l’art pour l’art[98]. Il la complète avec sa doctrine de l’impassibilité ; dès 1863, au dîner Magny, il développe cette thèse, « qu’un homme ne doit se montrer affecté de rien, que cela est honteux et dégradant ; qu’il ne doit jamais laisser passer de la sensibilité dans ses œuvres ; que la sensibilité est un côté inférieur en art et en littérature : — Cette force, dit il, que j’ai, et qui m’a fait supprimer le cœur dans mes livres, c’est par le stoïcisme des muscles que j’y suis arrivé[99] ». Sans doute, ce n’est qu’un paradoxe « étincelant », inter pocula. Ceux qui le connaissent bien ne s’y laissent pas prendre[100]. Mais les autres croient que cette boutade est l’orthodoxie parnassienne, et quelques parnassiens jurent sur ce mot du maître. Ses idées se répandent parce que sa personne est aimée : quand le divin Théo, comme ils disent, est cloué dans son fauteuil d’impotent, Théodore de Banville est de ceux qui, presque tous les jours, vont à Neuilly « serrer la main de l’auguste mourant[101] ». Ils se pressent autour de lui, et proclament qu’ils sont ses débiteurs. Armand Silvestre lui doit son amour pour la rime riche[102]. Heredia a beau se réclamer de Leconte de Lisle ; Barbey d’Aurevilly le rattache bon gré mal gré à la suite de Théo : c’est, dit le connétable, un gautiériste[103]. Heredia protesterait peut-être si Leconte de Lisle était là, mais, à Douamenez, il dit à Jules Breton : « quand je lui fus présenté, j’étais très jeune, intimidé de me trouver en face de ce maître que j’admirais. Il me tutoya d’emblée, et me tapant sur l’épaule, il me dit : José Maria de Heredia, je t’aime, parce que tu as un nom exotique et sonore[104] ! » Anatole France lui-même est conquis ; bien qu’il n’ait pas la bosse du respect, il s’incline devant Gautier : en compagnie de Calmettes, il le rencontre en avril 1871 à Versailles, dans la grande cour du Palais : le vieux poète, effondré, écoute les canons du Mont-Valérien qui matent Paris. Ils s’approchent ; Anatole France adresse à Gautier quelques paroles pleines de cette vénération que les parnassiens éprouvent pour le maître d’autrefois : Théo sort du rêve, qui l’écrase, et serre les mains que lui tendent respectueusement les deux jeunes gens[105]. Plus tard, G. Lafenestre exprimera, de la plus heureuse manière, l’admiration de l’École pour l’artiste disparu : « la lyre qu’a tenue le poète est une lyre ciselée et émaillée, dont les cordes scintillantes réjouissaient, par un singulier miracle, les regards autant que l’oreille, et répandaient, dans l’air surpris, des vibrations de couleurs en même temps que des vibrations sonores[106] ».

Comment ses admirateurs ne l’ont-ils pas pris, officiellement, pour chef de chœur ? C’est que la place’est occupée, et bien gardée, par Leconte de Lisle, qui du reste subit lui-même l’influence de Gautier[107]. Et puis Théo est trop bon prince, trop brave homme, pour inquiéter Leconte de Lisle. Il félicite, au contraire, publiquement, les Parnassiens de se grouper autour d’un pareil maître : « Leconte de Lisle a réuni autour de lui une école, un cénacle, comme vous voudrez l’appeler, de jeunes poètes qui l’admirent avec raison, car il a toutes les hautes qualités d’un chef d’école, et qui l’imitent du mieux qu’ils peuvent, ce dont on les blâme à tort, selon nous, car celui qui n’a pas été disciple ne sera jamais maître[108] ». Ce n’est pas une politesse protocolaire, de puissance à puissance. C’est, chez Théo, une conviction qu’il a souvent exprimée devant Maxime Du Camp[109] ; il n’est pas jaloux de Leconte de Lisle : il lui suffit de constater chez l’auteur des Poèmes Barbares une réelle déférence à son égard. Bergerat a très bien noté cette nuance : « les plus glorieux des intimes mêmes, Flaubert, Banville, Dumas fils, Goncourt, Leconte de Lisle, ne transgressaient pas une ligne respectueuse, deux fois marquée par l’âge et le génie… Théophile Gautier, le plus simple, le plus cordial des « patrons », n’en était pas moins jaloux de son autorité d’art[110] ».

Il ne désire rien de plus. Il a renoncé aux batailles littéraires. Il est au cadre de réserve. Comme les retraités, il est devenu, avec l’âge, assez apathique. Dès 1862, Guizot, qui le voit à une soirée chez Legouvé, a cette impression : « …tête de Vitellius ; un gourmand enfoncé dans sa graisse et dans sa barbe ; figure de gros épicurien spirituel et moqueur ». Guizot lui préfère Berlioz : « celui-là est un enthousiaste sincère, point bavard, jusqu’au moment où son enthousiasme le saisit, et il devient alors fécond et éloquent. En contraste frappant avec le critique sceptique et sensuel, Th. Gautier[111] ». Visiblement, dans cette entrevue, Guizot est resté un peu engoncé dans sa cravate. Dreyfous, un an après, est plus chaleureux : muni d’une lettre de recommandation par Emmanuel des Essarts, il pénètre dans la petite maison de Neuilly, avec émoi : « le voici, avec sa tête de Jupiter antique, à la barbe fine, légère, frisante ; ses cheveux très longs, noirs, à peine marqués aux tempes de quelques fils d’argent, tombent jusqu’aux larges épaules sur lesquelles ils laissent flotter leurs boucles… Puissant cou de taureau… Sérénité et noblesse d’attitude… Il cessait d’être intimidant dès que la musique incomparable de sa voix, faite d’harmonie et de bonté, vous avait dit le banal : — Asseyez-vous[112] ». Les jeunes en prennent un peu à leur aise avec Gautier, sans lui déplaire pour cela, car il semble le désirer : « il se complaît innocemment, dit Baudelaire, dans une affectueuse et familière paternité[113] ». Certains jours le vieux lion se fâche, et montre ses crocs ; Verlaine lui reproche de maltraiter Mallarmé, de critiquer son extravagance un peu voulue : « Ainsi s’exprimait « un peu » trop indolemment un maître fatigué, qui l’eût tant défendu au temps qu’il était le lion aussi bien endenté que violemment chevelu du romantisme[114] ». Mais ces réveils sont rares ; certains en sourient : Theuriet remarque que « le bon Théo, déjà un peu alourdi, était sobre de paroles, et nous traitait avec une bienveillance endormie[115] ». En réalité, il s’en allait peu à peu, de tristesse et de gêne, malgré les efforts de ses éditeurs pour le tirer d’embarras[116].

Pourtant il fait encore un effort, et, dans Le Parnasse Contemporain de 1866, il publie à la place d’honneur, en tête du volume. Le Bédouin et la Mer, Le Lion de l’Atlas, La Marguerite, une traduction de l’ode d’Horace à Sextius, et cette élégie exquise, Le Banc de pierre[117]. Grâce au Banc et à Sextius, l’apport de Gautier est honorable ; le reste a été pris aux fonds de tiroir.

Théo se complaît à feuilleter le volume ; il constate avec quelque fierté que les jeunes poètes continuent, comme Sully-Prudhomme et Coppée, à manier le mètre des Émaux et Camées : sur les deux cents pièces du Parnasse, vingt-et-une sont écrites en quatrains de vers de huit pieds. Le vieux maître est content de ses apprentis, et manifeste sa satisfaction dans son Rapport de 1868[118]. Il est aimable pour le livre, « cette anthologie où chaque talent a mis sa fleur ». Au fond, il est très flatté qu’on lui ait fait là une place, une belle place : « dans ce bouquet printanier, quelques roses d’antan ont été admises, puisque nous y figurons en compagnie d’Émile et d’Antoni Deschamps ; mais ce n’est là qu’une marque de bon souvenir de jeunes débutants aux jeux du cirque pour de vieux athlètes qui feraient peut-être bien de déposer leur ceste comme Entelle[119] ». La formule est pleine de modestie ; mais le vieux lutteur utilise le reste de ses forces en faisant à la nouvelle école une réclame, très nécessaire. Les Parnassiens étaient si peu connus qu’Asselineau, faisant un article sur ce Rapport, en démontre l’utilité par l’ignorance surprenante qu’il manifeste à propos de l’œuvre de Leconte de Lisle, et de Banville[120].

Malheureusement pour le Parnasse, ce Rapport est une déception. Il est quelconque. La prose ne réussit plus au poète. Son imagination est appauvrie, et sa mémoire fléchit : il dit de Catulle Mendès : « il s’est calmé et a mis, comme on dit, de l’eau dans son vin ; mais cette eau est de l’eau du Gange. Quelques gouttes du fleuve sacré ont suffi pour éteindre dans la coupe du poète le pétillement gazeux du vin de champagne ». L’image est plutôt bizarre, et le lecteur, qui ne peut pas l’oublier, est surpris de la retrouver, quinze pages plus loin, consacrée cette fois au talent d’E. des Essarts : « une goutte de vieux nectar mythologique tombe parfois au fond du verre à vin de Champagne, et en empêche le pétillement trop vif[121] ». N’importe, c’est signé : Théophile Gautier, et la signature est encore prestigieuse. Les Parnassiens les plus illustres trouvent que ce Rapport est comme une série de citations à l’ordre du jour. Beaucoup plus tard, Théodore de Banville reprend le passage qui lui est consacré, et le met en tête de la nouvelle édition de ses Exilés[122].

Théophile Gautier apparaît encore au Parnasse de 1869, mais cette fois c’est L. de Lisle qui figure en première page, et Théo n’arrive plus que trente-septième sur la liste. Pourtant, c’est dans cet envoi que se trouve le chef-d’œuvre parnassien, L’Impassible. Mais il y a à côté un fragment de poème inédit, une Marine, qui n’a rien de merveilleux : avec son mélange de Virgile et de Byron, on dirait une pièce jadis jetée au rebut, que le poète a ramassée, uir peu rabotée, et envoyée avec un sourire ironique : ce sera toujours assez bon pour eux. De même pour le sonnet : Un ange chez moi vient parfois le soir…

C’est un spécimen de la poésie sensuelle des romantiques où, parfois, de façon bien gênante, ils introduisaient le Ciel là où il n’a que faire. Enfin, est-ce une dérision ? Au moment où l’École parnassienne voudrait faire croire qu’elle tourne à l’École d’Athènes, Gautier, narquois, lui offre ce sonnet au rythme moqueur :


J’aimais autrefois la forme païenne,
Je m’étais créé, fou d’antiquité,
Un blanc idéal de marbre sculpté
D’hétaïre grecque ou milésienne.

Maintenant j’adore une Italienne,
Un type accompli de modernité,
Qui met des gilets, fume et prend du thé,
Et qu’on croit Anglaise ou Parisienne.

L’amour de mon marbre a fait un pastel,
Les yeux blancs ont pris des tons de turquoise,
La lèvre a rougi comme une framboise[123]


Maintenant on comprend pourquoi le Parnasse, tout en ne voulant pas refuser un hors-concours, ne lui a pas accordé la cimaise. Ils ont tout l’air d’être de l’avis de des Esseintes qui « aimait encore les œuvres de ce poète, ainsi qu’il aimait les pierres rares, les matières précieuses et mortes ; mais aucune des variations de ce parfait instrumentiste ne pouvait plus l’extasier, car aucune n’était ductile au rêve[124] ». Pourtant, ils lui restent reconnaissants. En 1872, ils préparent un livre collectif, dédié à sa mémoire, et Mendès demande à Coppée de célébrer « la tendresse si souvent niée à Gautier[125] ». N’importe : le sceptre était tombé de sa main défaillante ; ce n’est pas Baudelaire qui l’a ramassé.


  1. J’ai esquissé cette idée à la fin de mon Histoire du Romantisme ; je la développe avec des documents nouveaux. On ne retrouvera ici aucun des textes qui m’ont servi en 1927.
  2. De Spœlberch, Histoire des œuvres de Th. Gautier, I, 21-22.
  3. Id., ibid., I, 108.
  4. Journal des Goncourt, IV, 110.
  5. Faguet, R. D. D.-M., 15 juillet 1911, p. 237.
  6. G. Lafenestre, Artistes et Amateurs, p. 135. — Cf. Jasinski, Les années romantiques de Th. Gautier, p. 169 sqq., p. 210, 212 ; l’Espana, p. 170, 270-277.
  7. Baudelaire, III, 159. C’est également un excellent latiniste ; cf. de Spœlberch, II, 302.
  8. Souvenirs d’un Enfant de Paris, I, 328.
  9. Poésies, II, 297-298 ; de Spœlberch, Lundis d’un Chercheur, p. 40-41.
  10. Rapport, p. 295.
  11. Maurice Dreyfous, Ce que je tiens à dire, p. 324.
  12. Lundis, IV, 73.
  13. Reproduit dans Spœlberch, Les Lundis d’un Chercheur, p. 186-190.
  14. Rapport, p. 388-398.
  15. Dreyfous, Ce que je tiens à dire, p. 172 ; cf. Laurent Tailhade, Quelques fantômes de jadis, p. 270.
  16. Dreyfous, ibid., p. 173.
  17. Comte Primoli, R. D. D.-M., Ier novembre 1925, p. 79.
  18. Dans la fournaise, p. 217 ; cf. Dreyfous, ibid., p. 71-72.
  19. Cf. J. Marsan, La Bataille romantique, II, 221.
  20. Ce que je tiens à dire, p. 72.
  21. Baudelaire, Œuvres complètes, I, 22.
  22. Ce que je tiens à dire, p. 334-335.
  23. Poésies, II, 252 ; cf. de Spœlberch, Histoire, II, 349-352 ; Bergerat, Th. Gautier, p. 98-99.
  24. Poésies, II, 238 ; cf. Judith Gautier, Revue de Paris, Ier avril 1903, p. 631-632.
  25. Bergerat, Th. Gautier, p. 128.
  26. Souvenirs, II, 381 ; cf. ses lettres familières, publiées au Mercure de France par Henri Boucher, no  du 15 mai 1929, p. 109.
  27. Bergerat, Th. Gautier, p. 128.
  28. Goncourt, Journal, VI, 318.
  29. Bergerat, Th. Gautier, p. 117.1
  30. Journal des Goncourt, II, 196.
  31. Strowski, Revue des Cours, 13 juin 1912, p. 650.
  32. Bergerat, ibid., p. 129.
  33. Comte Primoli, R. D. D.-M., 15 novembre 1925, p. 331.
  34. R. D. D.-M., Ier avril 1841, p. 110-126.
  35. Préface aux Œuvres complètes de Baudelaire, I, 42, 46.
  36. Bergerat, Th. Gautier, p. 122.
  37. Comte Primoli, R. D. D.-M., Ier novembre 1925, p. 83.
  38. Poésies, II, 209 ; de Spœlberch, Histoire, II, 2.
  39. Préface aux Œuvres de Baudelaire, I, 42.
  40. R. D. D.-M., Ier avril 1841, p. 126.
  41. R. D. D.-M., Ier avril 1841, p. 126.
  42. Moniteur du 11 janvier 1898.
  43. Rapport, p. 359.
  44. Rapport, p. 322.
  45. De Spœlberch, Histoire, II, 64.
  46. Rapport, p. 322-323.
  47. De Spœlberch, ibid., t. Ier, p. ix.
  48. Cf. l’édition de Pascal par François de Neufchateau, t. II, p. xxvi : « Laïcs et ecclésiastiques ».
  49. Revue de Paris, Ier avril 1903, p. 622.
  50. De Spœlberch. Histoire, II, 145.
  51. De Spœlberch, Histoire, I, 448.
  52. Judith Gautier, Revue de Paris, Ier mars 1909, p. 177, et Ier avril, p. 567-568.1
  53. Moniteur universel du 19 septembre 1859.
  54. De Spœlberch, Histoire, I, 444.
  55. Philarète Chasles, Mémoires, I, 302-303 ; Maxime Du Camp, Souvenirs, I, 307.
  56. Journal, I, 331.
  57. Bergerat, Th. Gautier, p. 119-120, 149 ; cf. Boucher, Mercure de France, Ier janvier 1914, p. 41 ; L. Tailhade, Quelques fantômes, p. 166.
  58. Cf. M. Paléologue, R. D. D.-M., Ier mars 1928, p. 34.
  59. Scherer, Études sur la littérature contemporaine, t. VIII, p. xxi-xxii ; Faguet, XIXe siècle, p. 297-298 ; Brunetière, Évolution de la poésie lyrique, II, 42.
  60. Journal des Goncourt, V, 52.
  61. Bergerat, Th. Gautier, p. 157.
  62. Nouveaux Lundis, VI, 289 ; Gaston Paris, Villon, p. r 76-177 ; Strowski, Correspondant du 10 juillet 1911, p. 45. Jasinski, Les Années, p. 327.
  63. Paul Fierens, « sculpture romantique », dans les Débats du 10 avril 1928. — Cf. Henri Bidou, Débats du 30 juillet 1929.
  64. Bergerat, Th. Gautier, p. 6.
  65. Art romantique, dans ses Œuvres complètes, III, 160.
  66. Cité par Catulle-Mendès, Rapport, p. 102.
  67. Comte Primoli, R. D. D.-M., 15 novembre 1925, p. 357.
  68. Id., ibid., p. 360.
  69. Rossel, Histoire des relations littéraires entre la France et l’Allemagne, p. 223-224. — Cf. René Jasinski, Les années romantiques, p. 148-149 ; l’Espana, p. 139-140.
  70. Rapport, p. 361 ; de Spœlberch, Histoire, I, 133.
  71. Bergerat, Souvenirs, I, 356-358 ; Goncourt, Journal, II, 210 ; cf. Pierre Gauthier, Henri Heine, p. 155.
  72. Henri de Régnier, Débats du 21 novembre 1910 ; Judith Gautier, Revue de Paris, Ier février 1903, p. 550-551 ; Bergerat, Souvenirs, I, 374-379 ; et Th. Gautier, p. 76.
  73. Monselet, Petits Mémoires, p. 7-8.
  74. Marquis de Ségur, Vieux dossiers, p. 397 sqq. Primoli, R.D.D.-M., Ier novembre 1925, p. 56 et 15 novembre, p. 332.
  75. Ibid., p. 359-360.
  76. Nouveaux Lundis, VI, 333. Lettres familières de Gautier, publiées par H. Boucher au Mercure de France, no  du 15 mai 1929, p. 115, 120.
  77. Émile Henriot, Annales Romantiques, juillet 1912, p. 186.
  78. Souvenirs, I, 317.
  79. Arsène Houssaye, Confessions, I, 320.
  80. Pierre Lhande, les Études du 20 février 1927, p. 412.
  81. L’Art romantique, p. 188.
  82. Poésies, I, 203.
  83. Poésies, I, 190 ; Baudelaire, l’Art Romantique, p. 185.
  84. De Spœlberch, Lundis d’un Chercheur, p. 44.
  85. De Spœlberch, Histoire, II, 426 sqq.
  86. Journal des Goncourt, I, 185 ; Judith Gautier, Revue de Paris, Ier avril 1903, p. 622. Jules Breton, Un Peintre Paysan, p. 260.
  87. Lux, Une Américaine à la cour de Napoléon III, dans la Revue Bleue, 1911, tome
    LXXXVIII, p. 446-447.
  88. De Spœlberch, Histoire, II, 391.
  89. Parnasse de 1869, p. 261 ; Poésies, II, 240.
  90. De Spœlberch, Lundis, p. 56.
  91. Faguet, R. D. D.-M., 15 juillet 1911, p. 336-337 ; de Spœlberch, Lundis, p. 78.
  92. Vingt-quatre volumes, chez Sproul, Londres et New-York, 1901.
  93. Primoli, R. D. D.-M., 15 novembre 1925, p. 338.
  94. Bergerat, Th. Gautier, p. 75-76.
  95. Les Commérages de Tybalt, p. 294.
  96. R. D. D.-M., 15 juillet 1911, p. 338 ; cf. A. Fontainas, Mercure de France, 16 septembre 1911, p. 242.
  97. Rapport, p. 323.
  98. Marsan, La Bataille romantique, II, 208 sqq.
  99. Journal des Goncourt, II, 160.
  100. Baudelaire, L’Art romantique, p. 189.
  101. Armand Silvestre, Portraits, p. 30.
  102. Id., ibid., p. 117.
  103. Poésie et poètes, p. 313.
  104. Mme Demont-Breton, Les Maisons que j’ai connues, II, 106.
  105. Calmettes, Leconte de Lisle, p. 161.
  106. Artistes et Amateurs, p. 121.
  107. Jean Ducros, Le Retour de la Poésie, p. 62-63.
  108. Rapport, p. 336.
  109. Maxime Du Camp, Th. Gautier, p. 72.
  110. Souvenirs d’un enfant de Paris, I, 399.
  111. Lettres de M. Guizot à sa famille, p. 384, 385.
  112. Ce que je tiens à dire, p. 70.
  113. Art romantique, p. 160.
  114. Verlaine, Œuvres, IV, 287.
  115. Souvenirs, p. 245.
  116. Dreyfous, Ce que je tiens à dire, p. 284 sqq.
  117. Poésies, II, 222 ; cf. Judith Gautier, Revue de Paris, Ier mai 1903, p. 183.
  118. Sur ce Rapport, cf. de Spœlberch, Histoire, II, 358.
  119. Rapport, p. 359.
  120. Bulletin du Bibliophile, 1868, p. 300-301.
  121. Rapport, p. 362, 376-377.
  122. De Spœlberch, Histoire, II, 358.
  123. Parnasse de 1869, p. 262 ;
  124. Huysmans, À rebours, p. 251.
  125. Monval, Revue de Paris, Ier mars 1909, p. 85.