Histoire du parlement/Édition Garnier/Chapitre 14
Louis XII acheva d’établir la jurisprudence du grand conseil sédentaire à Paris. Il donna une forme au parlement de Normandie et à celui de Provence, sans que celui de Paris fût consulté sur ces établissements, ni qu’il en prît ombrage.
Presque tous nos historiens ont négligé jusqu’ici de faire mention de cette barrière éternelle que Louis XII mit entre la noblesse et la robe.
Les baillis et prévôts, presque tous chevaliers, étaient les successeurs des anciens comtes et vicomtes : ainsi le prévôt de Paris avait été souverain juge à la place des vicomtes de Paris.
Les quatre grands baillis, établis par saint Louis, étaient les quatre grands juges du royaume. Louis XII voulut que tous les baillis et prévôts ne pussent juger s’ils n’étaient lettrés et gradués. La noblesse, qui eût cru déroger si elle eût su lire et écrire, ne profita pas du règlement de Louis XII. Les baillis conservèrent leur dignité et leur ignorance ; des lieutenants lettrés jugèrent en leur nom, et leur ravirent toute leur autorité.
Copions ici un passage entier d’un auteur connu[1]. « On payait quarante fois moins d’épices qu’aujourd’hui. Il n’y avait dans le bailliage de Paris que quarante-neuf sergents, et à présent il y en a plus de cinq cents : il est vrai que Paris n’était pas la cinquième partie de ce qu’il est de nos jours ; mais le nombre des officiers de justice s’est accru dans une bien plus grande proportion que Paris ; et les maux inséparables des grandes villes ont augmenté plus que le nombre des habitants.
« Il maintint l’usage où étaient les parlements du royaume de choisir trois sujets pour remplir une place vacante : le roi nommait un des trois. Les dignités de la robe n’étaient données alors qu’aux avocats : elles étaient le prix du mérite, ou de la réputation qui suppose le mérite. Son édit de 1499, éternellement mémorable, et que nos historiens n’auraient pas dû oublier, a rendu sa mémoire chère à tous ceux qui rendent la justice, et à ceux qui l’aiment. Il ordonne par cet édit qu’on suive toujours la loi, malgré les ordres contraires à la loi, que l’importunité pourrait arracher du monarque. »
- ↑ Voltaire lui-même, chapitre CXIV de l’Essai sur les Mœurs ; voyez tome XII, page 203. Il donnait l’Histoire du Parlement pour l’ouvrage de l’abbé Big....