L’Émigré/Lettre 081

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P. F. Fauche et compagnie (Tome IIp. 314-315).


LETTRE LXXXI.

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Le Marquis de St. Alban
à la
Cesse de Loewenstein.


J’étais à vos pieds pour implorer mon pardon, et je m’y prosterne de nouveau pour adorer la clémence de mon adorable sœur. Ah ! permettez-moi de vous donner ce nom si doux à mon cœur, ce nom qui me rappellera sans cesse le seul genre d’affection que je puis espérer de vous. Monsieur le Commandeur est dans ma chambre, il me presse de partir pour aller dîner chez lui et ne me laisse pas un moment pour vous écrire une plus longue lettre ; mais ce n’est pas tout, il exige de moi que je l’accompagne, ce soir chez vous, madame la Comtesse. J’ai épuisé toutes les défaites possibles pour me refuser à son désir, il a eu réponse à tout, et vous sentirez qu’il est bien difficile à un homme isolé, sans relations, sans affaires, de trouver des excuses valables, pour se dispenser d’un voyage qu’on suppose devoir lui être agréable. Vous connaissez le ton d’autorité du bon Commandeur, et tous ses droits sur moi ; je n’ai pu me défendre de ses instances. Il se plaît à dire que vous me devez la vie ; il est encore bien plus certain que je vous la dois, que… je suis obligé de finir, et n’ai que le temps d’offrir à ma charmante sœur l’hommage de mon respect, du plus tendre attachement, de la plus profonde admiration et d’une éternelle reconnaissance.

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