L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo/Repentir d’un croyant aveugle

La bibliothèque libre.
Traduction par Guillaume Apollinaire d’après la traduction d’Alcide Bonneau de Raccolta universale delle opere di Giorgio Baffo, éd. 1789.
L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo, Texte établi par Guillaume ApollinaireBibliothèque des curieux, collection Les Maîtres de l’amour (p. 245).

REPENTIR D’UN CROYANT AVEUGLE

Si je croyais, Seigneur, que vous pensiez
Que je me repens des coups que j’ai tirés
Et que vous m’en fissiez un grand méfait,
Vous verriez chez moi un grand repentir ;

Mais je ne crois pas que vous ayez ces idées-là,
Vous ne vous occupez point de vos créatures,
Et comme, de nature, vous êtes bienheureux,
Vous n’y pouvez songer, même en le voulant.

Donc comment pourrais-je réduire ma pensée
À s’arrêter à un vrai repentir,
Sachant que vous ne vous en souciez point ?

Bien plutôt aujourd’hui je me repens de cœur
D’avoir un jour aveuglément cru
Qu’on offensait un Dieu à le mettre en moniche.