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Iconologie (Cesare Ripa, 1643)/II/Le Colerique

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Le coleriqve.


VOvs le voyez icy repreſenté par vn ieune Homme maigre, qui a le teint jaunaſtre, le regard furieux, le corps tout nud, & l’eſpée à la main, en action d’en vouloir battre quelqu’vn. En l’vn de ſes coſtez ſe void vn Eſcu, auec vne grande flamme au milieu, & en l’autre vn Lyon irrité qui l’accompagne par tout.

Lib. 4. aph. com. 6. Il eſt maigre, pource qu’au rapport de Galien, en luy

domine entierement la chaleur, qui, pour eſtre cauſe de la ſeichereſſe, eſt repreſentée par la flamme de ſon Eſcu.

Il a le teint jaune, & fait voir par là que la couleur du viſage eſt bien ſouuent vne marque qui manifeſte l’humeur du corps. D’où il aduient que par le teint blanc eſt demonſtré le phlegme, par le paſle ou le jaune la colere, par le rouge meſlé de blanc l’humeur ſanguine, & par la couleur ſombre & qui tire 4. de ſanit. tuen. ſur le noir, la melancolie, comme le remarque Galien.

Son viſage eſt effroyable & furieux, à cauſe que la colere, comme dit Ouide, produit ordinairement ſes effets.

Le viſage eſt enflé par elle,
Les veines noirciſſent de ſang,
Le feu rougit dans ſa prunelle,
La bile luy picque le flanc.

Son action repreſente celle d’vn Homme fougueux, & qui pour la moindre poinctille eſt touſiours preſt à ſe battre.

On le peint jeune & tout nud auecque ſon Eſcu par terre, pour monſtrer que la force de ſa paſſion l’aueugle ſi fort qu’il oublie ce qui le peut conſeruer, & s’expoſe temerairement à In Troad. toutes ſortes de dangers, ainſi que le remarque Seneque.

Les jeunes gens pleins d’inſolence
Suiuent leur premier mouuement,
Et peuuent difficilement
S’arreſter dans leur violence.

A quoy ſe rapporte à peu prés le dire d’Auicenne, que les actions qui ſe font meurement ſont les vrays ſignes d’vn temperament parfait ; comme au contraire celles qui s’executent ſans conſeil & par impetuoſité, ſont des marques de peu de ſens & de beaucoup de chaleur.

Quant au Lyon qui le ſuit, il eſt mis icy pour vn Symbole de la colere, veu que ſelon Alciat,

Ce Roy des animaux quand quelqu’vn le deſpite
Bat ſes flancs de ſa queuë, & lui-meſme s’irrite.

Par le Lyon neantmoins, il eſt demonſtré que les Hommes de complexion colerique, ont ie ne ſçay quoy de magnanime & de ſi genereux, qu’à force de l’eſtre ils en deuiennent ſouuent prodigues.