Idées républicaines, augmentées de remarques/7

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VII.

Ainſi les Evêques de Rome qui avoient donné les premiers cet exemple fatal, rendirent à la fois & leur domination & leur ſecte odieuſe dans la moitié de l’Europe ; ainſi pluſieurs Evêques en Allemagne devinrent quelquefois les oppreſſeurs des peuples dont ils devoient être les peres.

VII.

La gradation conduit M. D. V. aux Papes Evêques de Rome. L’iniquité de ſa cenſure ne nous montre encore ici que des Rebelles & des Tirans ; un trait de lumiere puiſé dans les vraies ſources de l’hiſtoire ſuffira pour l’écarter.

Deux cauſes ont préparé les révolutions de Rome ſous le régne des Empereurs de Conſtantinople. La foibleſſe de l’Empire & la négligence des Empereurs. Dès le VIII. Siécle les Papes étoient devenus comme le rampart de l’Italie contre le progrès des armes des Lombards ; ils épuiſoient leurs richeſſes, expoſoient leur vie pour conſerver la capitale & les provinces ſous l’obéiſſance du Souverain. Mais enfin abandonné par les Empereurs & trop foible pour réſiſter plus long-tems à la fureur d’une Nation barbare le Pape Etienne III. de concert avec les Romains implora la protection de Pepin Roi de France[1]. Ce Prince paſſe en Italie, enleve aux uſurpateurs les Provinces & les Villes qu’ils avoient envahies. Maître de ces Etats par le droit des conquêtes il les cede à l’Egliſe Romaine par une donation ſolemnelle. Charlemagne qui mit fin au Royaume des Lombards confirma cette ceſſion & étendit le domaine des Souverains Pontifes[2].

Les Romains virent ſans jalouſie la puiſſance temporelle des Papes : ils s’y ſoumirent avec joye. Dans ſa formation ou dans ſes progrès l’on n’apperçoit aucun veſtige d’injuſtice ni de tirannie. Il n’eſt point de ſouveraineté qui ſe ſoit formée & augmentée par une voye plus douce, plus flatteuſe, plus honorable.

La ſouveraineté de quelques Evêques en Allemagne fut également l’effet de la conceſſion de l’Empereur Charlemagne. Ce fut de la part de ce Prince le trait d’une ſage politique : par ce moyen il ſut affermir l’Egliſe & l’Empire contre l’invaſion des nations infidelles. Ses Succeſſeurs uſerent de la même politique avec le même ſuccès. Il eſt vrai que quelques-uns de ces Prélats ont quelquefois opprimé leurs ſujets : l’Hiſtoire ne les a pas épargnés ; mais elle les reconnoît pour de légitimes Souverains. L’on a déja remarqué les erreurs de M. D. V. ſur l’Hiſtoire, l’on vient d’en obſerver de nouvelles ; toute la différence qu’on trouve entre les unes & les autres, c’eſt que les premieres ont été l’effet de l’ignorance ou de la mauvaiſe foi, celles-ci ont pour principe l’irréligion.

  1. Anaſt Bibl. Concil. Gall. tom. 2.
  2. Conc. VII. œcum. tom. 8. Cons. lab.