L’Encyclopédie/1re édition/BAS

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* BAS, adj. terme relatif à la distance, ou la dimension en longueur considérée verticalement : haut est le corrélatif de bas. L’usage, la coûtume, les conventions, l’ordre qui regne entre les êtres, & une infinité d’autres causes, ont assigné aux objets, soit de l’art, soit de la nature, une certaine distance ou dimension en longueur considérée verticalement. Si nous trouvons que l’objet soit porté au-delà de cette distance ou dimension, nous disons qu’il est haut ; s’il reste en-deçà, nous disons qu’il est bas. Il semble que nous placions des points idéaux dans les airs, qui nous servent de termes de comparaison toutes les fois que nous employons les termes bas & haut ou élevé. Nous disons d’un clocher qu’il est bas, & d’une enseigne qu’elle est haute ; quoique de ces deux objets l’enseigne soit le moins élevé. Que signifient donc ici les mots haut & bas ? sinon que relativement à la hauteur ou à la distance verticale à laquelle on a coûtume de porter les clochers, celui-ci est bas ; & que relativement à la hauteur à laquelle on a coûtume de pendre les enseignes, celle-ci est haute. Voilà pour la distance & pour l’art ; voici pour la dimension & pour la nature. Nous disons ce chêne est bas, & cette tulipe est haute : ce qui ne signifie autre chose, sinon que relativement à la dimension verticale que le chêne & la tulipe ont coûtume de prendre, l’un peche par défaut, & l’autre par excès. C’est donc dans l’un & l’autre cas l’observation & l’expérience qui nous apprennent à faire un usage convenable de ces sortes de mots, qu’il ne faudroit peut-être pas définir, puisque l’exactitude, quand on se la propose, rend la définition plus obscure que la chose. Mais on n’écrit pas pour ses contemporains seulement.

Bas, (Marine.) les hauts & les bas du vaisseau ; les hauts du vaisseau, ce sont les parties qui sont sur le pont d’en-haut ; & les bas, celles qui sont dessous. (Z)

Bas le pavillon, mettre bas le pavillon (Marine) c’est-à-dire abaisser le pavillon pour se rendre ou pour saluer un vaisseau plus puissant à qui l’on doit cet honneur.

On dit de même avoir les mâts de hune à bas. (Z)

Bas, adj. (en Musique.) signifie la même chose que grave, & est opposé à haut ou aigu : on dit ainsi que le ton est trop bas, qu’on chante trop bas, qu’il faut renforcer les sons dans le bas. Bas signifie aussi quelquefois doucement, à demi-voix, &c. & en ce sens il est opposé à fort ; on dit parler bas, parler chanter ou psalmodier à basse voix : il chantoit ou parloit si bas qu’on ne l’entendoit point.


Coulez si lentement, & murmurez si bas,
Qu’Issé ne vous entende pas.

La Mothe, Opera d’Issé. (S)


Bas, (Man.) mettre bas, porter bas. Voy. Porter.

Avoir les talons bas. Voyez Talon. (V)

Bas se prend en Venerie, en Chasse, pour peu élevé : on dit bas voler, ou bavoler, en parlant de la perdrix, ou autres oiseaux qui n’ont pas le vol haut.

Bas, s. m. (Bonneterie, & autres marchands, comme Peaussier, &c.) c’est la partie de notre vêtement qui sert à nous couvrir les jambes : elle se fait de laine, de peau, de toile, de drap, de fil, de filoselle, de soie ; elle se tricote à l’aiguille ou au métier. Voy. pour les bas tricotés à l’aiguille, l’article Tricoter.

Voici la description du bas au métier, & la maniere de s’en seryir. Nous avertissons avant que de commencer, que nous citerons ici deux sortes de Planches : celles du métier à bas, qui sont relatives à la machine ; & celles du bas au métier, qui ne concernent que la main d’œuvre. Ainsi la Pl. III. fig. 7. du métier à bas, n’est pas la même Planche que la Pl. III. fig. 7. du bas au métier.

Le métier à faire des bas est une des machines les plus compliquées & les plus conséquentes que nous ayons : on peut la regarder comme un seul & unique raisonnement, dont la fabrication de l’ouvrage est la conclusion ; aussi regne-t-il entre ses parties une si grande dépendance, qu’en retrancher une seule, ou altérer la forme de celles qu’on juge les moins importantes, c’est nuire à tout le méchanisme.

Elle est sortie des mains de son inventeur presque dans l’état de perfection où nous la voyons ; & comme cette circonstance doit ajoûter beaucoup à l’admiration, j’ai préféré le métier tel qu’il étoit anciennement, au métier tel que nous l’avons, observant seulement d’indiquer leurs petites différences à mesure qu’elles se présenteront.

On conçoit, après ce que je viens de dire de la liaison & de la forme des parties du métier à bas, qu’on se promettroit en vain quelque connoissance de la machine entiere, sans entrer dans le détail & la description de ces parties : mais elles sont en si grand nombre, qu’il semble que cet ouvrage doive excéder les bornes que nous nous sommes prescrites, & dans l’étendue du discours, & dans la quantité des Planches. D’ailleurs, par où entamer ce discours ? comment faire exécuter ces Planches ? La liaison des parties demanderoit qu’on dît & qu’on montrât tout à la fois ; ce qui n’est possible, ni dans le discours, où les choses se suivent nécessairement, ni dans les Planches, où les parties se couvrent les unes les autres.

Ce sont apparemment ces difficultés qui ont détourné l’utile & ingénieux auteur du Spectacle de la nature, d’insérer cette machine admirable parmi celles dont il nous a donné la description : il a senti qu’il falloit tout dire ou rien ; que ce n’étoit point ici un de ces méchanismes dont on pût donner des idées claires & nettes, sans un grand attirail de Planches & de discours ; & nous sommes restés sans aucun secours de sa part.

Que le lecteur, loin de s’étonner de la longueur de cet article, soit bien persuadé que nous n’avons rien épargné pour le rendre plus court, comme nous espérons qu’il s’en appercevra, lorsqu’il considérera que nous avons renfermé dans l’espace de quelques pages l’énumération & la description des parties, leur méchanisme, & la main d’œuvre de l’ouvrier. La main d’œuvre est fort peu de chose ; la machine fait presque tout d’elle-même : son méchanisme en est d’autant plus parfait & plus délicat. Mais il faut renoncer à l’intelligence de ce méchanisme, sans une grande connoissance des parties : or j’ose assûrer que dans un métier, tel que ceux que les ouvriers appellent un quarante-deux, on n’en compteroit pas moins de deux milles cinq cens, & par-delà, entre lesquelles on en trouveroit à la vérité beaucoup de semblables : mais si ces parties semblables sont moins embarrassantes pour l’esprit que les autres, en ce qu’elles ont le même jeu, elles sont très-incommodes pour les yeux dans les figures, où elles ne manquent jamais d’en cacher d’autres.

Pour surmonter ces obstacles, nous avons crû devoir suivre ici une espece d’analyse, qui consiste à distribuer la machine entiere en plusieurs assemblages particuliers ; représenter au-dessous de chaque assemblage les parties qu’on n’y appercevoit pas distinctement ; assembler successivement ces assemblages les uns avec les autres, & former ainsi peu-à-peu la machine entiere. On passe de cette maniere d’un assemblage simple à un composé, de celui-ci à un plus composé, & l’on arrive sans obscurité ni fatigue à la connoissance d’un tout fort compliqué.

Pour cet effet nous divisons le métier à bas en deux parties ; le fût ou les parties en bois qui soûtiennent le métier, & qui servent dans la main d’œuvre ; & le métier même, ou les parties en fer, & autres qui le composent.

Nous nous proposons de traiter chacune séparément. Mais avant que d’entrer dans ce détail, nous rapporterons le jugement que faisoit de cette machine un homme qui a très-bien senti le prix des inventions modernes. Voici comment M. Perrault s’en exprime dans un ouvrage, qui plaira d’autant plus, qu’on aura moins de préjugés. « Ceux qui ont assez de génie, non pas pour inventer de semblables choses, mais pour les comprendre, tombent dans un profond étonnement à la vûe des ressorts presqu’infinis dont la machine à bas est composée, & du grand nombre de ses divers & extraordinaires mouvemens. Quand on voit tricoter des bas, on admire la souplesse & la dextérité des mains de l’ouvrier, quoiqu’il ne fasse qu’une seule maille à la fois ; qu’est-ce donc quand on voit une machine qui forme des centaines de mailles à la fois, c’est-à-dire, qui fait en un moment tous les divers mouvemens que les mains ne font qu’en plusieurs heures ? Combien de petits ressorts tirent la soie à eux, puis la laissent aller pour la reprendre, & la faire passer d’une maille dans l’autre d’une maniere inexplicable ? & tout cela sans que l’ouvrier qui remue la machine y comprenne rien, en sache rien, & même y songe seulement : en quoi on la peut comparer à la plus excellente machine que Dieu ait faite, &c.

Il est bien fâcheux & bien injuste, ajoûte M. Perrault, qu’on ne sache point les noms de ceux qui ont imaginé des machines si merveilleuses, pendant qu’on nous force d’apprendre ceux des inventeurs de mille autres machines qui se présentent si naturellement à l’esprit, qu’il suffiroit d’être venus des premiers au monde pour les imaginer ».

Il est constant que la machine à bas a pris naissance en Angleterre, & qu’elle nous est venue par une de ces supercheries que les nations se sont permises de tout tems les unes envers les autres. On fait sur son auteur & sur son invention des contes puériles, qui amuseroient peut-être ceux qui n’étant pas en état d’entendre la machine, seroient bien aises d’en parler, mais que les autres mépriseroient avec raison.

L’auteur du Dictionnaire du Commerce dit que les Anglois se vantent en vain d’en être les inventeurs, & que c’est inutilement qu’ils en veulent ravir la gloire à la France ; que tout le monde sait maintenant qu’un François ayant trouvé ce métier si utile & si surprenant, & rencontrant des difficultés à obtenir un privilége exclusif qu’il demandoit pour s’établir à Paris, passa en Angleterre, où la machine fut admirée & l’ouvrier récompensé. Les Anglois devinrent si jaloux de cette invention, qu’il fut long-tems défendu, sous peine de la vie, de la transporter hors de l’île, ni d’en donner de modele aux étrangers : mais un François les avoit enrichis de ce présent, un François le restitua à sa patrie, par un effort de mémoire & d’imagination, qui ne se concevra bien qu’à la fin de cet article ; il fit construire à Paris, au retour d’un voyage de Londres, le premier métier, celui sur lequel on a construit ceux qui sont en France & en Hollande. Voilà ce qu’on pense parmi nous de l’invention du métier à bas. J’ajoûterai seulement au témoignage de M. de Savari, qu’on ne sait à qui l’attribuer en Angleterre, le pays du monde où les honneurs qu’on rend aux inventeurs de la nation, leur permettent le moins de rester ignorés.

DU FUST.

1. Les deux piés de devant qui soûtiennent le siége de l’ouvrier. Fig. 1. Planche I.

2. Les deux piés de derriere.

3. La traverse d’en-bas, à laquelle est attachée la patte qui arrête les marches.

4. La traverse du haut du siége.

5. La traverse allegie. On pratique ordinairement à sa surface 5, une espece de rainure assez large, sur laquelle l’ouvrier met les choses qui lui sont commodes en travaillant.

6. La traverse du contre-poids.

7. La traverse d’en-bas.

8. 8. Les deux têtes du fût. Leur partie antérieure devroit être en biseau.

9. 9. Deux pattes de fer qui tiennent le métier fixe.

10. Le siége de l’ouvrier.

11. 11. Deux goussets qui servent à soûtenir le siége.

14. Support du gousset.

15. 15. Traverses qui servent de supports aux goussets.

16. 16. Supports des montans de devant.

17. 17. Les deux montans de devant.

18. 18. Goussets des montans & des piés de derriere.

19. 19. & 19. 19. Ouvertures pratiquées à chaque tête, pour y fixer les grandes pieces du métier.

20. 20. &c. Les vis avec leurs oreilles, qui servent à tenir les parties du fût fermement assemblées.

21. Un arrêtant. Ainsi l’arrêtant est, comme on voit, un morceau de fer fendu d’une ouverture oblongue, qui lui permet d’avancer ou de reculer à discrétion sous la tête de la vis, qui le fixe au côté intérieur du montant, & terminé d’un bout par une pointe dont l’usage est d’arrêter le crochet inférieur de l’abattant, & de l’empêcher d’avancer trop en-devant ; c’est de cet usage que cette piece a pris le nom d’arrêtant. Il y a un autre arrêtant à la surface & à la hauteur correspondante de l’autre montant.

  1. Un petit coup. Le petit coup est une espece de

vis, dont la tête a une éminence à laquelle on porte le bout du crochet inférieur de l’abattant quand on travaille : cette éminence est coupée en plan incliné vers le fond du métier, & permet au crochet de s’échapper presque de lui-même.

23. 23. Les écrous à oreilles de l’arrêtant & du petit coup.

24. 24. Deux broches de fer, capables de recevoir chacune une bobine.

25. Une bobine dans sa broche.

26. 26. Deux passe-soies. Les passe-soies sont deux morceaux de fer recourbés, comme on voit, & percés de trous, par lesquels on fait passer la soie, qu’ils dirigent & empêchent de s’attacher aux objets circonvoisins.

27. Un rouloir avec les crochets qui le suspendent. Le rouloir est un instrument qui sert à plier l’ouvrage à mesure qu’il se fait. Il faut y distinguer plusieurs parties. La barre 1, 2, plate qui tient unis les côtés 3, 4 par leurs extrémités supérieures. La barre ronde 5, 6 qui s’ajuste dans les trous percés aux extrémités inférieures des côtés, comme nous l’allons dire. La noix 7, la gachette 8, le ressort 9, le bouton 10, la tringle 13, 14 ; la barre ronde est faite en douille par les deux bouts ; la noix & le bouton ont chacun une éminence ou espece de tourillon, par lesquels ils s’adaptent, l’un à un bout & l’autre à l’autre bout. Ces especes de tourillons sont percés d’un trou, qui ont leurs correspondans à la douille qui les reçoit. On voit ces trous 11, 12 : on place dans chacun une goupille qui traverse la douille & les tourillons, & qui fixe le bouton à l’une des extrémités de la barre ronde, & la noix à l’autre extrémité. D’où il arrive, que cette barre passée dans les ouvertures pratiquées au bas des côtés du rouloir, peut tourner dans ces ouvertures, mais ne peut s’en échapper, & que la noix est tenue appliquée au côté 3, où l’extrémité de la gachette entre dans ses dents & y reste engrainée, en vertu du ressort qui pousse son autre extrémité.

L’extrémité de la gachette peut bien s’échapper des dents de la noix, & laisser tourner la barre ronde sur elle-même, en un sens, mais non dans l’autre, c’est-à-dire que l’ouvrage peut s’envelopper sur elle, & ne peut se développer.

La tringle 13, 14 sert à diriger l’ouvrage.

Vûe du fût, dont on a séparé un des côtés pour découvrir les parties suivantes. Planche II. fig. 1

1. 2. 1. Les trois marches.

3. 3. Quarrés de bois qui les séparent.

4. Quarré de bois percé par le milieu, qui écarte de la marche du milieu les deux autres.

5. 5. Extrémité de deux marches.

6. 6. Traverse de bois, sur laquelle les marches 5, 5 peuvent agir.

7. Traverse de derriere.

8. Crochet de fer qui part d’un bout de la serrure ou de l’anneau de l’extrémité de la marche du milieu, & qui embrasse de l’autre bout la partie la plus basse de la petite anse.

9. 9. Cordes qui partent de l’extrémité des marches 5, 5, passent sur le tambour de la roue 13, & la font mouvoir de gauche à droite, & de droite à gauche à discrétion.

10. 10. Cordes qui partent des extrémités de la traverse 6, 6, & la tiennent suspendue en vertu de leurs crochets 10, 10, qui s’arrêtent à ceux du balancier.

11. Patte de fer attachée à la traverse 4, qui reçoit un boulon, sur lequel sont soûtenues les marches qu’il traverse, & dont l’extrémité qu’on n’apperçoit pas est reçûe dans un piton.

12. Patte de fer qui tient la roue suspendue par une des extrémités de son axe ou arbre ; on conçoit bien que l’autre extrémité est soûtenue de la même maniere.

13. La roue avec son arbre & son tambour, dont elle ne laisse appercevoir que le quarré.

14. La tige du contre-poids ; cette tige est mobile de bas en haut dans la patte 15.

15. La patte du contre-poids.

Fig. 2. Une poulie avec son fil de soie. Cette poulie n’est autre chose qu’un fil de laiton, auquel on a fait une boucle à chaque bout ; le fil de soie passe par ces boucles, & le poids du fil de laiton l’empêche d’approcher des objets circonvoisins, & l’aide à se dévider de dessus la bobine. Quand la poulie n’est pas assez lourde pour la soie, on y attache une carte.

Voilà le fût du métier ancien, auquel on n’a presque point fait de changement depuis : on a seulement supprimé les quarrés qui séparent les marches ; on a allégi les pattes qui suspendent la roue. Au lieu de donner une patte à la tige du contre-poids, on a percé la traverse par le milieu d’un trou quarré, & l’on a fait passer la tige par ce trou, dont on a garni l’ouverture supérieure d’une plaque de fer, afin qu’elle ne fût point endommagée par la chûte du contre-poids : on en a encore amorti le coup, en attachant un morceau de cuir à la tête de la tige ou branche du contre-poids : cette tête doit être elle-même percée ; on verra dans la suite par quelle raison.

Voilà tout ce qui concerne le fût & ses parties. Nous n’avons rien dit de leur assemblage, parce qu’il n’a rien de particulier, & qu’il est tel qu’on le voit dans les figures. Passons maintenant au métier.

DU MÉTIER ET DE SES PARTIES.

Pour faciliter l’intelligence de cette machine, nous allons distribuer ses parties en plusieurs assemblages, qui s’assembleront eux-mêmes les uns avec les autres, & dont on verra résulter peu à peu la machine entiere.

Premier Assemblage. Planc. II. fig. 3.

Les pieces entierement semblables de part & d’autre, 1, II, 2, 3 ; 1, II, 2, 3, s’appellent les grandes pieces, & ce sont en effet les plus grandes qu’il y ait dans le métier : elles forment le devant du métier par leur saillie 1, II. 1, II. & le derriere par leur hauteur d’équerre 2, 3 ; 2, 3. Leur saillie 1, 2 ; 1, 2 s’appelle avant-bras. L’avant-bras a à son extrémité 1, 1, une charniere, & à son extrémité 2, 2, une éminence oblongue & parallélogrammatique, qu’on appelle l’oreille de la grande piece. Cette oreille est percée de plusieurs trous, qui servent à fixer par des vis la grande piece sur la tête du fût.

Les pieces entierement semblables & semblablement placées 4, 5 ; 4, 5, s’appellent les épaulieres ; elles s’assemblent par leurs ouvertures quarrées avec l’arbre 6, 7, dont elles reçoivent les quarrés.

La piece 6, 7 s’appelle l’arbre ; ses deux extrémités, dont on en voit une représentée fig. 4. sont terminées l’une & l’autre par un quarré 1, & par un tourillon 2. L’ouverture 5 quarrée des épaulieres 4, 5 ; 4, 5, reçoit le quarré de l’arbre, dont le tourillon est reçu dans le nœud 3 ou 3 de la grande piece : ainsi les épaulieres sont fixées sur l’arbre, mais l’arbre tourne dans les nœuds 3, 3 des grandes pieces.

L’arbre a dans son milieu une saillie ou espece d’oreille 8, qu’on appelle le porte faix de l’arbre. On voit à chaque nœud 3, 3, des grandes pieces 1, II, 2, 3 ; 1, II, 2, 3, un bouton en vis 9, 9, qui s’enleve & permet de couler de l’huile dans le nœud 3, 3 quand il en est besoin.

La partie 10, 10 s’appelle la barre de derriere d’en-haut : elle s’attache, comme on voit ici, au derriere des grandes pieces & en-dehors.

La partie 11, 11 s’appelle la barre de derriere d’en-bas : elle s’attache, comme on voit, au derriere des grandes pieces en-dedans.

L’usage de ces deux barres est de soûtenir le porte-faix d’en-bas.

Le porte-faix d’en-bas, fig. 5. est composé de plusieurs pieces : d’une roulette 1 attachée à la piece 2, qui conserve le nom de porte-faix d’en-bas ; d’une chappe 3, qui passe sur le porte-faix, qui y est fixée, & qui soûtient la roulette ; & d’un boulon 4, qui traverse les côtés de la chappe & la roulette mobile sur ce boulon.

Ce petit assemblage se fixe, fig. 3. au milieu de la barre d’en-haut & de la barre d’en-bas, & entre ces barres, comme on le voit en 12.

La partie 13, 13 s’appelle gueule de loup : la gueule de loup est fixée au milieu de la barre d’en-bas.

Les nouveaux métiers ont deux gueules de loup, attachées à la barre d’en-bas à des distances égales des grandes pieces. Les parties par lesquelles elles sont fixées à la barre, sont ouvertes selon leur longueur, afin qu’elles puissent, comme on l’a dit de l’arrétant, glisser sous la tête des vis qui les fixent, & s’arrêter à telle hauteur qu’on desire : ce qui est très-essentiel.

La partie 14, 14, 15, 15, fixée par deux vis sur chaque extrémité des épaulieres, s’appelle le balancier. Il est composé de deux barres paralleles 14, 14, 15, 15, qui sont assemblées, comme on voit, & dont celle d’en-bas 15, 15, est terminée par deux petits crochets.

On a corrigé ce balancier dans les métiers nouveaux ; on a supprimé la barre 15, 15 avec son tenon, & on lui a substitué sur la barre 14, 14, à égale distance des épaulieres, deux vis arrêtées par des écrous à oreilles, placés sur la surface supérieure de cette barre. La tête de ces vis se trouve donc sous cette barre. Cette tête percée peut recevoir deux petits crochets ; & ces petits crochets font les mêmes fonctions que ceux de la piece 15, 15 qu’on a supprimée. D’ailleurs, à l’aide des écrous à oreilles, on peut hausser & baisser ces crochets à discrétion.

La partie 16, 16 s’appelle le grand ressort. Son extrémité 16 est terminée par un petit tourillon, qui entre dans l’enfoncement ou coup de pointe 16 du porte-faix d’en-bas ; & son extrémité 16 s’ajuste par un autre tourillon dans l’extrémité de la vis 17, qui traverse le porte-faix d’en-haut, & à l’aide de laquelle il est évident qu’on peut bander ou relâcher à discrétion le grand ressort, dont l’effort tend à relever les épaulieres avec le balancier, en faisant tourner l’arbre sur lui-même.

Voilà le premier assemblage : j’avertis qu’avant de passer au second, il faut avoir celui-ci très-familier ; sinon les pieces venant à se multiplier, & les assemblages mal-compris s’assemblant ensuite les uns avec les autres, formeront des masses confuses où l’on n’entendra rien. On en jugera par le second assemblage, qui ne differe du premier que par un tres petit nombre de pieces sur-ajoûtées, & qui commence toutefois à devenir un peu difficile à bien saisir.

Second Assemblage. Planche III. fig. 1.

Cet assemblage est formé des pieces de l’assemblage précédent, auquel on a ajoûté les pieces suivantes.

Dans les nœuds 1, 1 des grandes pieces, sont placées les pieces 17, 18, 19 ; 17, 18, 19 : ces pieces s’appellent les bras de presse ; elles sont fixées dans les nœuds 1, 1 par un boulon & par une goupille. Il faut distinguer dans le bras de presse trois parties : 17, le nœud de la charniere du bras ; ce nœud s’ajuste, comme on voit, dans la charniere de l’avant-bras de la grande piece, & s’y retient, comme nous avons dit : 18, le croissant du bras ; & 19, sa patte.

La patte du bras de presse est garnie d’une vis avec l’écrou à oreilles 20, 20 ; 20, 20 : cette vis s’appelle vis de marteau. Son extrémité inférieure vient frapper, dans le travail, sur la grande piece : mais elle ne permet au bras de presse de descendre, qu’autant qu’on le juge à propos.

La partie 21, 21, fig. 2. s’appelle la grande anse. Le lieu qu’elle occupe, & la faculté de son jeu, exigent le coude qu’on lui voit : elle se fixe, comme on voit fig. 1. sur chaque patte des bras de presse, aux lieux 21, 21.

La partie 22, 22, fig. 3. s’appelle la petite anse. Ses deux crochets se placent aux deux angles du coude de la grande anse, comme on voit fig. 1.

La partie 23, 23 s’appelle le crochet de la petite anse, fig. 2. Pl. 3. S’il y avoit eu de la place, on le verroit dans le coude de la petite anse.

La partie 24, 24 qui part de l’extrémité, fig. 1. de la branche ou tige du contre-poids, est une courroie de cuir qui vient passer sur la roulette du porte-faix d’en-bas, & s’attacher par son extrémité 24, au milieu du coude de la grande anse.

La partie 25, fig. 1. est un contre-poids attaché, comme on voit, à la branche ou tige 26 du contre-poids qu’on doit reconnoitre, & dont nous avons parlé à propos du fût.

Le crochet 23, 23, fig. 4. dont un des bouts embrasse le coude de la petite anse, tient par son autre bout à l’anneau de la marche du milieu, comme on peut voir fig. 1, Pl. II.

Corollaire premier.

D’où il s’ensuit : 1°. qu’en appuyant du pié sur cette marche, fig. 1. Pl. II. le crochet 23, 23, fig. 1. Pl. II. sera tiré en-bas ; que la petite anse 22, 22, fig. 1. Pl. III. le suivra ; & que la petite anse fera descendre la grande anse 21, 21 : mais la grande anse 21, 21 ne peut descendre que les bras de presse 17, 18, 19 ; 17, 18, 19 ; ou plûtôt leurs vis de marteau 20, 20, ne viennent frapper sur les grandes pieces 1, II, 2, 3 ; 1, II, 2, 3 ; que la courroie 24, 24 qui passe sur la roulette du porte-faix d’en-bas, ne soit tirée en embas ; qu’elle ne fasse monter la tige ou branche 26 du contre-poids, & que cette tige n’entraine en-haut le contre-poids 25.

Corollaire II.

D’où il s’ensuit : 2°. que si on leve le pié de dessus la marche, alors tous les mouvemens se feront en sens contraire. Rien ne retenant plus le contre-poids 25, il descendra ; sa branche 26 descendra avec lui ; la courroie 24, 24 avec la branche : mais la courroie passant sur la roulette, ne peut descendre qu’elle ne tire en-haut & ne fasse monter la grande anse 21, 21. La grande anse montera ; les bras de presse 17, 18, 19 ; 17, 18, 19 se releveront ; la petite anse 22, 22 montera ; son crochet 23, 23 la suivra ; & la marche suivra le crochet, se relevera, & tout se restituera dans l’état que représente la fig. 1. de cette Pl. III.

Ce second assemblage forme ce qu’on appelle communément la cage du métier, sa carcasse, son corps, ses parties grossieres. Nous allons passer à ce que les ouvriers appellent l’ame du métier. Les parties se multiplieront ici au point, que je ne peux trop conseiller au lecteur de se familiariser avec ce second assemblage, & avec le jeu & les noms de ses parties.

Troisieme Assemblage. même Pl. III. fig. 5.

On voit dans la figure 5. de cette planche, quatre pieces assemblées. Les deux pieces semblables 27, 28, 29 ; 27, 28, 20, s’appellent porte-grilles ou chameaux de la barre fondue : la piece qu’on appelle bois de grille, & dont nous allons parler, se fixe sur leurs parties 28, 29 ; 28, 29, par des vis & des écrous à oreilles. Les extrémités des vis passent dans les ouvertures longitudinales qu’on y voit : on leur a donné cette figure, afin qu’on pût les avancer ou reculer à discrétion. La piece 30, 30 s’appelle petite barre de dessous ; & celle 31, 31, qui est fixée sur le milieu de la petite barre de dessous, est un porte-roulette garni de sa roulette, du boulon de la roulette, & de la goupille du boulon.

La figure 6. est l’assemblage des pieces précédentes, & du bois de grille garni de sa grille. On voit 32, 32 ; 32, 32, les vis qui traversent le bois de grille 33, 33, qui passent dans les ouvertures longitudinales des parties 28, 29 ; 28, 29 des chameaux, & qui fixent le bois de grille sur ces chameaux. La grosse piece 33, 33 s’appelle bois de grille. La grille est l’assemblage de deux rangées paralleles & perpendiculaires des petits ressorts plantés dans le bois de grille. Il est très-à-propos de connoître la configuration de ces petits ressorts, & d’en examiner l’arrangement. Ils sont plantés parallelement : ils laissent entre eux un petit espace ; & ceux qui forment la ligne de derriere, correspondent exactement aux intervalles que laissent entr’eux ceux qui forment la ligne de devant. L’extrémité supérieure de chacun de ces petits ressorts est renversée en-arriere, & forme une espece de plan incliné. La partie qui est immédiatement au-dessous de ce plan incliné est une cavité, qu’on peut regarder comme formée de deux autres petits plans inclinés, dont la rencontre forme un angle, & fait le fond de la petite cavité. La partie qui est immédiatement au-dessous de la petite cavité, est un quatrieme plan incliné, qui a le reste du ressort pour sa longueur.

La figure 7. est un des petits ressorts de grille détaché. La partie ab est le premier plan incliné ; la partie bc est le second ; la partie cd est le troisieme ; & la partie df est le quatrieme.

La figure 8. est ce qu’on appelle la barre fondue ou fendue : barre fondue, parce que la partie inférieure de son chassis est coulée & remplie d’étain ; barre fendue, à cause des ouvertures ou fentes que laissent entr’eux les petits quarrés de cuivre dont elle est garnie. Cette barre fondue ou fendue est composée de plusieurs pieces dont nous allons parler. 34, 34 ; 34, 34, sont deux côtés du chassis : 35, 35 ; 35, 35, sont deux pieces de commodité qui s’ajustent, comme on les voit avec les deux côtés, & qui servent à supporter la barre fondue : 36, 36 ; 36, 36, sont deux charnieres dont l’usage est de recevoir les contre-pouces ; pieces dont nous allons parler. On voit, fig. 9. une de ces charnieres : elle est percée à sa partie inférieure de deux petits trous, dans lesquels on fait passer une goupille qui traverse en même tems les deux côtés de la barre, & qui fixe la charniere entre ces côtés. Les deux quarrés de sa partie supérieure sont aussi percés dans le milieu, de même que tous les quarrés & autres parties prises entre les côtés de la barre fondue. On dira tout à l’heure l’usage de ces ouvertures. Les pieces 37, 37, sont deux autres charnieres, toutes semblables aux précédentes, & pareillement assemblées avec les côtés de la barre fondue ; mais dont l’usage est de recevoir d’autres pieces qu’on appelle tirans : 38, 38, 38, 38, &c. sont les cuivres de la barre fondue. On voit, fig. 10. la forme d’un de ces cuivres. Leur partie inférieure ou leur queue s’insere entre les côtés de la barre fondue, & le quarré de la partie supérieure demeure supporté sur ces côtés. Ces deux parties sont percées l’une & l’autre, comme on voit, & comme nous avons dit. Tous ces cuivres sont exactement semblables ; tous placés parallelement les uns aux autres, & laissant tous entr’eux le même petit intervalle. Quand on les a bien disposés, on coule de l’étain dans le dessous du chassis de la barre fondue : cet étain remplissant exactement le chassis, entre dans les trous pratiqués aux queues des cuivres, & les fixe solidement dans la disposition qu’on leur a donnée. C’est le nombre de ces cuivres qui marque la finesse d’un métier ; plus il y a de cuivres, plus un métier est fin. L’intervalle du premier au dernier cuivre est ordinairement de quinze pouces. On pourroit le prendre plus grand : mais l’expérience l’a déterminé de cette longueur. On divise cet intervalle en parties de trois pouces ; & s’il y a dans chaque intervalle de trois pouces vingt cuivres, on dit que le métier est un vingt ; s’il y en a trente, on dit que le métier est un trente ; & ainsi de suite. J’ai vû des métiers dont la barre fondue portoit jusqu’à quarante-deux cuivres, par trois pouces.

On ajuste aux extrémités de la barre fondue la piece quarrée 39, qu’on voit fig. 11. percée dans le milieu & allongée à son angle inférieur en tourillon. Cette piece est fixée à chaque extrémité de la barre fondue par une vis & son écrou. Cette vis traversant les côtés de la barre fondue avec la piece à tourillon, sert en même tems à serrer ces côtés. La piece 35 de la fig. 11. est la piece de commodité, séparée de l’assemblage de la fig. 8.

La figure 1. Pl. IV. est un assemblage des porte-grilles 27, 28, 29 ; 27, 28, 29 ; de la petite barre de dessous 30, 30, qu’on ne voit pas ; de la roulette fixée sur son milieu, que le bois cache aussi : du bois de grille, garni de sa grille 33, 33 ; de la barre fondue entiere 34, 34 ; 34, 34, avec les pieces de commodité 35, 35 ; des charnieres à contre-pouces 37, 37 ; des charnieres à tirans 36, 36 ; des cuivres 38, 38, &c. des quarrés à tourillon 39, 39.

J’observerai ici que la barre fondue n’est pas tout-à-fait la même dans les nouveaux métiers, que dans celui que je viens de décrire ; on a supprimé les pieces de commodité, & le quarré à tourillon n’a pas tout-à-fait la même figure : la barre se termine d’une façon un peu plus simple.

La piece 40 s’appelle platine à ondes, fig. 2. il faut distinguer dans cette piece plusieurs parties, qui ont toutes leurs usages, comme on verra dans la suite. a, la tête de la platine ; b, son bec ; c, le dessous du bec ; d, la gorge ; e, le ventre ; f, la queue.

On voit fig. 3, une piece qui s’appelle onde, 41. On voit que l’onde est fendue par sa partie antérieure, qu’elle a une éminence au milieu ; que cette éminence est percée, & que sa queue se termine en pointe mousse. La tête de la platine à onde s’insere, s’attache & se meut dans la fente de la tête de l’onde ; & ces deux pieces assemblées se placent entre les intervalles que laissent entr’eux les cuivres de la barre fondue, de maniere que l’ouverture de l’éminence de l’onde, réponde aux ouvertures des deux cuivres entre lesquels elle est placée, & que sa queue s’avance juste au fond de la cavité d’un ressort de grille.

Corollaire II.

Il s’ensuit de-là qu’il faut autant de platines à ondes que d’ondes, autant d’ondes que de cuivres, autant que de ressorts de grille ; & que les queues des ondes doivent être alternativement un peu plus courtes & un peu plus longues ; plus longues en celles qui vont jusqu’au fond de la petite cavité des ressorts de grille de la seconde rangée ; plus courtes en celles qui ne vont qu’au fond de la petite cavité des ressorts de grille de la premiere rangée.

On voit, fig. 4. tous les intervalles laissés entre les cuivres remplis d’ondes garnies de leurs platines, 40, 40, 40, &c. L’usage des cuivres est maintenant évident ; on voit qu’ils servent à tenir les ondes paralleles, & à les empêcher de vaciller à droite ou à gauche.

On a représenté, fig. 5. la piece appellée un tirant, qui doit remplir la charniere de barre fondue, que nous avons appellée charniere de tirant, & que nous avons chiffrée fig. 1, 36. Le tirant 42, fig. 4, ressemble exactement à la partie antérieure d’une onde ; il fait en dessus & en dessous les mêmes coudes : il a l’éminence pareille & pareillement percée ; il est seulement plus fort ; & au lieu d’avoir l’extrémité antérieure fendue, il l’a propre à être ajustée dans le porte-tirant.

On voit, fig. 4, le tirant 42 dans sa charniere, dont la figure n’est pas inutile ; car on doit s’appercevoir que ses deux quarrés sont destinés à tenir le tirant, parallele aux ondes & non vacillant.

La piece 43, 44, 45, fig. 4, qu’on voit dans la charniere que nous avons chiffrée 37, fig. prem. s’appelle contre-pouce : sa partie antérieure 43, a la forme d’un pouce ; elle est chargée d’un contre-poids 44 : il y a en dessous une éminence comme aux tirans & aux ondes, & sa partie postérieure 45 se termine par un quarré plat & percé dans le milieu.

Les contre-pouces, les tirans, les charnieres des contre-pouces, les charnieres des tirans & toutes les ondes avec les cuivres, sont traversées par une verge ronde, qu’on appelle verge de barre fondue. On voit en 46 l’extrémité de cette verge. Les tirans, les contre-pouces & les ondes, peuvent se mouvoir librement sur elle ; & elle sert comme d’axe & de point d’appui à toutes ces parties.

On a ajusté à l’extrémité de la barre-fondue, la roulette 47 dans son tourillon, fig. 4.

La piece 48, 48, qu’on voit, fig. 4, ajustée par ses extrémités quarrées, sur les extrémités de même figure des contre-pouces, s’appelle la bascule. Il faut que le bec du contre-pouce avec le poids dont il est chargé, soit plus lourd que la partie postérieure avec la partie de bascule qu’elle soûtient ; car l’usage du contre-pouce & de son contre-poids, est de faire relever la bascule d’elle-même, quand en lâchant le pouce, on cesse de presser le contre-pouce en dessous, & d’appliquer la bascule sur la queue des ondes.

Si l’on revient à la piece de commodité de la barre fondue, fig. 1, on appercevra à l’extrémité de sa partie postérieure un petit tenon o ; c’est sur ce petit tenon qu’est soûtenue la barre à chevalet, ou la machine 49, 49, qu’on voit passée sous la queue des ondes, fig. 4. Dans les métiers nouveaux, la barre à chevalet ne porte que sur les grandes pieces.

On distingue dans le chevalet plusieurs parties ; 50, 50, s’appelle la barre à chevalet ; 51, la joue du chevalet ; 52, le corps du chevalet ; 53, l’s de la corde à chevalet ; 54, la roulette de la barre à chevalet. Les joues & le corps du chevalet tiennent ensemble : cet assemblage est mobile le long de la barre à chevalet : c’est la même corde qui part d’une des s 53, passe sur une des roulettes 49 de la barre à chevalet, va s’envelopper sous la roue du fût 13, pl. 2, fig. prem. & se rend à l’autre s 53 ; elle est cloüée sous la roue.

Corollaire IV.

D’où il arrive qu’en appuyant sur la marche, 1, 5, qui est à gauche, fig. 1. Pl. II. cette marche faisant tourner le tambour de la roue 13, de droit à gauche, la roue 13 tourne en même sens ; le corps du chevalet, Pl. 4, fig. 4. 51, est tiré en même sens, & il va le long de la barre à chevalet 50, 50, de droite à gauche, jusqu’aux arrêts 55, 55 de la barre à chevalet : c’est le contraire, si lorsque le chevalet est aux arrêts 55 de la barre à chevalet, on vient à appuyer sur la marche qui est à droite.

Corollaire V.

Mais le corps du chevalet faisant comble 51, & étant un peu plus élevé que la position presqu’horisontale des ondes, ou que les petites cavités des ressorts de grille où leurs queues sont placées, ne peut passer sous ces queues sans les chasser de ces cavités ; c’est ce qui produit ce cliquetis assez long qu’on entend, lorsque l’ouvrier travaille. Il est causé par l’action du comble 51 du chevalet, contre le dessous de la queue des ondes ; par la réaction des ressorts de grille, des cavités desquels les queues des ondes ne peuvent s’échapper, sans repousser ces ressorts & se trouver ensuite sur le petit plan incliné, qui forme leur extrémité & qui facilite cette réaction ; & par la chûte de la tête des ondes sur une piece dont nous parlerons, & qu’on appelle la barre à moulinet, contre laquelle les têtes des ondes viennent frapper. C’est pour que cette chûte se fasse, qu’on a pratiqué en dessous de l’onde entre sa tête & son éminence, un coude ou vuide. Moyennant ce vuide, l’onde n’est point gênée dans son mouvement par la barre fondue, qui ne laisse pas d’avoir de la largeur ; c’est par cette raison qu’on a pratiqué le même coude, ou vuide aux tirans.

La bascule sert à faire sortir les queues des ondes des cavités des ressorts de grille & à les faire descendre ; & le chevalet, à les chasser des mêmes cavites & à les faire monter.

Dans les nouveaux métiers, comme il n’y a point de pieces de commodité, la barre à chevalet porte sur les longues pieces ; elle s’y fixe à l’aide de deux chameaux, qui ont chacun une vis quarrée avec un petit tourillon, qui entre dans le dessous de la barre à chevalet.

Voilà le troisieme assemblage, ou l’ame du métier. Nous allons passer au quatrieme, qui ne sera que l’assemblage du second & du troisieme ; de même que le second n’étoit que l’assemblage du premier & de quelques autres parties.

Quatrieme Assemblage, Pl. 4, fig. 6.

Ce quatrieme assemblage est composé du second & du troisieme. C’est la cage du metier dans laquelle on a placé l’ame.

Nous avons donné ci-dessus un détail si exact des parties de ces deux différens assemblages & de la maniere dont elles sont assemblées, que nous pourrions nous contenter d’observer ici, que l’ame ou le troisieme assemblage est mobile dans le second ou dans la cage ; que la barre fendue ou fondue & toutes ses appartenances sont soûtenues par la gueule de loup, 13, 13, fig. 3, Pl. II. attachée à la barre de derriere d’en bas, qui est fixée aux hauteurs d’équerre des grandes pieces, & par les deux roulettes 47, 47, fig. 6, Pl. 4. placées aux extrémités de la barre fondue ; que la roulette de la petite barre de dessous du bois de grille entre & se meut dans la gueule de loup ; que les deux roulettes de l’extrémité de la barre fondue passent & se meuvent sur les grandes pieces ; & que l’assemblage entier que nous avons appellé l’ame du métier, peut s’avancer en devant & se reculer en arriere.

Mais pour faciliter au lecteur l’intelligence de la machine, nous allons lui rappeller toutes les pieces de ce quatrieme assemblage, avec leurs principales correspondances, dans l’ordre où il a vû naître cet assemblage.

1, 2, 3 ; 1, 2, 3. Les grandes pieces.

4, 5 ; 4, 5. Les épaulieres fixées dans le quarré de l’arbre, 6, 7.

6, 7. L’arbre mobile sur ses tourillons placées dans les nœuds 3, 3, des grandes pieces.

8. Le porte-faix de l’arbre.

9. Bouton pour couler de l’huile dans le nœud.

10. 10. Barre de derriere d’en-haut.

11. 11. Barre de derriere d’en-bas. Ces deux barres servent à fixer entr’elles le porte-faix d’en bas, avec sa chappe & sa roulette.

12. Porte-faix d’en bas avec sa chappe & sa roulette, fixés entre les barres de derriere.

13. Gueule de loup fixée à la barre de derriere d’en-bas, qui reçoit la roulette de la petite barre de dessous de la barre fondue.

14, 14, 15, 15. Le balancier fixé sur les épaulieres à quelque distance de leurs nœuds.

16, 16. Le grand ressort placé entre les deux porte-faix.

17, 18, 19. 17, 18, 19. Les barres de presse assemblées avec les grandes pieces.

20, 20. Vis de marteau avec son écrou, placée sur les pattes des bras de presse.

21, 21. Les extrémités de la grande anse, fixées sur les extrémités des bras de presse.

22, 22. Les deux crochets de la petite anse.

Le nœud 4 de l’épauliere droite, couvre la partie de la courroie, qui prend au milieu de la grande anse & qui passe sur la roulette du porte-faix d’en-bas ; & la barre fondue & ses parties empéchent qu’on ne voye la suite de la courroie, aller de dessus la roulette du porte-faix d’en bas, au sommet de la tige ou branche du contre-poids : on n’apperçoit qu’une partie, 26, 26, des branches de la petite ante.

27, 28, 29. Un des chameaux ou porte-grille ; l’autre est caché par les platines à ondes.

Le bois de grille cache la petite barre de dessous 30, 31. avec son porte-roulette & sa roulette que reçoit la gueule de loup ; on n’apperçoit que l’extrémité 32. de la vis qui fixe le bois de grille sur le chameau du côté droit, que l’extrémité 33. du bois de grille, & que les extrémités des petits ressorts plantés dans le bois de grille & formant la grille.

34, 34. Les extrémités des deux barres qui forment le chassis de la barre fondue.

35. Une des pieces de commodité qui soûtiennent le chevalet par un piton qui entre dans un trou pratiqué au-dessous de la barre à chevalet.

36. Un des quarrés de la charniere du tirant.

37. 37. Les quarrés des deux charnieres des contrepouces. Les ondes 42 couvrent les cuivres de la barre fondue.

38. Piece quarrée prise entre les côtes de la barre fondue, de l’angle inférieur, de laquelle part un tourillon dont on voit 47 l’extremite à travers la roulette 47 du côté droit.

39. 39. 39. Platines à ondes fixées à l’extrémité des ondes.

40. Ondes.

41. 41. 41. Partie de la surface supérieure des cuivres de la barre fondue.

42. Un tirant dans sa charniere.

43, 44, 45. Un contrepouce avec son poids, dans sa charniere.

46. L’extrémité de la verge qui traverse les contrepouces, les tirans, les cuivres & les ondes.

47. Roulettes de la barre fondue.

48. 48. La bascule fixée sur les extrémités de derriere des contre-pouces.

On voit très-bien le chevalet 49. 50. 51. 52. 53. 54. avec toutes ses parties : mais on ne voit point le tourillon de la piece de commodité qui le supporte.

Voilà le détail de ce quatrieme assemblage : j’y ai rappellé toutes les parties dont nous avons fait mention jusqu’à présent ; tant celles qu’on voit dans sa figure, que celles qu’on n’apperçoit point du tout, ou qu’on n’apperçoit qu’en partie. Nous pouvons donc passer maintenant au cinquieme assemblage, & nous tenir pour persuadés que ce sera plûtôt l’effet de l’inattention du lecteur, ou plûtôt celui de la composition de la machine, que notre faute, si l’on ne nous a pas entendus jusqu’à présent.

Cinquieme Assemblage. Planche V.

On voit dans la premiere figure de cette Planche ce cinquieme assemblage complet.

La piece 56, 56, figure 1 & 2, qui sert de base à toutes les autres, s’appelle corps de barre à aiguilles : ce corps de barre à aiguilles a une petite saillie ou cordon qu’on apperçoit au lieu 57. On fixe sur cette saillie la petite barre de la figure 3, qu’on ne peut appercevoir dans la figure premiere qu’on appelle queue d’aronde du corps de barre à aiguilles. La surface inférieure de cette piece est plate ; sa supérieure est un talus ou biseau un peu convexe ; ce biseau est tourné vers le fond du corps de barre à aiguilles. On en verra tout-à-l’heure l’usage.

Les pieces 58, 58, figure premiere, sont appellées par les ouvriers étochios, figure 4, 58 ; elles sont placées sur le corps de barre qu’elles traversent, par un tenon quarré qui les tient fermes & immobiles sur ce corps ; elles sont au niveau de sa saillie, & elles sont appliquées exactement contre la queue d’aronde.

Les pieces 59, 59, 59, figure premiere, &c. sont des plombs à aiguilles avec leurs aiguilles, rangés sur la queue d’aronde, entre les deux étochios. On voit, figure 5 & 6, un de ces plombs à aiguilles avec ses trois aiguilles. On a pratiqué à ce plomb, en le coulant, une petite échancrure à sa partie antérieure de dessous. La queue d’aronde a exactement la forme de cette échancrure ; ensorte qu’elle remplit les échancrures de tous les plombs à aiguilles. Il n’est pas inutile de remarquer que la partie postérieure de dessus du plomb à aiguille est en talus.

Les pieces 60, 60, figure premiere, sont des plaques de barre à aiguilles : ces pieces sont plates en dessus ; mais leur partie antérieure de dessous, imite exactement le talus de la partie postérieure de dessus du plomb à aiguille. Les plombs à aiguille sont donc fixés inébranlablement entre les plaques & la queue d’aronde ; entre les plaques qui s’appliquent exactement sur le talus de leur partie postérieure, & la queue d’aronde qui remplit les échancrures de leur partie antérieure. Ces plaques sont fixées fortement sur le corps de barre par deux vis qui les traversent chacune, & le corps de barre.

Les pieces 61, 62 ; 61, 62, s’appellent des corps de jumelles ; ces corps de jumelles sont fixés fortement par leurs pattes 62, 62, sur le corps de barre à platines. Il faut y remarquer deux choses ; leur extrémité supérieure, avec la saillie qui est au-dessous, & parallele à cette extrémité. Cette configuration a son usage, comme on verra dans la suite.

Les jumelles des nouveaux métiers sont mieux entendues ; la plaque supérieure 61 de la jumelle est percée au milieu & traversée d’une vis qu’on peut avancer ou reculer ; & au lieu d’une saillie S, S, telle qu’on la voit ici, elles ont une autre plaque parallele & semblable à celle de l’extrémité 61, percée pareillement & traversée d’une vis, dont la tête est au-dessous de la plaque, & qu’on peut aussi avancer & reculer ; ce qui met moins de difficulté dans la construction du métier, & plus de facilité dans le travail, comme on verra quand je parlerai de la main d’œuvre.

Les pieces 63, 63, placées perpendiculairement sur le corps de barre & parallelement aux jumelles, s’appellent les moulinets.

Il y a dans les moulinets plusieurs parties à distinguer : 64, 64, le corps du moulinet, qui se termine par un tenon quarré que le corps de barre reçoit dans un trou quarré ; 65, 65, le ressort du moulinet. Ce ressort est mobile dans une charniere 66, qui traverse le corps du moulinet de dehors en dedans. La queue de ce ressort porte sur un autre ressort placé plus bas qui la releve ; 67. tenon qui traverse le corps du moulinet, & qui est traversé par l’arbre du moulinet qu’il tient ferme & dirige ; 68. croisée du moulinet ; 69. roue dentée du moulinet ; 80. arbre du moulinet.

La piece 81, 81, que traverse l’extrémité en vis de l’arbre à moulinet, s’appelle boîte à moulinet : c’est en effet une boîte, ouverte par sa partie antérieure, & mobile le long du corps à moulinet, à l’aide de l’arbre à moulinet. Cette boîte reçoit une barre de fer quarrée 82, 82, appellée barre à moulinet, que le ressort courbe 83, 83, 83, fixé par ses extrémités aux côtés des deux boîtes, tient dans l’état où on la voit. Ce ressort courbe est encore attaché par son milieu à la barre à moulinet. Cette barre peut se mouvoir en devant & en arriere : mais il est évident que si quelque puissance la pousse en arriere, le ressort la repoussera en devant, & la restituera dans la situation où on la voit dans cette figure, aussi-tôt que la puissance cessera d’agir.

La barre à moulinet étant renfermée par ses extrémités dans les boîtes, son ressort étant fixé par ses extrémités au côté des boîtes, il est évident que l’arbre de moulinet faisant monter ou descendre les boîtes, fera pareillement descendre ou monter avec elles la barre & son ressort. Fin du cinquieme assemblage.

Sixieme Assemblage.

Pour avoir le sixieme assemblage, il ne s’agit que d’assembler cet assemblage avec le quatrieme ; & c’est ce qu’on voit exécuté dans la figure 7. de la même Planche V.

Le corps de barre à aiguille 56, 56, est fixé sur les grandes piéces ; de maniere que les platines à ondes sont passées entre les aiguilles de deux en deux, & sont toutes voisines des plombs à aiguilles ; que les jumelles sont entre les bras de presse, & que l’extrémité des jumelles est appliquée sur les épaulieres, entre leurs nœuds & les extrémités du balancier.

Corollaire VI.

On voit que sans la plaque de l’extrémité des jumelles qui contient les épaulieres, le grand ressort faisant tourner l’arbre du métier, emporteroit au derriere du métier, & les épaulieres & le balancier qui leur est attaché.

Corollaire VII.

On voit encore qu’il est à propos que cette plaque des jumelles soit traversée d’une vis, dont l’extrémité donne sur les épaulieres ; car par ce moyen, on tiendra les épaulieres à telle hauteur qu’on voudra.

Corollaire VIII.

On voit en troisieme lieu que la saillie de la jumelle ne servant qu’à empêcher l’épauliere de descendre trop bas quand on travaille, il vaudroit mieux substituer à cette saillie immobile telle qu’on la voit ici, une autre plaque parallele à celle du dessus de la jumelle, & traversée d’une vis, dont la tête seroit en dessous. Par le moyen de cette vis, l’épauliere ne descendroit qu’autant qu’on le jugeroit à propos ; & l’on verra, quand nous parlerons de la main d’œuvre, combien il est important de joüir de ces avantages, qu’on s’est procurés dans le nouveau métier.

Je crois qu’il est assez inutile de rentrer dans une énumération complete de toutes les parties dont ce cinquieme assemblage est formé : il nous suffira, après ce que nous avons dit jusqu’à présent, d’observer deux choses : l’une concernant cet assemblage, & l’autre concernant les différences de l’ancien métier, tel que nous le donnons ici, & du nouveau métier.

Cet assemblage est formé de trois masses importantes ; la cage avec ses appartenances, comme grande anse, petite anse, crochet de petite anse, branche de contre-poids, & contre-poids, &c.

L’ame ou la barre fondue avec ses appartenances, comme porte-grille, bois de grille, grille, platines à ondes, ondes, tirans, contre-pouces, bascule, &c.

La barre à aiguilles avec ses appartenances, comme aiguilles avec leurs plombs, jumelles, moulinets, boîtes, barre à moulinet, ressort à moulinet, &c.

Les différences de l’ancien métier & du nouveau, sont très-légeres ; elles ajoûtent à la vérité quelque chose à la perfection du métier ; mais elles ajoûtent encore davantage à l’honneur de l’inventeur : car on remarquera que si ce métier devoit être exécuté par des êtres infaillibles dans leurs mesures, & mis en œuvre par des êtres infaillibles dans leurs mouvemens, il auroit fallu le laisser tel qu’il étoit. On s’est seulement menagé par les changemens qu’on y a faits, la commodité de tâtonner, & d’atteindre dans la pratique à cette précision geométrique que la machine avoit dans l’esprit de son inventeur. Passons au septieme assemblage.

Septieme Assemblage. Pl. VI.

La fig. premiere, Planche VI. montre ce septieme assemblage tel que nous l’allons detailler.

La piece qu’on voit 84. 84. fig. 2 & fig. 3. s’appelle barre à platine ; les grosses pieces 85. 85. auxquelles elle est fixée, fig. 2. s’appellent abattans.

La piece 86. 86. qu’on voit fig. 4. & qu’on n’apperçoit pas, fig. premiere, s’appelle le chaperon de la barre à platine ; il est placé à la partie supérieure postérieure de la barre à platine.

La piece 87. 87. qu’on voit fig. 5. mais qu’on n’apperçoit pas, fig. premiere, s’appelle queue d’aronde de la barre à platine. Cette queue d’aronde se fixe à la saillie 88. 88. ou au cordon qu’on voit à la barre à platine, fig. 3. nous parlerons de sa figure & de son usage plus bas. Il suffit de dire ici qu’elle sert à fixer les platines à plomb, & qu’elle en est couverte, de même que la queue d’aronde de la barre à aiguilles étoit couverte des plombs à aiguilles, & servoit à les fixer.

La barre à platine a pareillement ses deux étochios 89. 89. fig. 2. fixes aux extrémités de la queue d’aronde, & au niveau de la saillie, ou du cordon de la barre à platine. On voit, fig. 2. 89. 89. ces deux étochios ; ils ont la même figure & le même usage que sur la barre à aiguilles.

Les pieces qu’on voit, fig. 2. 90. 90. & fig. 6. 90. s’appellent porte-tirans ; ils ont une ouverture à la partie supérieure, par laquelle ils sont attachés, fig. 2. sermement au corps de la barre à platine, & une charniere à la partie inférieure, dont on verra l’usage.

Les pieces qu’on voit, fig. 2. 91. 91. 91. & fig. 7. 91. s’appellent platines à plombs avec leurs plombs à platines ; elles sont composées de deux parties, la supérieure qu’on voit fig. 8. & qu’on nomme plomb à platine, & l’inférieure qu’on voit fig. 9. qu’on nomme platine à plomb.

Le plomb à platine a deux fentes à sa partie large, & reçoit dans ces fentes deux platines à plomb qu’on y fixe, ensorte qu’il en résulte le tout de la fig. 7. ce tout a à sa partie postérieure un petit crochet qu’on voit fig. 8. la queue d’aronde a à sa partie postérieure une entaille en biseau, toute semblable à ce crochet, ensorte que tous les crochets des plombs à platines remplissent l’entaille ou le biseau de la queue d’aronde, à laquelle ils demeurent suspendus par leurs crochets ; ils sont appliqués du reste contre le corps de la barre à platines.

On les fixe contre le corps de la barre à platines par les plaques de barres à platines, 92. 92. & qui sont elles-mêmes fortement attachées par deux écrous & deux vis, comme on voit fig. 2.

Les pieces 93. 93. qu’on voit, fig. 2. attachées au corps de barres à platines par des éminences qui entrent dans une charniere qui tient au corps de barre à platines, & qui leur permet de se mouvoir, s’appellent pouces : on verra ci-après l’usage des pouces.

Passons aux grandes pieces 85, 85, fig. 2. on les appelle abattans ; il faut y distinguer plusieurs parties : on voit sur leur surface antérieure une piece 94, 94, qu’on appelle garde platine ; sur leur surface postérieure une piece 95, 95, qu’on appelle le crochet de dedans de l’abattant, & sous leur partie inférieure, une piece 96, 96, qu’on appelle le crochet de dessous des abattans. Il n’y a pas une de ces pieces qui n’ait son usage relatif à son lieu & à sa configuration : mais cet usage ne s’entendra bien que quand la machine entiere sera formée, & que nous traiterons de la main-d’œuvre.

La piece qu’on voit, fig. 2. 97, 97, fixée au bas des abattans par ses extrémités, & recevant sur son milieu les queues des platines à plomb, s’appelle la barre à poignée. Les parties ab, AB, sont celles que l’ouvrier tient dans ses mains, dont les doigts passent en dessous, & le pouce en dessus, de maniere qu’il puisse être appliqué contre la partie que nous avons appellée pouce ; cette barre s’appelle aussi barre à boîte, parce qu’elle forme une espece de boîte dans laquelle les queues des platines à plomb sont enfermées.

On voit, fig. 10. le dessus de cette boîte : les extrémités de ce dessus sont faites en coin, & s’appliquent dans les lieux cd, CD de la barre, fig. 2. où elles sont retenues par deux goupilles dont on voit les trous en e, E, à la barre.

Ce dessus ne gêne pas les queues des platines à plomb. Voilà toutes les parties qui forment le septieme assemblage.

Il ne s’agit plus que d’ajoûter cet assemblage au sixieme assemblage pour avoir le huitieme : c’est cette addition que nous allons considérer.

Huitieme Assemblage. Planc. VI.}}

On voit dans cette fig. 1. le septieme assemblage joint au sixieme.

L’extrémité supérieure des abattans est ajustée dans la charniere des épaulieres ; les tirans sont pris dans la charniere des porte-tirans ; les pouces répondent au-dessous de la partie antérieure des contre-pouces ; les platines à plomb remplissent les intervalles vuides qui restoient entre les aiguilles. Il y a entre chaque aiguille une platine ; il ne s’agit plus que d’attacher en A, a, sur les bras de presse, la piece 98, 98, qu’on voit fig. 12. & qu’on appelle la presse ; que de placer toute cette machine sur le fût, ou sur le bois, & que de travailler.

Car voilà la machine entiere & complette : voilà ce qu’on appelle le métier à bas : voilà toutes ses parties, & la maniere dont elles s’assemblent ; il ne reste maintenant que d’en expliquer le jeu, ou que de traiter de la main-d’œuvre.

Observation.

Mais avant que de passer au dernier assemblage, celui du métier avec son fût, j’observerai qu’il faut une extrème précision dans la configuration des parties du métier. Il faut que les intervalles que laissent entr’eux les cuivres, répondent bien exactement aux ressorts de grille ; que l’épaisseur des plombs à aiguilles soit bien compassée pour qu’il n’y ait pas plus de plombs à aiguilles que de platines à ondes, & que chaque platine à onde laisse toûjours entr’elle & celle qui la suit trois aiguilles ; que les plombs à platines à plomb soient bien compassés, pour que l’épaisseur d’un de ces plombs soit double de l’épaisseur d’un plomb à aiguilles ; que les deux platines que porte chacun de ces plombs, se rencontrent bien dans les deux intervalles que laissent entr’elles les trois aiguilles prises entre chaque platine à ondes, & que toutes ces parties délicates se meuvent librement les unes entre les autres.


Corollaire IX.

J’ai dit que l’intervalle de barre fondue sur lequel sont disposés les cuivres étoit de quinze pouces : j’ai travaillé chez le sieur Barrat, le premier ouvrier dans son genre, & le dernier qu’on verra peut-être de la même habileté, sur un quarante-deux, c’est-à-dire, un métier qui portoit sur chaque trois pouces de barre fondue, quarante-deux cuivres. La barre fondue entiere avoit donc deux cens dix cuivres ; il y avoit donc deux cens dix ondes, deux cens dix platines à ondes, quatre cens vingt platines à plomb, & six cents trente aiguilles. On verra dans la suite que chaque aiguille fait sa maille, & que par conséquent l’ouvrier faisoit, ou pouvoit faire sur ce métier, six cents trente mailles à la fois.

Mais il est à propos de donner ici la représentation d’une aiguille : on en voit une dans cette planche, fig. 11. il faut y distinguer trois parties ; son bec a, sa chasse b, & sa queue c : son bec est élastique, & quand il est pressé, il se cache dans la chasse b ; la queue c est prise dans le plomb à aiguilles. Nous avons donné à l’article Aiguille, la maniere de travailler les aiguilles du métier. On a pour ce travail une machine tout-à-fait commode, & très-curieuse ; elle est de l’invention du sieur Barrat, & il y a bien de l’apparence qu’elle differe peu de celle qu’a dû imaginer l’inventeur du métier ; car ce n’étoit pas assez que d’avoir imaginé la machine ; son exécution a dû offrir des difficultés étonnantes, & elle n’a pû avoir lieu que ces difficultés ne fussent levées ; pour cet effet, il a fallu trouver les moules des plombs à platines & des plombs à aiguille ; car s’il avoit fallu égaliser ces plombs à la lime, on n’auroit jamais fini : il a fallu trouver le moyen de pratiquer en très-peu de tems des chasses à des aiguilles fines comme des cheveux. Il ne faut donc pas regarder l’inventeur de la machine à faire des bas, comme un homme qui a imaginé une chose seule, très-difficile à la vérité, & qui l’a imaginée aussi parfaite presque qu’elle le pouvoit être ; mais comme un homme qui, lui seul, a encore surmonté tous les obstacles qui s’opposoient à l’exécution de la machine ; & ces obstacles sont de nature à ajoûter beaucoup à l’honneur de celui-là seul qui les auroit surmontés. Il faut consulter pour cet effet les articles de ce Dictionnaire, Moule & Aiguille.

Neuvieme Assemblage. Planc. VII.

Ce neuvieme assemblage est la machine entiere sur son fût.

Elle est composée 1°. de la cage, & de ses dépendances.

2°. De l’ame, & de ses dépendances.

3°. Des moulinets avec leurs dépendances.

4°. Des abattans, & de leurs dépendances.

Passons maintenant à la main-d’œuvre.

MAIN-D’ŒUVRE ou travail des bas sur le métier à bas.

Je diviserai la main-d’œuvre en sept opérations principales. La formation des mailles est le but de ces sept opérations. La premiere consiste à cueillir ; la seconde, à foncer du pié, & à former l’ouvrage ; la troisieme, à amener sous les becs ; la quatrieme, à former aux petits coups ; la cinquieme, à presser les becs, & à faire passer la maille du derriere sur les becs ; la sixieme, à abattre ; la septieme, à crocher.

Premiere Opération. Cueillir.

Pour rendre cette opération & les suivantes très-intelligibles, j’ai fait représenter les platines à ondes, & les platines à plomb, en grand.

Il y a une petite opération préliminaire à toute autre, c’est de noüer la soie à la premiere aiguille, comme on voit Planche I. du bas au métier, fig. 1. & fig. 2. au point 1, puis de la passer sous la seconde aiguille, & de lui faire faire un tour sur cette seconde aiguille, en la ramenant dessus ; de la conduire sous la troisieme aiguille, & de lui faire un tour sur cette aiguille, en la ramenant dessus ; de la conduire sous la quatrieme aiguille, & de lui faire faire un tour sur cette quatrieme aiguille, en la ramenant dessus, & ainsi de suite, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’aiguilles, & placer ce commencement d’ouvrage sous la gorge des platines, comme on l’y voit fig. premiere : cela fait, voici comment on travaille.

Le premier mouvement du cueillir consiste à prendre la soie au sortir de dessous la derniere aiguille, & de l’étendre sous les becs, comme on le voit en 3, 4, fig. premiere & fig. 3. & 2.

Le second mouvement, à presser sur la premiere marche à gauche ou à droite, selon le côté où sera le corps du chevalet : s’il est à droite, comme on le suppose ici, on pressera du pié la premiere marche à gauche ; il part de l’extrémité de cette marche une corde qui passe autour du tambour de la roue ; voy. la Pl. II. fig. 1. n° 9. cette corde 8 fera tourner le tambour & la roue 13 de droite à gauche : mais il y a autour de la roue une corde qui va de-là sur les roulettes de la barre à chevalet, & de ces roulettes aux S du corps à chevalet ; Voyez Pl. IV. fig. 6. n°. 54, 54 ; le corps à chevalet 51 même fig. glissera donc le long de la barre à chevalet 50 de droite à gauche : mais comme le comble 52 du corps à chevalet est plus haut que la queue des ondes, il accrochera en passant les queues des ondes, les chassera de la petite cavité c des ressorts de grille, fig. 1. Pl. IV. & le dessous de la tête de toutes les ondes sera forcé de descendre sur la barre à moulinet, voyez Pl. 5. fig. 1. & fig. 7. & s’y tiendra comme collé, par l’action du petit plan incliné ab, qui termine les ressorts de grille. Voyez fig. 1. Pl. IV. Or la tête des ondes ne peut descendre, que les platines à ondes qui sont assemblées avec les ondes ne descendent aussi : mais en descendant, leurs becs rencontreront nécessairement la soie qu’on a étendue dessous, l’entraîneront avec eux, comme on voit Pl. I. fig. 4. & lui donneront la disposition qu’on lui voit fig. 4. 5. ou 6. c’est-à-dire, qu’elle formera des boucles entre la seconde & la troisieme aiguille, entre la cinquieme & la sixieme, entre la huitieme & la neuvieme, & ainsi de suite. Fin de la premiere opération.

II. Opération. Foncer du pié & former l’ouvrage.

Le premier mouvement de cette opération se fait du pié dont on a cueilli & des deux mains. L’ouvrier prend la barre à poignée des deux mains, de maniere que ses pouces soient appliqués contre les pieces appellées pouces. Voyez Pl. VII. fig. 1. ses mains sont en AA, & ses pouces en BB. Il fait ensuite trois actions à la fois ; il presse du pié la marche 15, fig. 1. Plan. II. dont il a cueilli ou fait marcher le corps à chevalet de droite à gauche ; il tire des mains perpendiculairement en-bas la barre à poignée A A, fig. 1. Pl. VII. & il presse avec ses pouces fortement contre les pouces B B, fig. 1. Pl. VII. voyons quel est le résultat de ces actions.

Il part des extrémités de la traverse 6, 6, fig. 1. Pl. II. qui passe sous les marches 1, 2, 3, des cordes 9, 9, avec leurs crochets 10, 10, qui vont prendre les crochets du balancier 15, 15, Pl. II. fig. 3. la marche 1, 5, même Plan. fig. 1. étant pressée, presse la traverse 6, 6 : d’ailleurs le balancier 14, 14, 15, 15, fig. 3. même Pl. est attaché sur les épaulieres, comme on voit en 14, 14 ; les épaulieres reçoivent dans leurs charnieres les abattans, Pl. VI. fig. 1. 85, 85 ; 85, 85 : la barre à platines est attachée aux abattans, même Pl. & fig. 1. n° 84, 84. L’action du pié sur la marche tend donc à faire descendre les abattans, & avec les abattans, la barre à platines, avec la barre à platines, les platines à plomb, 91, 91, 91, même Plan. fig. 2.

L’action des mains qui tirent perpendiculairement en-bas les abattans, tend aussi à faire descendre les abattans, la barre à platines, & les platines à plomb.

Les actions du pié & des mains conspirent donc ici. L’action des pouces contre les pieces appellées pouces, tend, fig. 6. Pl. IV. à lever la partie antérieure des contre-pouces 43, 43, par conséquent à faire baisser leur partie postérieure 45, & à appliquer la bascule 48, 48, sur les queues des ondes, ou à les faire baisser, ou à relever leur tête, ou à relever les platines à ondes.

Les trois actions combinées de ce mouvement tendent donc à produire deux effets contraires ; l’un d’abaisser les platines à plomb, l’autre de relever les platines à ondes.

Le second mouvement de cette opération consiste à ménager doucement ces deux effets contraires, à les combiner finement, & à faire ensorte que les platines à ondes remontent d’entre les aiguilles, à peu près de la même quantité que les platines à plomb y descendent ; en sorte que les becs des unes & des autres se trouvent tous de niveau sous les aiguilles, comme on voit Pl. I. du bas au métier fig. 7.

Il s’est donc fait dans cette seconde opération une nouvelle distribution de la soie, comme on voit fig. 7. 8. & 9. & formé une boucle entre chaque aiguille : mais les nouvelles boucles s’étant formées aux dépens des précédentes, elles sont toutes égales & toutes plus petites que les premieres formées par les seules platines à ondes.

C’étoit pour donner lieu à cette distribution de la soie entre toutes les aiguilles, au retrécissement des boucles formées par les platines à ondes, & à la formation des boucles faites par les platines à plomb aux dépens des premieres, que l’on a fait un peu relever les platines à plomb ; car si on n’eût point fait relever les platines à plomb, que seroit-il arrivé ? c’est que ces platines eussent tenu tendues sur les aiguilles les portions de soie 1, 2 ; 3, 4, fig. 5. ou 1, 2 ; 3, 4, fig. 6. Pl. I. du métier à bas, & que les platines à plomb F E, DC, &c. venant à s’appliquer sur les mêmes portions, auroient produit l’un ou l’autre de ces effets, ou enfoncé les trois aiguilles contenues sous chaque portion, ou rompu la soie : au lieu que les platines à ondes A B remontant un peu, fig. 4. & 6. même Pl. lorsque les platines à plomb C D, E F, rencontrent les portions de soie 1, 2 ; 3, 4, fig. 6. & 5. elles font descendre sans peine cette soie sous les aiguilles, & la distribuent entr’elles sans les forcer. Mais chaque boucle des platines à ondes ne perdant qu’autant de soie qu’en prend chaque platine à plomb, & ces platines cessant les unes de remonter, & les autres de descendre entre les aiguilles, lorsque leurs becs sont tous de niveau sur les aiguilles, comme on les voit Pl. I. du bas au métier, fig. 7. 8. 9. toutes les boucles sont égales, & la soie se trouve distribuée entre les aiguilles, comme on voit fig. 7. & 8. La portion 1, 2 faite à la main fig. 7. est sous les gorges des platines, & la portion 3, 4 sous les becs. Fin de la seconde opération.

III. Opération. Amener l’ouvrage sous becs.

Cette opération s’exécute d’un seul mouvement, composé de deux actions ; l’une de laisser remonter les abattans, & l’autre de tirer la barre à poignée en-devant.

Il est évident que pour baisser les abattans, & mettre les platines à plomb de niveau avec les platines à ondes, il a fallu vaincre l’action du grand ressort ; car, Pl. VI. fig. 1. le grand ressort 16, 16, agissant par son extrémité supérieure contre le portefaix 8 de l’arbre 6, 7, tend à le faire tourner : or l’arbre ne peut tendre à tourner qu’il ne donne le même effort, la même tendance aux épaulieres 5, 85 ; 85, 5 : mais les épaulieres reçoivent dans leurs nœuds les abattans 85, 85 ; 85, 85 : le grand ressort tend donc à relever les abattans.

Ainsi pour laisser remonter les abattans, il n’est question que de lâcher des mains, ne point retenir la poignée AB, & que de laisser agir le grand ressort ; observant, tandis que le grand ressort fait remonter les abattans, de tenir les pouces BB fortement appliqués contre les contrepouces C C, Pl. VII. fig. 1. car par ce moyen les pouces BB ne cessant point d’agir contre les contrepouces CC, la partie antérieure des contrepouces ee sera levée à mesure que les abattans remonteront ; leur partie postérieure dd baissera d’autant ; la bascule ff sera toûjours appliquée sur les queues des ondes ; la tête des ondes g g suivra le mouvemement de la barre à platine h h, qui remontera avec les abattans, & les platines à ondes demeureront toûjours de niveau avec les platines à plomb.

L’autre action dont le mouvement de cette troisieme opération est composé, consiste à tirer la barre à poignée A A en devant.

Cette action se fait horisontalement : mais on ne peut tirer la barre à poignée A B, fig. 1. Pl. VI. en devant, que tout ce que nous allons dire ne s’ensuive ; voyez Pl. VI. fig. 1. la barre à platine 84, 84, est tirée en devant, car elle est attachée aux abattans ; les platines a ondes s’avancent en même tems en devant, & toûjours paralleles aux platines à plomb ; parce que la barre fondue est contrainte d’avancer, en vertu des tirans qui tiennent à elle d’un bout, & de l’autre aux porte-tirans 90, 90, même Pl. fig. 2. qui sont attachés à la barre à platines.

Par le mouvement composé de ces deux actions, les becs des platines a b s’élevent au-dessus des aiguilles, les dessous des becs sont amenés un peu au-delà de leurs têtes cd, & la soie se trouve disposée comme on la voit Pl. I. du bas au métier, fig. 10. 11. 12. mais alors la branche des crochets z de dessous des abattans est appliquée contre les petits coups x fig. 1. Pl. VII. Fin de la troisieme opération.

IV. Opération. Former aux petits coups.

Le premier mouvement de cette opération consiste à laisser remonter l’extrémité des crochets z de dessous des abattans, aux petits coups x, Plan. VII. fig. 1. Ce mouvement se joint presqu’au premier mouvement de l’opération précédente : la surface en talus, ou le dessous du petit coup x, se trouve alors appliqué à la surface en talus pareillement de l’extrémité du crochet z. Mais comme le grand ressort 16, 16, tend toûjours à relever les abattans, il tend en même tems à séparer l’extrémité du crochet z, de l’éminence du petit coup x.

Le second mouvement consiste à empêcher cette séparation par de petites secousses, qui font un peu glisser le talus de l’extrémité du crochet z sur le talus intérieur de l’éminence du petit coup x. Ces secousses ont pour but de corrompre & corroyer la soie sous les becs d’aiguilles, & de la tenir tendue en devant, & presque de niveau avec les becs, comme on voit Pl. I. du bas au métier, fig. 10. 11. 12.

Il faut toûjours tenir les pouces de la main fortement appuyés contre les pouces de la machine, afin que les têtes des ondes demeurant toûjours appliquées à la barre à platines ; les platines à ondes & les platines à plomb demeurent toûjours de niveau ; car cela est essentiel, comme il est facile de s’en appercevoir. Fin de la quatrieme opération.

V. Opération. Donner le coup. de presse, & faire passer l’ouvrage de dessous la gorge des platines sur les becs des aiguilles.

Le premier mouvement de cette opération consiste à abandonner les abattans à eux-mêmes, tenant toûjours les pouces des mains fortement contre les pouces B B de la machine, & les platines à ondes bien paralleles en tout sens aux platines à plomb. L’action du grand ressort 16, 16, fera remonter les abattans, jusqu’à ce que les épaulieres o o soient appliquées aux arrêtans de l’extrémité des jumelles p p, comme on voit Pl. VII. fig. 1.

Mais lorsque les abattans seront remontés à cette hauteur, alors le ventre n des platines correspondra ou se trouvera à la hauteur des aiguilles, comme on voit même Pl. même fig. 1. & Pl. II. bas au métier, fig. 1. a b.

Le second mouvement consiste à appuyer fortement le pié sur la marche du milieu ; & voici le résultat de ce mouvement. La marche baisse, tire à elle le crochet de la petite anse, ce crochet tire la petite anse, la petite anse tire la grande anse, la grande anse fait descendre les bras de la presse, & la presse se trouve appliquée sur les becs des aiguilles, dont elle force les pointes à se cacher dans les chasses, comme on voit fig. 1. Pl. II. du bas au métier.

Le troisieme mouvement, c’est tandis que la presse est sur les becs des aiguilles, de faire passer l’ouvrage qui est contre les ventres des platines, comme on voit Pl. II. fig. 1. au-delà des chasses des aiguilles, comme on voit fig. 4. même Pl. ce qui s’exécute en tirant la barre à poignée brusquement en devant, & horisontalement.

Le quatrieme mouvement, d’ôter le pié de dessus la marche du milieu ; d’où il s’ensuit que rien n’empêchera plus la grande anse qui est tirée en-haut par la lisiere de cuir ou la courroie, qui passe sur la roulette du porte-faix d’en-bas, & qui se rend à la branche du contre-poids, de remonter & d’entraîner avec elle & faire relever les bras de presse ; ce qui séparera la presse de-dessus les becs des aiguilles, & permettra à la pointe de ces becs de sortir de leurs chasses. Fin de la cinquieme opération.

Sixieme Opération. Abattre l’ouvrage.

Il n’y a qu’un mouvement assez léger à cette opération, il consiste à tirer la barre à poignée, & à faire avancer les ventres des platines jusqu’entre les têtes des aiguilles ; il est évident que ces ventres placés, comme on les voit, Pl. II. du bas au métier, fig. 3. feront passer l’ouvrage, de l’état où on le voit, sur les becs des aiguilles, fig. 4. 1, 2, dans l’état où on le voit fig. 5. 3, 4, ou fig. 6. 5, 6.

Voilà la formation de la maille : la septieme opération n’y ajoûte rien ; elle restitue seulement & le métier & l’ouvrage déja fait, dans une position à pouvoir ajoûter de nouvelles mailles aux mailles qu’on voit, ou dans l’état où il étoit quand on a commencé à travailler.

Septieme Opération. Crocher.

Cette opération n’a qu’un mouvement : mais c’est le plus considérable & le plus grand de tous.

Quand on est sur le point de crocher, le métier se trouve dans l’état suivant : les ventres des platines sont au niveau des têtes des aiguilles, & par conséquent le dessous des becs fort au-dessus des aiguilles ; les crochets de-dessous des abattans sont au-dessus des petits coups, comme on les voit Pl. VII. fig. 1. & les épaulieres sous les arrêtans des jumelles, comme on les voit même figure.

Pour crocher, on applique la branche du crochet z de-dessous des abattans, contre les arrêtans y ; on tire perpendiculairement en-bas les abattans par la barre à poignée A A ; tenant toûjours les branches des crochets appliquées à l’éminence t des arrêtans qui dirigent dans ce mouvement : on fait descendre de cette maniere les platines à ondes & les platines à plomb, jusqu’à ce que le haut de leurs gorges M, soit à la hauteur de N, ou des têtes des aiguilles : puis du même mouvement continué horisontalement, on repousse en arriere les abattans aussi loin que l’on peut ; & l’on laisse remonter le métier qui va de lui-même, s’arrêter au-dessous de la barre à aiguilles, où il rencontre un crochet prêt à recevoir celui qui est placé au derriere des abattans, & qu’on appelle crochet de-dessus des abattans.

Il est évident que dans ce mouvement le haut de la gorge M des platines a emporté avec lui l’ouvrage qui étoit sous les becs, en le faisant glisser le long des aiguilles ; que les becs des aiguilles sont vuides ; que le dessous des becs des platines à ondes & des platines à plomb, se trouve entre les aiguilles ; que l’ouvrage fait est caché pour celui qui ne voit le métier qu’en face, & qu’il le voit alors comme il est représenté Pl. II. fig. 8. du bas au métier, c’est-à-dire, prêt à travailler de nouveau, ou à faire de gauche à droite ce qu’il a exécuté de droite à gauche.

C’est maintenant qu’on doit avoir conçû comment se fait la maille, qu’il est à propos de revenir sur les parties du métier & sur leurs configurations, dont on n’étoit pas en état auparavant de bien entendre les propriétés.

Commençons par les marches ; elles sont au nombre de trois, Pl. II. fig. 1. du métier à bas ; c’est la même corde qui va de la premiere 1, 5. au tambour de la roue 17. & de ce tambour à la troisieme 1, 5. d’où il s’ensuit que si l’on presse du pié celle qui est à gauche, on fera tourner la roue de droite à gauche, & qu’en pressant du pié celle qui est à droite, la roue tournera de gauche à droite.

C’est la même corde qui passe sous la roue du fût, où elle est cloüée, & qui va se rendre d’un bout sur une des roulettes de la barre à chevalet, & de l’autre sur l’autre roulette, & s’attacher aux s qui partent du corps de ce chevalet, comme on voit Pl. IV. fig. 6. n°. 49. 49.

On conçoit actuellement ce que nous avons dit de l’arrétant, ou de cette partie yt qu’on voit Pl. VII. fig. 1. Il a fallu nécessairement se ménager la facilité de l’avancer ou de la reculer, en pratiquant à la partie appliquée & fixée au montant une ouverture longitudinale r : trop avancé en-devant, ou trop peu, le fond des gorges des platines ne pourroit plus venir chercher l’ouvrage abattu, en vuider les aiguilles, l’entraîner derriere, & donner lieu à la continuation du travail.

Au-dessous de l’arrêtant, on voit la piece appellée le petit coup x, même Planche & même figure. Sans ce petit coup, qui est ce qui regle l’ouvrier, quand il forme l’ouvrage & corrompt la soie amenée sous les becs des aiguilles ; il seroit exposé à avancer le dessous des platines trop en-avant, à casser la soie, ou à rompre les becs des aiguilles.

Voilà ce qu’il y a de plus remarquable sur le fût & ses parties. Passons au métier, & parcourons ses assemblages.

On s’est ménagé aux gueules de loup 13. la même commodité qu’aux arrêtans, celle de les hausser & baisser à discrétion, afin d’ajuster convenablement la barre fondue. Pl. II. fig. 3.

On sent de quelle importance est le grand ressort 16, 16. c’est par son moyen que les abattans sont relevés sans que l’ouvrier s’en mêle. Pl. II. fig. 3. la vis 17. qui sert à le bander ou à le relâcher, est très-bien imaginée.

Le balancier 14, 14, 15, 15, n’est pas une piece inutile ; il met à portée le pié d’aider la main ; à vaincre la résistance du grand ressort toutes les fois qu’il faut faire descendre les abattans. Or ce mouvement se faisant souvent, on n’a pû apporter trop d’attention à soulager l’ouvrier.

La patte du bras de presse 17, 18, 19, fig. 1. Pl. III. est garnie d’une vis 20, 20, dont on va sentir toute la finesse : sans cette vis, l’ouvrier, en donnant le coup de presse, seroit exposé ou à rompre toutes les aiguilles, si la presse s’appliquoit trop fortement sur elles, ou à ne pas cacher leurs becs dans leurs chasses, si elle ne s’appliquoit pas assez. Mais qui le dirigera dans cette opération ? les vis appliquées à l’extrémité des bras de presse, qui permettront à ces bras de descendre suffisamment, & à la presse de s’appliquer convenablement sur les becs d’aiguilles.

Mais ç’eût été bien du tems de perdu pour l’ouvrier, & bien de la peine réitérée, s’il eût fallu relever la presse & la soûtenir : aussi se releve-t-elle d’elle-même, à l’aide de la courroie passée de la grande anse sur la roulette du porte-faix d’en-bas, & attachée à la branche du contre-poids.

On s’est encore ménagé aux porte-grilles, Pl. III. fig. 5. le même avantage qu’aux gueules de loup, & qu’aux arrêtans. Leur ouverture longitudinale xx, permet aussi de les avancer ou reculer à discrétion.

Le porte-roulette fixé, même fig. au milieu de la petite barre de dessous, facilite avec les roulettes de l’extrémité de la barre fondue, le mouvement en-arriere ou en-devant, de tout ce qu’on appelle l’ame du métier, que l’ouvrier fait en travaillant avancer ou reculer toutes les fois qu’il tire à soi ou repousse les abattans ; ce qui lui arrive très-souvent. Aussi louai-je beaucoup ceux qui ont diminué le poids de ces parties, en ajoûtant une roulette à la petite barre, & une gueule de loup à la barre de derriere, pour recevoir la roulette ajoûtée.

Il y a plusieurs choses à considérer dans les ressorts de grille. Pl. III. fig. 6. Premierement, ils sont disposés sur deux rangées paralleles de maniere que les ressorts de la rangée de derriere répondent aux intervalles que laissent entre-eux les ressorts de la rangée de devant : c’est le seul moyen qu’il y eût peut-être de leur donner la force qui leur est nécessaire pour l’usage auquel ils sont employés. Si on les eût tous placés sur une même rangée, ils auroient été plus petits & trop foibles. Voilà pour leur arrangement.

Secondement, ils sont composés de quatre plans inclinés, disposés à-peu-près en zig-zag. Lorsque la queue de l’onde est chassée de la cavité c, figure 7. même Pl. par le corps du chevalet, elle écarte le ressort, qui revient ensuite sur elle quand elle est sortie, & qui la repousse d’autant plus vivement, qu’alors elle se trouve sur un plan incliné ab ; c’est le même effet quand elle est chassée de sa cavité en-dessous par la bascule : elle écarte pareillement le ressort qui revient ensuite sur elle, avec d’autant plus de vivacité qu’elle se trouve encore sur un plan incliné cd. La méchanique n’est pas différente, quand chassée de sa cavité, soit en-dessus, soit en-dessous, elle y est ramenée ; elle ne peut y descendre que par une espece d’échappement fort prompt, puitqu’elle y est toûjours conduite par un petit plan incliné cd, cb.

Ce n’est pas une petite affaire que de bien disposer les cuivres de la barre fondue. Leur usage est d’empêcher les ondes de vaciller dans leur mouvement de chûte. Si l’on a bien compris ce que j’ai dit jusqu’à présent, on doit s’appercevoir qu’il y a un rapport bien déterminé entre le nombre des ressorts, les intervalles qu’ils laissent entr’eux ; le nombre des cuivres, leur épaisseur ; les ondes, leur longueur, leur nombre, leur épaisseur ; les platines à ondes, leur nombre, leur épaisseur ; les platines à plomb, leur nombre, leur longueur, leur épaisseur ; les plombs à platines, leur nombre, leur épaisseur ; les aiguilles, leur nombre, leurs intervalles ; les plombs à aiguille, leur nombre, leur épaisseur : & que l’une de ces choses étant donnée, tout le reste s’ensuit. Il y a très peu d’ouvriers en état de combiner avec précision toutes ces choses, sur-tout quand il s’agit de faire un métier un peu fin ; comme un quarante, un quarante-un, un quarante-deux, &c.

La méchanique des contre-pouces 43, 44, 45, Pl. IV. fig. 4. mérite bien un coup-d’œil. Ces pieces sont chargées à leur extrémité d’un contre-poids 44, qui ne permet à la bascule d’agir sur les queues des ondes, qu’à la volonté de l’ouvrier. Il y a sur les ondes deux actions opposées pendant tout le travail, & elles ont leurs effets successivement, selon les mouvemens des abattans. Ces deux actions sont l’action de la bascule 48, 48, par le moyen des pouces & contre-pouces sur la queue des ondes, & l’action de la barre à platines sur leur tête. Lorsque l’ouvrier tire les abattans perpendiculairement en bas, alors la barre à platine, ou son chaperon, c’est-à-dire cette petite plaque qui lui est appliquée par derriere & qui fait éminence, presse fortement sur leurs têtes, les entraîne dans la même direction, & les réduit dans le parallélisme avec les platines à plomb, malgré l’action des pouces sur les contre-pouces, & celle des contre-pouces sur la bascule, & celle de la bascule sur les queues des ondes : mais lorsque l’ouvrier laisse agir le grand ressort, & que les abattans abandonnés à eux-mêmes sont relevés, alors rien ne s’oppose à l’action des pouces, des contre-pouces & de la bascule, qui subsiste pendant tout le travail ; & les ondes se relevent, & leurs queues rentrent dans leur cavité, ou descendent au-dessous, selon que l’ouvrier le veut.

Comme il falloit que dans tous les mouvemens les platines à ondes & les platines à plomb fussent toûjours exactement paralleles en tout sens les unes aux autres, quoique les platines à ondes appartinssent à la barre fondue, & que les platines à plomb appartinssent à la barre à platines, c’étoit donc nécessité que la barre fondue se prétât & suivît tous les mouvemens de la barre à platines : c’est ce qui s’exécute par le moyen des tirans qui répondent d’un bout à la barre fondue, & de l’autre à la barre à platines, & par le moyen des trois roulettes de l’ancien métier, & des quatre du métier nouveau, dont deux se meuvent dans les gueules de loup, & deux sur les grandes pieces.

Passons maintenant aux moulinets. Comme nous n’en avons rien dit jusqu’à présent, & que nous avons cependant traité de presque tout ce qui concerne la main-d’œuvre, on seroit tenté de croire au moins que ces parties & toutes celles qui leur appartiennent, comme la boite, la barre, & le ressort à moulinet, sont superflues, & qu’il n’y a pas non plus grand besoin de jumelles. On va voir combien ce soupçon est éloigné de la vérité.

Pour bien entendre ce qui suit, il faut examiner un peu la configuration d’une onde en-dessous. On voit, Pl. IV. fig. 3. que depuis a jusqu’à b elle est comme arrondie, & qu’elle est évidée depuis b jusqu’à c. La partie arrondie ab forme sa tête. Lorsque le chevalet passant sous la queue de l’onde, fait desecendre cette partie ab, elle s’applique sur la barre à moulinet 82, 82, Pl. V. fig. 1. ensorte que toutes les têtes des ondes sont rangées sur la barre à moulinet, quand le corps à chevalet a fait sa course. D’où il s’ensuit évidemment que plus cette barre sera haute, moins les têtes des ondes descendront, moins les platines à ondes attachées à ces têtes descendront entre les aiguilles ; moins les becs des platines descendront au-dessous des aiguilles dans la premiere opération de la main-d’œuvre ou le cueillement ; moins les boucles de soie formées entre les aiguilles seront grandes ; moins les mailles seront lâches : mais cette barre à moulinet étant enfermée dans des boîtes 81, 81, qui peuvent se hausser ou se baisser à l’aide des arbres à moulinet 68, 81 ; 68, 81, qui les traversent, on pourra donc hausser ou baisser cette barre à discrétion, & faire un bas plus ou moins serré. Voilà l’usage de la barre en elle-même & de sa mobilité le long des corps de moulinet ; mais ce n’est pas sans raison qu’on lui a attaché postérieurement un ressort 83, 83, 83, à l’aide duquel elle peut aller & venir dans les boîtes.

Pour sentir l’usage de ce ressort & de la mobilité de la barre dans ses boîtes, il faut relire ou se rappeller la derniere opération de la main-d’œuvre ou du crochement : il consiste à faire descendre les platines jusqu’à ce que leurs gorges soient un peu plus bas que les têtes des aiguilles, & que ces gorges puissent embrasser l’ouvrage qui remplit ces têtes, & le remporter en-arriere.

Mais pour exécuter ces mouvemens, comme il y a loin de la barre à moulinet, sur laquelle les têtes des ondes étoient placées, jusqu’aux têtes des aiguilles, il a fallu amener les têtes des ondes & les platines qui y sont attachées, en-devant ; c’est ce que l’ouvrier a fait, en tirant à lui la barre à poignée ou les abattans. Il a fallu faire descendre les platines, & par conséquent les têtes des ondes auxquelles elles sont assemblées, pour que les gorges des platines se trouvassent un peu au-dessous des têtes des aiguilles ; c’est ce qu’il a fait en tirant les abattans aussi bas qu’ils pouvoient descendre, & se laissant diriger par les arrêtans. C’est pour rendre possible ce dernier mouvement, que l’on a évidé les ondes en-dessous ; car si elles avoient été par-tout de la même largeur, elles n’auroient pû descendre ; la barre à moulinet sur laquelle elles auroient continué de porter, les en auroit empêché : mais en les évidant, elles ont cessé de porter sur la barre à moulinet, & en les évidant assez, elles n’ont rien rencontré d’ailleurs qui les gênât dans leur descente, & qui empêchât la gorge des platines de parvenir jusqu’au-dessous des becs des aiguilles.

Mais ce n’étoit pas tout ; il falloit que ces gorges remportassent l’ouvrage de dessous les becs des aiguilles en-arriere : pour cet effet, l’ouvrier tenant ces gorges entre les têtes des aiguilles, les repousse en-arriere : mais en les repoussant en-arriere, qu’arrive-t-il ? c’est que le talon de l’échancrure des ondes rencontre la barre à moulinet. Si cette barre à moulinet étoit immobile dans les boîtes, elle arrêteroit ce mouvement horisontal, & l’ouvrage ne seroit point remporté en-arriere par les gorges ; aussi l’a-t-on fait mobile : le talon de l’échancrure des ondes la fait reculer ; l’ouvrage est remporté par les gorges ; les ondes se relevent ; leurs talons cessent d’appuyer contre la barre à moulinet ; le ressort circulaire qui agit contre cette barre la restitue dans son premier état, & elle est disposée à recevoir de rechef la tête des ondes dans leur chûte, qui se fera au nouveau cueillement.

Voilà les usages de ces parties, qui paroissoient si superflues. On a dentelé la roue 69 du moulinet, figure premiere, Planche V. afin qu’on pût savoir de combien on haussoit ou baissoit la barre à moulinet, & évaluer à peu près par ce moyen, de combien on relâchoit ou resserroit les mailles, & relâcher & resserrer également de chaque côté. La partie 68, 68, qu’on appelle croisée du moulinet, sert de poignée à l’arbre, & puis c’est tout.

Il ne nous reste plus qu’un mot à dire des jumelles, 61, 61, fig. 1. Planc. V. des platines tant à ondes qu’à plomb, & des gardes-platines. On a pratiqué aux jumelles 61, 61, deux arrêtans 5, 5, l’un en-dessus 61, & l’autre en-dessous 5. L’usage de celui de dessus est de contenir à une juste hauteur les épaulieres & les abattans qui y sont assemblés, malgré l’action du grand ressort. Voyez même Planche, fig. 7. L’usage de celui de dessous est d’empêcher, dans le crochement, les mêmes épaulieres, ainsi que les abattans & par conséquent les gorges des platines, à descendre trop au-dessous des têtes des aiguilles, & de les briser & fausser toutes.

Toutes les sinuosités que l’on remarque aux platines, Pl. IV. fig. 2. ont leur raison. On peut distinguer quatre lieux principaux dans ces parties : leur bec b, qui prend la soie étendue sur les aiguilles & la fait descendre entr’elles : le dessous du bec c, qui amene la soie bouclée sous les becs & la corroie : le ventre e, qui abat l’ouvrage : la gorge d, qui le reprend & le ramene en-arriere : la queue f, qui s’emboîte dans la barre à poignée, & l’empêche de vaciller. S’il n’y avoit point de garde-platine 94, 94, Pl. VI. fig. 2. quand, dans la troisieme opération, on amene l’ouvrage sur les becs avec le ventre des platines, ce ventre viendroit frapper contre la presse qui est alors appliquée, & se défigureroit : mais le garde-platine empêche ce choc ; il permet aux ventres des platines d’approcher assez de la presse, pour que l’ouvrage soit bien amené sur les becs, mais non de la frapper, en rencontrant lui-même assez-tôt pour prevenir cet inconvénient, le bras de presse.

Il survient en travaillant plusieurs accidens, & il y a plusieurs autres choses à observer, dont je vais faire mention.

Lorsqu’il se rencontre des nœuds dans la soie ou qu’elle se casse, on ne peut continuer l’ouvrage sans faire ce que les ouvriers appellent une enture.

Pour enter, on étend bien sur les aiguilles la partie du fil de soie qui tient à l’ouvrage, & l’on couche l’autre partie, non pas bout à bout avec la premiere : mais on la passe entre la cinq, la sept, &c. avant le bout du fil qui tient à l’ouvrage ; ensorte que le fil se trouve double sur ces cinq, sept aiguilles, & l’on continue de travailler comme si le fil étoit entier.

Tout bas se commence par un ourlet, & voici comment on s’y prend pour le faire. On passe la soie dans la tête de la premiere aiguille, & on l’y arrête en la tordant ; on embrasse ensuite en-dessous les deux suivantes ; on la ramene en-dessus sur la premiere ; puis on la passe en-dessous, & on embrasse la quatrieme & la cinquieme sur lesquelles on la ramene, & sur la troisieme sous laquelle on la passe, & on embrasse la sixieme & la septieme sur lesquelles on la ramene, & sur la cinquieme sous laquelle on la passe ensuite, & on embrasse la huitieme & la neuvieme, & ainsi de suite.

Un bas n’est pas par-tout de la même venue ; on est obligé de le rétrécir de tems en tems. Supposons donc qu’on ait à rétrécir d’une maille, on prend un petit outil qu’on appelle poinçon, on s’en sert pour porter la maille de la troisieme aiguille sur la quatrieme aiguille, la maille de la seconde sur la troisieme, la maille de la premiere sur la seconde, & la premiere se trouve vuide.

On demandera peut-être pourquoi on porte la troisieme maille sur la quatrieme aiguille, & non la premiere sur la seconde tout d’un coup ; puisqu’il faut qu’il se trouve deux mailles sur une aiguille, pourquoi donner la préférence à la quatrieme ? Je répons que c’est afin que la lisiere soit plus nette ; car si la maille double se trouvoit au bord de la lisiere, elle tireroit trop. Il faut même, si l’on veut que la lisiere ne soit pas trop serrée, bien repousser l’ouvrage en-arriere, & ne pas accoller la platine avec la soie quand on la jette.

Au reste, on rétrécit d’une maille de chaque côté du métier de quatre rangées en quatre rangées, & l’on ne commence à rétrécir qu’à un pouce au-dessus de la façon, ou de cet ornement qu’on pratique au-dessus des coins.

Il arrive quelquefois, après le coup de presse, qu’un bec d’aiguille ne se releve pas, mais demeure dans sa chasse ; lors donc qu’on a cueilli & qu’on vient à abattre l’ouvrage, il y a une maille qui n’ayant pas été mise dans la tête de l’aiguille, mais ayant passé par-dessus, ne sera pas travaillée, & qu’il faudra relever ; il pourra même se trouver plusieurs mailles non-travaillées de suite ; pour les relever, voici comment on s’y prendra : on saisira la derniere qui est bien formée à l’ouvrage, avec le poinçon, & on la passera dans la tête de la tournille ou d’une aiguille emmanchée, puis on prendra avec le poinçon la bride de dessus cette maille ; on passera cette bride sur la tournille ; à mesure qu’elle avancera le long du bec, la bonne maille sortira de dessous, & bientôt la bonne maille se trouvera entierement sortie & fort loin du bec, & la bride à portée de passer dessous. On l’y fera donc passer ; puis quand elle y sera, on pressera avec le poinçon le bec de l’aiguille & l’on le tiendra dans la chasse ; cependant on tirera la tournille, ce qui fera avancer sa bride dans la tête de la tournille & passer la bonne maille par-dessus le bec, alors la maille sera relevée : on continuera de cette maniere s’il y en a plusieurs de tombées, traitant toûjours celle qui se trouvera dans la tête de la tournille comme la bonne, & la bride d’au-dessus comme la mauvaise ou comme la maille à relever ; & quand on en sera à la derniere, on la mettra dans la tête de l’aiguille. Voyez cette maneuvre, Planche III. du bas au métier, figure 2, 3. On entend par bride, la petite portion de soie, qui au lieu de passer dans la tête de l’aiguille, a passé par-dessus & n’a point été travaillée.

J’observerai pourtant qu’il faut faire cette opération en-dessous ou à l’endroit, c’est-à-dire, du côté de l’ouvrage qui ne regarde pas l’ouvrier, sans quoi les mailles relevées formeront un relief à l’envers, & par conséquent un creux à l’endroit.

Il arrive encore qu’il se forme des mailles doubles ; cet inconvénient arrive de plusieurs façons : s’il y a quelque grosseur dans la matiere, si une aiguille a le bec de travers, s’il y a quelque aiguille fatiguée qui ne presse pas, une aiguille n’aura point de maille & sa voisine en aura deux.

Dans ce cas, de deux mailles on arrête la premiere sous le bec de l’aiguille ; on fait tomber la seconde ; cette seconde tombée, formera une bride qu’on relevera & qu’on portera sur l’aiguille vuide.

Il y a encore des mailles mordues ; on entend par une maille mordue, celle qui est moitié dans la tête de l’aiguille, moitié hors, ou qui est à demi tombée. On fait entierement tomber la maille mordue, & on la releve en plein.

Les ouvriers entendent par la tige du bas, ce pouce d’ouvrage qui est au-dessus des façons & sur lequel on rétrécit.

Sur un métier de quinze pouces, on laisse du milieu d’une façon au milieu de l’autre, cinq pouces & un quart. Si le métier a moins de quinze pouces, la distance du milieu d’une façon au milieu de l’autre diminuera proportionnellement.

Quand on travaille la façon, on continue de rapetisser d’une aiguille de chaque côté de quatre en quatre rangées. Pour reconnoître les milieux des façons, on fait un peu lever les deux aiguilles qui les indiquent.

On fait usage dans les façons de deux especes de mailles, qui ne sont pas de la nature de celles dont le reste du bas est tricoté ; ce sont les mailles portées & les mailles retournées. On entend par une maille portée, celle qui, sans sortir de son aiguille, est portée dans la tête de celle qui la suit immédiatement, en allant vers la gauche de l’ouvrier ; & par une maille retournée on entend celle qu’on fait tomber & qu’on releve sur la même aiguille, de maniere qu’elle fasse relief à l’envers & creux à l’endroit du bas. Pour cet effet on n’a, comme nous l’avons dit à l’occasion des mailles tombées, qu’à la relever du côté du bas qui regarde l’ouvrier.

Les façons faites, il s’agit de partager les talons. Pour cet effet on prend la maille des aiguilles qui marquoient les milieux des façons, & on la jette sur les aiguilles voisines, en allant à la gauche de l’ouvrier ; puis on prend la maille de chacune des aiguilles voisines de ces aiguilles vuides, en allant à droite, & on la jette sur les aiguilles qui leur sont voisines, en allant aussi à droite.

On a donc en deux endroits de la largeur du bas deux aiguilles vuides, qui partagent cette largeur en trois parties.

On travaille ces trois parties avec trois fils de soie séparés, & qu’on jette chacun séparément. Jetter est synonyme à cueillir.

De ces trois parties, celle du milieu est pour le dessus du pié, & les deux autres sont les deux parties du talon. On travaille le dessus sans le rapetisser. Pour les parties du talon, on les rétrécit chacune d’une maille de six rangées en six rangées ; & cette maille on la prend à leurs extrémités ou aux côtés qui doivent se réunir pour former la couture du talon, ou sur la premiere & la derniere aiguilles pleines, ou sur l’aiguille pleine la plus à droite de l’ouvrier, & sur l’aiguille pleine la plus à gauche ; car ce n’est là que plusieurs manieres différentes de désigner les mêmes aiguilles.

On continue de rapetisser ou rétrécir les parties du talon de la maniere que nous avons dit, jusqu’à ce qu’elles n’ayent plus chacune que deux pouces & demi. Alors on forme la pointe du talon, en rétrécissant ces deux parties de la maniere suivante. Pour la partie qui est à droite de l’ouvrier, on compte les aiguilles pleines en allant de droit à gauche, & on jette la maille de la quatrieme aiguille, sur la sixieme aiguille ; la maille de la troisieme aiguille aussi sur la sixieme ; la maille de la seconde aiguille sur la cinquieme, & la maille de la premiere aiguille sur la quatrieme, qui est la seule qui reste vuide. Pour la partie du talon qui est à gauche, on compte les aiguilles pleines, en allant de gauche à droite, & on jette la maille de la quatrieme aiguille, sur la sixieme aiguille ; la maille de la troisieme aiguille pareillement sur la sixieme ; la maille de la seconde aiguille sur la cinquieme, & la maille de la premiere aiguille, sur la quatrieme qui est la seule qui reste vuide. On continue ces rapetissemens singuliers, trois, quatre, cinq fois, selon la finesse du bas, & cela de quatre en quatre rangées.

On finit les talons par une rangée lâche. Cette rangée lâche se fait en descendant les platines, comme quand on veut croiser, & en repoussant la barre à moulinet avec le talon des ondes.

On avance ensuite sous les becs, en prenant bien garde d’amener trop ; car on jetteroit le dessus du pié en bas.

On a fait cette rangée lâche, afin de pouvoir, à l’aide de la tournille, la diviser en deux & terminer le talon. Pour cet effet, on prend la premiere maille avec la tournille, & la maille suivante avec le poinçon ; à mesure que la seconde passe sur le bec de la tournille, l’autre sort de dessous la tête. Celle-ci est loin du bec, quand celle-là est à portée d’entrer dessous. On l’y fait donc entrer, & quand elle y est, on presse le bec de la tournille avec le poinçon ; on tire la tournille, & la premiere passe sur le bec & forme avec celle qui est dessous, le commencement d’une espece de chaînette, qu’on exécute exactement, comme quand on releve des mailles tombées ; avec cette différence que les mailles tombées se relevent dans une direction verticale, & que cette chaînette se forme horisontalement.

Pour arrêter la chaînette, on fait sortir la derniere maille qui est sous la tête de la tournille, en avançant la tournille ; on met le fil de soie à sa place : on presse ensuite le bec de la tournille ; on tire la tournille, & la maille passe sur le bec & par conséquent le fil de soie à travers elle. On recommence cette opération plusieurs fois ; cela fait on jette bas les talons sans aucun danger, & l’on continue le dessus du pié.

Avant que d’achever le bas, j’observerai que l’on pratique une rangée lâche, & sur cette rangée quelques autres à l’ordinaire, toutes les fois qu’on veut ôter un ouvrage de dessus le métier, sans donner lieu aux mailles de s’échapper.

Le dessus du pié s’acheve comme on l’a commencé ; quand il est achevé, on monte le talon sur le métier, non par le côté de la lisiere de derriere, mais par l’autre côté. Pour cet effet, on décroche le métier ; on tourne de son côté l’endroit de l’ouvrage ; on prend la seconde rangée de mailles après la lisiere, & on la fait passer dans les aiguilles, en tenant l’ouvrage d’une main au-dessus des aiguilles, & faisant passer chaque maille de la rangée dans chaque aiguille.

En s’y prenant ainsi, il est évident que quand après avoir croché & cueilli, comme on le dira, on abattra l’ouvrage, l’envers se trouvera vers l’ouvrier. Lorsque les mailles sont passées sur les aiguilles ; on laisse l’ouvrage sur elles, & on le repousse fort avant vers le derriere du métier, afin qu’il se trouve dans la gorge des platines, lorsqu’on crochera en dedans ; c’est-à-dire sans avancer le métier en devant, en tirant les abattans perpendiculairement : puis on pratique une enture du côté de la façon : on double la soie à cette enture, sur sept aiguilles seulement. On cueille sur elle avec la main, de peur que l’ouvrage qui est sous les gorges qui sont fort petites & qu’il remplit, ne laissassent pas tomber les platines entre les aiguilles, autant qu’il le faut pour la formation des mailles. On amene sous les becs, & l’on acheve l’ouvrage à l’ordinaire. Voilà comment on commence le coin : voici comment on le continue.

Après avoir cueilli une seconde fois, on rapetisse les coins, où l’on pratique ce que les ouvriers appellent les passemens, de la maniere suivante.

On prend la cinquieme aiguille en comptant de la pointe du coin, & l’on jette sa maille sur la quatrieme aiguille ; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l’on forme quatre mailles avec le poinçon.

On prend ensuite la sixieme aiguille, & l’on jette sa maille sur la quatrieme ; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l’on forme quatre autres mailles avec le poinçon. On prend ensuite la septieme aiguille, & l’on jette sa maille sur la quatrieme ; puis on passe la soie sur les quatre aiguilles, & l’on forme quatre autres mailles avec le poinçon ; ensuite on prend la huitieme aiguille, & l’on jette sa maille sur la quatrieme ; puis on passe la soie sur ces quatre aiguilles, & l’on forme quatre dernieres mailles avec le poinçon.

Cela fait, il est évident que l’on a quatre aiguilles vuides, & quatre aiguilles pleines ; on prend la quatrieme des pleines, & on la jette sur la neuvieme aiguille ; la troisieme des pleines, & on la jette sur la huitieme aiguille ou la premiere des vuides ; la seconde des pleines, & ainsi de suite. On fait là-dessus deux rangées, & l’on recommence les mêmes passemens, jusqu’à ce que le coin ait deux pouces & demi de large par le bas. On le finit par une rangée lâche, sur laquelle on fait quatre à cinq rangées à l’ordinaire, pour que la soie ne se défile pas.

Pour former la maille sur les quatre aiguilles, on passe la soie dans leurs têtes, on repousse l’ouvrage au-delà des têtes ; puis avec le poinçon on presse le bec de chaque aiguille, on retire l’ouvrage, & la maille formée à l’ouvrage passe sur les têtes, & forme de nouvelles mailles avec la soie qu’on y a mise.

Il ne reste plus que la semelle à faire : pour cet effet, on monte les coins par leur largeur bout-à-bout, ce qui forme un intervalle de cinq pouces ; c’est là-dessus qu’on travaille la semelle à laquelle on donne la longueur convenable.

Les grands bas d’hommes ont ordinairement trente-neuf pouces, depuis le bord de l’ourlet jusqu’à la pointe du talon.

Les grands bas de femmes n’ont ordinairement que vingt-neuf pouces, depuis l’ourlet jusqu’à la pointe du talon.

Les grands bas d’hommes, depuis le bord jusqu’à la façon, portent 28 pouces ; les grands bas de femmes, dix-neuf pouces.

La façon dans les grands bas d’hommes & les grands bas de femmes, est de deux pouces.

Le talon commence à la hauteur des coins, & il a jusqu’à sa pointe, neuf pouces dans les hommes, & huit pouces dans les femmes.

Les coins ont pour les hommes & pour les femmes, la même hauteur que les talons.

Les talons finis, on les met bout-à-bout & l’on travaille la semelle, de neuf pouces & demi pour les hommes, & de huit pouces & demi pour les femmes.

Après les talons finis, on continue le dessus du pié, à quatre pouces pour les femmes, & à cinq pouces pour les hommes.

Dans toutes ces dimensions, on observe les rétrécissemens que nous avons prescrits, dans l’article de la main-d’œuvre, & qu’il est inutile de répéter ici.

On voit, Planche III. du bas au métier, fig. 10. un modele de façon ; il est tracé sur un papier divisé en petits quarrés de dix en dix. La ligne AB la partage en deux parties égales ; chaque petit quarré représente une aiguille : le petit quarré A représente l’aiguille qui marque le milieu de la façon, & chaque rangée de mailles est représentée par chaque rangée de petits quarrés.

Pour exécuter la façon qu’on voit ici représentée, il faut donc faire aux mailles marquées par chaque petit quarré, quelque changement qui les distingue sur le bas : pour cet effet, on les porte, ou on les retourne ; ainsi tous les petits quarrés marqués d’un point désigneront des mailles portées ou retournées.

Nous avons déjà dit qu’une maille portée étoit celle dont la soie passoit sous deux têtes d’aiguilles, sous la tête de son aiguille propre, & sous la tête de l’aiguille voisine, en allant de droite à gauche de l’ouvrier ; & que la maille retournée étoit celle qu’on faisoit tomber, & qu’on relevoit sur l’envers de l’ouvrage, ensorte qu’elle étoit en relief sur l’envers, & par conséquent en creux sur l’endroit.

Mais les mailles ne se portent ou ne se retournent pas indistinctement partout. On voit évidemment que des mailles qu’il faut altérer pour distinguer la façon, on ne peut porter celles qui se suivent immédiatement. Quand il faut altérer la maille d’une aiguille, si celle qui lui est voisine, en allant de droite à gauche, ne doit point être altérée, on peut ou la porter ou la retourner : mais si elle doit être aussi altérée, il faut la retourner.

Ainsi dans le dessein de façon qu’on voit, toutes les mailles de masses noires doivent être retournées, & toutes les mailles des autres masses qui sont rares, & qui laissent entr’elles des mailles qu’il ne faut point altérer, peuvent être ou portées ou retournées.

Les ouvriers qui construisent des métiers à bas, se servent d’instrumens comme le rabot des verges, le moule à repasser les cuivres, le moule pour hacher les platines, la fraise, la lime à queue d’aronde, le chevalet pour les platines, le chevalet pour les cuivres, la machine à percer les aiguilles, & son détail, le moule à fondre les plombs à aiguilles & les plombs à platines, le brunissoir, les tourne-à-gauche, les becs d’âne, les clouyeres, la chasse-ronde, le pointot, la tranche, les perçoires plate & ronde, les broches, la griffe, les mandrins, le moule à bouton, le poinçon : entre ces instrumens, il y en a qui sont communs au faiseur de métier, & à celui qui s’en sert. On trouvera leurs usages aux articles de leurs noms, & leurs figures sur les planches du métier à bas.

La premiere manufacture de bas au métier fut établie en 1656, dans le château de Madrid, au bois de Boulogne. Le succès de ce premier établissement donna lieu à l’érection d’une communauté de maîtres-ouvriers en bas au métier ; & on leur donna des statuts. Par ces statuts, on régla la qualité & la préparation des soies, le nombre des brins de ces soies, la quantité des mailles vuides qu’il faut laisser aux lisieres, le nombre d’aiguilles sur lequel se doivent faire les entures, & le poids des bas.

Il fut ordonné trois ans d’apprentissage & deux ans de service chez les maîtres, pour le devenir ; la connoissance du métier, & de sa main-d’œuvre, & un chef-d’œuvre qui consiste en un bas façonné aux coins & par-derriere.

Les ouvriers en bas ne travaillerent qu’en soie jusqu’en 1684, qu’il leur fut permis d’employer des laines, le fil, le poil, le coton, à condition toutefois que la moitié des métiers d’un maître seroient occupés en soie, & les autres en matiere dont le filage seroit fin. Cette indulgence eut de mauvaises suites, & en 1700, sa Majesté ordonna à tous maîtres faiseurs de bas au métier de se conformer au reglement suivant.

I. Défense d’établir aucun métier ailleurs qu’à Paris, Dourdan, Roüen, Caën, Nantes, Oléron, Aix, Toulouse, Nismes, Usès, Romans, Lyon, Metz, Bourges, Poitiers, Orléans, Amiens & Rheims, où ils étoient déjà établis.

II. De travailler dans lesdites villes & leur banlieue sans être maîtres.

III. De faire bas, caleçons, camisolles, &c. sur autres métiers que des vingt-deux, à trois aiguilles par plomb.

IV. D’employer des soies sans être débouillies au savon, bien teintes, bien desséchées, nettes, sans bourre, doubles, adoucies, plates & nerveuses.

V. D’employer de l’huile dans ledit travail.

VI. D’employer pour le noir des soies autres que non teintes, dont les ouvrages seront envoyés faits aux Teinturiers.

VII. De travailler en soie pure, ou en poil & laine, sur un autre métier que d’un dix-huit au moins, à trois aiguilles par plomb, & de mettre moins de trois brins, deux de soie, ou poil, & un de laine.

VIII. De faire des ouvrages en laine, fil & coton sur un autre métier que de vingt-deux, à deux aiguilles par plomb.

IX. De mettre dans les ouvrages de fil, coton, laine & castor, moins de trois brins, & d’employer aucun fil d’estame, ou d’estain tiré à feu, parmi les trois fils.

X. De mettre en œuvre de mauvaise marchandise.

XI. De manœuvrer mal.

XII. De négliger les lisieres, & de n’y point laisser de maille vuide.

XIII. De faire les entures de moins que de cinq à six mailles, & de négliger de remonter les talons & les bords.

XIV. De fouler les ouvrages au métier avec autre chose que du savon blanc ou verd, à bras ou aux piés.

XV. Aux Fouleurs de se servir d’autres instrumens que de rateliers de bois ou à dents d’os, & aux Fouloniers de recevoir des bas.

XVI. De donner aux ouvrages moins de deux eaux vives, après les avoir dégraissés.

XVII. De se servir de pommelles & cardes de fer pour apprêter, appareiller.

XVIII. De débiter aucun ouvrage sans porter le plomb, qui montrera d’un côté la marque du maître, de l’autre celle de la ville.

XIX. Permission aux privilégiés de se distinguer par la fleur-de-lis jointe à l’initiale de leurs noms.

XX. Seront les articles ci-dessus exécutés à peine de confiscation des métiers, & de cent livres d’amende.

XXI. Défense aux maîtres de mettre en vente d’autres marchandises que celles qu’ils auront fabriquées, eux, leurs apprentifs ou compagnons.

XXII. Permission aux maîtres de faire peigner, carder, filer, mouliner, doubler, &c. les soies dont ils auront besoin.

XXIII. Défense de transporter hors du royaume aucun métier, sous peine de confiscation, & de mille livres d’amende.

XXIV. Défense aux maîtres de bas au métier, d’entreprendre sur ceux au tricot ; & à ceux-ci d’entreprendre rien sur les premiers.

Louis XIV. en conséquence de ces reglemens, avoit créé des charges d’inspecteurs, de contrôleurs, de visiteurs, de marqueurs, &c. Les marchands fabriquans en payerent la finance, & en acquirent les droits : mais comme la communauté étoit composée de maîtres privilégiés & d’autres, cette acquisition occasionna de la division entre les maîtres, les privilégiés se tenant exempts des droits, & les non-privilégiés prétendant les y soûmettre. Louis XV. fixa en 1720, la police de ces fabriquans, & fit cesser leurs querelles. Il voulut que les métiers dispersés dans les lieux privilégiés, comme le faubourg saint Antoine, le Temple, saint Jean de Latran, &c. payassent trente livres par métiers ; que les brevets des apprentifs fussent de cinq années. Les autres articles sont relatifs à l’acquit des dettes de la communauté, & aux autres objets semblables. Voyez le Diction. du Commerce.

Bas d’estame ; ce sont ceux qui se font avec du fil de laine très-tors, qu’on appelle fil d’estame ou d’estain. Voyez Estame.

Bas drappés ; ce sont ceux qui fabriqués avec de la laine un peu lâchement filée, qu’on appelle fil de trame, ont passé à la foule, & ont ensuite été tirés au chardon.

Bas à étrier ; ce sont des bas coupés par le pié, qui ne couvrent que la jambe : il y a encore des bas de chamois, qui sont du commerce des Peaussiers, & des bas de toile, qui sont du commerce des Lingeres. On n’exécute pas seulement des bas sur le métier, on y fait aussi des culotes, des caleçons, des mitaines, des vestes, & je ne doute pas qu’on n’y fît des habits. Il est évident, par les desseins qu’on exécute aux coins, qu’on pourroit y faire des fleurs & autres desseins, & qu’en teignant la soie, comme il convient qu’elle le soit, on imiteroit fort bien sur les ouvrages de bas au métier, & le chiné & le flambé des autres étoffes. Voyez Chiner & Flamber.