L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo/Sur le voyage du duc de Padoue

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Traduction par Guillaume Apollinaire d’après la traduction d’Alcide Bonneau de Raccolta universale delle opere di Giorgio Baffo, éd. 1789.
L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo, Texte établi par Guillaume ApollinaireBibliothèque des curieux, collection Les Maîtres de l’amour (p. 91-92).

SUR LE VOYAGE DU DUC DE PADOUE

Pour faire le chasseur dans le Padouan
S’en est allé le Duc, avec toute sa Cour,
Espérant trouver là plus belle rencontre
Qu’il n’a eu en chassant à Venise ;

Que l’espèce sera là plus commode,
Qu’elle n’aura pas la peau si dure,
Qu’elle ne sera, comme la nôtre, si rusée,
Et qu’il pourra en manger toute sa faim.

À ce qui se voit et à ce qui se dit,
Pour lui ce climat se montre plus serein,
Et il trouve qu’il y vivra mieux en joie ;

S’il séjourne si longtemps dans ces contrées,
Le monde ne se trompe pas en jugeant
Que la chasse lui réussit très bien.

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Comme le chasseur qui, poussé par la faim,
S’enfonce dans le bois avec son escopette,

Cherchant à pouvoir tirer un joli coup,
Ainsi allait ce Duc au milieu des Dames ;

Il les a trouvées toutes dures de peau
Et quoiqu’il tirât très droit,
Ses balles ne produisaient aucun effet,
Juste comme s’il tirait sur un cuir épais.

Il aurait voulu prendre de cette belle race,
Mais si l’une était forte comme un château,
L’autre était forte comme une place de guerre.

Jamais il n’a pu faire un beau coup ;
Et savez-vous comment a fini cette chasse ?
Il est parti en se tirant l’oiseau !